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Canal Détox

Le collagène pour soulager les douleurs, vraiment ?

De plus en plus de publications vantent les mérites de compléments alimentaires à base de collagène pour lutter contre les douleurs articulaires, le vieillissement de la peau ou encore pour avoir de « beaux cheveux ». Mais derrière toutes ces promesses, qu’en est-il réellement ? On revient sur le sujet dans ce nouveau Canal Détox.

Le 24 Jan 2024 | Par INSERM (Salle de presse)

CP web Collagène-gummies

© Unsplash

Sur Instagram et dans les magazines, on voit de plus en plus de publications vantant les mérites de compléments alimentaires à base de collagène pour lutter contre les douleurs articulaires, le vieillissement de la peau ou encore pour avoir de « beaux cheveux ». D’ailleurs, on retrouve la présence de collagène dans un certain nombre de produits cosmétiques. Certains sur les réseaux sociaux, n’hésitent pas à parler de « produit miracle ». Mais derrière toutes ces promesses, qu’en est-il réellement ? On revient sur le sujet dans ce nouveau Canal Détox.

Le collagène est la protéine la plus abondante du corps humain. Il s’agit du composé majoritaire des tissus conjonctifs dont la peau, les os, les ligaments, les tendons et le cartilage. Le collagène est caractérisé par une structure particulière en triple hélice, à l’origine des propriétés mécaniques spécifiques de ces tissus (élasticité, robustesse…).

Le terme « collagène » est utilisé dans le langage courant, mais il s’agit en réalité d’une vaste famille qui regroupe plusieurs « types » de collagènes. Les connaissances sur le sujet ont augmenté de façon exponentielle au cours des dernières décennies. Alors que dans les années 1970, la communauté scientifique ne parlait que de quatre types de collagènes génétiquement distincts, il est aujourd’hui admis que le grand ensemble qu’on désigne par ce terme comprend en fait jusqu’à 28 types qui diffèrent les uns des autres par leur composition moléculaire, par leur organisation au sein de l’organisme mais aussi par leurs propriétés.

Cette propension à utiliser le mot collagène de manière générique se retrouve dans le langage marketing utilisé pour promouvoir les compléments alimentaires, mais aussi parfois dans certains travaux scientifiques portant sur les effets du collagène sur la santé, qui omettent de définir le type ou la provenance du collagène considéré.

Il en résulte un certain degré de confusion : de quoi parle-t-on réellement lorsque que l’on dit que « le collagène a des effets bénéfiques » sur un problème de santé spécifique ? Fait-on référence à un type de collagène en particulier ? Tous les compléments alimentaires sur le marché ont-ils les mêmes effets ? Ces questions sont souvent laissées sans réponse, que ce soit dans la littérature scientifique ou dans les articles plus « médiatiques » qui s’intéressent au sujet.

Des limites méthodologiques

Au-delà de ces considérations lexicales, et même lorsque les travaux scientifiques prennent la peine de décrire les produits à base de collagènes qui ont été étudiés, d’autres problèmes se posent.

Tout d’abord, comme évoqué précédemment, le collagène est une protéine que le corps n’est pas capable d’assimiler sous cette forme. Lorsqu’il est ingéré, il est dégradé – ou « découpé » – en acides aminés. Ces acides aminés peuvent alors être utilisés par l’organisme pour construire des protéines. Ils peuvent certes intervenir dans la construction de collagène mais aussi de nombreuses autres protéines.

Plusieurs études ont toutefois été conduites sur différents compléments alimentaires à base de collagène, mais on constate qu’elles ont souvent des limites méthodologiques. Ainsi, si les données scientifiques disponibles soulignent généralement que les produits à base collagène sont sûrs et qu’ils peuvent avoir des effets bénéfiques pour limiter la douleur, en particulier dans le cadre de certaines pathologies comme l’arthrose, il existe une grande hétérogénéité en ce qui concerne la conception et le design des études, avec des échantillons de participants souvent très faibles, sans prendre en compte de potentiels facteurs de confusion et/ou sans comparaison des effets du produit à base de collagène avec ceux d’un placebo.

La plupart des études ne concluent pas non plus sur la question des doses efficaces (quelle dose de produit faut-il prendre et à quelle fréquence pour observer un effet bénéfique ?), ni sur celle de la période de traitement. Et comme le suivi à long terme des participants à ce type d’études est rarement effectué, il est également difficile de savoir si les éventuels effets bénéfiques qui peuvent être observés perdurent dans le temps, notamment si l’on cesse de prendre le produit.

On peut enfin ajouter que les messages marketing utilisés pour promouvoir les compléments alimentaires à base de collagène ne ciblent pas toujours uniquement les personnes qui souffrent d’arthrose ou de pathologies spécifiques. Ils sont parfois simplement décrits comme des produits qui permettent de « lutter contre les douleurs articulaires » et prévenir les troubles de santé, sans plus de précisions. Or en l’état actuel des connaissances scientifiques, il n’existe pas à ce jour de données robustes indiquant un quelconque bénéfice de la supplémentation en collagène pour prévenir l’apparition de maladies articulaires.

 

Et sur la peau ?

Le collagène a été largement commercialisé pour ses prétendus avantages en matière de réduction des rides, de rajeunissement de la peau, voire même d’inversion du vieillissement de la peau. Pourtant, en ce qui concerne les bénéfices pour la peau – mais aussi pour les cheveux – les résultats sont encore moins clairs.

Bien que certaines études aient suggéré que la supplémentation en collagène peut améliorer certaines propriétés de la peau telles que l’élasticité et l’hydratation, les messages promus dans les médias et sur les réseaux sociaux sur les effets dermatologiques du collagène vont souvent beaucoup trop loin. Les données disponibles dans la littérature sont actuellement limitées et les effets possibles de ce produit sur la peau n’ont pas encore été entièrement élucidés ni compris.

En conclusion, face à l’engouement médiatique et commercial autour des compléments alimentaires à base de collagène, une approche prudente et sceptique est recommandée. Les données scientifiques actuelles, limitées et souvent contradictoires, ne permettent pas de soutenir les affirmations relatives aux bienfaits du collagène sur les douleurs articulaires, la santé de la peau ou la qualité des cheveux. Les études jusqu’à présent souffrent de limitations méthodologiques significatives, et les résultats « prometteurs » doivent être interprétés avec prudence, d’autant qu’ils sont souvent utilisés comme arguments marketing pour vendre ces produits.

Par conséquent, il est conseillé de rester vigilants et de ne pas considérer les suppléments de collagène comme une solution miracle pour ces problèmes de santé. Il est impératif de réaliser des recherches supplémentaires, plus rigoureuses et systématiques, pour éclaircir les effets réels du collagène et déterminer si, et dans quelle mesure, il peut être bénéfique. En attendant, les individus devraient s’appuyer sur des approches éprouvées et scientifiquement validées pour la gestion de l’arthrose, des problèmes cutanés et autres conditions de santé.

 

Des collagènes « végétaux » ?

La grande majorité des collagènes que l’on trouve actuellement sur le marché sont obtenus à partir de matières premières d’origine animale. Seuls ces types de collagènes se retrouvent généralement dans les compléments alimentaires et font l’objet de recherches cliniques.

Les compléments alimentaires à base de collagène sont fabriqués à partir de collagène animal. Il est possible d’acheter des produits à base de plantes qui contiennent les nutriments nécessaires à la fabrication du collagène, comme la vitamine C et le zinc, mais ils ne contiennent pas eux-mêmes de collagène.

Texte rédigé avec le soutien de Francis Berenbaum directeur d’une équipe de recherche Inserm au Centre de Recherche St-Antoine et chef du service de rhumatologie de l’hôpital Saint-Antoine à Paris.

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