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Covid-19 : découverte d’une signature moléculaire des myocardites pédiatriques

enfant masqué

© Adobe Stock

 

Dans de très rares cas, des enfants ayant contracté la COVID-19 développent une inflammation sévère 4 à 6 semaines suivant leur infection par le virus SARS-CoV-2. Pour les deux tiers, ce syndrome inflammatoire atteint le cœur, entraînant des cas de myocardite. Dans une étude parue dans la revue MED, des chercheurs, médecins et enseignants chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP et d’Université de Paris à l’Institut Imagine, en collaboration avec l’Institut Pasteur, ont analysé le sang d’une cohorte de 56 patients jeunes ayant été hospitalisés à l’Hôpital Necker Enfants-Malades AP-HP. Ils ont ainsi pu identifier l’expression anormale de plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre d’identifier les enfants à risque de développer cette inflammation cardiaque rare.

Certains enfants infectés par le SARS-Cov-2 développent des inflammations sévères quatre à six semaines après leur infection, avec des symptômes variés : fièvre, douleurs gastriques, éruptions cutanées… Dans environ 70% des cas, ce syndrome inflammatoire dit « multisystémique » s’étend au myocarde, muscle assurant les contractions cardiaques. Ces cas sévères de myocardites ont été signalés pour la première fois en Angleterre, au mois de mars 2020, avant d’être observés en Italie, en France, puis partout dans le monde. Comment expliquer ces formes rares ?

 

Des analyses de pointe

Dans une étude parue dans MED, nouveau journal créé par la revue Cell, menée par les chercheurs Inserm Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager (*) au sein de deux laboratoires de l’Institut Imagine (Inserm, Université de Paris, AP-HP), en collaboration avec des médecins de l’Hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP et de l’Institut Pasteur, ont mené des investigations moléculaires de pointe pour répondre à cette question. Résultat : ils ont identifié plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite chez ces enfants.

Pour y arriver, les auteurs ont analysé les prélèvements sanguins de 56 enfants hospitalisés entre le 6 avril et le 30 mai 2020. Au total, 30 avaient développé un syndrome inflammatoire multisystémique consécutif à une infection au SARS-CoV-2, dont 21 avec une forme sévère de myocardite, et 9 sans myocardite. « Pour comprendre la différence entre ces deux groupes de patients, nous avons mené plusieurs analyses utilisant des techniques de pointe : un dosage ultra-sensible des cytokines – les hormones du système immunitaire permettant une réponse adaptée en cas d’infection –, une caractérisation de la composition des cellules du sang, et une analyse de l’expression des gènes cellule par cellule », explique Mickaël Ménager.

 

Trois anomalies moléculaires

Résultat : dans les deux groupes, les chercheurs ont mis en évidence une diminution du nombre de monocytes et de cellules dendritiques (globules blancs), ainsi qu’une augmentation du taux de cytokines inflammatoires et une suractivation de ce qu’on appelle « la voie NF-kB » au sein de ces cellules.

« Il s’agit d’une voie moléculaire permettant d’activer un ensemble de gènes, aboutissant à la production de protéines chargées d’orchestrer la réponse immunitaire, résume Frédéric Rieux-Laucat. Or, c’est précisément la suractivation de ce système qui, chez ces patients, déclenche une hyperinflammation ».

En comparant plus finement les cellules dendritiques et les monocytes des deux groupes, les auteurs ont observé trois anomalies spécifiques des patients avec myocardite : un défaut d’inhibition dans la voie NF-kB, une surproduction de « TNF-α » (cytokine impliquée dans l’activation de la voie NF-kB), et enfin un défaut de réponse aux interférons de type I et II (cytokines impliquées dans la régulation de l’inflammation).

Toutes ces anomalies peuvent s’expliquer par une expression anormale de certains gènes. Afin d’identifier ces gènes, les auteurs ont procédé à une analyse génétique cellule par cellule. « Nous avons ainsi pu identifier et valider plus d’une centaine de gènes surexprimés spécifiquement dans les monocytes et les cellules dendritiques de patients avec formes sévères de myocardite », explique Mickaël Ménager. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre la mise au point de tests pour identifier les patients à risque de développer ces inflammations cardiaques sévères.

 

(*) Frédéric Rieux-Laucat est directeur du laboratoire d’Immunogénétique des maladies auto-immunes pédiatriques. Mickaël Ménager est directeur du laboratoire « réponses inflammatoires et réseaux transcriptomiques dans les maladies » et responsable du LabTech Single-Cell@Imagine, plateforme dédiée à l’étude de l’expression des gènes cellule par cellule.

Un manque d’hormones placentaires pourrait jouer un rôle dans l’apparition de déficits neurodéveloppementaux

Image de coupe sagittale de cervelet de souris acquise en microscopie électronique montrant la substance blanche avec ses axones myélinisés et la substance grise avec la couche des grains. Claire-Marie Vacher (Columbia University Medical Center)/Cheryl Clarkson-Paredes and Anastas Popratiloff (The George Washington Nanofabrication & Imaging Center).

Plusieurs études ont montré que la prématurité augmentait le risque d’apparition de désordres neurodéveloppementaux tels que les troubles du spectre autistique (TSA). Plus la naissance est prématurée, plus le risque d’apparition de déficits moteurs ou cognitifs est élevé. Comment expliquer cela ? Des chercheurs de l’Université de Columbia à New York et du Children’s National Hospital de Washington, D.C., en collaboration avec  l’Inserm et l’Université Paris-Saclay, se sont penchés sur cette question et ont fait l’hypothèse que la perte prématurée du placenta pourrait jouer un rôle dans les déficits observés. Grâce au développement d’un nouveau modèle préclinique chez la souris, ils ont montré que la diminution significative d’une hormone placentaire, dont le cerveau en développement devrait normalement bénéficier dans la seconde moitié de la gestation, pourrait favoriser le risque d’apparition de troubles comportementaux qui pourraient s’apparenter aux troubles du spectre de l’autisme. Ces effets sont principalement observés chez les mâles. L’étude fait l’objet d’une publication dans la revue Nature Neuroscience.

Le placenta est un organe qui permet l’alimentation du fœtus en oxygène et nutriments et élimine les déchets. Il produit également des hormones, notamment des taux élevés d’alloprégnanolone  ou ALLO (une hormone dérivée de la progestérone) à la fin de la grossesse. Environ un nouveau-né sur 10 naît prématurément et de fait est privé de taux normaux de cette hormone.

Des chercheurs américains à l’Université de Colombia, en collaboration avec les équipes françaises de l’Inserm au sein de l’unité Maladies et Hormones du Système Nerveux (U 1195 Inserm) se sont intéressés au rôle du placenta dans le développement cérébral  pour tenter notamment d’expliquer le lien entre prématurité et risque élevé d’apparition de déficits moteurs ou cognitifs. Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont créé un modèle de souris dans lequel ils ont été en mesure de réduire de manière sélective la production placentaire d’ALLO au cours de la gestation, afin que les souriceaux soient exposés à des taux placentaires d’ALLO insuffisants.

L’équipe de chercheurs a ainsi découvert que la diminution de la concentration de cette hormone dans le placenta altérait le développement du cerveau sur le long terme, entraînant l’apparition de comportements de type autistique chez les descendants mâles.

En effet, bien que les fœtus mâles et femelles aient été, les uns comme les autres, soumis à une insuffisance d’ALLO, seuls les souriceaux mâles ont présenté des comportements de type autistique après la naissance, notamment des difficultés d’interaction avec les autres animaux et des stéréotypes moteurs. Les chercheurs ont ensuite analysé leur développement cérébral et suivi les conséquences de cette insuffisance sur leur comportement jusqu’à l’âge adulte.

Les souris mâles ayant reçu des taux placentaires d’ALLO insuffisants présentaient des modifications structurelles du cervelet, une région du cerveau impliquée dans la coordination des mouvements et qui a également été liée à l’autisme.

« En particulier, nous avons observé un épaississement de la gaine de myéline, le revêtement qui protège les fibres nerveuses et accélère la propagation de l’influx nerveux », a indiqué Claire-Marie Vacher, PhD, professeure associée en néonatalogie dans le département de Pédiatrie du Vagelos College of Physicians and Surgeons de l’Université de Columbia et première auteure de l’article. « On sait que des changements comparables ont été observés de manière transitoire dans le cervelet de certains enfants de sexe masculin souffrant d’autisme. »

« Chez l’animal, l’établissement d’un lien entre une modification de la fonction placentaire au cours de la gestation et des effets persistants sur le développement ultérieur du cerveau est un résultat particulièrement frappant », indique Anna Penn, MD, PhD, cheffe du service de néonatologie à l’Université de Colombia et dernière auteure de l’étude. 

 

Des similarités avec les tissus humains

Afin de déterminer si des modifications similaires peuvent survenir chez les nourrissons, les chercheurs ont également procédé à des examens post-mortem de tissus cérébelleux de prématurés et de nourrissons arrivés à terme, décédés peu de temps après la naissance. Leur analyse a permis de mettre en évidence des modifications similaires au niveau de la gaine de myeline spécifiquement pour les nourrissons masculins lorsque le cervelet de prématurés était comparé au cervelet de nourrissons nés à terme. Cette étude est une première étape importante pour comprendre comment les hormones placentaires peuvent contribuer au développement cérébral et comportemental chez l’homme.

 

L’injection de l’ALLO réduit les symptômes autistiques

L’étude a également permis de mettre en évidence que les changements affectant la structure du cervelet et les comportements chez les souris pouvaient être évités par l’injection d’ALLO à la fin de la gestation.

Les chercheurs ont constaté qu’une injection d’ALLO chez la mère au cours de la gestation pouvait prevenir les comportements de type autistique dans leur modèle préclinique. Des résultats similaires ont été observés après une injection de muscimol, un composé qui active les récepteurs GABA-A — les mêmes récepteurs qui réagissent à l’ALLO. Avec ces traitements, les chercheurs ont également constaté une normalisation des niveaux de protéines de la myéline dans le cervelet.

« Notre étude offre de nouvelles perspectives intéressantes sur l’implication de la perte d’hormones placentaires—qui se produit en cas de naissance prématurée ou si le placenta ne fonctionne pas correctement au cours de la grossesse—sur le risque de désordres neurodéveloppementaux et comportementaux chez l’enfant», indique l’auteure principale, Claire-Marie Vacher.

« On pourrait désormais également envisager des études rétrospectives en réalisant un suivi longitudinal pour corréler des défauts endocriniens pendant la grossesse avec des troubles cognitifs et/ou comportementaux des enfants. Cela permettrait d’identifier le stade de la grossesse où l’insuffisance hormonale intervient afin d’envisager une éventuelle intervention thérapeutique », ajoute Philippe Liere, PhD, ingénieur de recherche et responsable du plateau technique analytique de spectrométrie de masse de l’U1195.

Découverte d’une première cause génétique pour le syndrome de l’homme-arbre (papillomavirus cutané)

 Papillomavirus

Papillomavirus. © Inserm/U190

Une grande partie de la population est porteuse de papillomavirus humains (HPVs), et notamment de papillomavirus cutanés, qui provoquent en général des verrues ou des lésions locales et bénignes. Pourtant, de très rares patients dans le monde développent des formes sévères de ces maladies virales, dont le syndrome de « l’homme-arbre ». Cette maladie très handicapante se manifeste par une poussée anarchique de cornes cutanées pour lesquelles une chirurgie n’est pas efficace. Dans le cadre d’une collaboration internationale, des chercheurs de l’Inserm et enseignants-chercheurs d’Université de Paris et médecins de l’AP-HP regroupés à l’Institut Imagine (Inserm/Université de Paris, AP-HP) situé au sein de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP ont mis en évidence pour la première fois une cause génétique de ce syndrome. Ce travail a été mené par Vivien Béziat, sous la supervision des Pr Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel qui dirigent un laboratoire associé entre Paris et l’Université Rockefeller de New York[1]. Il fait l’objet d’une publication le 1er juillet 2021 dans la revue Cell.

Il existe plus de 200 papillomavirus (HPVs). Certains sont à l’origine de lésions cutanées bénignes telles que les verrues vulgaires ou plantaires, d’autres peuvent entraîner des cancers du col de l’utérus. Le laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses s’est concentré sur les HPVs cutanés, et s’attache depuis plusieurs années à comprendre pourquoi quelques très rares cas développent une forme sévère de ces infections généralement sans gravité.

Une mutation génétique rend plus sensible aux papillomavirus cutanés

Dans une publication dans la revue Cell, l’équipe de Vivien Béziat, chercheur Inserm au sein du laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses a étudié les caractéristiques génétiques d’un patient iranien atteint du syndrome de l’homme-arbre, et deux membres de sa famille qui présentent une forme sévère d’infection par un HPV cutané avec un nombre important de verrues sur les mains et les pieds, mais sans avoir développé ce syndrome. Un point commun a été retrouvé chez ces trois patients : une mutation du gène CD28. Celui-ci joue en temps normal un rôle majeur dans l’activation des lymphocytes T, cellules de l’immunité qui détruisent les cellules infectées par un virus.

Chez ces patients, la mutation du gène CD28 empêche le système immunitaire de reconnaitre le virus et de déclencher une réponse appropriée. Le virus prolifère alors dans les kératinocytes, les cellules qui constituent l’épiderme de la peau, et provoque une multiplication anarchique de verrues et/ou de cornes cutanées. C’est la première fois qu’une cause génétique du syndrome de « l’homme arbre » est mise au jour.

Le gène CD28, central pour la résistance à certains papillomavirus cutanés, mais pas pour le système immunitaire

Mais en analysant la mutation CD28, c’est une autre découverte qui a été faite par ces chercheurs. Le gène CD28, jusqu’ici considéré comme un pilier dans le fonctionnement du système immunitaire et la réponse des lymphocytes T, ne semble pas avoir un rôle si majeur. En effet, les trois patients étudiés ont été exposés dans leur histoire médicale à plusieurs types de HPVs et à de très nombreux autres pathogènes. Or, ils n’ont développé de réactions sévères qu’au HPV2 pour le patient atteint du syndrome de l’homme-arbre, et au HPV4 pour les deux membres de la famille.

« Ces patients n’ont montré une sensibilité anormalement élevée qu’à certains papillomavirus du genre gamma-HPV et alpha-HPV. Sur la base des travaux menés au cours des trente dernières années, nous pensions au contraire qu’un dysfonctionnement du gène CD28 rendrait les patients sensibles à de nombreux agents infectieux. Or, même si leur réponse immunitaire est affaiblie, les patients se défendent bien contre les autres pathogènes », explique Vivien Béziat, chercheur à l’Inserm et premier auteur de l’étude.

Cette découverte apporte donc à la fois de nouvelles perspectives sur la compréhension de la susceptibilité génétique aux HPVs, et remet en cause les dogmes de réponse immunitaire par les lymphocytes T.

« Aujourd’hui, aucun traitement n’a montré d’efficacité contre le syndrome de « l’homme-arbre ». Une greffe de cellules souches hématopoïétiques afin de remplacer le système immunitaire du patient est envisagée. Ce traitement lourd et coûteux n’est cependant pas facilement accessible aux populations vivant dans des pays moins développés et qui vont évoluer vers des formes très sévères, notamment par manque d’accès aux soins. En faisant progresser la recherche, l’équipe espère pouvoir accélérer l’accès au traitement pour ces patients

 

[1] Le laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses est dirigé par Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel est situé au sein de l’Institut Imagine à Paris et à l’Université Rockefeller à New York. Jean-Laurent Casanova dirige la génétique et l’immunologie expérimentale dans les deux branches (Paris et New York), tandis que Laurent Abel dirige la génétique et l’épidémiologie mathématique dans les deux branches.

Un nouveau traitement en essai clinique chez un premier enfant achondroplase en France

Nanisme

Radiographie d’un squelette d’une souris atteinte de nanisme. © Inserm/Guénet, François

 

Le 30 mars 2021, un premier enfant français atteint d’achondroplasie a reçu un inhibiteur de tyrosine kinase, l’infigratinib, traitement expérimental en développement par QED Therapeutics, à l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, dans le cadre d’un essai clinique international. L’identification du gène responsable de cette maladie, il y a 25 ans, à l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, a permis à la directrice de recherche Inserm Laurence Legeai-Mallet et son équipe d’élaborer des modèles d’étude pertinents, de caractériser les voies physiopathologiques, et de breveter l’utilisation de l’Infigratinib pour l’achondroplasie, sur la base des effets prometteurs de la molécule dans les études précliniques. Intéressé par ces résultats, l’investisseur BridgeBio a alors acquis les droits sur le brevet et crée la société QED Therapeutics, dédiée à ce développement, qui, quatre ans plus tard, a débuté le premier essai clinique, en Australie et en France notamment. L’histoire de cette nouvelle indication thérapeutique, bel exemple de recherche translationnelle, démontre la force d’accélération de l’Institut Imagine (AP-HP/Inserm/Université de Paris) dans l’identification et le développement de nouvelles thérapies pour les personnes atteintes de maladies génétiques rares.

 

Étendre l’indication de l’Infigratinib pour traiter les patients atteints d’achondroplasie

L’achondroplasie, forme de nanisme la plus courante, concerne environ une naissance sur 20 000. L’histoire a démarré en 1994, avec la découverte du responsable de cette maladie à l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP.

Lorsqu’il est muté, le gène FGFR3 provoque une production excessive de la protéine FGFR3 active, présente dans les chondrocytes (cellules du cartilage) et les ostéoblastes (cellules osseuses). Sa surexpression affecte la croissance osseuse et l’ossification, mécanisme qui transforme les tissus cartilagineux en os.

Depuis cette découverte, le laboratoire de bases moléculaires et physiopathologiques des ostéochondrodyslasies à l’Institut Imagine, labellisé Carnot, n’a cessé d’explorer les mécanismes dérégulés par l’altération de ce gène et de mettre au point des modèles cellulaires et animaux pour tester des molécules et développer de nouvelles options thérapeutiques.

La protéine FGFR3 est l’un des quatre récepteurs de tyrosine kinase de signalisation, qui interagissent avec les protéines qui contrôlent la signalisation des facteurs de croissance des fibroblastes (FGF). Des défauts de cette voie sont impliqués dans des troubles du développement comme le nanisme, les craniosténoses, et dans un large éventail de cancers. L’équipe a donc cherché des molécules inhibitrices de tyrosine kinase capables de contrecarrer l’hyperactivité de la protéine déjà utilisées en cancérologie.

Sur ces bases, en 2016, le Dr Laurence Legeai-Mallet, directrice de recherche à l’Inserm, a publié les résultats de travaux menés depuis 2014 et qui montrent l’action de la molécule NVP-BGJ398 (Infigratinib), alors en développement par Novartis et en essai clinique pour des patients souffrant de cancer de la vessie.

« Cette molécule réduit la phosphorylation de FGFR3, responsable de son hyperactivité, et corrige la croissance anormale dans nos modèles animaux. Nous avons montré qu’une faible dose, injectée par voie sous-cutanée, est capable de pénétrer dans la plaque de croissance de ces modèles et d’en modifier l’organisation », explique Laurence Legeai-Mallet.

La chercheuse brevette alors l’utilisation de cette molécule pour traiter l’achondroplasie.

 

De la recherche au lit du patient

En 2018, inspiré par les découvertes de l’équipe, et convaincu de pouvoir développer rapidement un médicament efficace, l’investisseur américain spécialisé dans les maladies rares BridgeBio achète le brevet de l’Infigratinib à Novartis et le brevet d’utilisation pour l’achondroplasie à Laurence Legeai-Mallet (INSERM). BridgeBio crée la start-up QED Therapeutics, dédiée aux maladies ciblant les récepteurs des facteurs de croissance des fibroblastes (FGFR) et au développement de ce médicament. Laurence Legeai-Mallet, membre de son conseil scientifique, a mené des travaux pour soutenir l’étude d’une faible dose de l’Infigratinib pour l’achondroplasie, et poursuit des travaux de recherche translationnelle sur d’autres modèles.

QED Therapeutics a lancé un essai clinique international en 2020. La première administration de l’Infigratinib à une enfant achondroplase a été effectuée en juillet 2020 à Melbourne en Australie.

Aujourd’hui, l’essai démarre en France avec un premier enfant qui reçoit le traitement expérimental à l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, essai coordonné par des équipes de l’Hôpital et de l’Institut Imagine, et notamment le Dr Kim-Hanh Le Quan Sang, le Dr Geneviève Baujat et le Pr Valérie Cormier-Daire.

« Le développement de ce médicament est un formidable exemple de recherche translationnelle telle que peut la conduire un Institut Hospitalo-Universitaire comme Imagine. Il illustre l’efficacité de notre modèle en boucle, partant du patient, passant par la recherche fondamentale et pré-clinique, l’élaboration de modèles de la maladie (lignées de cellules et modèles animaux), pour, enfin, revenir au patient. Le tout dans à un écosystème qui intègre les partenaires industriels, l’innovation et la valorisation, en vue d’une recherche appliquée, permettant l’accélération de la mise sur le marché d’une découverte scientifique, au bénéfice des enfants et des familles qui lui ont donné naissance », se réjouit le Pr Stanislas Lyonnet, directeur de l’Institut Imagine.

Journée Internationale des Maladies Rares 2021

L’achondroplasie, forme la plus fréquente de nanisme, touche actuellement environ 8 000 personnes en France.

Radiographie d’un squelette d’une souris atteinte de nanisme. © Inserm/Guénet, François

DU RARE AU FRÉQUENT : DE L’IMPORTANCE DE MENER DES RECHERCHES SUR LES MALADIES GÉNÉTIQUES

Comment l’étude des 7000 à 9000 maladies génétiques rares apporte-t-elle des connaissances essentielles au développement de pistes thérapeutiques pour des maladies bien plus fréquentes ? Trois millions de Français sont concernés par les maladies rares, soit une personne sur 20, certaines d’entre elles ne regroupant que quelques dizaines ou centaines de patients. Cependant, en étudiant les maladies génétiques rares et les gènes impliqués, ces connaissances bénéficient non seulement aux malades atteints, mais, la mise en évidence de la fonction de ces gènes peut permettre de décrypter des mécanismes généraux, souvent non encore décrits. Cela permet donc aussi parfois de porter un regard nouveau sur des maladies bien plus fréquentes. Si l’étude de toutes ces maladies rares reste un travail titanesque, il est essentiel de le conduire, non seulement pour ouvrir de nouvelles pistes thérapeutiques pour les patients concernés, mais également pour en imaginer d’autres, pour d’autres pathologies.

« Osciller entre le très courant et le très rare, voire le très exceptionnel, c’est le quotidien des travaux de recherche de l’Institut Imagine. Nos équipes s’investissent sur la drépanocytose, la maladie génétique la plus fréquente dans le monde, tout comme sur des pathologies qui ne concernent que quelques enfants, mais qui peuvent ouvrir des voies de compréhension dans  des maladies communes, lorsque les mécanismes sont liés. Ainsi, les découvertes réalisées sur des pathologies rares peuvent apporter des connaissances ou des pistes thérapeutiques sur des maladies communes. C’est tout l’agilité intellectuelle et opérationnelle d’un Institut hospitalo-universitaire (IHU) mêlant les expertises médicales, scientifiques, voire industrielles », souligne le Professeur Stanislas Lyonnet, directeur de l’Institut Imagine (Inserm/Université de Paris/AP-HP), situé au sein de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP.

Par exemple, très récemment, les travaux des équipes du chercheur Inserm Laurent Abel et de Jean-Laurent Casanova, co-directeurs du laboratoire de génétique humaine des maladies infectieuses à Imagine, ont montré que la connaissance de déficits immunitaires exceptionnels, révélés par des infections bactériennes ou virales communes, pouvait permettre de comprendre les formes cliniques les plus sévères observées dans la Covid-19. Ils ont ainsi pu mettre en évidence les mécanismes génétiques ou immunologiques liés à des auto-anticorps responsables de 15 % des formes graves d’infection par le Sars-Cov-2.

La Journée internationale des maladies rares, le 28 février 2021, est l’occasion pour Imagine de revenir sur ces travaux et de mettre à l’honneur des recherches qui illustrent ces liens entre maladies génétiques rares et maladies fréquentes.

 

De l’achondroplasie à l’arthrose et l’ostéoporose

L’achondroplasie, forme la plus fréquente de nanisme, touche actuellement environ 8 000 personnes en France. Elle est due à des anomalies de cartilage de croissance et de la formation osseuse. En 1994, Laurence Legeai-Mallet co-découvre le gène responsable de l’achondroplasie, le gène FGFR3. La production excessive de la protéine FGFR3 altère l’ossification, mécanisme qui transforme les tissus cartilagineux en os. La découverte du gène muté et les travaux qui ont été développés ont permis de mieux comprendre les mécanismes régulant l’homéostasie du cartilage et de la formation osseuse. Ces recherches ont permis de mettre en place plusieurs options thérapeutiques, aujourd’hui cinq essais cliniques sont en cours de développement pour l’achondroplasie. Ces atteintes du cartilage et de l’os dans cette pathologie sont à rapprocher dans certains aspects de deux pathologies adultes fréquentes : l’arthrose, dégradation du cartilage articulaire parfois invalidante et très douloureuse, et l’ostéoporose, qui provoque une grande fragilité des os.

« Il n’existe pas de traitement direct pour ces deux pathologies fréquentes. Or, nos recherches visant à identifier des signatures de gènes et des mécanismes cellulaires et moléculaires, et nos développements de modèles cellulaires et animaux pour l’achondroplasie pourraient apporter des solutions thérapeutiques pour l’arthrose et l’ostéoporose », conclut le Dr Laurence Legeai-Mallet (laboratoire des bases moléculaires et physiopathologiques des ostéochondrodysplasies à l’Institut Imagine).

 

Des déficits immunitaires génétiques aux lymphomes ou maladies auto-immunes

L’équipe de Sylvain Latour étudie les mécanismes de la réponse immunitaire impliqués dans le contrôle de l’infection par le virus Epstein Barr (EBV) qui est le principal virus chez l’homme responsable de plusieurs cancers dont le plus fréquent est le lymphome.

« Grâce à l’étude de deux maladies très rares, nous avons pu proposer des pistes thérapeutiques pour des maladies plus fréquentes, tels des lymphomes ou des maladies auto-immunes », explique le Dr Sylvain Latour, Directeur du laboratoire d’activation lymphocytaire et susceptibilité au virus d’Epstein-Barr.

Dans le premier cas, son équipe a récemment montré que la déficience en enzyme CTPS1 chez l’homme entraîne une forte susceptibilité aux infections virales, en particulier à l’infection par le virus de l’EBV, ce qui met en évidence le rôle crucial de la prolifération et de l’expansion des lymphocytes T activés lors des réponses immunitaires. Sur la base de cette découverte, la société Step-Pharma, spin-off d’Imagine, a été créée pour développer des inhibiteurs de CTPS1 qui pourraient représenter un nouveau traitement des maladies causées par une prolifération excessive et inappropriée des lymphocytes T comme le lymphome T, le rejet de la greffe ou les maladies auto-immunes. Dans le second cas, le gène CD70 a été identifié par l’équipe comme responsable d’une susceptibilité à l’infection au virus d’Epstein-Barr et de l’apparition de lymphomes B lorsqu’il est défectueux chez les enfants. Ce défaut se retrouve aussi dans certains lymphomes B de l’adulte. Les travaux de l’équipe ont montré que l’absence d’expression de la protéine CD70 à la surface des cellules de lymphomes a pour résultat une réponse immunitaire inefficace contre ces cellules. Ces travaux ont permis de proposer une nouvelle thérapie génique visant à ré-initier une réponse immunitaire anti-tumorale pour le traitement de certains lymphomes.

 

De l’importance de mener des recherches sur les maladies génétiques même très rares

L’accent est souvent mis sur le faible nombre de patients concernés par les recherches sur les maladies génétiques mais les exemples ne manquent pas pour montrer que ces connaissances profitent à tous. Les recherches sur des familles touchées par des cancers rares ont ainsi permis d’identifier des gènes de susceptibilité de cancers impliqués dans la réparation de l’ADN ou la division des cellules.

La connaissance fine des éléments déclencheurs dans les cancers ont ouvert de nouvelles pistes thérapeutiques, comme les thérapies ciblées.

Autre exemple, une classe thérapeutique mise au point pour traiter la maladie rare de l’hypophosphatasie est utilisée pour lutter contre l’ostéoporose.

Ces exemples illustrent l’importance de mener des recherches sur les maladies génétiques, dans l’intérêt de tous. La journée internationale des maladies rares, le 28 février, est l’occasion de le rappeler.

 

Mieux connaître les maladies génétiques, deux jours de web-conférences à Imagine

A l’occasion de cette journée internationale, l’Institut Imagine organise, les 27 et 28 février 2021, des séries de web-conférences et invite le public à échanger sur différents thèmes tels que la drépanocytose, les épilepsies rares, les déficits immunitaires, les maladies intestinales inflammatoires, les maladies mitochondriales, les cardiopathies congénitales, les troubles du langage, les maladies génétiques de l’œil, la génétique expliquée aux enfants. Le programme détaillé est disponible à l’adresse suivante : https://www.institutimagine.org/fr/27-et-28-fevrier-2021-un-weekend-dedie-aux-maladies-rares-1017

 

L’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP comporte 31 centres de référence des maladies rares affiliés à l’Institut Imagine (hématologie, Immunologie-infectiologie, neurodéveloppement, néphrologie, développement et cardiologie) sur les 386 que compte l’AP-HP. Ils sont les interlocuteurs des associations de patients, et jouent un rôle capital pour le développement des essais cliniques et la constitution des cohortes, sans lesquelles la recherche ne pourrait se conduire. Ces centres sont intégrés dans des « filières nationales de santé maladies rares, il en existe 23 dont 12 coordonnées par l’AP-HP.

À propos des maladies génétiques

3 millions, c’est le nombre de personnes atteintes de maladies génétiques en France. Il s’agit le plus souvent de maladies rares, et presque systématiquement orphelines, car sans traitement.

On admet que 80% des maladies dites rares sont d’origine génétique. Les maladies rares touchent moins d’une personne sur 2 000. Une anomalie génétique ou une malformation congénitale est à déplorer dans près de 3% des naissances et peut entraîner de nombreux handicaps par la suite.

Une avancée majeure dans la compréhension de la prédisposition du nouveau-né aux méningites à streptocoque du groupe B

 

 

 

Chaque année à travers le monde, des milliers de nourrissons sont affectés par les méningites à streptocoques du groupe B. Souvent mortelle, la maladie peut aussi entraîner de lourdes séquelles chez les bébés qui survivent. Les adultes sont néanmoins épargnés par ce type de méningite. Des chercheurs de l’Inserm, du Collège de France, du CNRS, de l’Institut Pasteur, de l’Université de Paris et de l’AP-HP apportent désormais des éléments de réponse expliquant la prédisposition du nouveau-né à faire des méningites à Streptocoque du groupe B. Ils ont identifié et démontré que les récepteurs d’une protéine bactérienne permettant le franchissement de la barrière hémato-encéphalique[1] étaient surexprimés chez le nouveau-né et absents chez l’adulte. Les résultats de leurs travaux sont publiés dans la revue « Journal of Clinical Investigation ».

Les streptocoques du groupe B sont présents dans le microbiote vaginal de 20 à 30 % des femmes. Pour éviter l’infection du nouveau-né au moment de la naissance, qui pourrait entrainer une septicémie et dans les cas les plus graves, une méningite, de nombreux pays développés, dont la France, ont mis en place un dépistage vaginal quelques semaines avant l’accouchement. Les femmes porteuses de streptocoques du groupe B reçoivent dans ce cas des antibiotiques au moment de l’accouchement.

Cette stratégie a permis de réduire fortement l’incidence des infections à streptocoques du groupe B survenant durant la première semaine de vie mais n’a eu aucun effet sur celles survenant entre 1 semaine et 3 mois de vie.  

Par ailleurs, dans de nombreux pays du monde, aucun dépistage prénatal n’est proposé, et de nombreux bébés décèdent après la naissance d’une méningite à streptocoque du groupe B. Il s’agit donc d’un problème majeur de santé publique.

 

Prédisposition des nourrissons

Pour mieux comprendre la maladie et améliorer la prise en charge des mères et des enfants, la chercheuse Inserm Julie Guignot et son groupe de recherche à l’Institut Cochin (Inserm/CNRS/Université de Paris)[2] ont cherché à comprendre ce qui prédispose les nourrissons à cette maladie, alors que les enfants et les adultes ne sont qu’exceptionnellement concernés par ce type de méningite.

Dans de précédents travaux, les scientifiques avaient montré qu’un variant de streptocoque du groupe B était responsable de plus de 80 % des cas de méningites chez le nouveau-né. Ce variant exprime à sa surface des protéines spécifiques qui jouent un rôle essentiel dans le franchissement de la barrière hémato-encéphalique qui sépare le sang du cerveau.

Par des approches complémentaires, les chercheurs ont démontré qu’une des protéines exclusivement exprimées par ce variant reconnaissait de manière spécifique deux récepteurs présents dans les vaisseaux sanguins cérébraux qui constituent l’élément principal de la barrière hémato-encéphalique. Grâce à des prélèvements humains, ils ont démontré que ces récepteurs sont surexprimés chez les nouveau-nés. Ces récepteurs cérébraux ne sont en revanche pas présents chez l’adulte, ce qui explique que le streptocoque du groupe B n’est que très rarement responsable de méningites au-delà de la première année de vie, les bactéries ne pouvant atteindre le cerveau.

Grâce à des modèles animaux de méningite, les chercheurs ont confirmé leurs résultats, montrant que l’expression de ces récepteurs durant la période post-natale contribuait à la susceptibilité du nouveau-né à la méningite due au variant de streptocoque du groupe B.

Pour les chercheurs, ces résultats ouvrent des pistes thérapeutiques intéressantes. « L’idée serait de développer des traitements qui ciblent ces récepteurs au niveau de la barrière hémato-encéphalique. A plus long terme, nous aimerions étudier les facteurs de susceptibilité individuels conduisant au développement de ces infections. Ceci permettrait de réaliser un suivi personnalisé des nourrissons à risque nés de mère colonisée par ce variant », explique Julie Guignot.

 

[1] Barrière physiologique entre le sang et le cerveau qui protège ce dernier des substances toxiques et des micro-organismes pathogènes

[2] Le laboratoire Biologie moléculaire structurale et processus infectieux (CNRS/Institut Pasteur), le Centre interdisciplinaire de recherche en biologie (CNRS/Collège de France/INSERM), l’Institut pour l’avancée des biosciences (CNRS/INSERM/UGA), entre autres, ont également participé à ces travaux.

Les émulsifiants alimentaires augmentent le pouvoir pathogène de certaines bactéries et le risque d’inflammation intestinale

Certaines bactéries du microbiote intestinal, marquées en rouge, sont capables de pénétrer la couche de mucus normalement stérile et marquée en vert. © Benoit Chassaing

L’alimentation jouerait un rôle dans le déclenchement d’inflammations intestinales pouvant aboutir au développement de certaines pathologies, comme la maladie de Crohn. Des chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de Université de Paris ont montré que les émulsifiants alimentaires présents dans de nombreux plats transformés pouvaient avoir un impact délétère sur certaines bactéries spécifiques du microbiote intestinal, conduisant à une inflammation chronique. Leurs résultats sont publiés dans Cell Reports.

La prévalence des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ne cesse d’augmenter dans tous les pays du monde. Près de 20 millions de personnes seraient concernées. Caractérisées par l’inflammation de la paroi d’une partie du tube digestif, ces pathologies regroupent notamment la maladie de Crohn et les rectocolites hémorragiques.

Plusieurs facteurs, à la fois génétiques et environnementaux, ont été mis en cause pour expliquer l’inflammation de l’intestin associée à ces maladies. Depuis plusieurs années, le chercheur Inserm Benoît Chassaing et son équipe à l’Institut Cochin (Inserm/CNRS/Université de Paris) s’intéressent au rôle de l’alimentation et notamment à l’impact de certains additifs alimentaires comme les émulsifiants.

Largement utilisés par l’industrie agroalimentaire dans de nombreux produits transformés, les émulsifiants[1] ont pour fonction d’en améliorer la texture et d’en prolonger la durée de conservation. Par exemple, des émulsifiants comme la lécithine et les polysorbates permettent de garantir la texture onctueuse des crèmes glacées industrielles et d’éviter qu’elles ne fondent trop rapidement une fois servies.

Dans différents travaux s’appuyant sur des modèles animaux, les scientifiques ont déjà montré que la consommation d’émulsifiants alimentaires altérait négativement le microbiote de manière à favoriser l’inflammation.

Par ailleurs, dans des modèles de souris dont le microbiote était composé d’une faible diversité de bactéries, les chercheurs ont observé que les animaux étaient protégés contre les effets négatifs de certains émulsifiants.

Ils ont donc émis l’hypothèse que les émulsifiants impacteraient seulement certaines bactéries spécifiques, inoffensives dans des conditions « normales », mais ayant un potentiel pathogène. C’est seulement en présence d’agents émulsifiants que ces dernières seraient capables de favoriser le développement d’une inflammation intestinale chronique et de maladies associées.

E. coli comme un modèle

Dans le cadre de leur étude publiée dans Cell Reports, les chercheurs ont cette fois ci travaillé à partir de deux modèles de souris : l’un sans microbiote et l’autre avec un microbiote simple comportant seulement 8 espèces de bactérie. Ils les ont colonisés avec une souche de la bactérie Escherichia coli (les « bactéries AIEC ») associée à la maladie de Crohn.

Les chercheurs se sont intéressés aux effets de deux émulsifiants administrés suite à la colonisation des souris par les bactéries AIEC. Alors que la seule consommation d’agents émulsifiants était inoffensive chez ces animaux en l’absence de ces bactéries, ils ont constaté le développement d’une inflammation intestinale chronique et de dérégulations métaboliques lorsque ces dernières étaient présentes. Ainsi, le « couple » bactéries AIEC / agent émulsifiant était nécessaire et suffisant pour induire une inflammation intestinale chronique.

Des analyses supplémentaires ont révélé que lorsque ces bactéries étaient en contact avec les émulsifiants, elles sur-exprimaient des groupes de gènes qui augmentaient leur virulence et leur propension à induire l’inflammation. « Nous avons ainsi pu identifier un mécanisme par lequel les émulsifiants alimentaires peuvent favoriser l’inflammation intestinale chronique chez les personnes abritant certaines bactéries, telles que les bactéries AIEC, dans leur tractus digestif », souligne Benoît Chassaing qui a coordonné l’étude.

La prochaine étape consiste à lister l’ensemble des bactéries ayant les mêmes effets au contact de ces additifs alimentaires.

A plus long terme, des études pour identifier et stratifier les patients en fonction de la composition de leur microbiote et de leur risque d’inflammation pourraient être mises en place dans le but de faire de la prévention et de mettre en place des recommandations nutritionnelles personnalisées. Les personnes porteuses de microbiotes spécifiques, sensibles aux émulsifiants, pourraient en effet bénéficier de recommandations alimentaires ciblées.

« Et s’il est illusoire de penser que l’on pourra bannir les émulsifiants de notre alimentation, les modèles et les méthodologies que nous avons développés ici vont aussi nous permettre de tester l’action de plusieurs types d’agents émulsifiants sur le microbiote afin identifier ceux qui n’auraient pas d’effets délétères, et ainsi encourager leur usage », conclut Benoît Chassaing.

 

[1] Un émulsifiant est un composé qui a une affinité à la fois avec l’eau et avec l’huile et qui permet aux différentes phases d’un composé de rester mélangées

Une nouvelle cible thérapeutique contre le diabète de type 2 découverte grâce à une maladie rare

Une image représentant une photo en 3D d’un adipocyte humain (en vert le réservoir de la protéine ALMS1, en rouge une partie du cytoskelette, et en bleu le noyau de la cellule). © Vincent Marion

Une nouvelle cible thérapeutique contre le diabète de type 2 vient d’être identifiée par des chercheurs de l’Inserm et de l’Université de Strasbourg, en collaboration avec plusieurs centres hospitaliers européens. Il s’agit de l’ALMS1, une protéine à la fonction encore mal comprise. Celle-ci a été mise en évidence grâce à l’étude d’une maladie rare, le syndrome d’Alström, qui touche différents organes et associe obésité précoce et diabète de type 2. Ces travaux ouvrent la voie au développement d’un nouveau médicament et sont parus dans Diabetes.

Obésité et diabète de type 2 sont fortement intriqués. Ainsi, environ 80% des sujets obèses développent cette pathologie, mais les raisons de cette association ne sont pas encore clairement établies. Pour étudier les liens entre les deux, l’équipe du chercheur Inserm Vincent Marion au laboratoire de génétique médicale (Inserm/Université de Strasbourg) a travaillé sur le syndrome d’Alström, une maladie monogénique[1] extrêmement rare qui touche plusieurs organes et entraine à la fois une obésité et un diabète de type 2.

Cette pathologie est provoquée par des mutations du gène ALMS1 codant une protéine à la fonction encore mal connue. « Le fait qu’il s’agisse d’une maladie monogénique offrait un point de départ pour étudier les mécanismes complexes du diabète de type 2 », souligne Vincent Marion. L’équipe a découvert que des anomalies du tissu adipeux causées par la perte de fonction d’ALMS1 entrainaient un diabète de type 2 chez les personnes atteintes du syndrome d’Alström. Par ailleurs, chez l’animal, restaurer la fonction de cette protéine rétablissait l’équilibre glycémique. Les chercheurs ont ainsi mis en évidence une nouvelle cible thérapeutique contre le diabète de type 2 : la protéine ALMS1.

Ces résultats sont le fruit de plusieurs années de recherche s’appuyant sur différentes approches cliniques et expérimentales, menées in vivo chez des sujets atteints de la maladie d’Alström et dans un modèle de souris pour cette maladie, ainsi que sur des observations in vitro. Les chercheurs ont identifié des anomalies de structure et de fonction du tissu adipeux chez les personnes atteintes de la maladie d’Alström bien plus importantes que celles constatées chez des sujets obèses présentant la même masse corporelle mais non atteints de cette maladie. Chez la souris, ces anomalies ont été associées à l’incapacité des adipocytes, qui composent le tissu adipeux, à absorber le glucose. « En empêchant les adipocytes d’absorber le glucose, la perte de fonction d’ALMS1 est directement responsable d’un diabète de type 2, ce qui en fait une cible thérapeutique très intéressante », explique Vincent Marion.

ALMS1 cible thérapeutique en cas de diabète

Dans l’étude publiée dans Diabetes, les chercheurs ont voulu évaluer l’intérêt thérapeutique de cette protéine en restaurant l’expression du gène ALMS1 dans leur modèle de souris. Cette manipulation a rétabli l’équilibre glycémique chez ces animaux grâce à l’augmentation de l’absorption du glucose par ces dernières.

Les chercheurs ont également travaillé in vitro avec des adipocytes humains issus de personnes atteintes du syndrome d’Alström dans le but de comprendre les mécanismes moléculaires sous-jacents, permettant d’expliquer pourquoi cette protéine permet de rétablir l’équilibre glycémique. Ils ont découvert que, dans ces cellules du tissu adipeux, la protéine ALMS1 agissait très en aval d’une chaine de signaux moléculaires contrôlée par l’insuline.

« Grâce à ce travail sur un modèle de maladie rare, nous avons découvert une molécule capable à elle seule d’augmenter l’absorption du glucose par les adipocytes et de maintenir un bon équilibre glycémique. Cela en fait une très bonne cible thérapeutique pour lutter contre le diabète de type 2 en général, associé ou non à une obésité », explique Vincent Marion.

En identifiant et en utilisant une molécule capable de cibler cette protéine ALMS1 chez des sujets atteints de diabète de type 2, l’espoir est d’améliorer le contrôle du diabète, indépendamment du taux d’insuline circulant chez ces personnes. Un peptide est déjà en cours de développement.

Les essais précliniques menés chez l’animal sont en cours de finalisation et des essais cliniques devraient débuter en 2021 chez des sujets atteints de diabète de type 2, obèses ou non. A terme, si ce candidat médicament s’avère efficace et sûr, il pourrait être prescrit seul ou en association avec d’autres antidiabétiques qui ciblent d’autres mécanismes moléculaires.

Fort de ces résultats, le chercheur a fondé ALMS Therapeutics, une société destinée à valoriser cette découverte.

[1] Maladie génétique résultant de la mutation d’un seul gène

Le placenta conserverait la mémoire de l’exposition au tabac avant la grossesse

© fotografierende on Unsplash

L’arrêt du tabagisme avant une grossesse est reconnu pour diminuer considérablement les risques pour la santé de la mère et l’enfant. Des travaux d’une équipe de l’Inserm, du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes au sein de l’Institut pour l’avancée des biosciences, publiés dans BMC Medicine vont plus loin, et montrent pour la première fois que la consommation de tabac, même lorsqu’elle est stoppée avant la grossesse, peut avoir des conséquences sur le placenta. À travers l’étude de l’ADN placentaire de 568 femmes, les chercheurs montrent que fumer pendant mais aussi avant la grossesse entraîne des modifications épigénétiques (méthylation de l’ADN) qui pourraient avoir des conséquences sur son déroulement.

Bien qu’il ait été montré que la consommation de tabac pendant la grossesse a de nombreuses conséquences néfastes sur la santé de la mère et de l’enfant, les mécanismes en jeu sont encore mal connus. De précédentes études ont associé la consommation de tabac durant la grossesse à des altérations de la méthylation de l’ADN – une forme de modification épigénétique (voir encadré) impliquée dans l’expression des gènes – dans le sang du cordon ombilical et dans les cellules du placenta. En effet, ce dernier joue un rôle crucial dans le développement du fœtus, tout en restant vulnérable à de nombreux composés chimiques.
En revanche, l’impact de l’exposition au tabac avant la grossesse sur la méthylation de l’ADN placentaire n’avait jusqu’à présent jamais été étudié.

Une équipe de l’Inserm, du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes, au sein de l’Institut pour l’avancée des biosciences, a mesuré et comparé l’impact chez la femme enceinte de la consommation de tabac dans les 3 mois précédant la grossesse et/ou pendant la grossesse sur la méthylation de l’ADN placentaire.

Les chercheurs ont étudié l’ADN d’échantillons de placenta, prélevés au moment de l’accouchement chez 568 femmes de la cohorte EDEN [1] réparties en trois catégories : non-fumeuses (n’ayant pas fumé depuis les trois mois précédant la grossesse ni pendant la grossesse), anciennes fumeuses (arrêt de la consommation dans les trois mois précédant la grossesse) et fumeuses (consommation dans les trois mois précédant la grossesse et pendant toute la durée de la grossesse).

Les scientifiques ont observé que, chez les fumeuses, 178 régions du génome placentaire présentaient des altérations de la méthylation de l’ADN. Chez les anciennes fumeuses, les chercheurs ont identifié 26 de ces 178 régions dont la méthylation de l’ADN était encore altérée. La méthylation des 152 autres régions n’était altérée que chez les femmes ayant fumé pendant leur grossesse.

Les régions altérées correspondaient le plus souvent à des zones dites enhancers, qui contrôlent à distance l’activation ou la répression de gènes. De plus, une partie d’entre elles étaient situées sur des gènes connus pour avoir un rôle important dans le développement du fœtus.

« Si un grand nombre de régions semblent avoir un profil de méthylation normal chez les femmes après arrêt du tabac, la présence de certaines modifications de méthylation de l’ADN dans le placenta de femmes ayant arrêté de fumer avant la grossesse suggère l’existence d’une mémoire épigénétique de l’exposition au tabac », précise la chercheuse Inserm Johanna Lepeule qui a dirigé ces travaux. Selon elle, des modifications de la méthylation de l’ADN placentaire au niveau des gènes liés au développement du fœtus et des régions enhancers pourraient en partie expliquer les effets du tabagisme observés sur le fœtus et la santé ultérieure de l’enfant.

Les prochaines étapes de ces travaux viseront à déterminer si ces altérations impactent des mécanismes impliqués dans le développement du fœtus et si elles peuvent avoir des conséquences sur la santé de l’enfant.

[1] Les femmes enceintes ont été recrutées entre 2003 et 2006 dans les centres hospitalo-universitaires de Nancy et de Poitiers.

 

En savoir plus sur les modifications épigénétiques et la méthylation de l’ADN

Les modifications épigénétiques sont matérialisées par des marques biochimiques présentes sur l’ADN. Réversibles, elles n’entraînent pas de modification de la séquence d’ADN mais induisent toutefois des changements dans l’expression des gènes. Elles sont induites par l’environnement au sens large : la cellule reçoit des signaux l’informant sur son environnement, et se spécialise en conséquence, ou ajuste son activité. Les marques épigénétiques les mieux caractérisées sont les méthylations de l’ADN, impliquées dans le contrôle de l’expression des gènes.

Covid-19 : 15 % des formes graves de la maladie s’expliquent par des anomalies génétiques et immunologiques

Image de microscopie du Coronavirus SARS-CoV-2 responsables de la maladie COVID-19 accrochés aux cellules épithéliales respiratoires humaines

SARS-Cov-2 coronavirus responsible for COVID-19 disease attached to human respiratory epithelial cells ©M.Rosa-Calatraval/O.Terrier/A.Pizzorno/E.Errazuriz-Cerda

Pourquoi la réponse individuelle à l’infection par le virus SARS-CoV2 varie-t-elle autant d’une personne à l’autre ? Résoudre ce mystère permettrait d’identifier les patients à risque, d’anticiper et d’améliorer leur prise en charge et d’offrir de nouvelles voies thérapeutiques fondées sur une meilleure compréhension de la maladie. Des chercheurs de l’Inserm, d’Université de Paris et de l’AP-HP à l’Institut de recherche Imagine (hôpital Necker-Enfants malades AP-HP), et de l’Université Rockefeller et du Howard Hughes Medical Institute à New York en collaboration avec l’équipe dirigée par le Pr Guy Gorochov au Centre d’Immunologie et des Maladies Infectieuses (Sorbonne Université/Inserm/CNRS), ont pour la première fois répondu à cette question clé.

L’équipe franco-américaine, dirigée conjointement par Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel*, a identifié les premières causes génétiques et immunologiques expliquant 15 % des formes graves de Covid-19. Ces malades ont un point commun : un défaut d’activité des interférons de type I, molécules du système immunitaire qui ont normalement une puissante activité antivirale. Ces découvertes permettraient de dépister les personnes à risque de développer une forme grave, et de mieux soigner ce groupe de patients. Les résultats de ces travaux sont publiés dans la revue Science.

Dès le début de pandémie de Covid-19, le chercheur Jean-Laurent Casanova et son équipe ont mis en place un consortium international, COVID human genetic effort dans le but d’identifier les facteurs génétiques et immunologiques pouvant expliquer la survenue de formes graves de la maladie. Ils se sont intéressés à des patients atteints de ces formes sévères, dont certains patients inclus dans les cohortes French-Covid et CoV Contact promues par l’Inserm. En ciblant leur recherche sur des mécanismes spécifiques de l’immunité – la voie des interférons (IFN) de type I qui sont de puissantes molécules antivirales – les chercheurs ont mis en évidence chez certains patients des anomalies génétiques qui diminuent la production des IFN de type I (3-4% des formes graves). Chez d’autres patients, ils ont identifié des maladies auto-immunes qui bloquent l’action des IFN de type I (10-11% des formes graves). L’ensemble de ces découvertes expliquerait donc 15 % des formes graves de Covid-19

Le premier article publié dans Science décrit ainsi des anomalies génétiques chez des patients atteints de formes sévères de Covid-19 au niveau de 13 gènes déjà connus pour régir la réponse immunitaire contrôlée par les IFN de type I contre le virus grippal. Des mutations de ces gènes sont la cause de certaines formes sévères de grippe.La principale conséquence de ces mutations est un défaut de production des IFN de type I. C’est par exemple ce qu’ont montré les laboratoires d’Ali Amara et Vassili Soumelis à l’Institut de Recherche Saint Louis à partir des cellules d’un patient porteur d’une mutation dans le gène IRF7.  

Quel que soit leur âge, les personnes porteuses de ces mutations sont plus à risque de développer une forme potentiellement mortelle de grippe ou de Covid-19.

Un moyen simple et rapide de détecter certains de ces sujets à risque pourrait être le dosage sérique des IFN de type I par la technique ultra-sensible d’ELISA digitale utilisée pour ce travail par l’équipe de Guy Gorochov au Centre d’Immunologie et des Maladies Infectieuses.

La prise précoce d’IFN de type 1 chez ces patients pourrait être une piste thérapeutique. Ces médicaments sont disponibles depuis plus de 30 ans et sans effets secondaires notables s’ils sont pris pendant une courte période.

Dans la seconde étude également publiée dans Science, les chercheurs montrent chez les patients atteints de formes graves de Covid-19, la présence à taux élevé dans le sang d’anticorps dirigés contre les IFN de type I des individus (auto-anticorps) et capables de neutraliser l’effet de ces molécules antivirales. Ces auto-anticorps sont retrouvés chez plus de 10 % des patients développant une pneumonie grave par infection au SARS-CoV2. D’une manière intéressante, ils ont pu être retrouvés bien avant la pandémie chez certains patients suivis de longue date à l’AP-HP pour d’autres pathologies. Ils sont absents chez les personnes qui développent une forme bénigne de la maladie et sont rares dans la population générale. Leur présence empêche les IFN de type I d’agir contre le virus SARS-CoV2. La production de ces anticorps dirigés contre le système immunitaire des patients témoigne probablement d’autres altérations génétiques qui sont en cours d’étude. Ces personnes pourraient bénéficier d’une plasmaphérèse (prélèvement de la partie liquide du sang contenant notamment les globules blancs et les anticorps), ou d’autres traitements pouvant réduire la production de ces anticorps par les lymphocytes B.

L’analyse d’un échantillon contrôle de 1 227 personnes en bonne santé a permis d’évaluer la prévalence d’auto-anticorps contre l’IFN de type 1 à 0,33 % dans la population générale, soit une prévalence 15 fois inférieure à celle observée chez les patients atteints de formes sévères. Ces résultats laissent penser qu’il faut donc dépister la population générale afin de détecter ces anticorps.

« Qu’il s’agisse de variants génétiques qui diminuent la production d’IFN de type I pendant l’infection ou d’anticorps qui les neutralisent, ces déficits précèdent l’infection par le virus et expliquent la maladie grave. Ces deux publications majeures mettent donc en évidence le rôle crucial des IFN de type I dans la réponse immunitaire contre le SARS-CoV2 », concluent Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel.

Une piste pour comprendre l’incidence de forme sévère chez les hommes et les plus de 65 ans

Dans la deuxième publication, sur les 101 patients présentant ces anticorps dirigés contre les IFN de type 1, 95 étaient des hommes. Cette proportion est supérieure à celle observée chez les patients atteints de formes sévères sans anticorps neutralisants. De plus l’une des 6 femmes chez qui la présence d’auto-anticorps a pu être détectée, était par ailleurs atteinte d’Incontinentia pigmenti, une maladie génétique due à une mutation d’un gène porté par le chromosome X, l’un des chromosomes qui distingue les males des femelles. Ces données suggèrent que la production de ces anticorps pourrait être liée au chromosome X.

Par ailleurs 49,5 % des patients testés positif pour ces anticorps avaient plus de 65 ans, contre 38 % dans le reste de la cohorte, ce qui laisse également supposer que la fréquence de ces anticorps augmente avec l’âge.

* Jean-Laurent Casanova dirige la génétique et l’immunologie expérimentale dans les deux branches, tandis que Laurent Abel dirige la génétique et l’épidémiologie mathématique dans les deux branches.

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