Vaccination © Inserm/Depardieu, Michel
Le cas de personnes obtenant un résultat positif à un test PCR quelques jours après avoir été vaccinées a fait le tour des réseaux sociaux. Certains y voient une preuve que les vaccins disponibles pour lutter contre la Covid-19 ne sont pas efficaces. Mais est-ce si simple que cela ? Peut-on être infecté par le SARS-CoV-2 dans les jours qui suivent la vaccination ? Et à plus long terme ?
Notre nouveau Canal Détox fait le point en s’appuyant sur les données issues des essais cliniques vaccinaux et sur les connaissances acquises jusqu’ici sur le virus.
Prendre en compte le délai d’incubation
Lorsque l’on est infecté par le SARS-CoV-2, les symptômes éventuels n’apparaissent pas tout de suite. Le délai d’incubation médian est de 4 à 5 jours, pouvant aller dans les cas les plus extrêmes jusqu’à 14 jours. Dès le mois de mai 2020, une étude avait montré que plus de 90 % des personnes qui développent des symptômes le font dans les 11,5 jours qui suivent l’exposition au virus.
Il est donc théoriquement possible qu’une personne soit vaccinée relativement peu de temps après avoir été infectée par le virus sans le savoir, pendant la période d’incubation. Dans ce cas, il se peut qu’elle ne manifeste des signes cliniques de la maladie et qu’elle ne soit testée positive qu’après avoir reçu sa dose de vaccin (c’est ce qui s’est par exemple passé dans le cas de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot).Les vaccins ne peuvent en revanche pas entraîner de PCR positive, mais ils permettent d’activer le système immunitaire et de faire produire des anticorps dirigés contre le virus. Un test sérologique peut donc revenir positif suite à la vaccination (voir encadré ci-dessous).
Les tests RT-PCR sont les tests de référence pour le diagnostic de la phase aiguë de la Covid-19. Fondés sur des méthodes de biologie moléculaire, ils permettent de détecter la présence du SARS-CoV-2 dans l’organisme d’un individu à un instant T et donc de confirmer un diagnostic de Covid-19 posé par un médecin. Concrètement, des échantillons nasopharyngés sont recueillis chez les personnes qui présentent des symptômes de la maladie par le biais d’un écouvillon introduit dans la narine jusqu’au rhinopharynx. À l’heure actuelle, la période idéale pour détecter l’ARN viral est de 1 à 7 jours après l’apparition des symptômes. Ce sont ces tests qui permettent de dire que l’on est infecté par le SARS-CoV-2 à un temps T.
Les tests sérologiques quant à eux permettent de déterminer si une personne a été exposée au SARS-CoV-2, en identifiant la présence dans l’organisme d’anticorps ayant été produits suite à une infection. Un test positif ne signifie pas qu’une personne est infectée à l’heure actuelle, mais que son organisme a déjà rencontré le virus. Le test sérologique d’une personne vaccinée contre la Covid-19 peut être positif, révélant la présence d’anticorps contre le virus, dans la mesure où le vaccin est allé déclencher une réponse immunitaire.
Prendre en compte le temps nécessaire pour développer une protection
Les vaccins contre la Covid-19 aujourd’hui sur le marché sont caractérisés par une efficacité très élevée. Si l’on se penche notamment sur les deux vaccins à ARNm, les données des essais cliniques de phase 3 qui étaient disponibles en novembre 2020 faisaient état d’une efficacité de 94 % pour protéger les personnes d’une infection symptomatique pour le vaccin Moderna et de 95 % pour le vaccin Pfizer.
Il est également important de souligner la grande efficacité de ces vaccins pour prévenir les formes graves nécessitant une prise en charge hospitalière : dans les essais cliniques de phase 3 évaluant les vaccins Pfizer, Moderna ou AstraZeneca, il était exceptionnel qu’un patient présente une Covid-19 sévère après les deux doses de vaccin. Malgré la vaccination, un petit pourcentage d’individus peut être infecté par le virus SARS-CoV-2 sans présenter de symptômes (forme dite « asymptomatique ») ou avoir une Covid-19 bénigne.
Les études « en vie réelle » dans des pays où la vaccination a été massive (Israël, Royaume-Uni) montrent toutefois que la vaccination permet également de protéger contre les infections asymptomatiques, avec une efficacité variable entre les études mais généralement entre 80 et 95 %. Ces données sont très encourageantes pour espérer tarir l’épidémie.
Il est enfin nécessaire de noter qu’aucun vaccin n’atteint jamais une efficacité de 100 %. À titre de comparaison, le vaccin contre la grippe saisonnière prévient environ 60 % des infections chez les adultes en bonne santé âgés de 18 à 64 ans, et il atteint ce niveau d’efficacité environ 14 jours après la vaccination. La vaccination BCG présente quant à lui une efficacité de 75 à 85 % pour éviter de développer l’infection et prévenir les formes graves de la tuberculose chez les jeunes enfants.
Des cas très rares d’infection après une vaccination complète : les cas de « percée vaccinale »
Un très faible pourcentage de personnes complètement vaccinées développera la Covid-19 si elles sont exposées au virus qui le cause. C’est ce qu’on appelle « un cas de percée vaccinale » (vaccine breakthrough), définie comme une infection ≥ 14 jours après avoir terminé l’immunisation complète vaccinale. Cela s’explique par le fait que les vaccins ne sont pas efficaces à 100%.
Les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC aux Etats-Unis) ont identifié au 20 Avril 2021, 7,157 cas d’infections au SRAS-CoV-2 chez plus de 87 millions de personnes entièrement vaccinées, soit 0,0082%. Il s’agit donc d’un risque très faible, même s’il est important de souligner que ces cas déclarés sont probablement sous-estimés puisque cela repose sur une surveillance passive et volontaire. Pour le moment, il n’y a pas de profils particuliers prédisposant à ces percées vaccinales, qui demeurent extrêmement rares. Il est recommandé de continuer de porter un masque, d’éviter les rassemblements et les espaces ventilés même quand on est complètement vacciné.
Enfin, à l’heure actuelle, le recul reste encore insuffisant pour savoir combien de temps dure la protection conférée par les vaccins contre la Covid-19. Une Correspondance dans le journal NEJM a constaté que chez 33 participants de l’essai de Phase I du vaccin de Moderna, une activité neutralisante contre le virus a été détectée 6 mois après la seconde dose. Le manque de données avec un temps de suivi plus long ne permet pas d’en savoir plus pour le moment.
Des études scientifiques se poursuivent afin d’en savoir plus sur ce sujet et de déterminer si une dose supplémentaire de vaccin sera nécessaire pour prévenir à plus long terme l’infection chez les personnes vaccinées, voire si une vaccination annuelle comme pour la grippe doit être envisagée. Les chercheurs étudient également de manière plus fine la réponse immunitaire des personnes vaccinées, afin de mieux la comprendre et de voir comment elle varie en fonction de l’âge ou du sexe de ces individus.
Texte rédigé avec le soutien de Nathan Peiffer-Smadja, chercheur dans le laboratoire IAME : infection, antimicrobiens, modélisation, évolution (unité 1137 Inserm/Université de Paris) et Thibault Fiolet, doctorant en santé publique à l’Université Paris-Saclay, UVSQ, Inserm, Gustave Roussy, Equipe Exposome Hérédité, CESP UMR1018.