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Communiqués et dossiers de presse

Le Viagra: nouvelle piste contre la transmission du parasite du paludisme ?

11 Mai 2015 | Par INSERM (Salle de presse) | Immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie

En augmentant la rigidité des globules rouges infectés par l’agent du paludisme, le Viagra favorise leur élimination de la circulation sanguine et pourrait donc réduire la transmission du parasite de l’homme au moustique. Cette étonnante découverte, réalisée par des chercheurs du CNRS, de l’Inserm et de l’Université Paris Descartes – à l’Institut Cochin –  et de l’Institut Pasteur, en collaboration avec une équipe de la London School of Tropical Medicine and Hygiene, pourrait être à l’origine d’un traitement réduisant la propagation du paludisme dans la population. Leurs travaux sont publiés dans la revue PLOS Pathogens le 7 mai 2015.

Plasmodium falciparum, le parasite responsable du paludisme, a un cycle de développement complexe se déroulant pour partie chez l’homme et pour partie chez le moustique anophèle. Les traitements contre le paludisme ciblent les formes asexuées de ce parasite, responsables des symptômes, mais pas les formes sexuées transmises de l’homme au moustique lors d’une piqûre. L’éradication de cette maladie nécessite donc le développement de nouveaux types de traitements contre les formes sexuées du parasite pour bloquer cette transmission et ainsi éviter la dissémination du parasite dans la population.

Les formes sexuées du parasite se développent chez l’homme dans des globules rouges séquestrés dans la moelle osseuse avant d’être libérés dans le sang. Ils sont alors accessibles aux moustiques qui peuvent les absorber lors d’une piqûre (voir le haut de l’image page 2). Or, les globules rouges circulants, parasités ou non, sont déformables, ce qui évite leur élimination par la rate : cet organe, qui filtre le sang en permanence, ne retient en effet que les globules rouges rigides, vieux ou anormaux. Mais les globules rouges parasités, déformables, traversent aisément la rate et persistent plusieurs jours dans la circulation sanguine.

Dans une nouvelle étude, des scientifiques ont donc cherché à rendre plus rigides les globules rouges infectés. Ils ont montré que la déformabilité du globule rouge parasité est régulée par une voie de signalisation impliquant l’AMP cyclique. Quand les molécules d’AMP cyclique s’accumulent, le globule rouge devient plus rigide. Or, l’AMP cyclique est dégradé par des enzymes appelées phosphodiestérases, qui favorisent donc par leur action la déformabilité des globules rouges.

A l’aide d’un modèle in vitro reproduisant la filtration de la rate, les chercheurs ont identifié plusieurs molécules pharmaceutiques qui inhibent les phosphodiestérases et peuvent donc augmenter la rigidité des globules rouges infectés. Un de ces inhibiteurs est le sildenafil citrate, plus connu sous son nom commercial de « Viagra ». Les auteurs ont montré que cette molécule, à la dose habituellement administrée, a le potentiel d’augmenter la rigidité des formes sexuées du parasite et ainsi de favoriser l’élimination des globules rouges parasités par la rate.image1

La déformabilité des globules rouges parasités, facilitée quand la voie de l’AMP cyclique est inhibée, leur permet de circuler librement à travers la rate et de rester accessibles aux moustiques dans la circulation sanguine (en haut). L’action du Viagra augmente la rigidité des globules rouges parasités en activant la voie de l’AMP cyclique, empêchant leur passage à travers l’endothélium de la rate et éliminant les parasites de la circulation sanguine (en bas).© Catherine Lavazec

Cette découverte ouvre la voie à une nouvelle approche pour bloquer la propagation du paludisme à travers la population. 

Modifier le principe actif du Viagra pour éviter son effet érectile, ou tester des molécules similaires dépourvues de cet effet secondaire pourrait en effet déboucher sur un traitement contre la transmission du parasite de l’homme au moustique.

Cette étude, réunissant les équipes de Catherine Lavazec et de Gordon Langsley à l’Institut Cochin et à l’Institut Pasteur et celle de David Baker à la London School of Tropical Medicine and Hygiene, a été soutenue par le programme ATIP-Avenir du CNRS et de l’Inserm, les Labex Gr-EX et Parafrap, le Fonds Inkermann et la Fondation Bill and Melinda Gates dans le cadre d’un projet en collaboration avec l’équipe de Pierre Buffet de l’Université Pierre et Marie Curie.
Contacts
Contact Chercheur
Catherine Lavazec
01 40 51 64 37
rf.mresni@cezaval.enirehtac
Contact Presse
CNRS
Véronique Etienne 
01 44 96 51 37
rf.rid-srnc@enneite.euqinorev

Inserm
rf.mresni@esserp
Sources
cAMP-signalling regulates gametocyte-infected erythrocyte deformability required for malaria parasite transmission
Ghania Ramdani, Bernina Naissant, Eloise Thompson, Florence Breil, Audrey Lorthiois, Florian Dupuy, Ross Cummings, Yoann Duffier, Yolanda Corbett, Odile Mercereau-Puijalon, Kenneth Vernick, Donatella Taramelli, David A. Baker, Gordon Langsley, Catherine Lavazec.
PLOS Pathogens, 7 mai 2015.
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