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Quelle immunité après une infection par le SARS-CoV-2 ?

  Comment éviter un second pic épidémique une fois le confinement levé ? Pour protéger une population contre une infection virale, l’immunité collective peut être un objectif à atteindre.   Le concept est simple : pour que la population dans son ensemble soit protégée, il suffit qu’une certaine proportion de cette population soit immunisée contre […]

Le 17 Avr 2020 | Par INSERM (Salle de presse)
Comment éviter un second pic épidémique une fois le confinement levé ? Pour protéger une population contre une infection virale, l’immunité collective peut être un objectif à atteindre.
 
Le concept est simple : pour que la population dans son ensemble soit protégée, il suffit qu’une certaine proportion de cette population soit immunisée contre le virus, soit parce qu’elle y a été exposée et a développé une réponse immunitaire, soit parce qu’elle a été vaccinée.

Pour faire face à la pandémie actuelle, certains experts, notamment au Royaume-Uni, avaient estimé que l’immunité collective serait atteinte lorsque 60 % de la population aurait été exposée et aurait développé des anticorps contre le SARS-CoV-2. Nous en sommes encore loin : les derniers travaux de modélisation de la pandémie de Covid-19 de l’Inserm suggèrent ainsi qu’au 5 avril 2020, moins de 10 % de la population française aurait été infectée par le virus.

Mais au-delà de ces considérations, faire le pari de l’immunité collective fondée sur l’infection progressive et contrôlée de la population pourrait s’avérer risqué dans la mesure où de nombreuses questions concernant l’immunisation conférée par l’infection restent encore en suspens.

Immunité et réinfections
En l’état actuel des connaissances, il est difficile de dire si le fait d’avoir été infecté par le virus signifie automatiquement que l’on est immunisé, et le cas échéant, pour combien de temps. En effet, les anticorps développés contre le virus ne sont pas forcément neutralisants (anticorps « bloquant » le virus) chez tous les individus, et leur présence pourrait simplement témoigner du fait que l’organisme a été en contact avec le virus. Si l’on prend l’exemple du rhume hivernal banal, le fait de l’attraper une fois ne signifie pas que l’on est protégé pour le reste de la saison.

Dans ce cadre se pose donc la question de savoir si l’on peut être réinfecté. Plusieurs cas de réinfections ont été rapportés, notamment en Chine et en Corée du Sud. Certains experts ont néanmoins émis l’hypothèse qu’il s’agirait peut-être d’individus sortis de l’hôpital alors qu’ils étaient encore infectés, et dont la charge virale faible avait ensuite rebondi.

D’autres pensent également qu’une réinfection pourrait être possible pendant l’intervalle entre la guérison et l’apparition des anticorps. À l’heure actuelle, il est très difficile de conclure sur cette question, car les chercheurs manquent encore de recul.

Des recherches sont en cours pour mieux répondre à ces interrogations, les travaux les plus aboutis n’ayant pour le moment donné lieu qu’à des publications en preprint et devant donc être analysés avec prudence. Une étude menée à Shanghai sur 175 patients convalescents a ainsi montré que la grande majorité d’entre eux développait des anticorps neutralisants 10 à 15 jours après l’apparition des symptômes. Par ailleurs, pour une dizaine, aucun anticorps neutralisant n’a été détecté dans le sang. Ces derniers étant sortis guéris de l’hôpital, il est probable que d’autres aspects de la réponse immunitaire entrent en jeu dans la lutte contre le virus. Ces résultats devront désormais être complétés par d’autres études rigoureuses publiées notamment dans des revues à comité de lecture.

Durée et ampleur de l’immunité
Autre interrogation clé : combien de temps une immunité contre le virus, même partielle, peut-elle durer ? Les recherches sur d’autres types de coronavirus peuvent apporter quelques indications. Dans le cas de l’épidémie de SRAS partie de Chine au début des années 2000, des études avaient rapporté que 10 % des patients n’étaient plus immunisés au bout de 12 mois. Il n’est toutefois pas certain que ces données soient applicables au SARS-CoV-2.

Dans le cas du Covid-19, de premiers résultats suggèrent que la durée de vie des anticorps pourrait être assez courte, et que les individus infectés pourraient n’être protégés que pour quelques mois, voire quelques semaines.

Cependant, le recul par rapport au début de l’épidémie est encore insuffisant pour confirmer cette hypothèse ou estimer précisément la durée de l’immunité. Approfondir les connaissances sur toutes ces questions est nécessaire aussi bien pour orienter les décisions publiques en matière de déconfinement et de dépistage de la population avec les tests sérologiques, que pour faire avancer la recherche vaccinale contre le SARS-CoV-2.

Texte préparé avec la collaboration de Marie-Paule Kieny, directrice de recherche Inserm et membre du Comité analyse recherche et expertise (Care). 
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