Menu
Communiqués et dossiers de presse

Un poisson pour détecter des contaminants perturbateurs endocriniens

25 Juin 2012 | Par INSERM (Salle de presse) | Biologie cellulaire, développement et évolution

Les chercheurs de l’INERIS et de l’Inserm (équipe dirigée par Olivier Kah au sein de l’Unité Inserm 1085 « Institut de recherche, sante, environnement et travail ») viennent de développer un test chez le poisson permettant de détecter les effets perturbateurs endocriniens de certains contaminants de l’environnement. Les chercheurs basent leurs travaux sur un gène s’exprimant dans le cerveau qui réagit fortement à certains perturbateurs endocriniens. Pour faciliter la mesure de ce gène, ils utilisent un gène rapporteur fluorescent. Réalisé sur les embryons de poisson zèbre qui sont translucides, les effets sont observables dans le cerveau lorsque les embryons sont exposés à des polluants perturbateurs. Les résultats de ces travaux sont publiés dans la revue Plos One.

Observation de la fluorescence dans le cerveau de l’embryon de poisson induite par l’expression du gène cyp19a1b couplé à la GFP. Copyright Inserm, O. Kah

Ces 20 dernières années, de nombreuses études ont prouvé les effets néfastes de composés artificiels sur la capacité des organismes à se reproduire. Certains polluants (nonylphénols, bisphénol A, pesticides, résidus pharmaceutiques,…) présents dans les eaux de surface, les effluents industriels ou les sédiments ont la capacité de mimer les effets des œstrogènes. Ils modifient par ce biais les processus biologiques contrôlés par les œstrogènes et liés aux fonctions de reproduction et de croissance des organismes, avec des conséquences potentiellement néfastes pour la santé des êtres vivants et de leur descendance. Ces substances sont appelées « perturbateurs endocriniens » (PE).

Les polluants à activité œstrogénique agissent aussi sur le cerveau

L’originalité des travaux des chercheurs de l’Inserm et de l’INERIS réside dans le fait que l’étude des effets des perturbateurs endocriniens porte sur un gène exprimé exclusivement au niveau du cerveau, démontrant la susceptibilité du système nerveux à ces polluants. Les résultats obtenus par les chercheurs confirment qu’un certain nombre de substances affecte, chez l’embryon de poisson, l’activité des cellules souches du cerveau, des cellules capitales pour le développement du système nerveux central. Cet effet passe par l’expression d’un gène spécifique dans le cerveau extrêmement sensible aux œstrogènes : le gène cyp19a1b.

Un modèle de poisson zèbre pour caractériser les PE

A partir de ces observations, les équipes de l’INERIS et de l’Inserm ont mis au point un test de détection de cette activité œstrogénique au moyen d’un modèle de poisson transgénique. Ce modèle de poisson zèbre transgénique (1), permet d’identifier les effets des polluants sur une enzyme issue du gène cyp19a1b, l’aromatase, responsable de la synthèse des œstrogènes dans l’organisme.

En utilisant un rapporteur fluorescent, la GFP (Green Fluorescent Protein), le cerveau des embryons de poisson devient fluorescent lorsqu’ils sont exposés à des substances mimant les œstrogènes.

21 composés (e.g. œstrogènes naturels ou de synthèse, alkylphénols, bisphénols) sur les 45 testés ont induit une fluorescence, à des degrés variables. Les capacités métaboliques du modèle permettent de détecter des substances comme certains androgènes et certains progestatifs synthétiques (utilisés dans les pilules contraceptives).

Un tel test présente un intérêt pour l’évaluation de substances chimiques, comme le requiert le règlement REACh (2). Cet outil vient compléter les dispositifs in vitro existants ; il a l’avantage d’intégrer le devenir des polluants dans l’organisme, y compris en tenant compte de leur métabolisme, ce que les tests cellulaires ne permettent pas toujours. En raison de sa sensibilité, il pourrait aussi s’envisager pour la surveillance des milieux aquatiques.

Les recherches de l’INERIS et de l’Inserm ouvrent enfin des perspectives nouvelles dans le champ d’étude des perturbateurs endocriniens au niveau du système nerveux central.

Pour les chercheurs, il semble que ce test simple, robuste et sensible trouvera de nombreuses applications dans le cadre de l’évaluation des risques liés aux perturbateurs endocriniens de nature œstrogénique.

Financées par le Ministère chargé de l’Ecologie et l’Agence Nationale de la Recherche, les recherches menées par l’INERIS et l’Inserm ont vocation à caractériser le potentiel PE de ces substances chimiques, qui entrent dans la composition de médicaments, cosmétiques, produits phytosanitaires, plastiques, etc.

A propos de l’INERIS
L’Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques a pour mission de contribuer à la prévention des risques que les activités économiques font peser sur la santé, la sécurité des personnes et des biens, et sur l’environnement. Il mène des programmes de recherche visant à mieux comprendre les phénomènes susceptibles de conduire aux situations de risques ou d’atteintes à l’environnement et à la santé, et à développer sa capacité d’expertise en matière de prévention. Ses compétences scientifiques et techniques sont mises à la disposition des pouvoirs publics, des entreprises et des collectivités locales afin de les aider à prendre les décisions les plus appropriées à une amélioration de la sécurité environnementale. Créé en 1990, l’INERIS est un établissement public à caractère industriel et commercial, placé sous la tutelle du Ministère de l’Écologie, du Développement Durable et de l’Energie. Il emploie 588 personnes, basées principalement à Verneuil-en-Halatte, dans l’Oise. Site Internet : www.ineris.fr.

A propos de l’Inserm
Créé en 1964, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) est un établissement public à caractère scientifique et technologique, placé sous la double tutelle du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la Santé. Ses chercheurs ont pour vocation l’étude de toutes les maladies, des plus fréquentes aux plus rares, à travers leurs travaux de recherches biologiques, médicales et en santé des populations. L’Inserm soutient plus de 300 laboratoires répartis sur le territoire français. L’ensemble des équipes regroupe près de 13 000 chercheurs, ingénieurs, techniciens, gestionnaires… l’Inserm est membre de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé, fondée en avril 2009 avec le CNRS, l’Inserm, le CEA, l’Inra, l’Inria, l’IRD, l’Institut Pasteur, la Conférence des Présidents d’Université (CPU) et la Conférence des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires Cette alliance s’inscrit dans la politique de réforme du système de recherche visant à mieux coordonner le rôle des différents acteurs et à renforcer la position de la recherche française dans ce secteur par une programmation concertée.

Notes

(1) en collaboration avec le Professeur B.C. Chung de l’Academia Sinica à Taiwan.

(2) Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemical substances : règlement du Parlement Européen et du Conseil n°1907/2006 du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances.

Contacts
Contact Chercheur
Olivier Kah, directeur de recherche Inserm Unité INSERM 1085 "Institut de recherche, sante, environnement et travail" Tél. : 02 23 23 67 65
Contact Presse
INERIS : Aurélie Prévot – 03 44 55 63 01 Inserm : Priscille Rivière – 01 44 23 60 97
Sources
Brion (F.), Le Page (Y.), Piccini (B.), Cardoso (O.), Tong (S.K.), Chung (B.C.), Kah (O.). Screening Estrogenic Activities of Chemicals or Mixtures In Vivo Using Transgenic (cyp19a1b-GFP) Zebrafish Embryos. PLoS One, 2012, 7(5):e36069, Epub 2012 May 7.
fermer