Des études cherchent à déterminer si les régimes intermittents améliorent l’équilibre alimentaires des personnes. Crédits Julia Zolotova sur Unsplash
Dans les magazines et sur les réseaux sociaux, les régimes intermittents ont le vent en poupe. Des influenceurs qui racontent leur expérience aux pseudo-experts qui alimentent leurs blogs de conseils pour permettre à chacun de s’y mettre, Internet se fait le relai, depuis plusieurs années, de cette tendance. Cependant, le terme « régime intermittent » recouvre plusieurs réalités, avec des pratiques variées (voir encadré). Leur point commun est toujours d’alterner des périodes plus ou moins longues de restrictions alimentaires avec des périodes où l’on peut manger normalement.
Ce type de régime est souvent présenté comme plus efficace pour favoriser la perte de poids. Certains estiment notamment qu’il permet d’éviter les contraintes et les frustrations éventuelles liées à une restriction alimentaire continue, et donc qu’il conduit à une meilleure adhésion. D’autres mettent en avant des effets bénéfiques sur des paramètres métaboliques (pression artérielle, glycémie, cholestérol…), voire pour la prévention de certaines maladies (cancers, maladies inflammatoires, métaboliques, cardiovasculaires…).
Il faut toutefois noter que des études scientifiques bien construites, avec des méthodologies solides, manquent encore pour évaluer correctement ces régimes et leurs effets au sein de différentes populations. De plus, même lorsque des résultats intéressants sont obtenus, il peut être difficile de les généraliser à l’ensemble des régimes intermittents étant donné l’hétérogénéité des pratiques.
Alors, que peut-on dire concernant l’effet des régimes intermittents sur la perte de poids ? Sont-ils plus efficaces que d’autres régimes à long terme ? Et quel est leur impact sur le comportement alimentaire ? Canal Détox se penche sur ces questions.
Les régimes intermittents les plus pratiqués
- Le régime 5 : 2 consiste à manger normalement pendant 5 jours puis à diminuer le nombre de calories de manière importante les 2 jours qui suivent (500 calories/jour pour les femmes et 600 calories/jour pour les hommes).
- Le régime 16/8 consiste à jeûner au cours de la journée pendant une période de 14 à 16 heures et à prendre ses repas sur les 8 à 10 heures restantes (on peut par exemple prendre un goûter à 16 h et ne plus rien consommer jusqu’au matin suivant).
- L’alternate day fasting est le fait de jeûner un jour sur deux.
Les régimes intermittents ne sont pas plus efficaces que d’autres régimes
La promesse principale des régimes intermittents serait de faciliter la perte de poids tout en allégeant les contraintes par rapport à d’autres régimes restrictifs. Or lorsqu’on se penche sur les études les plus rigoureuses ou sur les revues de littérature scientifique (méta-analyses), on s’aperçoit que les résultats sont variables. La plupart des publications ne montrent pas de supériorité du régime intermittent (quelles que soient ses modalités) par rapport à d’autres régimes en matière de perte de poids.
Parmi les études publiées sur le sujet avec une méthodologie rigoureuse, citons-en quelques-unes, qui se sont notamment intéressées au régime 5 : 2 (5 jours libres et 2 jours avec une consommation très réduite de calories).
Un travail publié dans l’International Journal of Obesity a été mené auprès de 332 personnes en situation d’obésité divisées en trois groupes (restriction continue avec réduction du nombre de calories consommées chaque jour ; restriction alternée une semaine sur deux et restriction intermittente classique 5 : 2). Après 12 mois, seuls 146 sujets ont été au terme de l’étude, avec une perte de poids modérée similaire dans les trois groupes (respectivement 6,6 kg, 5,1 kg et 5 kg en moyenne).
Des résultats semblables ont été constatés dans une étude portant sur 109 sujets suivis pendant 24 mois, avec une perte de poids similaire la première année pour les trois types de régimes et une stabilisation de ce poids entre 12 et 24 mois. Il n’est toutefois pas possible à partir de ces données d’apporter des conclusions sur d’autres types de régimes intermittents.
Ces différentes études se sont aussi intéressées à des paramètres métaboliques cruciaux pour la santé, notamment cardiovasculaires, sans parvenir à montrer la supériorité d’un régime sur les autres. Dans les travaux comparant le régime 5 : 2 aux régimes restrictifs plus classiques par exemple, si le cholestérol global a diminué, le taux de glucose dans le sang et les triglycérides[1] sont restés inchangés dans tous les groupes. De même, dans l’étude comparant ces régimes à une alimentation sans restriction, aucune différence n’a été relevée en ce qui concerne les paramètres métaboliques.
Si les régimes intermittents ne seraient donc pas moins efficaces que d’autres pour la perte de poids, ils ne peuvent toutefois être considérés comme des « régimes miracles ». D’autant que d’autres facteurs sont à prendre en compte, par exemple leur impact sur l’appétit et l’équilibre alimentaire.
Là encore les données issues de la recherche sont assez hétérogènes. On peut néanmoins citer des résultats qui suggèrent qu’un régime restrictif en continu pourrait être associé à une plus grande amélioration de l’équilibre alimentaire, avec une consommation de repas plus variés et des habitudes plus saines, que les régimes intermittents.
Quant à la question de savoir si les personnes qui pratiquent un régime intermittent « surcompensent » en mangeant plus dans les périodes où cela leur est autorisée, elle n’est pas encore entièrement tranchée.
Et enfin, il faut souligner que l’adhésion à long terme à des régimes, qu’ils soient intermittents ou non, est souvent faible. Dans plusieurs études, on observe que les participants abandonnent le régime en cours de route, avec un risque de reprendre les kilos perdus. Favoriser une alimentation équilibrée avec un soutien médical, mettant aussi l’accent sur des rythmes réguliers pour les repas et une activité physique reste une approche efficace pour de nombreux individus.
Pour aller plus loin : une sélection d’études sur le poids, l’appétit et les paramètres métaboliques
Sundfør T.M., Tonstad S., Svendsen M. Effects of intermittent versus continuous energy restriction for weight loss on diet quality and eating behavior. A randomized trial. Eur J Clin Nutr. 2019; 73 (7): 1006-1014
Jospe M.R., Roy M., Brown R.C., et al. Intermittent fasting Paleolithic, or Mediterranean diets in the real world: exploratory secondary analyses of a weight-loss trial that included choice of diet and exercise. Am J Clin Nutr. 2020; 111 (3): 503-514
Roman Y.M., Dominguez M.C., Easow T.M., et al. Effects of intermittent versus continuous dieting on weight and body composition in obese and overweight people: a systematic review and meta-analysis of randomized controlled trials. Int J Obes (Lond). 2019; 43 (10): 2017-2027
Coutinho S.R., Halset E.H., Gåsbakk S., et al. Compensatory mechanisms activated with intermittent energy restriction: A randomized control trial. Clin Nutr. 2018; 37(3):815-823. doi: 10.1016/j.clnu.2017.04.002
Trepanowski J.F., Kroeger C.M., Barnosky A., et al. Effect of alternate-day fasting on weight loss, weight maintenance, and cardioprotection among metabolically healthy obese adults: a randomized clinical trial. JAMA Intern Med. 2017
Régime intermittent, effet sur d’autres pathologies : l’exemple du cancer
Tout un pan de la recherche scientifique a également commencé à s’intéresser au lien entre régime intermittent et développement de maladies, en particulier le cancer. Néanmoins, les résultats sont à prendre avec prudence car ils ont été obtenus dans des modèles animaux. Par exemple, un régime intermittent a eu des effets bénéfiques dans un modèle de souris obèses avec cancer du sein, ralentissant la croissance tumorale et réduisant les métastases pulmonaires sans que les animaux n’aient perdu du poids par ailleurs. Il n’est toutefois pas possible de généraliser ces conclusions chez l’humain à l’heure actuelle en l’absence d’essai clinique rigoureux.
Soulignons enfin que pour les patients atteints de cancer, comme le rappelle un article relayé par l’American Cancer Society, si des études précliniques suggèrent que les régimes intermittents pourraient réduire la toxicité de la chimiothérapie, leurs risques – notamment en matière de dénutrition – sont bien plus importants.
En conclusion, si les régimes intermittents semblent globalement sûrs pour des individus sains et peuvent contribuer à réduire le poids chez certaines personnes en surpoids, leur supériorité par rapport à d’autres régimes n’est pas confirmée. De plus, des questions subsistent quant à leurs effets sur d’autres paramètres en lien avec la santé cardiovasculaire. Une alimentation équilibrée, s’appuyant sur le Programme national nutrition santé (PNNS), couplée à une activité physique régulière, est à privilégier pour favoriser la perte de poids et la santé.
[1] Des lipides sanguins dont une concentration trop élevée augmente le risque cardiovasculaire
Lire le communiqué de presse : La consommation d’aliments moins bien classés au moyen du Nutri-Score associée à une mortalité accrue
Lire la synthèse de l’expertise collective de l’Inserm : Activité physique : Prévention et traitement des maladies chroniques
Texte écrit avec l’aide de la chercheuse Karine Clément, unité 1269 Inserm/Sorbonne Université, Nutrition et obésités : approches systémiques (Nutriomique)