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Troubles de l’érection après traitement d’un cancer de prostate: les résultats prometteurs des premières greffes de cellules souches dans le pénis

12 patients souffrant de troubles sévères de l’érection après un cancer de la prostate ont reçu une greffe de cellules souches dans le pénis. Après six mois, des améliorations significatives de la qualité des rapports sexuels, de l’érection, de la rigidité du pénis et de la qualité de l’orgasme ont été rapportées par les patients selon une étude de l’Inserm. Cet essai clinique a été conduit sous la direction du Professeur René Yiou dans le service d’urologie de l’hôpital universitaire Henri-Mondor, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à Créteil.

Ces résultats sont publiés dans la revue European Urology.

 

Les troubles de l’érection (impuissance sexuelle) restent une séquelle fréquente après l’ablation chirurgicale d’un cancer de la prostate (prostatectomie radicale). Ils sont susceptibles d’altérer sévèrement la qualité de vie et l’image de soi des hommes. Les troubles de l’érection sont la conséquence de lésions des vaisseaux et des nerfs du pénis qui sont normalement accolés aux faces latérales de la prostate avant d’atteindre les formations érectiles.

Un essai clinique pilote a été mené par l’Inserm pour réparer les lésions cellulaires péniennes causées par la prostatectomie radicale. Cette nouvelle approche thérapeutique a consisté à injecter dans le pénis des cellules souches prélevées dans la moelle osseuse des patients. De nombreuses études ont montré que la moelle osseuse contient plusieurs types de cellules souches ayant la capacité de se transformer spontanément en cellules du même type que celles endommagées dans le pénis après prostatectomie radicale (essentiellement les cellules endothéliales, musculaires lisses, conjonctives). Elles peuvent également secréter des substances favorisant la réparation de vaisseaux sanguins et de nerfs endommagés. Dès 2004, l’équipe du Pr René Yiou (Unité Inserm 955 « Institut Mondor de recherche biomédicale ») à l’hôpital Henri Mondor – AP-HP -, a cherché à mettre au point de nouvelles stratégies thérapeutiques pour réparer les séquelles de la chirurgie prostatique, utilisant notamment les capacités régénératrices des cellules souches.

L’objectif principal de cet essai clinique de phase I/II soutenu par l’Inserm a été de tester la faisabilité et la tolérance d’une injection de cellules souches médullaires dans le pénis pour traiter des troubles de l’érection après prostatectomie radicale. Les objectifs secondaires de l’étude étaient d’évaluer les effets de la greffe cellulaire sur la qualité des érections, des rapports sexuels et les vaisseaux du pénis. Ce traitement n’ayant encore jamais été testé chez l’homme, il était nécessaire de faire un premier essai sur un petit nombre de patients pour tester la tolérance de plusieurs doses de cellules. Dans cette étude pilote, ont été inclus des patients présentant des troubles de l’érection sévères et jugés irréversibles après une prostatectomie radicale, c’est à dire que le traitement médical maximal (Injections de prostaglandine dans le pénis + Viagra® aux doses maximales et l’utilisation d’un vaccum (pompe à érection[1])) restait inefficace après une durée moyenne de deux ans. D’autre part, l’écho Doppler pénien montrait des altérations sévères des vaisseaux du pénis à l’origine des troubles de l’érection.

 

Méthodologie de l’essai

12 patients ont été inclus pour une durée totale de 6 mois. Quatre doses croissantes de cellules souches ont été testées et chaque patient participant à l’essai clinique n’a reçu qu’une seule injection. Les cellules souches ont été prélevées dans la moelle osseuse de la hanche et préparées par l’Etablissement Français du Sang (Dr. Hélène Rouard).

Les effets de la greffe cellulaire ont été évalués par des auto-questionnaires spécifiques évaluant par scores les principaux domaines de la vie sexuelle : satisfaction des rapports sexuels, fonctions érectile et orgasmique, désir sexuel, et la rigidité du pénis lors des rapports. Une étude des vaisseaux du pénis a été effectuée par écho Doppler avant et après la greffe de cellules. Les chercheurs ont par ailleurs évalué les modifications de la taille du pénis après greffe, puisque la rétraction pénienne est une séquelle fréquente de la prostatectomie radicale.

schéma

(c) Inserm / AP-HP

 

Principaux résultats

La tolérance au traitement été excellente et le principal effet secondaire rapporté était une douleur passagère au niveau du site de prélèvement de la moelle osseuse (région fessière).

Six mois après la greffe cellulaire, les chercheurs ont noté une amélioration significative des principaux scores sexuels, notamment un gain moyen du score évaluant la fonction érectile de +10 points (17,4/30 à 6 mois versus 7,3/30 avant la greffe) sur une échelle allant de 0 à 30 (30 correspondant à la meilleure fonction érectile possible). Les autres scores significativement améliorés concernaient la satisfaction globale des rapports sexuels : 6,8/10 à 6 mois versus 3,9/10 avant la greffe (10 étant le score le plus favorable) ; la qualité de l’orgasme : 6,3/10 à 6 mois versus 3,5/10 avant la greffe ; la rigidité du pénis lors des rapports : 2,6/4 à 6 mois versus 1,3/4 avant la greffe (4 indiquant une rigidité maximale). Au moins deux patients ont décrit une réapparition d’érections normales comme avant la prostatectomie radicale sans prise de médicament. Une augmentation moyenne de 1 cm de la longueur du pénis a été constatée. Les bénéfices cliniques ont été plus marqués pour les doses élevées et étaient associés à une normalisation des mesures vasculaires artérielles péniennes par écho Doppler. L’amélioration des scores sexuels s’est maintenue 1 an après la greffe même si certains patients continuaient à utiliser un traitement lors des rapports.

Face à ces bons résultats, les chercheurs souhaitent toutefois rappeler que : « le faible nombre de patients inclus dans l’étude et l’absence de groupe contrôle qui aurait reçu une injection « placebo » incitent à la prudence quant à la démonstration avec certitude de l’efficacité de cette nouvelle stratégie thérapeutique« . Cependant, il est important de rappeler que les patients traités présentaient tous des troubles de l’érection sévères ne répondant pas au traitement médical maximal et associés à des altérations importantes de la vascularisation pénienne. La probabilité d’amélioration spontanée des érections avait été jugée comme quasi-nulle avec ces critères. L’amélioration des scores sexuels associée à une normalisation des mesures écho Doppler péniennes plaide en faveur d’un effet bénéfique de la greffe de cellules souches à moyen terme.

Cette stratégie thérapeutique pourrait constituer la première approche à visée curatrice des troubles de l’érection.

Pour le Pr René Yiou :  » Si les résultats de cette étude sont confirmés par d’autres essais cliniques contrôlés, les indications de la thérapie cellulaire pourraient s’élargir aux autres formes de troubles de l’érection moins sévères ou résultant de maladies générales comme le diabète ou autres maladies vasculaires. »

Pour plus de renseignements : www.urologie-fonctionnelle.com

[1] La pompe fait le vide autour du pénis ce qui provoque par différence de pression un afflux de sang dans les corps caverneux et donc une érection.

Lancement d’une alliance européenne dédiée à l’accélération de nouveaux concepts dans le domaine de la recherche d’un vaccin contre le VIH

La Commission Européenne a attribué plus de 22 millions d’euros à l’Alliance européenne pour un vaccin contre le VIH (EHVA) pour développer une plate-forme pluridisciplinaire afin d’évaluer de nouveaux vaccins préventifs et thérapeutiques. À ce financement s’ajoutent 6 millions d’euros supplémentaires de la part du gouvernement suisse pour les partenaires suisses du projet.

L’EHVA, un partenariat créé par le professeur Yves Lévy, PDG de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), et par le professeur Giuseppe Pantaleo, directeur de l’Institut suisse pour la recherche de vaccins à l’hôpital universitaire de Lausanne (CHUV), rassemble 39 partenaires industriels et universitaires provenant de l’Europe, des États-Unis et d’Afrique, et ayant une expertise et des technologies de pointe pluridisciplinaire.

Le VIH reste un problème sanitaire mondial majeur avec 37 millions de personnes vivant avec et plus de 2 millions de nouvelles infections chaque année. De nombreuses stratégies biomédicales de prévention contre le VIH (comme une prophylaxie avant et après exposition), même si elles sont efficaces, sont difficiles à maintenir sur le long terme. Un vaccin représente encore l’outil de santé publique le plus efficace dans le combat contre le VIH/SIDA.

L’EHVA a pour but de développer plusieurs concepts innovants de vaccins contre le VIH à la fois dans les domaines prophylactique et thérapeutique. La stratégie d’un vaccin prophylactique repose sur le développement de nouveaux vaccins candidats et sur un système de vaccination capable d’améliorer les réponses des anticorps protecteurs, alors que l’approche d’un vaccin thérapeutique étudiera les moyens qui contribueront à développer une cure fonctionnelle en combinant des vaccins avec d’autres interventions immunologiques. À partir de l’expérience très riche obtenue dans le domaine de la recherche sur le VIH au cours des dernières décennies, l’EHVA développera un processus solide qui facilite la sélection et le développement de vaccins candidats prometteurs, de la découverte et de la fabrication jusqu’aux essais cliniques précoces. L’EHVA fera également appel à des experts industriels et sera en liaison étroite avec des scientifiques africains reconnus et avec le Partenariat Europe-Pays en développement pour les essais cliniques (EDCTP) dans le but de tester de futurs vaccins en Afrique subsaharienne.

Le professeur Yves Lévy, Coordinateur de l’EHVA déclare :

« Au-delà de l’excellence scientifique des différentes équipes impliquées dans ce projet très ambitieux, l’EHVA permettra de structurer la recherche d’un vaccin contre le VIH en Europe via l’alliance de ses 39 partenaires regroupant leur expertise et savoir-faire autour d’un plan de travail ambitieux de 5 ans. Nous sommes très reconnaissants envers la Commission Européenne et le gouvernement suisse qui ont apporté un soutien financier qui nous permettra de mettre en place ce plan de travail. »

Le professeur Giuseppe Pantaleo, coordinateur scientifique de l’EHVA a pour sa part ajouté :

« L’EHVA est un stimulateur important pour la recherche d’un vaccin contre le VIH en Europe. Non seulement cela nous donne l’opportunité d’accélérer le développement d’un certain nombre de nouveaux vaccins candidats, mais surtout cela nous permet de développer des outils pour mieux comprendre les réponses immunitaires humaines au vaccin et comment elles sont associées à l’efficacité d’un vaccin ; nous pourrons ainsi diminuer le nombre de vaccins candidats prometteurs sélectionnés à l’avenir. »

Le docteur Ruxandra Draghia-Akli, directrice de la Direction de la santé à la Direction générale pour la recherche et l’innovation de la Commission Européenne, a dit : « La recherche financée par l’UE présente un triple bénéfice : elle met en avant l’excellence scientifique européenne et des collaborations mondiales, elle permet de développer de nouveaux vaccins candidats prophylactiques et thérapeutiques et elle améliore la compétitivité européenne. La Commission a le plaisir de financer le projet de l’EHVA dans le cadre de ses efforts pour surmonter les obstacles du développement de vaccins et pour atteindre l’objectif d’un monde sans sida. »

L’EHVA est un projet de 5 ans (début en janvier 2016) financé par le programme Horizon 2020 pour la recherche et l’innovation de l’Union Européenne selon l’accord de financement n° 681032.

Un test de radiosensibilité pour prédire les séquelles après radiothérapie

Des chercheurs de l’Unité Inserm 1194 « Institut de recherche en cancérologie de Montpellier » (Inserm/Université de Montpellier/Institut Régional du Cancer de Montpellier) confirment l’intérêt d’un nouveau test permettant d’identifier les patients atteints de cancer qui seront indemnes de séquelles après radiothérapie. Réalisé par une prise de sang chez 500 femmes atteintes d’un cancer du sein traitées dans 10 centres en France et suivies pendant 3 ans, ce test montre que les femmes ayant un taux d’apoptose radio-induite lymphocytaire (TALRI) élevé ont un très faible taux de fibrose tardive mammaire. Ces résultats, publiés dans EBioMedicine, suggèrent une personnalisation envisageable de la radiothérapie à visée curative en adaptant la dose de radiation délivrée au patient et la technique de radiothérapie utilisée.

Institut de Recherche en Cancerologie de Montpellier (IRCM)

(c) Inserm/ P Latron

Un des traitements du cancer du sein est le recours à la radiothérapie. Les rayons détruisent les cellules cancéreuses de manière localisée. Cependant, ils induisent également la mort de certaines cellules saines dans le champ d’irradiation. Les chercheurs ont analysé avec une simple prise de sang le taux d’apoptose radio-induite lymphocytaire (TALRI) CD8 dans le cadre d’un essai clinique multicentrique prospectif débuté en 2005. L’objectif de cet essai est le développement d’un test prédictif fonctionnel de radiosensibilité des tissus à partir du TALRI et fait suite à plusieurs essais pilotes initiés depuis 15 ans dans le cancer du sein mais également d’autres pathologies.

Dans ce contexte, 500 patientes atteintes du cancer du sein et traitées par radiothérapie ont été recrutées dans 10 centres français. Les chercheurs de l’Unité mixte de recherche « Institut de recherche en cancérologie de Montpellier » (Inserm/Université de Montpelier/Institut Régional du Cancer de Montpellier) ont évalué le TALRI à 8 Gy des patientes avant qu’elles ne reçoivent leur traitement par radiothérapie. Les patientes ont ensuite été suivies pendant trois ans afin d’évaluer les séquelles tardives mammaires (fibrose).

Les résultats de l’étude multicentrique confirment à large échelle les données préliminaires obtenues par les chercheurs. Ils montrent qu’un TALRI élevé est corrélé à une faible incidence de séquelles tardives. Un faible taux de fibrose tardive mammaire a été constaté avec une valeur prédictive négative de plus de 90%. En revanche, la quasi-totalité des patientes qui présentent une fibrose élevée correspondent au groupe avec un TALRI bas, prédictif de séquelles plus importantes.

« Cette étude multicentrique donne un niveau de preuve suffisant pour utiliser ce test en pratique clinique quotidienne et change la prise en charge des patients.Avec les résultats qui l’accompagnent, on peut envisager la possibilité d’augmenter de manière localisée la dose totale de radiation ou de modifier les volumes ciblés sans compromettre les résultats carcinologiques. » explique David Azria, principal investigateur de l’étude.

En pratique, ce test est effectué par une simple prise de sang et un résultat est obtenu en 72h.

En offrant la possibilité d’identifier les patients qui seront indemnes de séquelles et ceux les plus à risque, ce test ouvre la voie à la personnalisation de la radiothérapie à visée curative.

Il ne doit pas être utilisé seul mais doit être intégré à d’autres paramètres dans un nomogramme prédictif, un outil graphique de calcul, déposé en brevet d’invention par l’équipe de Montpellier. « Les résultats intégrés avec l’ensemble des paramètres permettent de donner un risque fiable de séquelles tardives après radiothérapie » conclut David Azria.

Une bactérie intestinale antidouleur

La bactérie Faecalibacterium prausnitzii est abondante dans l’intestin des personnes en bonne santé mais diminue dès l’apparition d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin. Une équipe impliquant l’Inra, l’Inserm et l’Université d’Auvergne révèle, chez l’animal, les propriétés antalgiques de cette bactérie. En plus des propriétés anti-inflammatoires déjà connues de F. prausnitzii, ces résultats publiés dans Scientific Reports le 18 janvier 2016, confirment son potentiel bénéfique pour le bien-être et la santé humaine.

PhotoCP web langella

Image en microscopie électronique à balayage de F. prausnitzii (c) Plateforme MIMA 2, T. Meylheuc

Les douleurs abdominales chroniques sont un des symptômes fréquemment retrouvés chez des patients présentant des atteintes intestinales telles que le Syndrome de l’Intestin Irritable (SII) ou une Maladie Inflammatoire Chronique de l’Intestin (MICI). En 2008, des chercheurs de l’Inra de Jouy-en-Josas ont montré que chez des patients souffrant d’une MICI, l’abondance de la bactérie Faecalibacterium prausnitzii diminue dans l’intestin.

En collaboration avec deux autres équipes françaises impliquant l’Inra, l’Inserm et l’Université d’Auvergne, ces chercheurs ont mis en évidence, grâce à des modèles animaux de stress (développant une hypersensibilité viscérale d’origine colique), qu’une diminution de l’abondance de F. prausnitzii était liée à l’apparition d’une hypersensibilité viscérale. Or, chez l’homme, une telle hypersensibilité peut se traduire par un inconfort intestinal ou des douleurs abdominales. Les scientifiques ont démontré qu’en administrant F. prausnitzii à ces animaux, ils retrouvaient une sensibilité colique normale.

La bactérie F. prausnitzii pourrait donc présenter, chez l’homme, des propriétés antalgiques, venant s’ajouter à ses propriétés anti-inflammatoires décrites précédemment.

Chez les patients souffrant d’une MICI ou du SII, la diminution de la présence de F. prausnitzii au niveau colique suite à une inflammation intestinale ou à un stress chronique pourrait participer à l’aggravation des symptômes inflammatoires et/ou douloureux au niveau viscéral. De façon à entraver ce cercle vicieux, les scientifiques envisagent désormais de restaurer le « bien-être intestinal » grâce à de nouveaux compléments alimentaires (probiotiques) contenant F. prausnitzii.

Par ailleurs, ces travaux, qui viennent enrichir notre connaissance fondamentale dans le domaine de la microbiologie cellulaire, sont aussi à l’interface de nouvelles applications industrielles et médicales.

Un masque à oxygène pour éviter les séquelles de l’AVC ?

Et si un simple masque à oxygène protégeait les personnes atteintes d’un AVC aigu des séquelles neurologiques ? Il suffirait pour cela de l’administrer aux patients pendant le laps de temps nécessaire aux équipes médicales pour réalimenter leur cerveau en sang et donc en oxygène. C’est en tout cas l’hypothèse formulée par Jean Claude Baron, directeur de recherche Inserm au sein de l’Unité 894 « Centre de psychiatrie et neurosciences » en collaboration avec des chercheurs anglais et allemand. Des travaux menés pour le moment chez l’animal montrent que ce geste très simple prévient quasi-complètement la perte neuronale et de façon complète les déficits sensori-moteurs, suite à l’accident vasculaire cérébral.
Les résultats de ces travaux sont publiés dans Brain.

cerveau

(c) Fotolia

Parfois nommé « attaque cérébrale », l’accident vasculaire cérébral (AVC) correspond à l’obstruction ou à la rupture d’un vaisseau qui transporte le sang, et donc l’oxygène, au cerveau. Il s’agit d’une urgence médicale absolue qui nécessite d’appeler le Samu (15) ou le numéro d’urgence européen (112) pour une prise en charge immédiate. Malgré le développement spectaculaire ces 20 dernières années des traitements visant à restaurer la circulation sanguine après obstruction aiguë d’une artère cérébrale (forme d’AVC la plus fréquente, dite ‘ischémique’) et donc oxygéner le cerveau le plus tôt possible après le début des symptômes, l’AVC reste une cause majeure de handicap. Les séquelles les plus fréquentes et invalidantes sont l’hémiplégie (paralysie de la moitié gauche ou droite du corps) et l’aphasie (trouble du langage oral et écrit, affectant l’expression et la compréhension).

Si les traitements actuels réussissent souvent à désobstruer les vaisseaux et sauver les tissus cérébraux encore viables, ils ne peuvent sauver les tissus déjà endommagés. Or un tissu en manque d’oxygène mais encore viable se nécrose rapidement si la circulation sanguine n’est pas rétablie en urgence. De plus, des formes plus mineures d’AVC tels les accidents ischémiques transitoires (AIT), ne sont pas des indications à ces traitements du fait du rétablissement spontané de la circulation, et donc de leur bonne récupération spontanée. Néanmoins, ces accidents mineurs causent aussi des lésions cérébrales. Un objectif majeur poursuivi par les médecins et chercheurs est donc, dans tous les cas de figures, de protéger le tissu encore viable jusqu’à ce qu’il soit à nouveau irrigué et donc ré-oxygéné.

 

Le modèle murin d’AVC est considéré comme une bonne représentation de la situation clinique chez l’homme. Dans ce travail, le groupe de chercheurs dirigé par Jean-Claude Baron a testé l’hypothèse que l’oxygénothérapie normobare (100% d’oxygène délivré par un simple masque facial) empêche le développement des lésions cérébrales dans un modèle mimant un AVC avec reperfusion spontanée précoce.

Les chercheurs ont montré que ce traitement très simple prévient quasi-complètement la perte neuronale et l’inflammation tissulaire chez ces animaux, et de façon complète les déficits sensori-moteurs, suite à l’ischémie cérébrale.

Pour Jean Claude Baron, directeur de recherche à l’Inserm et neurologue attaché à l’hôpital Sainte-Anne : « Ce travail a également une valeur importante pour sa transposition à l’homme car le traitement consiste en une simple bouteille à oxygène et un masque facial léger.

Ce traitement serait donc très facile à mettre en œuvre chez des patients ayant un AVC, ce dès le transport en ambulance.

Il serait également envisageable de le mettre en œuvre à domicile, avant l’arrivée des secours, chez les patients à haut risque d’AVC, grâce à une formation minimale du patient et de son conjoint.  » précise-t-il.

Si l’utilité clinique de ce traitement simple à mettre en œuvre et peu coûteux est prouvée par des essais ultérieurs randomisés appropriés, il serait possible à la fois d’améliorer l’efficacité des traitements et de diminuer les lésions cérébrales suite à un AIT/AVC mineur, et ainsi de réduire les handicaps.

Arrêt cardiaque – Ne négligez pas les signes d’alerte !

Plus de la moitié des patients qui meurent subitement auraient des signes avant-coureurs dans le mois qui précède la crise cardiaque, ce qui laisserait largement le temps d’intervenir rapporte une étude de l’Inserm menée par Eloi Marijon, chercheur et cardiologue au sein du Paris Centre de recherche cardiovasculaire (Unité Inserm 970 / AP-HP Hôpital Européen Georges Pompidou)
Ces travaux sont publiés la revue Annals of Internal Medicine.

PhotoCP web Marijon

(c) Fotolia

Chaque année, environ 50000 Français décèdent prématurément d’un arrêt cardiaque. Soit environ un arrêt cardiaque toutes les 10 minutes : dix fois plus que de tués sur la route. Après 45 ans, ce sont le plus souvent les maladies coronaires qui vont provoquer un infarctus du myocarde, lequel, dans certains cas, entraînera l’arrêt cardiaque. En France, seuls 5 à 7 % des victimes d’arrêt cardiaque survivent. Jusqu’à aujourd’hui, ces arrêts sont vécus comme une fatalité, laissant penser que rien ne peut prédire à court terme le risque d’arrêt cardiaque.

Or, « plus de la moitié des patients qui meurent subitement auraient des signes avant-coureurs, ce qui laisserait largement le temps d’intervenir », rapporte une étude Inserm, AP-HP, Université Paris Descartes publiée dans Annals of Internal Medicine. Pour parvenir à ce résultat, Eloi Marijon du Centre d’Expertise Mort Subite de l’Hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP, en collaboration avec le Cedars-Sinai Heart Institute (Los Angeles, Californie), a étudié précisément ce qui se passait dans les 4 semaines précédant la survenue d’un arrêt cardiaque. La reconstitution des évènements chez 839 hommes et femmes victimes de mort subite s’est faite en interrogeant minutieusement les témoins, les membres de la famille, mais également les données médicales des hôpitaux et des médecins libéraux de la région.

La douleur dans la poitrine était le symptôme le plus fréquent. Les autres signes d’alerte étaient l’essoufflement d’effort et les pertes de connaissance. Le Dr Marijon précise que dans deux cas sur trois les douleurs de la poitrine étaient caricaturales d’un problème cardiaque, avec une douleur intense en étau. «Mais elles avaient été intermittentes jusqu’à la survenue de l’arrêt cardiaque. En revanche, lorsque c’était une difficulté pour respirer, elle démarrait quelques jours avant et était le plus souvent continue jusqu’à l’arrêt cardiaque», précise le chercheur de l’Inserm et cardiologue.

L’équipe a également analysé comment ces patients « répondaient » à ces symptômes et en quelle mesure cela pouvait influencer le pronostic (la chance de survivre). Les résultats sont édifiants : seulement 19% de ces patients avec symptômes ont appelé les secours (équivalent du « 15 » en France). Et pourtant ceux qui ont appelé présentaient 6 fois plus de chance de survivre (atteignant plus de 30% de survie !!) comparé à ceux ayant négligé leurs symptômes.

« La leçon, c’est que si vous avez ce genre de symptômes, il ne faut pas les ignorer. Si vous êtes dans cette situation, allez au plus vite voir votre médecin traitant. Et surtout ne perdez pas de temps », insiste l’auteur de l’étude.

« Ces nouvelles données doivent motiver la communauté médicale à développer une nouvelle stratégie de prévention subaiguë » annonce le Dr Marijon, c’est à dire être capable d’identifier les sujets à risque d’arrêt cardiaque à court terme.

Jusqu’à présent, la prévention de la mort subite est basée essentiellement sur la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires et l’implantation de défibrillateurs chez les patients les plus à risque…Mais cette prévention (à long-terme) montre ses limites. Le développement exponentiel de la médecine connectée (e-Health) devrait être un atout pour développer cette prévention que cela soit en termes d’identification des sujets à risque, mais aussi une optimisation de la prise en charge de l’arrêt cardiaque avec les systèmes de géolocalisation….

Début de la vie : comment la symétrie entre en jeu ?

La première division embryonnaire, qui suit la fusion des gamètes (ovule et spermatozoïde), lance le développement d’un nouvel individu, la genèse d’un organisme adulte fonctionnel. Cette division est symétrique chez l’embryon au stade 1-cellule (aussi appelé zygote) ; elle donne lieu à la formation de deux cellules filles de taille identique. A l’inverse, elle est asymétrique chez l’ovule, qui a pourtant la même taille, et la même forme que l’œuf. Pourquoi ? Qu’est-ce qui oriente le zygote vers une division symétrique alors que l’ovule se divise au cours de la méiose de manière asymétrique ? Telles sont les questions que se sont posées Marie-Emilie Terret, chercheuse à l’Inserm, et Marie-Hélène Verlhac, chercheuse au CNRS et directrice de l’équipe Divisions asymétriques ovocytaires au Centre interdisciplinaire de recherche en biologie (Inserm/CNRS/Collège de France)[1]. En combinant biologie, physique et mathématiques, les chercheuses ont réussi à montrer, chez la souris, la mécanique de régulation qui détermine en un temps très court la géométrie et donc la destinée (division symétrique ou asymétrique) de la cellule. Les éléments issus de ces travaux pourraient dans le futur contribuer à améliorer l’efficacité de la fécondation in vitro.

Le détail de ces résultats est publié aujourd’hui dans la revue Nature communications.

 

L’embryon au stade 1-cellule ressemble énormément à un ovule : c’est une cellule ronde, isolée, d’une taille proche de celle de l’ovule. La géométrie de division d’une cellule est déterminée par la position du fuseau de microtubules, machinerie qui transporte et sépare les chromosomes. Dans la plupart des cellules animales, les centrosomes organisent le réseau de microtubules, essentiel à la formation et au positionnement du fuseau de division. Or, les ovules et zygotes sont dépourvus de centrosomes. Une différence majeure entre ces deux types de cellules réside cependant dans la géométrie de leurs divisions. En effet, les ovules se divisent de manière extrêmement asymétrique en taille au cours de la méiose, permettant la formation principale d’un énorme ovule unique et l’expulsion de « globules polaires » contenant le matériel génétique excédentaire. Le zygote au contraire se divise de manière parfaitement symétrique, conduisant à la formation de deux cellules filles de tailles identiques.

CP Terret

Ovule et embryon de souris au stade 1-cellule. Les images du haut montrent les réseaux d’actine, celles du bas les fuseaux de microtubules avec les chromosomes alignés.

(c) Marie-Emilie Terret

La géométrie de la division est déterminée par la position du fuseau de microtubules : excentrée dans les ovules, centrée chez les zygotes. L’équipe Divisions asymétriques ovocytaires a montré précédemment que le positionnement excentré du fuseau de division dans l’ovule dépend de la mécanique de réseaux d’actine. Dans le travail publié ce jour, l’équipe de chercheurs montre que la localisation centrée du fuseau de division chez le zygote est due également à la mécanique de réseaux d’actine, mais régulée différemment.

Trois étapes sont nécessaires à cette division symétrique :

1.Le centrage grossier des pronoyaux mâles et femelles, nécessitant un réseau d’actine et la myosine-Vb.

2.Le centrage fin du fuseau de division requérant une forte rigidité de l’ovocyte.

3. Le maintien passif du fuseau au centre de la cellule.

La mécanique de réseaux d’actine/myosine permet donc de passer d’une division asymétrique à une division symétrique, changement de géométrie requis pour la transition ovule-embryon.

 

L’équipe de recherche formule déjà des hypothèses quant au mode d’action de l’actine, qui intervient dans les caractéristiques physiques de la membrane paroi de la cellule (rigide ou molle), celles-ci influant sur la géométrie de la division.« Nos prochains travaux porteront sur l’étude plus fine des interactions entre actine et microtubules pour tenter de comprendre leurs rôles respectifs sur l’architecture de la cellule au moment de sa division, et les potentielles interventions d’autres protéines intermédiaires », explique Marie-Emilie Terret.

Mieux comprendre les caractéristiques physiques et le comportement de l’ovule, fécondé ou non, pendant sa division apportera potentiellement de nouveaux éléments utiles pour la procréation médicalement assistée. Lors de la fécondation in vitro (FIV) par exemple, la température de conservation des ovocytes pourrait avoir un impact sur la qualité des réseaux d’actine, et par conséquent affecter la division, et donc la formation d’un zygote.

Accroître l’efficacité de la FIV pourrait donc représenter un objectif à long terme pour cette équipe de recherche, une des seules en France à travailler sur cette thématique.

[1] En collaboration avec des chercheurs du Laboratoire analyse et modélisation pour la biologie et l’environnement (CNRS/CEA/Université d’Evry Val d’Essonne/Université de Cergy Pontoise), du Laboratoire de physique théorique de la matière condensée (CNRS/UPMC), du Laboratoire Physico-chimie Curie (CNRS/Institut Curie/UPMC).

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