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Hyperglycémie : vers une meilleure compréhension de son impact délétère sur la peau

Fibroblastes humains observés en microscopie de fluorescence. Les mitochondries sont marquées en rouge, l’ADN du noyau des fibroblastes est marqué en bleu. © Nivea Dias Amoedo/Inserm

Une dégradation de la qualité de la peau, de sa capacité à cicatriser, et de son vieillissement normal, est souvent observée chez les personnes présentant une hyperglycémie chronique. Une équipe de chercheuses et chercheurs de l’Inserm, de l’université de Bordeaux et de LVMH Recherche, s’est intéressée à la façon dont l’hyperglycémie altère le derme humain et en particulier les cellules impliquées dans sa cicatrisation, les fibroblastes. Ses travaux, parus dans Redox Biology, montrent qu’une trop forte concentration en glucose dans le derme vient perturber une mécanique complexe et finement régulée de production de l’énergie par les fibroblastes, avec des impacts sur leur capacité à maintenir l’intégrité de la peau.

Le glucose est un sucre vital pour les cellules des mammifères : il permet notamment la synthèse de nombreuses molécules essentielles à l’organisme, comme l’ADN, ainsi que la transformation d’énergie par les mitochondries, les « centrales énergétiques » du corps humain, via le mécanisme dit de « respiration mitochondriale ». Bien que les concentrations en glucose dans le derme (l’une des trois couches constituant la peau, située entre l’épiderme – la couche externe – et l’hypoderme) reflètent celles retrouvées dans le sang, le métabolisme du glucose dans la peau reste peu étudié et mal connu.

Au sein du derme, on retrouve les fibroblastes, des cellules, impliquées notamment dans la régénération de l’épiderme et dans la cicatrisation de la peau, grâce à leur capacité à produire du collagène et à se déplacer sur le site d’une blessure. Ces fibroblastes cutanés subissent directement le stress métabolique causé par l’hyperglycémie[1], une conséquence des régimes alimentaires riches en sucres.

Or, l’hyperglycémie et les maladies métaboliques qui lui sont liées (comme le diabète par exemple) sont fréquemment associées à une dégradation de la qualité et de l’intégrité de la peau, avec en particulier une moins bonne cicatrisation et un vieillissement cutané prématuré. Une des clés pour limiter ces altérations pourrait ainsi être de mieux comprendre comment l’hyperglycémie impacte le métabolisme et la structure de la peau.

Une équipe projet co-dirigée par Rodrigue Rossignol, directeur de recherche Inserm et co-directeur du laboratoire Maladies rares : génétique et métabolisme (Inserm/université  de Bordeaux) et Anne-Laure Bulteau à LVMH Recherche, s’est intéressée à la façon dont les fibroblastes du derme humain et les mitochondries qu’ils contiennent se comportent lorsqu’ils sont exposés à plusieurs degrés d’hyperglycémie : normale, modérée, élevée et extrême[2].

Ces études ont été menées dans 4 modèles complémentaires : sur des fibroblastes cultivés in vitro, dans un derme reconstitué (un modèle in vitro reproduisant la structure en trois dimensions du derme), dans une peau humaine reconstituée (similaire au derme reconstitué mais combinant derme et épiderme) et enfin dans une biopsie cutanée prélevée sur un patient diabétique.

Les résultats mettent en évidence un système très sensible et complexe de régulation du métabolisme énergétique et de l’activité des mitochondries au sein des fibroblastes humains, en réponse à la variation du taux de glucose dans le derme.

Les scientifiques ont notamment constaté qu’une hyperglycémie croissante inhibe la respiration cutanée réalisée par les mitochondries. Ils ont identifié des mécanismes moléculaires inédits débutant par la répression de l’activité des mitochondries, puis menant à leur fragmentation, jusqu’à l’activation de leur dégradation.

« Le blocage de la chaîne respiratoire des mitochondries produit des molécules toxiques pour la peau, impliquées dans son vieillissement, explique Rodrigue Rossignol, on parle alors de stress oxydatif. » 

Parmi les acteurs de la régulation de l’activité mitochondriale, les scientifiques ont identifié un facteur de croissance, appelé GDF15, dont l’activité était fortement inhibée dès l’apparition de l’hyperglycémie modérée et qui tendait à continuer de diminuer avec l’augmentation du taux de glucose environnant. Cette inhibition entraînait alors la diminution de la production de nouvelles mitochondries dans les fibroblastes. En revanche, une supplémentation des modèles de peau en GDF15 permettait d’inverser les altérations observées du métabolisme énergétique, même si l’hyperglycémie persistait.

« Nos résultats suggèrent que GDF15 pourrait être au cœur d’une potentielle stratégie pharmacologique ou dermatologique visant à limiter les dommages cutanés causés par le stress métabolique chez les personnes hyperglycémiques, indique Rodrigue Rossignol. Le chercheur tempère cependant : en conditions réelles, l’hyperglycémie chronique implique des phénomènes inflammatoires. Ceux-ci, non reproduits dans nos modèles, pourraient être susceptibles d’entraver l’action protectrice d’une supplémentation en GDF15. »

Enfin, l’équipe a pu observer que l’altération de l’activité mitochondriale des fibroblastes dégradaient leur capacité à produire un réseau de collagène cutané qualitatif.

« En cas de lésion cutanée, le réseau de collagène sert notamment aux fibroblastes à se déplacer dans le derme pour aller réparer les zones abîmées, détaille Rodrigue Rossignol, nos résultats montrent que, sous l’effet de l’hyperglycémie, le réseau étant défaillant, les fibroblastes s’y déplaçaient plus difficilement et la reconstruction cutanée était donc moins efficace. »

Ces données apportent de nouvelles connaissances fondamentales sur la façon dont l’hyperglycémie altère la physiologie de la peau et des mitochondries. Elles offrent de nouvelles perspectives concernant les causes de la dégradation de la qualité de la peau chez les personnes présentant une hyperglycémie et ouvrent la voie à de potentielles stratégies innovantes ciblant spécifiquement les mitochondries

Ces travaux sont co-financés par l’Inserm, l’université de Bordeaux, LVMH Recherche, la Fondation pour la recherche médicale (FRM) et la région Nouvelle-Aquitaine.

Seyta Ley Ngardigal, première autrice de cette étude et docteure de l’université de Bordeaux, a bénéficié d’une bourse doctorale financée par LVMH Recherche. Ces travaux s’inscrivent ainsi dans le cadre d’une thèse CIFRE dirigée par Rodrigue Rossignol et Anne-Laure Bulteau, au sein de l’unité Maladies Rares : génétique et métabolisme (Inserm/université de Bordeaux) et de LVMH Recherche (Orléans).

Les CIFRE, ou Conventions industrielles de formation par la recherche, sont des dispositifs financés par le ministère chargé de l’Enseignement supérieur de la Recherche ayant pour vocation à renforcer les échanges entre les laboratoires de recherche publique et les milieux socio-économiques, favoriser l’emploi des docteurs dans les entreprises et contribuer au processus d’innovation des entreprises établies en France.

[1]Selon l’OMS, un niveau de concentration sanguine en glucose normal est de 700 à 1000 mg de glucose par litre de sang (3,9 à 5,6 mmol/L). Entre 1200 et 2162mg/L (6,9 à 12 mmol/L), la personne est considérée en hyperglycémie ; 1200mg/L est considérée comme une hyperglycémie modérée et 2162 mg/L comme une hyperglycémie élevée.

[2]25mmol/L, soit environ deux fois la valeur d’une hyperglycémie élevée.

L’intelligence artificielle au service de la prévention de la mort subite

image décorative© Adobe stock

De nombreux décès par mort subite d’origine cardiaque pourraient être évités grâce à l’intelligence artificielle. Dans le cadre d’une nouvelle étude parue dans l’European Heart Journal, le 30 mars 2025, un réseau de neurones artificiels imitant le cerveau humain a été développé par des chercheurs et des chercheuses de l’Inserm, de l’Université Paris Cité, et de l’AP-HP, en collaboration avec des chercheurs américains. En analysant les données de plus de 240 000 électrocardiogrammes ambulatoires, cet algorithme a permis d’identifier les patients à risque de faire une arythmie grave pouvant provoquer un arrêt cardiaque au cours des deux semaines suivantes dans plus de 70 % des cas.

Chaque année, la mort subite d’origine cardiaque est responsable de plus de 5 millions de décès à travers le monde[1]. Un bon nombre de ces arrêts cardiaques surviennent brutalement sans signe précurseur identifiable, et frappent des individus de la population générale parfois sans antécédent connu de maladie cardiaque.

L’intelligence artificielle pourrait permettre de mieux anticiper les arythmies, des troubles inexpliqués du rythme du cœur dont les formes les plus sévères peuvent provoquer un arrêt cardiaque fatal, selon une nouvelle étude dirigée par une équipe de chercheurs et de chercheuses de l’Inserm, de l’Université Paris Cité et de l’AP-HP, en collaboration avec des chercheurs américains.

Dans le cadre de cette étude, un réseau de neurones artificiels a été développé par une équipe d’ingénieurs de l’entreprise Cardiologs (groupe Philips) en collaboration avec l’Université Paris Cité et l’université d’Harvard. Concrètement, cet algorithme imite les fonctions du cerveau humain, avec pour objectif d’améliorer la prévention de la mort subite d’origine cardiaque.

Les chercheurs ont analysé plusieurs millions d’heures de battements du cœur grâce aux données de 240 000 électrocardiogrammes ambulatoires recueillies dans six pays (États-Unis, France, Royaume-Uni, Afrique du Sud, Inde et République tchèque).

Grâce à l’intelligence artificielle, ils sont parvenus à identifier de nouveaux signaux faibles annonçant un risque d’arythmie. Les chercheurs se sont notamment intéressés au temps nécessaire à la stimulation électrique et à la relaxation des ventricules dans le cœur pendant un cycle complet de contraction et de relaxation cardiaque.

« Nous nous sommes rendu compte qu’il était possible d’identifier, sur l’analyse de leur signal électrique pendant 24 heures, les sujets susceptibles de développer une arythmie cardiaque grave dans les deux semaines qui suivent. Ce type d’arythmie, s’il n’est pas pris en charge, peut évoluer vers un arrêt cardiaque fatal », explique Laurent Fiorina, premier auteur de l’étude, chercheur au sein du laboratoire Paris – Centre de recherche cardiovasculaire (Inserm/Université Paris Cité), cardiologue à l’Institut cardiovasculaire Paris Sud et directeur médical en charge de l’intelligence artificielle chez Philips.

Le réseau de neurones artificiels est encore en phase d’évaluation, mais, dans le cadre de cette étude, il a montré qu’il était capable de détecter les patients à risque dans 70 % des cas, et les patients sans risque dans 99,9 % des cas.

Dans le futur, cet algorithme pourrait servir à surveiller les patients à risque à l’hôpital. À condition d’affiner ses performances, il pourrait aussi être intégré à des dispositifs comme les holters ambulatoires qui mesurent la pression artérielle pour mettre en évidence les risques d’hypertension, voire à des montres connectées.

« Ce que nous proposons ici, c’est un changement de paradigme dans la prévention de la mort subite, commente Eloi Marijon, directeur de recherche à l’Inserm au sein du laboratoire Paris – Centre de recherche cardiovasculaire (Inserm/Université Paris Cité), professeur de cardiologie à l’Université Paris Cité et chef du service de cardiologie à l’Hôpital européen Georges-Pompidou AP-HP. Jusqu’à présent, nous essayions d’identifier les patients à risque sur le moyen et long terme, mais nous étions incapables de prédire ce qui pouvait se passer dans les minutes, les heures ou les jours précédant un arrêt cardiaque.  Aujourd’hui, grâce à l’intelligence artificielle, nous sommes capables de prédire ces événements à très court terme et, potentiellement, d’agir avant qu’il ne soit trop tard. »

Les chercheurs souhaitent désormais réaliser des études cliniques prospectives pour tester l’efficacité de ce modèle en conditions réelles.

« Il est essentiel que cette technologie soit évaluée dans des essais cliniques avant de pouvoir être intégrée à la pratique médicale, insiste Laurent Fiorina. Mais ce que nous avons déjà montré, c’est que l’intelligence artificielle a le potentiel de transformer radicalement la prévention des arythmies graves. »

[1] https://www.thelancet.com/commissions/sudden-cardiac-death

Maladies cardiovasculaires : un médicament à l’essai pour prévenir de la sténose aortique

Photo d'imagerie par fluorescence. Visualisation des collagènes constitutifs d'une fibrose cardiaque dans le coeur d'une souris modèle pour l'hypertrophie cardiaque causée provoquée par une sténose aortique.

Visualisation des collagènes constitutifs d’une fibrose cardiaque dans le coeur d’une souris modèle pour l’hypertrophie cardiaque causée provoquée par une sténose aortique. Le collagène I est marqué en vert, le collagène III en rouge. © C Heron et D Godefroy/ Inserm.licence CC-BY-NC 4.0 international.

Elle est l’une des pathologies cardiaques les plus fréquentes chez le sujet âgé. En effet, la sténose aortique concerne près de 5 % des adultes de plus de 65 ans. Cette maladie grave, due à une calcification progressive de la valve aortique, demeure à ce jour sans traitement médicamenteux efficace. Une équipe de recherche du CHU de Lille, de l’Inserm, de l’Université de Lille et de Institut Pasteur de Lille, a priorisé ses recherches sur l’identification de médicaments capables de stopper ou de ralentir ce processus de calcification. Les résultats de ces travaux ont été publiés ce 24 février dans la revue Circulation.

« Cette découverte pourrait non seulement améliorer rapidement la prise en charge des patients souffrant de sténose aortique, mais également prolonger la durée de vie des prothèses valvulaires artificielles. » Prs Sophie SUSEN et Eric VAN BELLE, médecins-chercheurs au CHU de Lille.

Le rétrécissement aortique calcifié, appelé également sténose aortique dégénérative, est la maladie des valves cardiaques la plus fréquente dans le monde occidental. Sa fréquence augmente avec l’âge, car les tissus se rigidifient et se calcifient avec le temps. Elle se manifeste par un essoufflement à l’effort, parfois même au repos ; un gonflement des chevilles ou des jambes ; des douleurs thoraciques et parfois même des évanouissements à l’effort. En cas de sténose aortique sévère, le cœur doit travailler beaucoup plus à chaque battement pour pomper la même quantité de sang. Au lieu d’éjecter le sang à travers un orifice de la taille d’une pièce de deux euros, il doit le faire à travers un orifice de la taille d’une pièce de 50 centimes. En l’absence de traitement, le cœur devient plus gros et s’affaiblit progressivement. Cette maladie évolue classiquement vers une défaillance irréversible du cœur avec un risque d’œdème du poumon et de décès précoce. Une fois les symptômes présents, le taux de mortalité sans intervention TAVI (implantation de valve aortique par voie percutanée) ou chirurgicale est de plus de 30% à un an et 50% à deux ans.

Prévenir de la calcification : un défi majeur en cardiologie

La sténose aortique est un problème mécanique. L’orifice par lequel le sang est éjecté étant trop petit, le seul moyen actuel de l’agrandir est de remplacer la valve aortique. C’est dans cette optique que l’avènement des techniques de remplacement percutané a fortement progressé avec l’utilisation des bioprothèses. Toutefois, celles-ci ont tendance à calcifier également 10 à 15 ans après leur implantation, rendant nécessaire une nouvelle intervention, souvent risquée.

L’identification de cibles thérapeutiques permettant de ralentir ou de prévenir ces mécanismes de calcification reste un défi majeur en cardiologie. La communauté scientifique et les sociétés savantes considèrent la découverte de molécules capables de stopper ou ralentir ce processus comme une priorité. En ce sens, l’équipe des Pr Sophie SUSEN et Eric VAN BELLE (Inserm, Université de Lille, CHU de Lille, Institut Pasteur de Lille) a adopté une approche allant du modèle cellulaire au pré-clinique, combinant de multiples analyses permettant l’identification de cibles pharmacologiques innovantes, tout en favorisant le repositionnement de molécules déjà commercialisées.

Un dérivé de la vitamine A comme médicament contre la calcification de la valve

En collaboration avec l’Hôpital Européen Georges Pompidou et l’European Homograft Bank de Bruxelles, l’équipe lilloise s’est appuyée sur des cohortes de patients suivis au CHU de Lille. Grâce à une approche d’étude de l’expression des gènes de valves calcifiées et non calcifiées, les chercheurs ont mis en évidence la forte réduction de l’expression de l’enzyme ALDH1A1 permettant la synthèse d’un dérivé de la vitamine A dans les valves atteintes de sténose aortique. Cette réduction impactant certaines cellules valvulaires et favorisant le développement d’une nature plus calcifiante.

Grâce à cette mise en évidence, les chercheurs se sont intéressés à l’acide rétinoïque, le principal produit synthétisé par l’enzyme à partir de la vitamine A. Ils ont découvert que celui-ci était efficace in vitro et dans deux modèles animaux précliniques de dégénérescence tissulaire pour contrer la calcification. Ces travaux, publiés ce 24 février dans la revue Circulation, confirment que l’acide rétinoïque protège les cellules valvulaires de toute transformation calcifiante. Déjà commercialisé et utilisé comme traitement pour des indications en oncologie ou dermatologie, l’acide rétinoïque offre une opportunité de disponibilité rapide et sûre pour traiter la sténose aortique et prévenir la dégénérescence des bioprothèses. Ces résultats ouvrent la voie à des essais cliniques, capables d’améliorer la qualité de vie des patients et de prolonger la durée de vie des bioprothèses.

Des organoïdes humains de trompes de Fallope cultivés pour mieux comprendre les causes d’infertilité et améliorer la PMA

Images de microscopie électronique à balayage des organoïdes de trompes de Fallope humaines avec ou sans spermatozoïdes humains. © Nicolas Gatimel.

Une équipe de scientifiques de l’Université de Toulouse, du CHU de Toulouse et de l’Inserm a réussi une double avancée qui pourrait avoir des répercussions sur l’optimisation des techniques de procréation médicalement assistée (PMA). Non seulement ils ont réussi à fabriquer des organoïdes de trompes de Fallope humaines fonctionnels, mais ils ont aussi démontré que leur utilisation permettait le maintien d’une mobilité des spermatozoïdes à des niveaux supérieurs à ceux obtenus dans les milieux de culture utilisés actuellement pour la PMA. Ces résultats sont publiés dans l’édition de janvier de la revue Human Reproduction.

L’infertilité est un réel problème de santé publique qui touche un couple sur cinq en France, ainsi que plus de 200 millions de personnes dans le monde[1]. Les couples ont ainsi de plus en plus recours aux techniques de PMA pour concevoir un enfant. Toutefois, ces techniques ont besoin d’être améliorées car elles montrent encore des résultats sous-optimaux.

C’est dans ce contexte que deux équipes associant cliniciens et chercheurs se sont intéressées à une partie de l’appareil génital féminin importante dans le processus de reproduction humaine : les trompes de Fallope. Au moment de l’ovulation, les trompes de Fallope transportent l’ovocyte et permettent sa rencontre avec les spermatozoïdes pour initier la fécondation et les premières étapes du développement embryonnaire.

Afin de pouvoir étudier les trompes de Fallope sous toutes les coutures, Nicolas Gatimel, praticien hospitalier au sein du centre de PMA du CHU de Toulouse et professeur universitaire à l’Université de Toulouse au sein du laboratoire Développement embryonnaire, fertilité et environnement (DEFE – Inserm/UM/UT), et l’équipe de Nathalie Vergnolle, directrice de recherche Inserm au sein de l’Institut de recherche en santé digestive à Toulouse (IRSD – Inserm/Inrae/UT/ENVT), ont développé au laboratoire des organoïdes de trompes de Fallope humaines à partir de tissus de patientes ayant subi une ablation (salpingectomie) contraceptive.

Les organoïdes sont de petites structures biologiques en 3D qui reproduisent certaines fonctions d’un organe. Comme les trompes de Fallope sont le lieu d’événements majeurs pour la reproduction – notamment le maintien de la mobilité et l’acquisition du pouvoir fécondant des spermatozoïdes –, l’hypothèse des scientifiques était qu’une version organoïde des trompes de Fallope pourrait, en reproduisant des conditions proches de celles de l’organe in vivo, améliorer les capacités fécondantes des spermatozoïdes de manière plus efficace que dans les conditions in vitro appliquées au cours d’une PMA. Si l’hypothèse se confirmait, les scientifiques imaginaient que la connaissance de cet environnement pourrait aider à l’amélioration des milieux de culture actuellement utilisés en PMA.

Pour mener à bien ces recherches, des tissus ont été récupérés sur les organes retirés et ont été traités pour produire des cultures d’organoïdes. Ceux-ci sont des modèles in vitro, reproduisant une partie de l’organe et s’auto-reconstituant à partir de cellules souches issues de l’organe en question.

« Rapidement, les cellules isolées des trompes ont formé des organoïdes. Par rapport à d’autres expériences du même type, nos organoïdes étaient différents puisqu’ils avaient des caractéristiques morphologiques plus avancées et des dimensions exceptionnelles », détaille Guillaume Perez, chercheur à l’Université de Toulouse et co-auteur de l’étude. « Ils étaient également tout à fait aptes à ce pour quoi ils ont été conçus : accueillir des spermatozoïdes humains. »

Néanmoins, en se développant in vitro dans les boîtes de culture, les organoïdes se replient en formant des sphères difficilement accessibles aux spermatozoïdes. Pour résoudre cette problématique, les scientifiques des deux équipes de recherche ont conçu une nouvelle méthode résolvant cette difficulté d’accès et permettre une mise en culture combinée des organoïdes de trompes et des spermatozoïdes, mimant l’arrivée de spermatozoïdes au contact des trompes tel que cela se produit dans l’organe reproducteur de la femme.

« Les spermatozoïdes ainsi cultivés sur les organoïdes de trompes de Fallope ont montré une mobilité qualitativement et quantitativement supérieure à celle obtenue avec des milieux utilisés communément pour les techniques de PMA », souligne le professeur universitaire.

C’est par ailleurs la première fois que des organoïdes montrent une potentielle application clinique directe en médecine de la reproduction. Les scientifiques vont désormais pouvoir étudier plus précisément les interactions entre les trompes de Fallope et les spermatozoïdes, les ovocytes ou les embryons, et ainsi mieux comprendre certaines infertilités.

Enfin, selon Nicolas Gatimel, « grâce à notre travail, ce sont les conditions de préparation et de culture des spermatozoïdes et des embryons pour la PMA qui pourraient être améliorées », et ainsi offrir un horizon plus dégagé pour les couples ayant des difficultés à concevoir.

Ce travail de recherche fait l’objet d’un dépôt de brevet déposé par l’Inserm.

Les cultures des organoïdes se sont déroulées sur la plateforme Organoïdes de l’IRSD, dirigée par Nathalie Vergnolle, directrice de recherche Inserm, et David Sagnat, ingénieur d’études Inserm.

[1] selon le rapport sur les causes d’infertilité, produit par le Pr Hamamah et Mme Berlioux, rendu au ministère de la Santé en 2022 ; Vander Borght et al. 2018 ; Slama et al. 2012 ; Ben Messaoud et al. 2020

Augmentation des cas de scorbut chez les enfants en France depuis la pandémie de Covid

Oranges et citrons dans une coupe.Le scorbut est une maladie causée par une carence profonde en vitamine C. © Yann Khatchadourian sur Unsplash

Les équipes du service de pédiatrie générale et du centre de référence des rhumatismes inflammatoires et maladies auto-immunes systémiques de l’enfant (RAISE) de l’hôpital Robert-Debré AP-HP, de l’Inserm, de l’université Paris Cité et du département de pédiatrie de l’hôpital Cayenne en Guyane, coordonnées par les Drs Zein Assad, Maelle Trad et le Professeur Ulrich Meinzer, ont réalisé une étude sur l’augmentation de la maladie de scorbut chez les enfants en France depuis la pandémie de Covid-19. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication parue le 6 décembre 2024 dans la revue The Lancet Regional Health – Europe.

Le scorbut est une maladie causée par une carence profonde en vitamine C et qui avait pratiquement disparue à la fin du XXe siècle dans les pays à haut revenu, en particulier en Europe. Le scorbut peut être responsable, entre autres, de douleurs osseuses intenses et d’une faiblesse musculaire invalidante, d’hémorragies et d’une altération de l’état général. Le retour inquiétant de cette maladie met en lumière les possibles conséquences de l’augmentation de la précarité socio-économique depuis 2020 sur l’état nutritionnel des enfants en France.

L’objectif principal de l’étude était d’évaluer les tendances de l’incidence du scorbut chez les enfants hospitalisés en France sur une période de neuf ans et d’examiner l’impact de la pandémie de Covid-19. L’étude a également analysé l’évolution de la malnutrition, en différenciant les formes sévères des formes modérées et légères.

Cette étude repose sur des données collectées à partir du système national PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information). Elle a inclus des patients âgés de 18 ans et moins, atteints de scorbut et de malnutrition sévère, entre janvier 2015 et novembre 2023. L’étude couvre deux périodes distinctes : pré-pandémie (2015-2020) et post-pandémie (2020-2023). Les facteurs socio-économiques tels que l’indice des prix à la consommation ont été intégrés pour évaluer les corrélations avec l’incidence des maladies.

Un total de 888 patients atteints de scorbut a été hospitalisé, dont l’âge moyen était de 11 ans. L’augmentation des hospitalisations est estimée à 34,5 % après le début de la pandémie de Covid-19. Par ailleurs, la hausse des cas de malnutrition sévère, estimée à 20,3 %, conforte le lien du scorbut avec une dégradation de l’état nutritionnel des enfants. L’augmentation des cas de scorbut et de malnutrition sévère était associée à une aggravation de la précarité socio-économique et de l’inflation. Cette association ne constitue pas nécessairement une relation causale, bien que plausible.

La réémergence du scorbut peut être liée à différentes causes incluant des facteurs environnementaux, sociaux mais aussi liés aux habitudes alimentaires. Il faut également souligner l’impact inattendu, de la pandémie et des crises socio-économiques et politiques mondiales qui l’ont suivie, sur l’aggravation de l’insécurité alimentaire. Ainsi, en France, l’inflation des prix alimentaires a atteint 15 % au début de 2023, touchant particulièrement les familles précaires.

A la suite des résultats de cette étude, des recommandations pourraient être proposées, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de programmes d’aide alimentaire ciblés, l’amélioration de l’accès à des aliments nutritifs et financièrement abordables, ainsi qu’un renforcement de la formation clinique pour la prévention et la détection précoce des carences alimentaires.

Stéatohépatite associée à un dysfonctionnement métabolique (MASH) : il n’existe pas un mais deux types de maladie

La MASH est une pandémie croissante dans le monde entier, qui va de pair avec l'augmentation de l'obésité et du diabète. Il s'agit également d'un domaine où les besoins médicaux non satisfaits sont importants. Crédits : François PattouLa MASH est une pandémie croissante dans le monde entier, qui va de pair avec l’augmentation de l’obésité et du diabète. Il s’agit également d’un domaine où les besoins médicaux non satisfaits sont importants. © François Pattou

La MASH, anciennement connu sous le nom de la NASH, est une maladie hépatique chronique grave, qui concerne environ 4 à 6 % de la population adulte mondiale[1]. Une nouvelle étude révèle que contrairement à ce qui était admis jusqu’ici, il n’existe pas une seule forme de MASH mais deux. Elles se distinguent à la fois par des caractéristiques biologiques et des progressions différentes. L’une est d’origine génétique quand l’autre est la conséquence de désordres métaboliques. Cette découverte faite au CHU de Lille dans le cadre du RHU PreciNASH, un vaste projet de recherche hospitalo-universitaire coordonné par l’Inserm, a nécessité la collaboration de plusieurs équipes scientifiques issues d’Inria, du CNRS, de l’université, du CHU, et de l’Institut Pasteur de Lille[2]. Cette étude fait l’objet d’une publication dans Nature Medicine et pourrait marquer un tournant dans la façon d’appréhender la maladie sur le plan clinique et thérapeutique.

La stéatose hépatique métabolique (MASLD) est caractérisée par un excès de gras dans le foie. Cette maladie n’est pas nécessairement grave, mais si la graisse continue à s’accumuler, le foie devient le siège d’une inflammation appelée hépatite. On parle alors plus précisément de « stéatohépatite associée à un dysfonctionnement métabolique » (MASH). Dans ce cas, l’inflammation ne disparait pas, elle va au contraire s’aggraver avec le temps et peut évoluer vers la fibrose du foie[3], voire vers une cirrhose, avec un risque de cancer hépatique.

Deux types de MASH

La progression vers la MASH est variable d’un patient à un autre, à la fois en ce qui concerne sa sévérité et les complications associées. Cela suggère qu’il existe différents types de MASH. Pour vérifier cette hypothèse, des équipes lilloises regroupées dans un consortium international coordonné par le Pr François Pattou[4], ont eu recours à plusieurs cohortes de patients et à l’intelligence artificielle.

En analysant les données cliniques et de biopsie de foie de 1800 patients par un « algorithme », ils ont mis en évidence deux profils distincts de patients présentant un risque de MASH. Ces deux profils peuvent être distingués sur la base de seulement six variables cliniques et biologique simples : l’indice de masse corporelle, le taux d’enzyme hépatique alanine aminotransférase (ALT), l’âge, le taux de LDL cholestérol, le taux de triglycérides (un type d’acides gras), et celui d’HbA1c qui reflète le taux moyen de glucose dans le sang.

Les scientifiques montrent notamment que l’un des deux groupes de patients est caractérisé par un taux de triglycérides et d’HbA1c élevés et l’autre par un taux anormal d’enzyme hépatique ALT. Ces résultats ont été obtenus à partir de la cohorte ABOS, composée de personnes suivies au CHU de Lille, dans le cadre du projet européen IMI Sophia. Ces patients en situation d’obésité ont accepté la réalisation d’une biopsie hépatique dans le cadre d’une chirurgie de l’obésité. Les principaux résultats ont ensuite été validés à l’aide de quatre cohortes européennes indépendantes en Italie, Finlande, Belgique et au Royaume-Uni.

Forts de ces observations, le Pr François Pattou et ses collègues sont allés plus loin dans l’analyse des différents cas de MASH issus de la cohorte lilloise. Ils ont découvert que les deux profils de patients identifiés présentaient en fait deux formes de MASH différentes.

Origine génétique ou cardio-métabolique

Le premier groupe de patients qui présente un taux anormal d’enzyme hépatique ALT développe une MASH spécifique du foie, d’origine génétique, caractérisée par un dysfonctionnement hépatique qui conduit le foie à produire des acides gras qui s’accumulent à l’intérieur de cet organe.

Le deuxième groupe qui a des taux élevés de triglycérides et d’HbA1c présentent une MASH de type cardio-métabolique. Dans celle-ci, des lipides circulants sont importés dans foie via le sang.

« Ces deux formes ne peuvent pas être distinguées par la biopsie hépatique qui sert au diagnostic de la MASH et qui permet seulement de constater l’association d’une stéatose et d’une inflammation dans le foie. En revanche, nous montrons ici que les mécanismes physiopathologiques conduisant à l’apparition de ces deux formes de la maladie ainsi que leur progression, diffèrent », clarifie Stefano Romeo, spécialiste suédois des maladies métaboliques et chercheur associé de l’université de Lille.

Concrètement, la MASH spécifique du foie apparait chez des personnes plus jeunes et provoque essentiellement des maladies hépatiques graves alors que la seconde, de type cardio-métabolique, expose aussi au diabète de type 2 et à la survenue d’accidents cardiovasculaires.

 « Ce travail permet de stratifier les cas de MASH en deux endotypes distincts, caractérisés chacun par des mécanismes biologiques spécifiques et une progression clinique différente », résume Francois Pattou.

« Il s’agit d’une avancée importante vers une médecine de précision, avec l’idée que nous pourrions adapter à l’avenir la prise en charge des patients selon le type dont ils sont atteints. En particulier, plusieurs médicaments sont en développement pour lutter contre cette maladie, avec des résultats hétérogènes. Il serait utile de les évaluer de façon distincte selon le type de MASH », précise le professeur Philippe Mathurin, hépatologue, également impliqué dans le projet.

Pour accompagner ces prochaines étapes, l’équipe a mis au point l’application RShiny librement accessible en ligne pour les cliniciens : ce programme permet d’identifier le type de MASH d’un patient, sur la seule base des six variables simples prises en compte dans ce travail.

« Cet outil statistique n’est pas un dispositif médical, mais permet aux cliniciens de classer bien facilement de nouveaux patients sans avoir besoin de connaissance en programmation » conclut Guillemette Marot, biostatisticienne, impliquée dans la construction des deux endotypes.

 

[1] La « Metabolic dysfunction-associated steatotic liver disease » (MASLD), anciennement appelée « nonalcoholic fatty liver disease (NAFLD) », touche environ 30 % de la population adulte mondiale. Cette maladie englobe un spectre allant de l’accumulation bénigne de graisse dans le foie (stéatose) à sa forme plus sévère, la « metabolic dysfunction-associated steatohepatitis » (MASH), auparavant connue sous le nom de « nonalcoholic steatohepatitis » (NASH). La MASH, qui concerne environ 4 à 6 % de la population adulte, représente une progression dangereuse de la maladie, pouvant conduire à des complications graves telles que la cirrhose, le cancer du foie.

[2] Ce travail a été menée dans le cadre du projet RHU PreciNASH, coordonné par l’Inserm et impliquant l’Université de Lille, le CHU de Lille, L’Institut Pasteur de Lille, le CNRS. Il a été mené en lien avec le laboratoire Sanofi.

[3] Fibrose :  accumulation de tissu cicatriciel non fonctionnel

[4] François Pattou est chef du service de chirurgie générale et endocrinienne au CHU de Lille, et directeur du laboratoire de recherche translationnelle sur le diabète (U1190-EGID, Inserm, Institut Pasteur de Lille, Université de Lille, CHU de Lille)

 

Pour aller plus loin sur le sujet : regarder l’émission de l’Inserm « Le foie, ce super organe méconnu »

Dans la ville la plus haute du monde, des scientifiques mesurent les effets du manque d’oxygène sur le corps

Ville de la Rinconada, au Pérou. © Agence de communication scientifique Perceptiom - Expedition 5300Ville de la Rinconada, au Pérou. © Agence de communication scientifique Perceptiom – Expedition 5300

Plus nous montons en altitude, plus l’apport en oxygène à notre corps diminue. Depuis 2019, une équipe de recherche de l’Inserm, de l’Université Grenoble Alpes et du CHU Grenoble Alpes s’intéresse aux conséquences de la restriction en oxygène sur la santé. Leurs travaux les ont conduits au Pérou, à la Rinconada, ville la plus haute du monde (5 300 m), devenue un véritable laboratoire à ciel ouvert. Dans le cadre de l’une de leurs missions récentes, ils se sont intéressés plus spécifiquement aux effets du manque d’oxygène sur la circulation sanguine des personnes vivant sur ces territoires. Avec un double objectif : celui d’aider les populations locales en leur proposant des soins médicaux adaptés, mais aussi de mieux comprendre les mécanismes en œuvre dans l’hypoxie, situation où la disponibilité en oxygène est réduite, comme c’est le cas dans de nombreuses maladies cardiovasculaires et respiratoires. Leurs résultats, publiés dans The Lancet Regional Health Americas, montrent comment l’hypoxie altère la réactivité des vaisseaux sanguins, qui est un marqueur pronostique de santé générale.

L’hypoxie est une situation où l’apport en oxygène à l’organisme est réduit. Elle peut être rencontrée dans différentes pathologies, comme dans certaines maladies cardiovasculaires ou bien respiratoires[1]. Étudier l’hypoxie est donc d’une importance cruciale pour mieux comprendre les mécanismes en œuvre dans ces pathologies et espérer un jour en améliorer le diagnostic et le traitement.

L’étude de l’hypoxie est au cœur des travaux de recherche de l’équipe du laboratoire HP2[2] (Inserm/UGA/CHU Grenoble Alpes) depuis de nombreuses années. Les scientifiques étudient l’hypoxie en laboratoire et réalisent également des études de terrain en haute altitude, dans le cadre du programme Expédition 5300 (voir encadré ci-dessous). En effet, l’élévation en altitude est associée à une diminution progressive de la disponibilité en oxygène. Mener des recherches sur ce terrain permet donc de pouvoir étudier l’hypoxie en conditions réelles, chez des personnes qui y sont en permanence confrontées. Comprendre comment l’organisme humain peut tolérer plus ou moins difficilement l’hypoxie pourrait à terme permettre d’individualiser les soins et d’affiner les prises en charge thérapeutiques.

Dans ces travaux, les chercheurs se sont plus spécifiquement intéressés aux effets de l’hypoxie sévère sur l’organisme et plus précisément sur le système vasculaire. Sur un groupe de 94 personnes adultes, les scientifiques ont mesuré, grâce à des techniques d’imagerie et à des échantillons sanguins, ce qu’on appelle la réactivité des vaisseaux sanguins, c’est-à-dire leur capacité à se contracter ou à se dilater face à des stimuli extérieurs. La réactivité des vaisseaux sanguins est communément considérée comme un marqueur pronostique de bonne santé générale.

Plus précisément, les chercheurs ont mesuré la réactivité du système vasculaire à la fois sur les grosses artères (macrocirculation) et les petits vaisseaux sanguin (microcirculation cutanée) sur des populations péruviennes vivant à différents niveaux d’altitude, dont des habitants de la Rinconada, la ville la plus haute du monde.

Les résultats des analyses menées montrent une moindre réactivité vasculaire chez les personnes vivant en haute altitude, principalement chez celles qui vivent de façon permanente en situation d’hypoxie sévère. Les chercheurs ont observé que chez ce groupe de personnes[3], les artères et les vaisseaux étaient dilatés en permanence, diminuant ainsi leur capacité à se dilater de façon additionnelle en réponse à un stimulus. Les résultats obtenus témoignent à la fois d’une forme d’adaptation de l’organisme de ces habitants à une situation d’hypoxie permanente (on parle aussi d’hypoxie chronique) mais également de l’atteinte de certaines limites de tolérance à l’hypoxie sévère de haute altitude, pouvant mener à des complications de santé (hypertension artérielle ou insuffisance cardiaque).

Les chercheurs ont également identifié une augmentation du statut inflammatoire des habitants avec l’altitude, et notamment du stress oxydatif[4]. L’augmentation de l’inflammation observée avec l’altitude était associée à un déclin progressif de la fonction micro et macrovasculaire.

« Cette étude nous permet de décrire pour la première fois une cascade de mécanismes présents chez les personnes en situation d’hypoxie chronique, de la réponse inflammatoire à ses effets sur le système vasculaire, explique Julien Brugniaux, enseignant-chercheur à l’Université Grenoble Alpes. Ces résultats nous autorisent de façon plus large à mieux comprendre les réactions de notre organisme face au manque d’oxygène et notamment les effets de ces situations sur notre fonctionnement vasculaire », conclut-il.

« En plus de nous permettre une meilleure compréhension des pathologies impliquant des carences en oxygène, cette étude, qui s’inscrit dans un projet plus large que nous poursuivons depuis 2019, nous permet aussi d’accompagner les problématiques de santé d’une population sujette à des conditions de vie rudes, et parfois en grande précarité », explique Samuel Vergès, directeur de recherche à l’Inserm, superviseur du programme Expédition 5300.

La mission scientifique se poursuit pour Expédition 5300 qui s’est depuis rendu à nouveau à la Rinconada pour s’intéresser plus spécifiquement à la santé des enfants vivant dans ces conditions d’hypoxie chronique. L’objectif ? mieux comprendre les effets de l’hypoxie sur la croissance et le développement des enfants de haute altitude.

 

Quelques mots sur le programme Expédition 5300

Expédition 5300 a été lancé en 2019 par les chercheurs de l’unité 1300 de l’Inserm, sous la supervision du directeur de recherche Inserm Samuel Vergès. Depuis, près d’une trentaine d’experts français et internationaux, spécialisés dans la recherche sur l’altitude et l’hypoxie, se sont rendus lors de huit missions de terrain à la Rinconada, au Pérou.

Leur objectif est double :

– comprendre les mécanismes d’adaptation à l’hypoxie d’altitude (comparable à une hypoxie chronique sévère) pour soigner les patients souffrant du manque d’oxygène à La Rinconada ;

– transposer ces résultats de recherche sur l’hypoxie d’altitude pour développer de nouveaux traitements adaptés à des pathologies caractérisées par des conditions d’oxygénation insuffisante.

La Rinconada au Pérou est la ville la plus haute du monde avec plus de 50 000 habitants vivants entre 5 100 et 5 300 m d’altitude. Cette ville rassemblée autour de l’activité d’une mine d’or est accrochée au flanc de la montagne sous les glaciers et impose à ses habitants des conditions de vie extrêmes. La présence de médecins est rare, de nombreux habitants n’en ont jamais vu et ne bénéficient d’aucun suivi de leur santé alors même que leurs conditions de vie sont particulièrement difficiles. Aucune recherche scientifique n’avait encore jamais été organisée dans cette ville ni dans aucun lieu d’habitation permanent si élevé.

[1]Des pathologies comme la bronchopneumopathie chronique obstructive, l’apnée du sommeil ou la drépanocytose se caractérisent par une exposition du malade à des conditions d’oxygénation insuffisante du fait d’anomalies respiratoires ou hématologiques.

[2] Laboratoire Hypoxie et physiopathologies cardiovasculaires et respiratoires

[3] Un total de 38 personnes habitaient à plus de 3 800 mètres d’altitude, 17 vivaient à la Rinconada.

[4] Déséquilibre entre la production par l’organisme d’agents oxydants nocifs (radicaux libres notamment) et celle d’agents antioxydants (comme les vitamines E et C). Il entraîne une inflammation et la survenue de mutations de l’ADN.

Une étude internationale caractérise pour la première fois un nouveau type de rejet de greffe rénale

Bloc opératoire La transplantation rénale est le traitement de choix pour les patients atteints d’insuffisance rénale terminale. © Image par mspark0 de Pixabay

En cas d’insuffisance rénale, la transplantation est le traitement de choix. Toutefois, le risque de rejet demeure important. Une meilleure compréhension de la réponse immunitaire lors du rejet de greffe rénale – et notamment du phénomène d’inflammation microvasculaire – pourrait contribuer à une meilleure prise en charge diagnostique et thérapeutique des patients. Une étude menée par des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’AP-HP et de l’université Paris Cité[1], en collaboration avec des partenaires internationaux, a caractérisé pour la première fois des nouvelles formes de rejet de greffe rénale et leur impact sur la survie à long terme des greffons rénaux. Les résultats sont publiés le 24 octobre dans la revue New England Journal of Medicine (NEJM).

La transplantation rénale est le traitement de choix pour les patients atteints d’insuffisance rénale terminale, mais son succès à long terme est compromis par le rejet, principale cause de perte des greffons. L’inflammation microvasculaire, un indicateur clé de la réponse immunitaire lors du rejet de greffe rénale, représente un défi majeur pour les cliniciens. Ce phénotype, encore très peu caractérisé, peut se manifester dans des contextes cliniques variés, rendant la prise en charge diagnostique et thérapeutique des patients particulièrement complexe.

Dans une vaste étude internationale[2] coordonnée par Alexandre Loupy, professeur à l’université Paris Cité, néphrologue dans le service de néphrologie-transplantation rénale adultes de l’hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) et directeur de l’Institut de Transplantation et de Régénération d’Organes de Paris – PITOR de l’université Paris Cité), incluant 16 000 biopsies réalisées chez 7000 patients greffés rénaux dans 30 centres de référence répartis dans 7 pays en Europe et en Amérique du Nord, les chercheurs et chercheuses ont caractérisé pour la première fois des nouvelles formes de rejet de greffe rénale et leur impact sur la survie à long terme des greffons rénaux.

Cette collaboration internationale a en effet permis de constituer une vaste cohorte de patients, inédite par son niveau de caractérisation et de précision, intégrant des données cliniques, biologiques, immunologiques et histologiques. Grâce à cette cohorte unique, les chercheurs ont découvert que les patients transplantés rénaux présentant une inflammation microvasculaire avaient un risque accru de progression de la maladie et de perte du greffon rénal à long terme.

Ces résultats montrent que la prise en compte de l’inflammation microvasculaire du greffon rénal permet une meilleure stratification du risque. Ils apportent également de nouvelles perspectives sur des formes de rejet jusqu’ici peu reconnues, ouvrant ainsi la voie à une prise en charge optimisée des patients par un diagnostic de précision et des thérapeutiques immunosuppressives adaptées.

« Notre étude fournit des preuves essentielles montrant que l’inflammation microvasculaire est un indicateur clé d’une évolution défavorable des greffons rénaux à long terme », déclare le Dr Marta Sablik (doctorante à l’Inserm, PITOR), co-première auteure de l’étude.

« Ces résultats soulignent l’importance d’une meilleure compréhension de l’inflammation microvasculaire rénale afin d’améliorer la précision diagnostique et les approches thérapeutiques », ajoute le Dr Aurélie Sannier, pathologiste dans le service d’anatomie et cytologie pathologiques de l’hôpital Bichat – Claude-Bernard (AP-HP) et chercheuse au sein de l’institut PITOR, également co-première auteure de l’étude.

La cohorte unique constituée dans le cadre de cette recherche reflète la diversité des pratiques cliniques à travers plusieurs pays, renforçant ainsi la portée des résultats et leur potentiel à influencer les soins en transplantation au niveau mondial. L’intégration de ces nouveaux phénotypes dans le diagnostic du rejet ouvre la voie à la standardisation des futurs essais cliniques, visant à élucider les processus immunologiques sous-jacents et à définir des stratégies thérapeutiques personnalisées.

« Cette recherche représente une avancée majeure en médecine de la transplantation rénale, pour une prise en charge optimisée des patients. Par ailleurs, ces résultats ouvrent des voies significatives pour mieux élucider les mécanismes du rejet d’organes avec des retombées dans d’autres domaines tels que la greffe cardiaque, hépatique, pulmonaire, de tissu composite ainsi qu’en xénotransplantation où notre équipe a récemment démontré des mécanismes similaires de rejet impliquant la microcirculation », déclare le Professeur Alexandre Loupy.

Cette étude met aussi en évidence la nécessité de projets d’envergure pour favoriser l’innovation dans la prise en charge et le suivi des patients transplantés, alors que l’amélioration de la survie des greffons est essentielle pour relever le défi mondial de la pénurie d’organes.

[1] Ce projet a été conduit par un consortium de chercheurs de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm), de l’AP-HP et de l’Université Paris Cité, sous la direction du Professeur Alexandre Loupy de l’Institut de Transplantation et de Régénération d’Organes de Paris (PITOR). Ces travaux ont été permis grâce au soutien de l’ANR (étude KTD-Innov, ANR-17-RHUS-0010) ainsi que des programmes européens Horizon 2020 (étude EU-TRAIN, 754995) et ERC Consolidator Grant (AI-Care, 101126272). 

[2] NCT06496269

Diabète : découverte de nouveaux liens entre le diabète de type 2 et le cancer du pancréas

Illustration 3D du pancréasIllustration 3D du pancréas © Fotalia

Une étude menée par des scientifiques de l’Inserm, du CNRS, du CHU de Lille, Université de Lille, Institut Pasteur de Lille, publiée dans la revue Diabetes, révèle comment le diabète de type 2 peut provoquer des changements épigénétiques menant au cancer du pancréas. Dirigée par le Dr Amna Khamis* et le Pr Froguel* de l’Université de Lille, cette recherche offre de nouvelles perspectives pour la prévention et le traitement de l’un des cancers les plus agressifs.

Les patients atteints de diabète de type 2 présentent un risque plus élevé que les non diabétiques de développer un cancer du pancréas. Il s’agit de l’un des cancers les plus meurtriers car celui-ci est généralement diagnostiqué trop tard. Il est crucial de connaître les évènements précoces liés au diabète qui favorisent l’apparition de ce cancer pour mieux le prévenir et le combattre.

Dans cette étude, les chercheurs ont analysé l’ADN d’échantillons de pancréas provenant de 141. donneurs. Ils ont découvert que le diabète provoque un changement épigénétique, c’est-à-dire une modification biochimique d’un gène qui modifie son niveau d’activité sans altérer la structure de l’ADN. Dans ce cas, il s’agit d’une hyperméthylation du gène PNLIPRP, une modification qui réduit son activité. Ce gène est impliqué dans le métabolisme des lipides au sein du pancréas exocrine, partie du pancréas dédiée à la sécrétion des enzymes digestives. Les résultats montrent que cette modification du gène PNLIPRP1 est liée à l’hyperglycémie et l’hyperlipidémie consécutive du diabète de type 2 et qu’elle entraine des changements cellulaires du pancréas exocrine typiques des états précancéreux.

De plus, l’étude révèle que des mutations rares ou fréquentes du gène PNLIPRP1 sont associées à des anomalies du contrôle glycémique, démontrant pour la première fois le rôle du pancréas exocrine, et pas seulement endocrine (partie du pancréas sécrétant l’insuline), dans l’apparition du diabète de type 2. Dans l’ensemble, le gène PNLIPRP1 et le métabolisme des lipides semblent avoir un rôle clé dans un cercle vicieux liant diabète, cancer du pancréas et pancréas exocrine.

Les chercheurs suggèrent que l’utilisation de statines, des médicaments couramment utilisés pour réduire le cholestérol, pourrait interrompre ce processus au niveau cellulaire et ainsi protéger les patients contre le cancer du pancréas.

Le diabète de type 2 touche environ 4 millions de personnes en France et 537 millions dans le monde, et ce chiffre est en constante augmentation. Les patients diabétiques ont un risque accru de développer un cancer du pancréas, qui reste l’un des plus agressifs avec environ 14 000 nouveaux cas par an en France et 460 000 à l’échelle mondiale. Ce cancer est souvent diagnostiqué tardivement, rendant la prévention cruciale.

*Dr. Amna KHAMIS
Chaire de Professeur Junior, chercheuse de l’UMR INSERM 1283 / CNRS 8199 / Université de Lille / Institut Pasteur de Lille /
CHU de Lille
**Pr Philippe Froguel, MD, Ph D
Directeur de l’UMR INSERM 1283 / CNRS 8199 / Université de Lille / Institut Pasteur de Lille / CHU de Lille.
Directeur du Labex EGID, de l’Equipex LIGAN-Médecine Personnalisée et du Centre National de Médecine de Précision
PreciDIAB

Les mutations de résistance au nirsévimab apparaissent rarement chez le virus respiratoire syncytial (VRS)

Vaccination d'un bébéLe nirsévimab est un anticorps ciblant le virus respiratoire syncytial (VRS). Mis à disposition en France depuis septembre 2023, il est indiqué chez les nouveau-nés et nourrissons dans la prévention des bronchiolites causées par le VRS. © AdobeStock.

Le nirsévimab est un anticorps ciblant le virus respiratoire syncytial (VRS). Mis à disposition en France depuis septembre 2023, il est indiqué chez les nouveau-nés et nourrissons dans la prévention des bronchiolites causées par le VRS. Sa large diffusion soulève cependant la question de l’apparition de mutations de résistance. La plus grande étude de surveillance prospective de la sensibilité au nirsévimab menée à ce jour, l’étude POLYRES, vient de livrer ses conclusions. Ces travaux coordonnés par les Pr. Slim Fourati et Marie-Anne Rameix-Welti[1] ont bénéficié d’un financement de l’ANRS MIE grâce au soutien du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche dans le cadre du Consortium EMERGEN.[2] Les scientifiques de l’AP-HP (dont ceux des Hôpitaux Universitaires Henri Mondor), de l’Inserm, de l’Institut Pasteur et des Université Paris-Est-Créteil et Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, membres des équipes du réseau de virologie de l’ANRS MIE, ont montré que les mutations de résistance au nirsévimab étaient très rares chez le VRS. Les résultats de l’étude viennent de paraître dans la revue Lancet Infectious Diseases du 15 octobre 2024.

Le virus respiratoire syncytial (VRS) est le principal virus responsable de la bronchiolite, une infection des voies respiratoires basses affectant le nourrisson. On distingue deux groupes de VRS (le VRS-A et le VRS-B) qui peuvent circuler en alternance ou ensemble. Chaque année, le VRS est responsable de plus de 33 millions de cas de bronchiolites dans le monde, conduisant au décès de 100 000 enfants essentiellement dans les pays à bas revenus. En France, cette pathologie est responsable d’environ 480 000 cas par an. Elle est de loin la première cause d’hospitalisation chez l’enfant, entrainant chaque année plus de 26 000 hospitalisations en pédiatrie. Le nirsévimab, un nouvel anticorps neutralisant* contre le virus, avait été mis à disposition en France en septembre 2023. Cet anticorps monoclonal** cible un site antigénique spécifique (l’épitope*** Ø) sur une protéine située à la surface du VRS impliquée dans la multiplication virale, la protéine de fusion F, et bloque ainsi le virus. Il existe un risque théorique d’émergence de variants du VRS portant des mutations de résistance à la neutralisation par le nirsévimab, même en absence de pression de sélection par l’anticorps. Le VRS est, en effet, un virus variable. Ce risque pourrait augmenter avec l’utilisation préventive généralisée du nirsévimab.

Lors des essais cliniques de phase IIb/III, seuls 48 VRS ayant infecté des enfants sous traitement par le nirsévimab avaient pu être étudiés, et des mutations d’échappement# avaient été retrouvées chez deux d’entre eux.  L’étude POLYRES avait pour objectif d’évaluer le risque d’échappement virologique au nirsévimab sur un plus vaste échantillon grâce à une étude observationnelle, multicentrique, de grande envergure se déroulant en vie réelle au cours de la saison hivernale 2023-2024.

Dans cette étude, ont été inclus 695 nourrissons ayant une infection par le VRS, parmi lesquels 349 avaient reçu une prophylaxie par nirsévimab. Le VRS-A était majoritaire cette saison et a été retrouvé chez 86,6 % des enfants infectés. Les équipes ont analysé les caractéristiques des VRS-A et VRS-B présents dans les prélèvements nasopharyngés réalisés dans le cadre de la prise en charge habituelle des enfants. La séquence complète du génome viral a été déterminée pour rechercher en particulier des mutations dans le site de liaison (le site Ø) du nirsévimab (analyse génotypique§). La capacité du nirsévimab à inhiber la multiplication des virus en culture cellulaire a également été étudiée (analyse phénotypique¥). L’analyse de 472 VRS-A (dont la moitié provenant d’enfants traités) n’a révélé aucune mutation de résistance au nirsévimab dans le site Ø de la protéine F. Parmi les 73 enfants infectés par le VRS-B, 24 avaient reçus du nirsévimab en prophylaxie. Chez ces 24 enfants, deux isolats de VRS-B présentaient des mutations de résistance à l’anticorps, une déjà connue, l’autre inconnue et décrite ici pour la première fois.

« Cette étude est la plus vaste concernant des analyses virologiques d’échecs au nirsévimab à ce jour. Elle a pu être réalisée grâce à un travail synergique et collaboratif avec le consortium des virologues de l’ANRS MIE, et constitue un projet d’ampleur nationale qui permet d’identifier les phénomènes de résistance liés à la diffusion du médicament. Ce type d’études est essentiel pour analyser la dynamique d’évolution des virus, à la lumière de solutions médicales existantes » précise le Pr Marie-Anne Rameix-Welti, responsable du Centre national de référence des Virus des infections respiratoires à l’Institut Pasteur, et responsable de l’unité M3P (Institut Pasteur, Inserm U1173).

« La faible prévalence des mutations de résistance au nirsévimab chez des patients traités est rassurante. Toutefois quelques VRS-B issus de patients traités analysés à ce jour présentaient des mutations d’échappement, ce qui invite à la prudence et souligne l’importance d’une surveillance moléculaire active dans le contexte d’une future utilisation du nirsévimab à l’échelle mondiale. Ces résultats sont essentiels dans la lutte contre cette maladie et pour anticiper toute forme de résistance », ajoute le Pr Slim Fourati, responsable de l’unité de Virologie- Virus Respiratoires, CHU Henri Mondor, Inserm U955.

En conclusion, les résultats de l’étude POLYRES sont en faveur de la poursuite de l’utilisation du nirsévimab en prophylaxie pour tous les nouveau-nés dans le monde.

 

* Les anticorps neutralisants sont des anticorps particuliers empêchant l’infection en bloquant l’entrée du virus dans les cellules cibles. Ils le font en formant un complexe antigène-anticorps qui inhibe l’activité biologique de l’antigène (substance étrangère à l’organisme capable de déclencher une réponse immunitaire visant à l’éliminer).

** Les anticorps monoclonaux regroupent un seul type d’anticorps (les polyclonaux, plusieurs). Ils sont utilisés en médecine.

*** Partie d’une molécule reconnue par un anticorps.

# Les mutations d’échappement permettent au virus de déjouer l’action des anticorps du système immunitaire humain

  • Les tests génotypiques sont basés sur l’identification de mutations conférant au virus un caractère de résistance.

¥ Le phénotypage, effectué par des tests phénotypiques, permet de définir le caractère sensible ou résistant du virus. Ceci se fait par culture du virus en présence de l’antiviral étudié.

[1] Responsable du Centre national de référence des Virus des infections respiratoires à l’Institut Pasteur et responsable de l’unité M3P (Institut Pasteur, Inserm U1173)

[2] Coordonné par Santé publique France et l’ANRS MIE

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