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La souche historique du SARS-CoV-2 décroît alors que progression du variant britannique s’intensifie

 

Cellule infectée par le SARS-CoV-2. © Sébastien Eymieux et Philippe Roingeard, INSERM – Université de Tours.

Face à l’apparition des variants du SARS-COV2, les cartes de progression de l’épidémie de Covid 19 ont été rebattues. D’après les derniers scénarios élaborés par les chercheurs de l’Inserm sous la direction de Vittoria Colizza, le variant « britannique » pourrait devenir dominant en France la dernière semaine de février ou la première semaine de mars, avec de grandes disparités régionales. Pour le moment, le déploiement prévu de la vaccination aurait un impact limité sur ces trajectoires mais le renforcement des « mesures barrières » pourrait permettre de gagner du temps.

Les données relatives aux admissions à l’hôpital montrent qu’après une augmentation de leur nombre de décembre (6 700 hospitalisations hebdomadaires en moyenne) à début janvier (environ 9 000), l’épidémie a plafonné dans la deuxième moitié du mois, après la mise en œuvre du couvre-feu à 18H et le renforcement des mesures de distanciation sociales en France.

Sur la base de la circulation du variant britannique estimée début janvier, les chercheurs de l’Inserm considèrent que ce plateau observé résulte du contrepoids de deux dynamiques opposées : une circulation décroissante de la souche historique (avec des effectifs reproducteurs passant sous la barre du chiffre 1[1]) opposée à l’augmentation exponentielle de celle de la variante. Celle-ci pourrait devenir dominant d’ici la fin du mois de février ou le début du mois de mars.

Un possible ralentissement lié aux vacances scolaires, avec des mesures de distanciation sociale plus contraignantes, ainsi que le renforcement du dispositif tracer-tester-isoler permettrait de gagner du temps supplémentaire avant une résurgence des cas attendue, associée à la diffusion des variants.

[1] (0,95 en France, 0,95 en île de France)

Covid-19 : Un modèle mathématique pour améliorer le système de dépistage français et mieux contrôler l’épidémie

L’étude s’intéresse au système de dépistage de nouveaux cas de Covid-19 au moment du premier déconfinement. © Adobe Stock

Comment améliorer les politiques de santé publique mises en place pour détecter les nouveaux cas de Covid-19 ? A l’heure du déconfinement et à l’approche des fêtes de fin d’année, cette question est plus que jamais d’actualité. Avec l’objectif d’éclairer les politiques publiques sur ce sujet et de continuer à freiner l’épidémie en France, la directrice de recherche Inserm Vittoria Colizza et son équipe à l’Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique (Inserm/Sorbonne Université) ont développé un nouveau modèle mathématique permettant de tirer de premiers enseignements scientifiques du dispositif « tester – tracer – isoler » mis en place au moment du premier déconfinement de l’été 2020. Leurs travaux sont publiés dans le journal Nature.

 A l’approche des fêtes de Noël et au moment où les pouvoirs publics envisagent les prochaines étapes pour alléger les restrictions, la mise en place d’une politique efficace de dépistage des cas de Covid-19 et de traçage des « cas-contacts » est considérée comme une priorité afin de garder le contrôle de l’épidémie.

Vittoria Colizza, directrice de recherche Inserm à l’Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique (Inserm/Sorbonne Université) publie avec ses collègues une nouvelle étude pour faire le bilan de la stratégie « tester – tracer – isoler » mise en place lors du dernier déconfinement.

L’idée est de mieux appréhender son efficacité et d’identifier ses éventuelles limites en utilisant un modèle mathématique pour estimer le nombre de cas symptomatiques de Covid-19 n’ayant pas été détectés en France métropolitaine entre le 11 mai 2020 et le 28 juin 2020.

Afin de renseigner les paramètres du modèle mathématique et estimer le nombre de cas symptomatiques de Covid-19 pendant le déconfinement, les chercheurs ont eu recours à différents types de données : les chiffres d’admission à l’hôpital région par région, des données socio-démographiques, des estimations de Santé Publique France indiquant le pourcentage de personnes respectant les mesures barrières ou encore à des données de mobilité de Google permettant d’avoir une meilleure idée du nombre de personnes retournant en présentiel sur leur lieu de travail.

En parallèle, pour mieux appréhender les comportements des Français en matière de santé pendant le déconfinement et évaluer les éventuels retards dans leur prise en charge, les chercheurs se sont aussi appuyés sur des données issues du système de surveillance participative mis en place par l’Inserm, Santé Publique France et Sorbonne Université. Initialement connu sous le nom de « grippenet.fr » et visant à suivre l’évolution des épidémies de grippe sur le territoire français, ce système est devenu Covidnet.fr au printemps. Par ce biais, ils ont peu avoir accès à des données portant sur l’état de santé et les comportements de près de 7500 personnes entre mai et juin 2020.

Enfin, les chercheurs se sont penchés sur les données du système de surveillance virologique national SI-DEP qui comprend tous les résultats de tests Covid-19 réalisés par les laboratoires de biologie médicale, afin de comparer le nombre de cas de Covid-19 estimés grâce à leur modèle au nombre de cas positifs rapportés via ce dispositif de surveillance.

Mieux cibler les personnes à dépister

A partir de leur modèle, les scientifiques estiment qu’au cours de la période étudiée le nombre de cas symptomatiques de Covid-19 a été sous-estimé : environ 90 000 cas symptomatiques de Covid-19 n’auraient pas été identifiés dans le cadre du système de dépistage mis en place dans la période suivant le déconfinement.

Le nombre de personnes positives au Covid-19 aurait donc été supérieur au nombre estimé à partir des données issues de la surveillance virologique via le système SI-DEP. Par ailleurs, les données issues de Covidnet.fr suggèrent que seul 31 % des personnes ayant présenté des symptômes de Covid-19 ont consulté un médecin sur cette période. 

Pour les chercheurs, il est donc important de mieux sensibiliser la population et de continuer à adapter le système de dépistage pour qu’il soit mieux ciblé en direction des personnes symptomatiques, dès les premières manifestations cliniques. 

En identifiant la majorité des cas de Covid-19 présentant des symptômes, il sera ensuite plus aisé de tracer leurs contacts et d’identifier d’éventuels cas asymptomatiques. A noter que depuis la période de l’étude, le système de dépistage a largement évolué avec notamment l’arrivée des tests antigéniques facilitant ainsi l’accès aux tests à un plus grand nombre. 

L’étude suggère aussi que même une augmentation faible du taux d’incidence (nombre de tests positifs pour 100 000 habitants) a un impact délétère sur la capacité à identifier de nouveaux cas. Pour les chercheurs, il s’agit surtout de mieux cibler les personnes qui doivent se faire tester, même lorsque le virus circule faiblement et que le nombre de nouveaux cas est faible.

« Une forte sous-estimation des cas est un frein majeur au contrôle de l’épidémie. En effet, les cas non identifiés continuent de propager le virus mettant à risque notre stratégie de contrôle. Tester-tracer-isoler est le seul moyen dont nous disposons pour continuer à freiner la propagation du virus en allégeant les mesures restrictives ciblant toute la population. La tâche est d’autant plus ardue que nous sommes en période hivernale. Notre étude suggère qu’il faut continuer à renforcer les capacités de dépistage pour qu’elles soient plus ciblées, efficaces et accessibles à tous pour lutter contre la pandémie », conclut Vittoria Colizza.

Nouvelle analyse de la mobilité des Français au cours de la première semaine du confinement

Comment la mobilité est-elle impactée par le reconfinement ? Crédits : Adobe Stock

Depuis fin octobre, la France est entrée dans un deuxième confinement afin de ralentir la circulation du virus et le nombre d’hospitalisations. Bien que plus légères que lors du confinement mis en place au printemps, ces mesures restrictives ont un impact sur la mobilité des personnes à différentes échelles spatiales et temporelles.

Une équipe de recherche, coordonnée par les chercheurs Inserm Vittoria Colizza et Eugenio Valdano en collaboration avec l’opérateur  téléphonique Orange, s’est appuyé sur les données des téléphones mobiles pour analyser la mobilité de la population française au cours de la première semaine ouvrée du confinement actuel (du 2 au 6 novembre 2020). Ces données rendent compte pour chaque journée des déplacements sur 1436 différentes zones géographiques réparties sur tout le territoire français et sont stratifiées en fonction de l’âge des personnes et de l’heure de la journée à laquelle intervient le déplacement.

Dans un nouveau rapport, les chercheurs présentent donc une analyse spatiale (mobilité nationale, régionale et locale), temporelle (par semaine, par jour, par heure) et par classe d’âge (jeunes, adultes, seniors) des déplacements au cours de la première semaine du confinement. De plus, la mobilité est comparée avec celle enregistrée au cours de la première semaine de travail du premier confinement (23-27 mars 2020).

Les données suggèrent que la mobilité a bien diminué depuis l’annonce de ce deuxième confinement. En effet, elle est inférieure de 33 % par rapport aux niveaux de mobilités observés en 2020 avant que la pandémie ne prenne de l’ampleur. Elle est toutefois plus importante que celle observée en mars, au début du premier confinement (elle atteignait alors – 67% des niveaux de mobilité pré-pandémique) et est caractérisée par de fortes disparités régionales.

Cette moindre réduction est notamment expliquée par les mesures de confinement moins restrictives, notamment le maintien de l’ouverture des écoles et d’un plus grand nombre de secteurs d’activité.

Autre résultat d’intérêt : les chercheurs mesurent aussi une forte association entre la réduction de la mobilité et les indicateurs socio-économiques, indiquant que les restrictions de mobilité sont les plus prononcées parmi les catégories de population les plus aisées, confirmant les résultats déjà trouvés lors du premier confinement, apparus sur Lancet Digital Health.

Cette première analyse constitue un outil supplémentaire pour évaluer l’impact des politiques publiques actuelles mises en place dans le contexte de la crise sanitaire et pour éclairer les futurs ajustements possibles.

L’exposition au plomb pendant la grossesse associée à une diminution du poids de naissance

Photo by Aditya Romansa on Unsplash

L’exposition au plomb au cours de la grossesse est associée à une diminution du poids à la naissance de l’enfant. C’est ce que confirme une étude menée auprès d’une cohorte européenne mères-enfants coordonnée par Rémy Slama, directeur de recherche Inserm à l’Institut pour l’avancée des biosciences (Inserm/CNRS/Université de Grenoble). Elle s’inscrit dans le vaste projet HELIX (Early-Life Exposome) mené par l’Inserm et des partenaires européens, dont l’objectif est d’évaluer l’exposition précoce à 131 facteurs environnementaux sur la santé. Ce travail a été publié dans l’International Journal of Epidemiology.

Chaque jour, nous sommes exposés à de nombreux facteurs environnementaux : bruit, pollution atmosphérique, conditions météorologiques, pesticides, perturbateurs endocriniens, métaux lourds, etc. L’ensemble de ces éléments constitue ce que l’on appelle l’exposome. Ce concept désigne en effet toutes les expositions qui peuvent influencer la santé humaine tout au long de la vie, à l’exception des facteurs génétiques.

Des équipes de recherche décrivent et étudient l’impact de l’exposome sur différents paramètres de santé. Le directeur de recherche Inserm Rémy Slama et son équipe spécialisée en épidémiologie environnementale à l’Institut pour l’avancée des biosciences (Inserm/CNRS/Université de Grenoble) travaille en particulier sur les liens entre exposome et poids de naissance dans le cadre du projet européen HELIX (voir encadré).

Dans leur récente publication, ils ont étudié les relations entre l’exposition à 131 facteurs environnementaux au cours de la grossesse, et le poids des enfants à la naissance dans une cohorte européenne composée de 1287 paires mères-enfants. L’exposition à ces différents facteurs a été mesurée de plusieurs manières. Dans le cas des particules fines, les chercheurs ont par exemple utilisé des mesures et des modélisations de la pollution atmosphérique tandis que des dosages biologiques de prélèvements sanguins ou urinaires ont été réalisés pour étudier des substances chimiques comme les PCB (polychlorobiphényles), les phtalates ou encore le bisphénol A.

En moyenne, les enfants issus de la cohorte sont nés à 39 semaines de gestation révolues ; 90 % d’entre eux avaient un poids de naissance compris entre 2 550 g et 4 240 g. L’analyse statistique des chercheurs a permis d’identifier trois facteurs associés à des poids de naissance s’écartant de la moyenne, parmi lesquels l’exposition au plomb. Après correction sur les facteurs comportementaux et physiologiques connus pour influencer la croissance fœtale (durée de gestation, sexe, tabagisme maternel…), les chercheurs ont montré que le poids des enfants à la naissance diminuait de 97g à chaque fois que la concentration sanguine de plomb chez la mère était multipliée par deux.

En France, le niveau moyen d’exposition au plomb des femmes est relativement élevé, notamment en raison d’une interdiction tardive du plomb dans l’essence dans l’hexagone (en 2000) par rapport à d’autres pays comme les États-Unis. Dans l’étude, même chez les femmes présentant une plombémie inférieure à 10 µg / litre, soit une valeur très inférieure au seuil de déclenchement d’une déclaration obligatoire aux autorités sanitaires pour la prévention du saturnisme infantile (50 μg/L)[1], l’association avec le poids de naissance se maintenait.

Par ailleurs, deux autres types d’exposition ayant un impact sur le poids de naissance ont été identifiées, même si le lien était statistiquement moins robuste. L’exposition aux particules fines atmosphériques (les PM2,5) au cours du troisième trimestre de grossesse a été associée à un plus petit poids de naissance, tandis que l’exposition des garçons aux éthyl- et propyl-parabènes (des conservateurs utilisés dans les cosmétiques, les médicaments et les aliments pour leurs propriétés antibactériennes et antifongiques), était associée à un poids de naissance plus élevé. 

En considérant des dizaines de facteurs environnementaux simultanément au cours d’une étude et en proposant une description fine de l’exposome des femmes enceintes européennes, ces travaux marquent une avancée dans l’étude de l’exposome. 

Qu’est-ce que le projet HELIX ? 

Le projet HELIX (Early-Life Exposome) est un projet européen, précurseur dans l’étude de l’exposome. Lancé en 2013, il est destiné à mesurer l’exposition de la population à de nombreux facteurs environnementaux au cours des premières années de vie et à évaluer leur impact sur la santé (neuro-développement, santé respiratoire ou encore corpulence de l’enfant).

De nombreux agents chimiques préoccupants d’après les connaissances toxicologiques et épidémiologiques actuelles sont inclus dans l’analyse, ainsi que des facteurs physiques comme les rayons UV. Dans ce projet, les chercheurs étudient l’exposome durant la vie intra-utérine via les expositions de la femme enceinte, et pendant l’enfance à partir de dosages et de mesures réalisés chez l’enfant de 6 à 10 ans.

Le consortium HELIX regroupe six cohortes européennes, correspondant à un total d’environ 1300 familles. La partie française du projet s’est appuyée sur un peu moins de 200 familles, recrutées et suivies dans le cadre de la cohorte Eden mise en place par l’Inserm et les CHU de Poitiers et Nancy. A la suite d’une première série de projets sur l’exposome soutenus en 2013, parmi lesquels le projet HELIX, l’Union Européenne a soutenu 9 nouveaux projets sur l’exposome en 2020, dont deux associant l’Inserm.

[1]En France, pour toute concentration sanguine en plomb supérieure ou égale 50 µg/l de sang à chez la femme enceinte ou l’enfant, le médecin doit faire une déclaration obligatoire auprès de l’ARS.

Comment modéliser l’impact de la réouverture des écoles sur l’épidémie de Covid-19?

L’équipe de la directrice de recherche Inserm Vittoria Colizza à l’Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique (Inserm/Sorbonne Université) publie un nouveau rapport pour modéliser l’impact potentiel de la réouverture des écoles en Ile-de-France sur la progression de l’épidémie. S’appuyant sur des données démographiques et de mobilité des populations, sur les connaissances actuelles sur le rôle des enfants dans l’épidémie, et sur la capacité d’accueil des services hospitaliers de réanimation de la région, les chercheurs ont ainsi tenté d’évaluer les conséquences d’une réouverture progressive, partielle ou totale de chaque type d’école (maternelle, école primaire, collège et lycée) et le risque de saturation des hôpitaux, en tenant compte des incertitudes sur le risque de transmission du virus selon l’âge.

 

 

Leurs travaux suggèrent qu’une ouverture des écoles maternelles et primaires à partir du 11 mai, qu’elle soit progressive ou non, ne conduirait pas à une saturation des services de réanimation. L’occupation de ces services n’atteindrait en effet au maximum que 65% de leur capacité (estimée ici à 1,500 lits suite à la première vague épidémique).

Afin de minimiser son impact, cette réouverture doit néanmoins s’accompagner de mesures de distanciation sociale ainsi que de tests conduits à grande échelle, avec un suivi et une mise en isolation des individus infectés et des cas contacts.

Selon le rapport, une réouverture des collèges et des lycées devrait intervenir plus tardivement afin d’éviter une saturation du système hospitalier en Ile-de-France. A noter que le modèle ne prend pas en compte les possibles effets du port de masques à l’école, les données sur la capacité de cette intervention à réduire la transmission du virus étant encore limitées.

Cryothérapie : très peu d’effets bénéfiques prouvés mais des effets secondaires réels

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En 2010, l’Inserm et la Direction générale de la santé (DGS) ont signé une convention de partenariat dont le cadre vise à évaluer l’intérêt pour la santé des médecines dites non conventionnelles pratiquées en France. Dans un nouveau rapport publié ce jour, les chercheurs de l’Inserm se sont penchés sur la cryothérapie, une technique exposant l’organisme pendant 2 à 3 minutes à un froid intense allant de -110 à -170°C.

A l’origine destinée aux sportifs de de haut niveau, afin de prévenir ou traiter les douleurs musculaires après l’exercice, cette pratique est désormais proposée dans le cadre de maladies inflammatoires ou neurologiques, voire en dehors de tout contexte pathologique.

Après analyse de la littérature scientifique publiée sur ce sujet et des témoignages d’experts ou de patients, le rapport de l’Inserm conclut que les résultats en faveur d’un effet positif de la cryothérapie sont modestes et mesurés et uniquement à très court terme.

D’autre part, la qualité méthodologique des études existantes est insuffisante, ce qui doit amener « à relativiser d’autant plus les effets positifs rapportés » estiment les chercheurs qui alertent également sur le fait «qu’en tout état de cause, la cryothérapie ne peut en aucune façon revendiquer de traiter efficacement des cancers ou d’autres pathologies somatiques sévères».

D’après les chercheurs, la cryothérapie corps entier pose par ailleurs d’authentiques problèmes de sécurité. Des effets secondaires bien réels ont été rapportés (brulures, maux de tête, urticaire chronique au froid…). Enfin, le rapport conclut qu’il est indispensable de mieux étudier et évaluer la cryothérapie du corps entier en rendant possible les conditions de ces évaluations.

Rééducation orthoptique et limitation de l’exposition aux écrans : un duo gagnant pour traiter les vertiges dus aux troubles de la convergence chez l’enfant

boy and girl standing in front of laptop

© stem.T4L on Unsplash

Afin de voir nettement les objets, nos yeux doivent être capables de « faire le point » en superposant parfaitement les images perçues par chacun des yeux : en louchant (convergeant), lorsque l’objet est proche, et en relâchant cette convergence, lorsque le regard passe d’un objet proche à un objet plus éloigné. Cette capacité de nos deux yeux à effectuer ensemble des mouvements symétriques et coordonnés (même vitesse et même amplitude) est appelée vergence binoculaire. Les troubles dits de la vergence ou troubles orthoptiques sont donc caractérisés par une mauvaise coordination des deux yeux. Ils peuvent générer chez les enfants des symptômes handicapants (vertiges, instabilité, difficultés à la lecture…) qui peuvent être responsables d’absentéisme scolaire et de troubles des apprentissages.

Une équipe de chercheurs dirigée par Sylvette R. Wiener-Vacher (PH, AP-HP) et Maria Pia Bucci (chercheuse CNRS) dans l’unité 1141 « NeuroDiderot : maladies neurodéveloppementales et neurovasculaires » (Inserm/Université de Paris), avait déjà montré que des troubles de vergence devaient être recherchés chez tous les enfants atteints de vertiges dont l’examen neurologique et vestibulaire[1] était normal. Les nouveaux travaux de cette équipe, publiés dans Frontiers in Integrative Neuroscience , montrent que les vertiges liés aux problèmes de vergence chez l’enfant pourraient être traités par l’association d’une rééducation orthoptique et d’une diminution de l’utilisation des écrans.

Pendant 3 ans, l’équipe de recherche a évalué l’efficacité de la rééducation orthoptique sur des enfants adressés au service ORL de l’hôpital Robert-Debré – AP-HP pour des vertiges. 49 enfants présentant une insuffisance de convergence comme seule cause de leurs symptômes ont participé à cette étude. 109 enfants en bonne santé ont servi de témoins. Chaque enfant a été suivi pendant 9 mois, et tous ont effectué une évaluation orthoptique (bilan des capacités de vergence) ainsi que des enregistrements des mouvements oculaires à différentes étapes de l’étude : avant et 3 mois après le début de la rééducation orthoptique, puis 6 mois après la fin de la rééducation. Les chercheurs ont aussi conseillé à tous les enfants de réduire leur utilisation d’écrans vidéo qui était intensive (~ 3,6 h par jour) et qui apparaissait comme un potentiel facteur aggravant. 

Chez tous les patients, les vertiges avaient disparu après la fin de la rééducation orthoptique et tous les paramètres des mouvements oculaires s’étaient nettement améliorés.  6 mois après la fin de la rééducation, ces paramètres étaient toujours positivement stables.

Ces résultats indiquent que le traitement orthoptique, associé aux instructions visant à réduire l’utilisation d’écrans, montre un effet significatif à long terme sur les symptômes de vertiges ainsi que sur les performances oculomotrices des enfants suivis.

« Ces nouveaux résultats pourraient avoir un effet positif sur la reconnaissance de l’efficacité de la rééducation orthoptique, qui est encore controversée », précisent les auteurs.

Les résultats de cette étude suggèrent de plus que l’utilisation intensive des écrans peut aggraver des problèmes orthoptiques latents. Les chercheurs précisent « Aujourd’hui, de nombreux enfants sont exposés aux écrans vidéo pendant de longues périodes. L’augmentation du nombre de patients présentant des symptômes dus aux problèmes de vergence que nous observons ces dernières années pourrait être expliquée par ce mode de vie. » Les auteurs recommandent ainsi l’inclusion d’un bilan orthoptique dans les tests cliniques pour les enfants qui souffrent de vertiges ainsi qu’une réduction de l’exposition aux écrans vidéo, particulièrement chez les enfants présentant des troubles de vergence.

 

[1] Le vestibule est une partie de l’oreille interne impliquée dans l’équilibre.

Les conséquences neurologiques du virus Zika enfin dévoilées

©Fotolia

L’infection virale Zika est toujours un problème de santé publique mondial. Son agent pathogène est le virus Zika transmis par les moustiques du genre Aedes. Depuis 2007, de nombreuses épidémies ont été recensées en Asie et en Afrique, et plus récemment en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Si le virus est bien connu par les chercheurs et médecins, la fréquence d’apparition des complications neurologiques, leurs tableaux cliniques et leurs pronostics restent encore très énigmatiques. Dans une étude publiée dans Neurology, des équipes de chercheurs français*ont réussi à lever le voile sur les effets à long terme de ce virus. 

 L’infection par le virus Zika est responsable de graves maladies neurologiques, appelés neuroZika. De nombreuses études ont tenté de répertorier les conséquences neurologiques dues à l’infection au virus. Mais la plupart de ces études étaient limitées car elles ne s’intéressaient qu’aux patients adultes hospitalisés et se focalisaient sur le syndrome de Guillain-Barré ou sur des manifestations neuroinflammatoires aigues. En outre, des preuves biologiques d’infection par le virus Zika ont été rapportées de manière incohérente, en l’absence de pronostic.

Afin de rendre compte du spectre complet et du pronostic de neuroZika et d’identifier les facteurs prédictifs de mauvais pronostic, des équipes de recherche de l’Institut Pasteur à Paris, de l’Inserm, de l’Institut Pasteur de Guadeloupe, du Centre hospitalier universitaire de Guadeloupe, du Centre hospitalier universitaire de Martinique, de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP et du CNRS, a mené une vaste étude d’observation basée sur la population lors de l’épidémie de 2016 aux Antilles françaises.

Pour ce faire, des neurologues, neurobiologistes et infectiologues se sont associés pour étudier le cas des malades du Zika. Ces chercheurs ont étudié tous les malades du Zika qui se sont présentés à l’hôpital et avaient consultés des médecins pour des symptômes neurologiques. Parmi ceux-ci, 87 patients, dont 6 enfants, avait un neuroZika.

La majorité des cas de neuroZika (54 patients) avaient des atteintes du système nerveux périphérique (nerfs). Dix-neuf autres avaient une atteinte du système nerveux central (cerveau et moelle épinière) et quatorze patients présentaient un tableau neurologique mixte, à la fois central et périphérique.

Un quart des patients avec neuroZika ont eu une ventilation assistée en Service de Réanimation. Tous ces cas montraient des traces d’acides nucléiques du virus Zika dans l’urine, le sang ou le liquide céphalo-rachidien. Un quart des cas avec neuroZika présentaient des séquelles entrainant une grave invalidité. Ces séquelles pouvaient être prédites par la détection des acides nucléiques du virus Zika dans l’urine, le sang ou le liquide céphalorachidien.

« Ces résultats révèlent que le spectre du neuroZika revêt une grande diversité de manifestations cliniques. Ils soulignent aussi l’importance de la détection des acides nucléiques du virus pour mieux prendre en charge les malades qui pourraient présenter des graves séquelles à long terme » souligne Françoise Lazarini, chercheuse au sein de l’Unité de perception et mémoire olfactive dans le département des Neurosciences de l’Institut Pasteur.

Les séquelles à long terme sont donc fréquentes chez NeuroZika et le statut du virus à l’admission du patient peut informer du pronostic. Ces éléments doivent être pris en compte pour adapter le diagnostic et la prise en charge des malades avec neuroZika

*CHU de la Martinique, Faculté de Médecine de l’Université des Antilles, CIC Antilles Guyane, Inserm, Institut Pasteur, CNRS, AP-HP, Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Sorbonne Université, ICM

L’âge apparent des seniors : un outil diagnostique pour les généralistes ?

©Photo by Wiebrig Krakau on Unsplash 

Pour estimer l’état de santé des seniors, le personnel médical dispose de différents outils cliniques : échelles d’évaluation gériatrique, questionnaires de santé et score de fragilité. Cependant, si ces tests sont adaptés à un contexte médicalisé, ils sont plus difficiles à mettre en place pour les médecins généralistes, car ils réclament du temps et du matériel dont ne disposent pas toujours les praticiens. Pour évaluer l’état de santé général de leurs patients seniors, les généralistes se basent en premier lieu sur une connaissance approfondie du patient ainsi que sur un ensemble de signaux qu’ils détectent chez lui lors de la consultation (apparence physique, façon de se déplacer…).

La cohorte S.AGES[1], avait pour objectif de décrire entre 2009 et 2014 la prise en charge médicale et paramédicale de patients âgés de plus de 65 ans, à partir d’une base de données générée par des médecins généralistes. Des praticiens de toute la France ont été recrutés pour participer à cette étude impliquant un suivi sur 3 ans de certains de leurs patients non institutionnalisées et présentant un état de santé satisfaisant. En plus de la collecte de données sociales, démographiques et médicales, il a été demandé à chaque généraliste de classer leurs patients selon leur âge apparent en répondant à la question : «  A votre avis, est-ce que votre patient(e) paraît plus jeune ou plus vieux(ille) que son âge ou fait-il/elle son âge ? ».

C’est sur l’analyse statistique des réponses à cette question que se sont penchés des chercheurs de l’Inserm du Centre de recherche en Epidémiologie et santé des populations. Cette étude visant à analyser les caractéristiques associées à l’estimation de l’âge apparent par le généraliste et à déterminer si celles-ci permettaient de prédire un décès dans les 3 ans de suivi.

Les chercheurs ont ainsi observé que les problèmes cardiaques, la dépression, l’obésité, ainsi qu’une faible autonomie dans les actes de la vie quotidienne étaient associés principalement à des patients dont l’âge estimé était supérieur à leur âge réel, tandis qu’un haut niveau d’étude, une autonomie normale, l’absence de dépression,  l’absence de problèmes vasculaires et d’hypertension chronique et une faible médication étaient associés à des patients paraissant plus jeunes que leur âge réel. Seules deux variables impactaient cependant l’âge apparent dans les deux sens : la qualité de l’autonomie et la présence/absence de dépression.

Sur les patients décédés lors des 3 ans de suivi : 7,5% faisaient partie de ceux ayant l’air plus jeunes, 8,7% de ceux faisant leur âge et 13,8% de ceux ayant l’air plus vieux. Il ressort donc de cette étude que les patients paraissant plus âgés présentent un plus grand risque de mortalité : l’estimation de l’âge effectuée par les généralistes est donc significativement associée au risque de décès.

Ces résultats suggèrent que l’évaluation de l’âge d’un sénior par son médecin généraliste pourrait être un outil relativement fiable dans la pratique quotidienne des praticiens pour estimer de l’état de santé  globale du patient. Ceci n’implique pas de remplacer les scores de fragilité, mais bien d’amener le sens clinique du praticien comme appui au diagnostic.

[1] La cohorte S.AGES a été financée par les laboratoires Sanofi et a été approuvée par le Comité de Protection des Personnes Ile de France XI et l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé

Repositionnement de médicaments contre la grippe : un essai clinique de phase 2 pour FLUNEXT

©Fotolia

L’équipe VirPath du CIRI (Centre International de Recherche en Infectiologie, Unité Inserm 1111 – UMR 5308 CNRS – ENS Lyon – UCBL1), en collaboration avec le laboratoire du Dr Guy Boivin (chaire de recherche du Canada sur les virus émergents, Centre de Recherche en Infectiologie du Centre Hospitalier Universitaire de Québec et de l’Université Laval), a développé et validé une stratégie innovante qui consiste à identifier et exploiter directement des échantillons infectieux prélevés cliniquement, afin de sélectionner et d’utiliser des médicaments déjà commercialisés pour soigner d’autres virus (on parle alors de « repositionnement de médicaments »). Ce programme a été financé par l’Inserm, la DGOS, l’Agence National de la Recherche, la Région Auvergne Rhône-Alpes, l’Université Claude Bernard et l’Université Laval.

Cette démarche originale et accélérée du patient au laboratoire et du laboratoire au patient est particulièrement bien adaptée aux infections respiratoires aigües, car elle permet l’identification et la validation rapide de nouvelles générations d’antiviraux plus efficaces et traitant un plus grand spectre de maladies. En outre, les avantages règlementaires et financiers de la stratégie de repositionnement de médicaments sont évidents par rapport au processus long et très coûteux du développement classique de nouvelles molécules. La plateforme de « Drug Discovery » de l’équipe a déjà démontré son potentiel (trois brevets internationaux qui protègent huit médicaments repositionnés) avec l’identification du diltiazem (Tildiem®) – initialement utilisé pour des pathologies cardiaques – comme anti-infectieux pour les virus de la grippe.

Sur la base de ces résultats, un essai clinique de phase 2 piloté par Manuel Rosa-Calatrava, chercheur Inserm et Julien Poissy (Unité Inserm 995 « Centre international de recherche sur l’inflammation de Lille ») du CHU Lille, a démarré en janvier 2018. Cet essai national vise à évaluer les effets du diltiazem en combinaison avec un antiviral, l’oseltamivir (Tamiflu®), dans le traitement des infections grippales sévères. L’essai FLUNEXT vise à inclure 300 patients dans dix services de réanimation, sur deux périodes d’épidémie, pour des résultats attendus en 2019.

La validation de cette stratégie et les résultats déjà obtenus ont conduit à la création de la startup Signia Therapeutics. Désormais, le programme de recherche du laboratoire va s’étendre à d’autres pathogènes respiratoires tels que le virus syncytial respiratoire et le métapneumovirus, responsables d’infections respiratoires sévères chez les jeunes enfants et les personnes âgées.

Pour en savoir plus sur l’équipe VirPath et le CIRI :

Le site du laboratoire VirPath

Le site du CIRI

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