Pour la première fois chez l’Homme, des chercheurs de l’Unité mixte de recherche 938 Inserm-UPMC et de l’AP-HP, en collaboration avec l’unité d’Ingénierie et de Thérapie Cellulaire de l’EFS, ont réussi à injecter à un donneur humain des globules rouges cultivés (GRc) créés à partir de ses propres cellules souches hématopoïétiques humaines (CSH). Dans un contexte où les besoins en sang ne cessent de croître et où le nombre de donneurs diminue, les résultats de cette étude menée par Luc Douay dans l’unité mixte de recherche Inserm-UPMC, représentent l’espoir qu’un jour les patients ayant besoin d’une transfusion sanguine deviennent leurs propres donneurs.
Les résultats sont publiés aujourd’hui dans Blood, le journal de l’American Society of Hematology (ASH, association américaine d’hématologie)
© Inserm, Claude Féo – Sang normal humain (hématies)
En utilisant les CSH (cellules souches qui fabriquent tous les types de cellules sanguines) d’un donneur humain, les chercheurs de l’Unité mixte de recherche 938 (Inserm – UPMC) et de l’Hôpital Saint Antoine (AP-HP) ont réussi à produire en laboratoire des milliards de GRc, avec l’aide de facteurs de croissance spécifiques qui régulent la prolifération et la maturation des CSH en globules rouges. Les chercheurs, qui tentaient de prouver que les GRc sont capables d’atteindre la maturation complète dans l’organisme, ont ensuite injecté ces cellules à quatre modèles de souris. Ils ont pu confirmer que les cellules suivaient effectivement la totalité du processus de maturation.
L’équipe de recherche a ensuite répété l’expérience sur un donneur volontaire : en lui réinjectant des GR cultivés à partir de ses propres cellules souches, ils ont évalué leur survie chez l’Homme. Au bout de cinq jours, le taux de survie des GRc dans la circulation sanguine du donneur était compris entre 94 et 100 % et, au bout de 26 jours, entre 41 et 63 % ; ce taux est comparable à la demi-vie moyenne de 28 jours des globules rouges natifs normaux. Ces résultats démontrent que la durée de vie et le taux de survie des cellules cultivées sont similaires à ceux des globules rouges « classiques », ce qui étaye leur validité en tant que source possible de transfusion.
« Bien que les recherches déjà menées aient montré qu’il est possible de transformer les CSH en globules rouges matures, cette étude est la première à démontrer que ces cellules peuvent survivre dans le corps humain, une percée majeure pour la médecine transfusionnelle. Nous avons cruellement besoin de nouvelles sources de produits sanguins pouvant être transfusés, en particulier pour faire face à la pénurie de donneurs de sang et pour réduire le risque d’infection lié aux nouveaux virus émergeants, associé à la transfusion classique. » souligne Luc Douay, principal auteur de l’étude, directeur de l’équipe de recherche « Prolifération et différenciation des cellules souches » (Inserm – UPMC) à l’Hôpital Saint Antoine.
« Bien que la production à grande échelle de ces cellules nécessite des progrès technologiques supplémentaires dans le domaine de l’ingénierie cellulaire, nous sommes convaincus que les GRc pourraient constituer une réserve illimitée de cellules sanguines et une alternative aux produits de transfusion classiques », conclut-il.