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Maintenir une bonne santé cardiovasculaire diminuerait le risque de développer une démence et un déclin cognitif avec l’âge

Photo by George Kourounis on Unsplash

Des chercheurs de l’Inserm au sein du Bordeaux Population Health Research Center, du Paris Cardiovascular Research Center, de l’Université de Bordeaux et de la cohorte des 3 Cités ont démontré que maintenir à un niveau optimal et combiner plusieurs facteurs et comportements bénéfiques pour le cœur était associé à un risque diminué de développer une démence et un déclin cognitif après 65 ans. Les chercheurs ont utilisé le concept de santé cardiovasculaire optimale défini par l’American Heart Association dans ses objectifs à 2020 pour la prévention des maladies cardiovasculaires. Cette étude a été publiée dans la revue JAMA.

Dans le cadre d’une nouvelle étude épidémiologique menée au sein de la grande cohorte Française des 3 Cités initiée en 1999 pour comprendre l’impact des facteurs de risque vasculaires dans le vieillissement cognitif et la démence, des chercheurs de l’Inserm (au sein du Bordeaux Population Health Research Center et du Paris Cardiovascular Research Center) ont suivi en France pendant 16 ans, 6 626 adultes âgés de 65 ans et plus. Plusieurs travaux ont à ce jour montré la pertinence de l’approche de la prévention dans le cas des maladies cardiovasculaires. Compte tenu des liens biologiques et de la présence de facteurs de risque communs entre maladies cardiovasculaires et démence, l’équipe de recherche s’est intéressée aux bénéfices de la prévention des facteurs de risque vasculaires pour les démences et le déclin cognitif.

La notion de « santé cardiovasculaire optimale » telle qu’elle est définie par l’American Heart Association repose sur 7 paramètres qui intègrent 4 comportements de santé (ne pas fumer, avoir un poids corporel optimal, une activité physique et une alimentation en adéquation avec les recommandations de santé publique) et 3 composantes biologiques (avoir un taux de cholestérol, un taux de glucose et une tension artérielle à un niveau idéal, et ce sans traitement).

Bien que cette étude possède ses limites, notamment concernant la population étudiée issue du milieu urbain et la variation possible des paramètres pris en compte. Elle montre néanmoins que le fait de maintenir une santé cardiovasculaire dite optimale (7 paramètres au niveau idéal) est associé à une diminution importante du risque de développer une démence, et à une atténuation du déclin cognitif qui lui est associé.

Ainsi par exemple, chaque paramètre supplémentaire à niveau idéal est associé à une diminution de 10% du risque de démence (si les 7 paramètres sont à un niveau optimal, la réduction du risque est de 70 % par rapport à ceux n’en ayant aucun).

Si l’objectif est d’atteindre une santé cardiovasculaire optimale, l’étude montre que le simple fait d’avoir un seul paramètre au niveau idéal est associé à une diminution du risque de démence. Cécilia Samieri, chercheuse Inserm en charge de l’étude précise : « En pratique, cet objectif paraît plus réaliste et pourrait permettre de toucher un plus grand nombre de personnes et donc d’avoir des effets plus importants. La promotion de la santé est un enjeu collectif des pouvoirs publics et des professionnels de santé mais qui implique également que chacun soit acteur de sa propre santé ».

Epidémies d’Ebola en 2018 : où en est la recherche vaccinale ?

©Inserm/Delapierre, Patrick, 2018

Une nouvelle épidémie de maladie à virus Ebola, la seconde depuis mai 2018, touche depuis juillet dernier la République Démocratique du Congo. Une nouvelle campagne de vaccination a débuté dans la région concernée du Nord-Kivu pour tenter d’enrayer l’épidémie. Dans ce contexte, les chercheurs du consortium PREVAC (Partnership for Research on Ebola VACcination), signent un état des lieux des avancées sur les vaccins contre Ebola dans la revue The Lancet et pointent la nécessité de poursuivre les essais cliniques.

Depuis la fin du mois de juillet 2018, la République Démocratique du Congo fait face à sa deuxième épidémie d’Ebola de l’année, après celle survenue en mai. Ces deux épisodes, qui s’ajoutent à celui de 2017 dans ce pays et à ceux de 2013-2016 en Guinée, Libéria et Sierra Leone, montrent à quel point le risque de réémergence du virus Ebola est réel. Si à l’heure actuelle il n’existe aucun traitement ni vaccin homologué pour lutter contre la maladie à virus Ebola, certains vaccins ont atteint un stade avancé de développement. La recherche vaccinale contre Ebola doit continuer car, associée à des mesures efficaces de santé publique, elle est un élément essentiel dans la prévention et la réponse à de prochaines épidémies.

L’Inserm et ses partenaires d’Aviesan ont mis en place en 2013 REACTing, un consortium multidisciplinaire rassemblant des équipes et laboratoires d’excellence, afin de préparer et coordonner la recherche pour faire face aux crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes. Dans ce cadre, en 2015, l’Inserm, National Institute of Allergy and Infectious Diseases et la London School of Hygiene & Tropical Medicine, en collaboration avec les autorités sanitaires et les scientifiques de 4 pays atteints par Ebola (Guinée, Libéria, Sierra Leone et Mali) ont constitué le consortium international PREVAC (PArtnership for Research on Ebola VACcination) et ont lancé un essai clinique à grand échelle portant sur trois stratégies de vaccination contre le virus Ebola. Cet essai dont sont également partenaires les universités de Bordeaux et du Minnesota ainsi que l’ONG ALIMA, et trois compagnies pharmaceutiques Janssen Vaccines & Prevention, B.V., une des entreprises Janssen Pharmaceutical de Johnson & Johnson, Bavarian Nordic et Merck Sharp & Dohme Corp (MSD en dehors des Etats-Unis et du Canada) vise à identifier les stratégies de vaccination les plus prometteuses pour protéger les personnes d’Ebola.[1]

Deux vaccins prometteurs sont à l’essai  dans le cadre de PREVAC dont le vaccin rVSVΔG-ZEBOV-GP qui est utilisé depuis le 9 août 2018, en réponse à la nouvelle épidémie en République Démocratique du Congo. Le second vaccin, Ad26.ZEBOV (nécessitant un rappel 8 semaines plus tard avec le vaccin MVA-BN-Filo), est également en cours d’évaluation, notamment dans le cadre du projet EBOVAC dont l’Inserm  est partenaire.

Les chercheurs du consortium PREVAC signent le 10 août 2018 dans The Lancet, un état des lieux de la recherche vaccinale contre Ebola dans lequel ils estiment qu’il reste encore des paramètres clés à étudier à travers différentes stratégies vaccinales. Au cœur des préoccupations des chercheurs une meilleure compréhension de la réponse immunitaire aux vaccins anti-Ebola, la question de la rapidité et de la durabilité de la réponse immunitaire (et donc de la protection) des personnes vaccinées, l’innocuité et la capacité du vaccin chez les enfants à déclencher une réponse immunitaire, ainsi que la nature des réponses chez les personnes immunodéficientes et les femmes enceintes.

Selon l’équipe de recherche de PREVAC, différentes stratégies vaccinales et scénarios doivent être étudiés pour identifier la réponse la plus efficace pour prévenir et répondre à de futures épidémies d’Ebola.

La vaccination post-exposition, la vaccination préventive ciblée destinée aux personnes ayant été en contact avec des malades, ainsi que les campagnes de vaccination préventive chez les populations à risques comme les soignants et éventuellement les résidents des zones régulièrement touchées par les épidémies font partie des stratégies à étudier.

Répondre à ces enjeux nécessite la poursuite des partenariats collaboratifs autour de la recherche contre Ebola mais également le renforcement de la confiance des communautés vis-à-vis des campagnes de vaccination et des vaccins. En effet, l’adhérence des personnes recrutées et l’engagement communautaire tout au long du processus d’un essai clinique est fondamental pour la réussite de ce dernier. Amener les sciences sociales dans la recherche clinique permet d’améliorer la confiance de la population et son implication dans les essais.

[1] Toutes les informations sur l’essai clinique PREVAC sont disponibles en ligne sur page Inserm dédiée :

https://www.inserm.fr/actualites-et-evenements/actualites/ebola-plus-2-000-personnes-deja-incluses-dans-essai-vaccinal-prevac

Consommation d’alcool et risque de démence

Les conclusions d’une nouvelle étude coordonnée par l’Inserm montrent que la consommation excessive d’alcool à long terme est associée à une augmentation du risque de démence. Les résultats suggèrent également un sur-risque parmi les abstinents, même si les mécanismes sous-jacents dans chacun des deux groupes sont vraisemblablement différents. Alors que chez les gros consommateurs, les cas d’hospitalisation pour maladie chronique liée à l’alcool ont été associés à un risque de démence quatre fois plus élevé ; chez les abstinents, ce risque n’est qu’1,5 fois plus grand et s’explique en partie par un risque plus important de maladies cardiométaboliques. Ces résultats sont publiés dans le British Medical Journal à partir des données de la cohorte britannique Whitehall II.

Avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes atteintes de démence devrait normalement tripler d’ici 2050 et tous les facteurs de risque ne sont pas encore identifiés. C’est pourquoi une équipe de chercheurs de l’Inserm basés en France et au Royaume-Uni a entrepris d’étudier l’association entre la consommation d’alcool dans la force de l’âge (entre 40 et 60 ans) et le risque de développer une démence dans les 23 années qui ont suivi. Ils ont aussi examiné si les maladies cardiométaboliques (groupe de pathologies incluant l’accident vasculaire cérébral, les coronaropathies et le diabète) avaient un quelconque effet sur cette association.

Leur étude révèle que les personnes qui s’abstiennent de boire de l’alcool ou celles qui consomment plus de 14 unités d’alcool par semaine entre quarante et soixante ans présentent un risque accru de développer une démence en vieillissant.

Les résultats qu’ils ont obtenus reposent sur 9 087 fonctionnaires britanniques âgés de 35 à 55 ans en 1985 qui participaient à l’étude Whitehall II, une étude qui examine les conséquences des facteurs sociaux, économiques, biologiques et de mode de vie sur la santé à long terme. À intervalle régulier entre 1985 et 1993, les participants (moyenne d’âge 50 ans) ont fait l’objet d’une évaluation de leur consommation d’alcool et de leur dépendance à l’alcool.

Les admissions à l’hôpital pour maladies chroniques liées à l’alcool et les cas de démence à compter de 1991, ainsi que les maladies cardiométaboliques ont été identifiées à partir des dossiers d’hospitalisation.

Sur les 9 087 participants, 397 cas de démence ont été enregistrés pendant un suivi moyen de 23 ans. L’âge moyen au moment du diagnostic de la démence était de 76 ans.

Après avoir pris en compte les données sociodémographiques, le mode de vie et les facteurs associés à la santé qui auraient pu affecter les résultats, les chercheurs ont découvert que l’abstention ou la consommation de plus de 14 unités d’alcool (112g d’alcool) par semaine étaient associées à un risque supérieur de démence par rapport à la consommation de 1 à 14 unités d’alcool par semaine. Parmi les personnes consommant plus de 14 unités d’alcool par semaine, chaque augmentation de 7 unités d’alcool par semaine consommée était associée à une hausse de 17 % du risque de démence.

Les cas d’hospitalisation pour maladie chronique liée à l’alcool ont quant à eux été associés à un risque de démence quatre fois plus élevé.

Si ces résultats montrent que l’abstention et la consommation excessive d’alcool sont associées à un risque accru de démence, les chercheurs s’accordent à dire que les mécanismes sous-jacents dans chacun des deux groupes sont vraisemblablement différents.

Chez les abstinents, les chercheurs montrent qu’une partie du risque supplémentaire de démence était associé à un risque plus élevé de maladies cardiométaboliques. Toutefois, d’autres facteurs de santé, une consommation d’alcool plus tôt dans la vie, et d’autres caractéristiques sociodémographiques non mesurées pourraient également expliquer le sur-risque de démence observé chez les abstinents.

Pour Séverine Sabia, chercheuse à l’Inserm et principale auteur de ces travaux : « ces résultats obtenus renforcent les données selon lesquelles une consommation excessive d’alcool est un facteur de risque de démence, et que ces résultats incitent à préconiser des seuils plus bas de consommation pour favoriser un meilleur vieillissement cognitif. En aucun cas, les résultats observés chez les abstinents ne doivent encourager les personnes ne buvant pas à commencer à boire de l’alcool car comme le rapporte Santé publique France, la consommation d’alcool est responsable en France de 49000 décès par cancer, cirrhose, psychose et dépendance alcoolique».

En France, les recommandations de santé publique en termes de « risque acceptable » sont de 10 verres par semaine et pas plus de deux verres par jour sur la base qu’un verre en France correspond à 10g d’alcool, soit 100g par semaine. Ces recommandations sont désormais valables indifféremment pour les hommes et les femmes.

Enfin, cette étude est une étude d’observation, il n’est donc pas possible de tirer des conclusions définitives sur une relation de cause à effet.

A lire sur le même sujet : Alcoolisme et risque de démences, une étude publiée en février dont les conclusions sont similaires.

Chez la souris, une exposition au chlordécone a des effets transgénérationnels sur la production de spermatozoïdes

souris blanches et noires

Une étude coordonnée par des chercheurs de l’Inserm au sein de l’Institut de recherche en santé, environnement et travail à Rennes, montre que l’exposition de souris gestantes au chlordécone[1] entraine chez leur descendance mâle (3e génération) une diminution du nombre de cellules souches germinales (à l’origine des spermatozoïdes), une atteinte de leur différenciation et une diminution du nombre de spermatozoïdes matures. Ces travaux sont publiés dans la revue Scientific Reports

Lors du développement embryonnaire, l’exposition maternelle à certains facteurs environnementaux peut avoir un impact sur le fœtus à naître. L’exposition précoce à certains perturbateurs endocriniens est suspectée d’entrainer des effets sur la fonction de reproduction.  L’objectif de cette nouvelle étude était de tester chez l’animal, l’hypothèse de conséquences sur plusieurs générations, de l’exposition au cours de la gestation au chlordécone, un perturbateur endocrinien avéré.

Il est en effet bien établi que l’exposition au chlordécone à l’âge adulte et à des doses élevées induit chez l’animal de laboratoire ainsi que chez l’homme une atteinte de la production et de la qualité spermatique. Des études épidémiologiques précédemment conduites par l’Inserm aux Antilles, ont montré que les niveaux d’exposition environnementale au chlordécone, auxquels les populations sont confrontées actuellement, ne sont pas de nature à entrainer des modifications des caractéristiques du sperme, lorsque l’exposition intervient à l’âge adulte. Mais du fait de la capacité du chlordécone à traverser la barrière placentaire, la question d’un effet de cette substance lors d’une exposition cours de la vie intra-utérine restait sans réponse.

Pour apporter des éléments de réponse, des souris gestantes ont été exposées par voie orale à une dose journalière de chlordécone connue pour ne pas induire d’effets néfastes chez cette espèce (100 μg par kg de poids corporel). La période d’exposition choisie (du 6ème au 15ème jour embryonnaire) correspond à une fenêtre critique pour la transmission d’information épigénétique aux générations suivantes mais également de vulnérabilité pour le développement des cellules germinales.

Principaux résultats : l’exposition des femelles gestantes au chlordécone entraine à la troisième génération (première génération n’ayant pas été directement exposée) une diminution du nombre de cellules souches germinales ou spermatogonies, une atteinte de leur différenciation et une diminution du nombre de spermatozoïdes matures.  

En d’autres termes, explique Fatima Smagulova, chercheuse à l’Inserm, responsable scientifique de ce travail et d’une équipe ATIP/Avenir :  » l’ensemble de la lignée germinale chez le mâle est affecté soit de manière quantitative soit de manière qualitative et ce, après deux générations. »

Ces modifications apparaissent corrélées à des changements de localisation de certaines marques épigénétiques (notamment méthylation et acétylation des histones) situées au niveau des promoteurs de gènes codants pour des facteurs de transcription, dont certains sont régulées par ESR1 (connu également sous le nom de récepteur alpha aux œstrogènes).

Enfin, des modifications de l’expression de 377 gènes codant pour des protéines impliquées dans des fonctions cellulaires essentielles (ségrégation des chromosomes, division cellulaire, réparation de l’ADN) sont observées.

Cette recherche menée chez des rongeurs montre que l’exposition prénatale au chlordécone à de faibles doses entraine des effets transgenerationnels sur la production spermatique et suggère que les propriétés hormonales de la molécule pourraient être impliquées dans les mécanismes conduisant à ces effets. Les chercheurs ignorent cependant quelle pourrait être la portée effective de ces résultats sur la fertilité des hommes résidants aux Antilles ayant été exposés au chlordécone lors de leur vie prénatale.

[1] Le chlordécone est un insecticide organochloré employé aux Antilles de 1973 jusqu’en 1993 pour lutter contre le charançon du bananier. Sa présence persistante dans l’environnement est à l’origine de la contamination de diverses denrées alimentaires locales, végétales et animales, terrestres et aquatiques. La population, y compris les femmes enceintes, sont exposées comme l’ont montré des études d’imprégnation menées antérieurement par l’Inserm, l’exposition ayant lieu principalement aujourd’hui par la consommation d’aliments contaminés.

Un dépistage universel de l’hépatite C coût-efficace en France

Crédits: Inserm/Jammart, Baptiste

En France, environ 75 000 personnes seraient infectées par le virus de l’hépatite C sans en avoir connaissance. Les résultats d’une étude soutenue par l’ANRS et menée par Sylvie Deuffic-Burban, chargée de recherche à l’Inserm au sein de l’IAME « Infection, Antimicrobiens, Modélisation, Evolution » (Inserm – Université Paris Diderot – Université Paris 13) et son équipe, mettent en avant le coût-efficacité d’une stratégie de dépistage universel de l’hépatite C associée à un bénéfice sur l’espérance de vie des personnes infectées, par rapport à un dépistage ciblé. Ces résultats fondés sur une modélisation font l’objet d’une publication dans la revue Journal of Hepatology le 1er juillet 2018.

Actuellement, en Europe, les recommandations concernant le dépistage du virus de l’hépatite C (VHC) ciblent les personnes présentant un haut risque d’infection par le virus. En 2014, en France, selon les données de Santé Publique France, environ 75 000 personnes de 18 à 80 ans étaient infectées par le VHC sans en avoir connaissance. De plus, lorsque les patients sont diagnostiqués, ces derniers, le sont, au moins une fois sur dix à un stade avancé de la maladie, alors qu’une mise sous traitement rapide après la contamination permet de réduire la morbidité et la mortalité de manière significative. On dispose en effet aujourd’hui, vis-à-vis de l’infection par le VHC, de traitements à la fois très efficaces et bien tolérés, assurant en quelques semaines la guérison de l’infection dans plus de 95% des cas.

C’est dans ce cadre qu’au sein d’une équipe de recherche de l’Inserm dirigée par le Pr Yazdan Yazdanpanah, Sylvie Deuffic-Burban a mis au point un modèle mathématique permettant d’évaluer l’efficacité et le coût-efficacité de différentes stratégies de dépistage dont celle d’un dépistage universel.

Pour mener cette étude, les scientifiques se sont appuyés sur les données de l’enquête de séroprévalence menée en 2004 par l’InVS qu’ils ont appliquées à la population générale résidant en France, âgée de 18 à 80 ans, excluant les personnes atteintes d’une infection chronique par le VHC et déjà diagnostiquées. La combinaison de ces données de séroprévalence avec d’autres données issues d’études portant sur les caractéristiques des personnes infectées (âge, sexe, stade de la maladie lors du diagnostic, consommation d’alcool…), la progression naturelle de la maladie, la qualité de vie de patients traités et les coûts que représente la prise en charge de cette infection a permis aux chercheurs l’élaboration de leur modèle d’analyse. Les différentes stratégies de dépistage évaluées ciblaient les publics suivants : uniquement la population à risque, tous les hommes entre 18 et 59 ans, tous les individus entre 40 et 59 ans, tous les individus entre 40 et 80 ans, et enfin tous les individus entre 18 et 80 ans (dépistage universel).

Les résultats obtenus grâce cette modélisation ont permis de démontrer qu’un dépistage universel, est associé à la meilleure espérance de vie ajustée sur la qualité de vie, comparée aux autres stratégies. De plus, ce dépistage universel se révèle coût-efficace si les patients dépistés pour l’infection par le VHC sont pris en charge et traités rapidement après le diagnostic.

Selon Sylvie Deuffic-Burban, « Le dépistage permet, à titre individuel, une prise en charge rapide ce qui évite le développement de complications graves. Dans une perspective collective, il contribue à l’élimination, à terme, de l’hépatite C dans une population qui aurait été dépistée sans restrictions. »

Ainsi, les résultats de cette étude soutenue par l’ANRS plaident en faveur d’un dépistage universel du VHC en France, suivi d’une prise en charge et d’un traitement immédiat des personnes diagnostiquées.

« Notre modèle ne permet pas de le tester, mais les caractéristiques épidémiologiques qui rapprochent le VHC, le VIH et le VHB permettent de penser qu’un dépistage universel et combiné de ces trois virus pourrait être particulièrement intéressant. » conclut la chercheuse.

Hypertension artérielle: une étude internationale démontre le bénéfice tensionnel de la dénervation rénale endovasculaire par ultrasons focalisés chez des patients ne recevant aucun médicament antihypertenseur

Après avoir rapporté les premiers résultats positifs de la dénervation rénale dans l’hypertension artérielle (HTA) résistante dans la revue The Lancet en 2015, l’équipe du Centre d’Excellence en Hypertension Artérielle et du CIC1418 APHP-Inserm conduites par le Pr Michel Azizi et celle du service de radiologie interventionnelle conduite par le Pr Marc Sapoval de l’hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP, ont obtenu de nouveaux résultats prometteurs chez des patients hypertendus ne recevant aucun traitement antihypertenseur dans le cadre d’une étude internationale. Ils apportent, pour la première fois, la preuve de la réduction de la pression artérielle après dénervation rénale par ultrasons focalisés dans cette indication. Les résultats de l’étude RADIANCE-SOLO, coordonnée par l’hôpital européen Georges-Pompidou, AP-HP, ont été présentés au congrès EuroPCR à Paris et lors du congrès de la Société Européenne d’HTA à Barcelone. Ils sont publiés dans la revue The Lancet. Ils ouvrent ainsi de nouvelles perspectives de traitement dans cette pathologie qui touche 30% de la population française en permettant d’envisager dans le futur une alternative au traitement médicamenteux pour certains patients.

La dénervation rénale par voie endovasculaire consiste à interrompre l’activité électrique des nerfs du système nerveux sympathique à destinée rénale en délivrant des ultrasons focalisés par l’intermédiaire d’un cathéter dans l’étude RADIANCE-SOLO ou en utilisant une autre technologie basée sur un courant électrique de faible intensité. Cette nouvelle piste thérapeutique a été développée initialement pour traiter l’HTA sévère et résistante à au moins 3 médicaments hypertenseurs.

Une étude internationale dirigée par le Pr Michel Azizi de l’Hôpital européen Georges-Pompidou, AP-HP – chef de service, Centre d’Excellence en Hypertension Artérielle et Coordonnateur CIC1418 APHP-Inserm – et de l’Université Paris-Descartes, et le Pr Laura Mauri (Université d’Harvard, Brigham and Women’s Hospital, Boston, USA) a été menée en collaboration avec une start-up américaine. Elle avait pour but d’évaluer de façon objective l’efficacité tensionnelle et la sécurité de la dénervation rénale par ultrasons contre une intervention fictive – appelée « sham »- pour la première fois chez des patients ne recevant aucun traitement médicamenteux pour leur HTA.

Au total, 146 patients ayant une HTA modérée ne prenant aucun médicament antihypertenseur ont été répartis par tirage sort entre le groupe traité par dénervation rénale ou le groupe « sham » limité à une artériographie diagnostique. 

Ni les patients ni l’équipe médicale assurant le suivi des patients ne connaissaient le groupe auquel ils avaient été assignés par le tirage au sort. L’intervention fictive ou « sham » avec maintien de l’insu de la randomisation des patients et des équipes médicales permet de s’affranchir de l’effet placebo en particulier dans l’HTA et a été approuvée par les autorités de santé et le comité de protection des personnes en France et dans le monde.

Après 2 mois de suivi sans addition de traitement antihypertenseur sauf en cas de nécessité de sécurité, les résultats de l’étude montrent que :

  • la pression systolique ambulatoire diurne a été réduite de façon significativement plus importante dans le groupe dénervation (-8,5 mmHg) que dans le groupe sham (-2,2 mmHg), soit une différence de 6,3 mmHg en faveur de la dénervation rénale.
  • plus de 66% des sujets traités par dénervation rénale ont eu une réduction de 5 mmHg ou plus de la pression artérielle systolique ambulatoire diurne, comparativement à 33% dans le groupe témoin.
  • 20% des patients traités par dénervation rénale avaient leur pression artérielle normalisée sans prendre aucun médicament antihypertenseur contre 3% dans le groupe témoin.
  • Aucun évènement indésirable grave n’a été observé.

(*mmHg : millimètre de mercure)

La dénervation rénale a donc un effet hypotenseur à moyen terme chez des patients ayant une HTA et ne recevant aucun médicament antihypertenseur.

En France, l’hypertension artérielle touche environ 30% de la population et peut conduire à des complications cardiovasculaires ou rénales graves, parfois mortelles. Malgré la disponibilité de nombreuses classes médicamenteuses différentes, l’HTA reste mal contrôlée chez plus de 45% des patients hypertendus en France[1] et dans le monde.

 « Le maintien à long terme de cette réduction tensionnelle après une procédure de dénervation rénale aurait des conséquences bénéfiques en termes de réduction des évènements cardiovasculaires et cérébrovasculaires chez les patients ayant une HTA.  Le suivi à 6, 12 et 36 mois est en cours et donnera des indications sur le maintien à distance de la baisse tensionnelle »  explique le Pr Michel Azizi, Hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP. 

Le programme de recherche RADIANCE-HTN se poursuit actuellement pour inclure des  patients ayant une HTA résistante qui est à plus haut risque de complications. Les patients pionniers et la communauté médicale, cherchent ensembles à ouvrir de nouvelles perspectives de simplification et de personnalisation du traitement de l’HTA en France et dans le monde, afin de contribuer à son meilleur contrôle et à en réduire les complications.

[1] étude épidémiologie ESTEBAN menée par Santé Publique France et à l’échelle mondiale l’étude May Measurement Month 2017

Quel impact de la pollution atmosphérique sur le placenta?

Crédits: AdobeStock

Des chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes regroupés au sein de l’Institut pour l’avancée des biosciences (Unité mixte de recherche 1209) ont analysé les conséquences des expositions environnementales in utero, grâce aux données recueillies à partir d’une cohorte de 668 femmes. L’exposition à la pollution atmosphérique est associée à des modifications épigénétiques au niveau du placenta, pouvant présenter un risque pour le fœtus. Ces résultats ont été publiés dans la revue Environment International le 21 Juin 2018.

L’exposition à la pollution atmosphérique pendant la grossesse, présente un risque pour la santé fœtale et pour l’enfant. Selon plusieurs études, l’exposition à la pollution atmosphérique est associée à des impacts délétères tels que la pré-éclampsie chez la femme enceinte (hypertension associée à la présence de protéines dans les urines), un poids à la naissance diminué chez l’enfant et peut-être même un fonctionnement dégradé des poumons et des troubles neuro-développementaux. Les mécanismes expliquant un effet des polluants de l’air sur le développement du fœtus et de l’enfant pourraient passer par une altération du placenta.

Les chercheurs ont mené une étude basée sur 668 mères et leurs enfants de la cohorte EDEN. Les femmes enceintes ont été recrutées entre 2003 et 2006 dans les Centres hospitalo-universitaires de Nancy et de Poitiers. Les scientifiques ont pu observer que les mères les plus exposées au dioxyde d’azote (gaz issu des processus de combustions automobiles, industrielles et thermiques) pendant leur grossesse présentaient une modification épigénétique sur le gène ADORA2B. « Des défauts dans l’expression de ce gène ont été associés dans d’autres études à la pré-éclampsie, une maladie de la grossesse fréquente et grave si elle n’est pas prise en charge » explique Johanna Lepeule, chercheuse Inserm. Les niveaux d’exposition moyens dans la population étudiée étaient inférieurs à la limite annuelle fixée par la directive de l’Union européenne sur la qualité de l’air (40 mg/m3 pour le dioxyde d’azote).

Les résultats de cette étude confirment ainsi une partie de l’hypothèse selon laquelle les expositions prénatales aux polluants de l’air, à des niveaux communément retrouvés en Europe et en France, pourraient avoir des effets néfastes sur la santé de la femme enceinte et de l’enfant à naître.

C’est la première étude concernant les polluants atmosphériques qui aborde la question en se basant sur l’analyse de données épigénétiques à grande échelle (sur plus de 400 000 localisations épigénétiques). Les études précédentes se concentraient sur des gènes particuliers.

Ce projet de recherche a été financé par la Fondation de France et par des institutions publiques.

L’hypertension artérielle à 50 ans augmenterait le risque de développer une démence

©JORGE LOPEZ on Unsplash 

Et si, selon l’âge à laquelle on la développe, l’hypertension artérielle avait des conséquences plus ou moins grandes sur le maintien de nos fonctions cognitives ? C’est ce que suggère l’étude d’une équipe Inserm en collaboration avec le Department of Epidemiology and Public Health du University College London qui suit, depuis 1985, l’évolution de la tension artérielle et la survenue de démences chez plus de 10 000 volontaires. Ces travaux parus dans European Heart Journal suggèrent qu’à 50 ans, une tension élevée mais toujours en-dessous du seuil de diagnostic de l’hypertension, pourrait être associée à une augmentation du risque de développer une démence plus tard dans la vie et ce, même pour les personnes ne présentant aucune autre pathologie cardio-vasculaire.

Bien qu’il existe déjà des études associant pression artérielle et risque accru de démence à un âge avancé, celles-ci portent sur les mesures de la pression artérielle chez une large catégorie de population dont l’âge varie de 35 à 68 ans et n’ont jamais été réalisées sur des tranches d’âge précises.

Des chercheurs de l’Inserm, en collaboration avec le  Department of Epidemiology and Public Health du University College London (UCL) ont entrepris avec l’étude Whitehall II, de suivre sur le long terme une population de 10 000 volontaires âgés de 35 à 55 ans au lancement de l’étude en 1985, afin d’étudier le lien entre âge, hypertension et démence. En 1985, 1991, 1997 et 2003, les chercheurs ont mesuré la pression sanguine des participants. Ces derniers ont été suivis jusqu’en 2017 afin de détecter la possible survenue d’une démence.

Parmi les participants, moins de 5% ont développé une démence en vieillissant avec un âge moyen de diagnostic d’environ 75 ans.

L’équipe de recherche a étudié deux types de pressions artérielles distincts : la pression artérielle systolique – mesurée lors de la phase de contraction du cœur permettant d’éjecter le sang dans les artères (systole) – et la pression artérielle diastolique – mesurée lors de la phase de relâchement du cœur qui lui permet de se remplir de sang (diastole).

Si la pression diastolique ne semble pas avoir d’impact sur le risque de développer une démence, les chercheurs ont en revanche observé que les quinquagénaires qui avaient une pression systolique égale ou supérieure à 130mmHg (selon la Société Européenne de cardiologie, la valeur seuil pour diagnostiquer une hypertension est de 140mmHg) avaient 45% de risque supplémentaire de développer une démence par rapport à ceux ayant une pression systolique plus basse au même âge. Aucune majoration de ce risque n’a été observée chez les personnes ayant une hypertension artérielle à 60 ou 70 ans.

Par ailleurs, le sur-risque associé à une pression artérielle supérieure à 130mmHg est constaté également chez les personnes n’ayant développé aucun problème cardio-vasculaire durant la période de suivi : leur risque était accru de 47% par rapport aux personnes sans problème cardio-vasculaires présentant une pression systolique inférieure à 130mmHg.

Selon Archana Singh-Manoux, directrice de recherche Inserm responsable du projet de recherche et professeur honoraire à l’UCL, ces analyses « suggèrent que l’impact de la pression artérielle sur la santé du cerveau est dépendant du temps d’exposition ; pour cette raison les personnes ayant une pression artérielle élevée dès 50 ans seraient plus susceptibles de développer une démence que celles qui développent une hypertension à 60 ou 70 ans ».

Ceci pourrait s’expliquer par le fait qu’une pression artérielle élevée est responsable de petits AVC qui, bien que souvent indétectables, sont dommageables pour le cerveau et peuvent entraîner à terme un déclin dans son fonctionnement.

« Dans cette étude, nous avons pu mettre en évidence différents schémas d’association selon les tranches d’âge étudiées », précise la première auteure de l’article Jessica Abell, post-doctorante à l’Inserm et  chercheuse associée à l’UCL qui ajoute que « ces résultats pourraient ainsi permettre de redéfinir les tranches d’âge à étudier pour évaluer l’impact de l’hypertension sur la santé ». Elle conclut : « Il est important d’insister sur le fait que ces résultats sont issus d’une étude observationnelle d’un échantillon de la population et ne peuvent être directement utilisés comme des outils prédictifs pour chaque individu. La définition de la valeur seuil optimale permettant de diagnostiquer l’hypertension est actuellement au cœur du débat ».

Réduire les conséquences du stress aux urgences

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Un passage aux urgences n’est pas anodin. Quelle que soit la raison pour laquelle une personne s’y présente, environ 1 sur 5 souffrira pendant plusieurs mois de symptômes divers (maux de tête, difficulté à se concentrer, irritabilité, troubles sensoriels …). Afin d’agir sur ce phénomène, les chercheurs de l’Inserm de l’Unité 1219 « Bordeaux Population Health center « , ont montré les bénéfices d’une séance précoce d’EMDR réalisée dans les 6 heures suivant l’événement ayant conduit aux urgences. Ces séances sont efficaces pour diminuer jusqu’à 75% les syndromes post-commotionnels et les troubles de stress post-traumatique. Ces résultats sont publiés dans The Journal of Psychiatric Research.

D’après une étude menée en 2012,  plus de 10 millions de personnes fréquentent les services d’urgences en France chaque année. Si l’on prend en considération les passages multiples, ce sont 18 millions de visites qui sont comptabilisées par an. Environ 10 à 20% des patients souffriront pendant plusieurs mois de symptômes persistants très divers (maux de tête, difficulté à se concentrer, irritabilité, troubles sensoriels …), dégradant significativement leur qualité de vie. Cela représente un enjeu de santé publique majeur puisque environ un million de personnes sont concernées chaque année. Parce que ces symptômes ont été initialement décrits chez des personnes souffrant de commotions cérébrales, leur persistance sur plusieurs mois est connue sous le nom de syndrome post-commotionnel.  Environ 5% de ces patients souffrent également d’un trouble assez proche : le trouble de stress post-traumatique, qui se traduit par des symptômes décrits classiquement chez des personnes ayant vécu une situation durant laquelle leur intégrité physique ou psychologique ou celle de son entourage a été menacée ou atteinte.

Les chercheurs Inserm du centre de recherche « Bordeaux Population Health », du CHU de Bordeaux et du centre hospitalier de Cadillac ont remarqué, lors d’investigations menées depuis 2007, que les niveaux de stress de ces patients étaient particulièrement élevés. Ils se sont demandé s’il était possible de les faire baisser, avec comme objectif ultime de prévenir la survenue de ces symptômes invalidants.

 

Un protocole de prise en charge adapté aux Urgences

 Ils ont conduit pour cela une nouvelle étude, dans le but d’évaluer la faisabilité et l’efficacité d’une approche thérapeutique reconnue, l’EMDR (en français « désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires»), pour laquelle ils ont adapté un protocole administrable dans le contexte d’un service d’urgences. Lors de la séance d’EMDR aux urgences, on demande au patient de porter attention aux éléments qui les placent dans un état de stress, et à leur ressenti physique, émotionnel et sensoriel. Ce faisant, le thérapeute effectue des séries de stimulations bilatérales alternées, consistant en des mouvements oculaires (balayage horizontal ou vertical) ou, lorsque l’état clinique du patient ne le permet pas, des tapotements alternés des genoux ou des épaules.

Ce modèle psychothérapeutique est l’une des deux thérapies recommandées par la Haute Autorité de Santé (HAS), l’OMS et l’Inserm dans la prise en charge du trouble de stress post-traumatique. La durée du traitement est habituellement variable (2 à plusieurs séances). Pour la présente étude, il s’agit de prévenir l’apparition des manifestations du syndrome post-commotionnel et du trouble de stress post-traumatique, en utilisant un protocole d’intervention précoce (dans les 6 heures suivant l’événement ayant conduit aux urgences), unique (une seule séance lors de la consultation aux urgences) et bref (une heure maximum). L’étude a consisté à inclure des patients évalués comme étant à haut risque de développer ces deux troubles (le fait d’avoir eu recours à des antidépresseurs, d’avoir eu une mauvaise santé au cours de l’année et le genre féminin étaient les facteurs prédictifs principaux).

 

Des patients traités par EMDR bien moins sujets aux troubles post traumatique que les autres

 130 patients ont été ainsi sélectionnés et ont accepté de participer à l’étude. Ils ont par la suite été répartis au hasard en trois groupes : le premier bénéficiait d’une séance d’EMDR de 60 minutes, le deuxième d’un entretien de 15 minutes avec un psychologue tandis que le troisième ne recevait pas de prise en charge psychologique.

Les patients étaient ensuite contactés par téléphone trois mois plus tard, afin d’identifier ceux qui avaient développé un syndrome post-commotionnel, ou un trouble de stress post-traumatique.

Dans les trois groupes les proportions de patients souffrant de syndrome post-commotionnel trois mois plus tard étaient respectivement de 15%, 47% et 65%.  La proportion de patients présentant un trouble de stress post-traumatique était de 3%, 16% et 19%.

« Il s’agit du premier essai contrôlé randomisé mondial qui montre qu’une intervention EMDR brève et ultra-précoce est, d’une part réalisable dans le contexte des urgences et d’autre part potentiellement efficace. » estime Emmanuel Lagarde, directeur de recherche Inserm. Ces résultats restent à confirmer par une nouvelle étude de plus grande ampleur. Une telle étude a été initiée en janvier 2018 par la même équipe aux CHU de Lyon et de Bordeaux, auprès de plus de 400 patients. Ses résultats seront connus avant la fin de l’année 2018.

Infections nosocomiales : la bactérie Bacillus cereus peut aussi en être la cause

Bacillus cereus – Inserm/Leclerc, Henri, 1990 – Source : Inserm images

 

Si Bacillus cereus est bien connue pour être à l’origine d’infections alimentaires, des chercheurs de l’Inra et de l’Anses, en collaboration avec les médecins de neuf hôpitaux en France dont ceux de
l’AP-HP[1] démontrent pour la première fois que cette bactérie est responsable de contaminations nosocomiales inter- et intra-hospitalières. Cette étude menée chez 39 patients entre 2008 et 2012 révèle également la présence dans l’environnement hospitalier de souches de B. cereus capables d’engendrer des infections parfois mortelles. Publiés dans la revue PLOS ONE, ces résultats incitent à ne pas négliger ces infections dans les hôpitaux afin d’améliorer la prise en charge des patients.

Bacillus cereus est une bactérie présente partout : dans les sols, les aliments, quasiment sur toutes les surfaces, la peau humaine… Sous forme de spores, elle résiste à la cuisson et à la pasteurisation. B. cereus est le deuxième agent responsable d’infections alimentaires en France et le troisième en Europe, caractérisées par des diarrhées et des vomissements. Dans des cas plus rares mais plus sévères, B. cereus peut également être responsable d’infections cliniques d’origine non alimentaire, en particulier chez les personnes fragiles (nouveaux nés, personnes âgées). Or, la réelle incidence de telles infections cliniques par B. cereus n’est pas connue et les informations sur les caractéristiques des souches bactériennes incriminées sont peu nombreuses.

Pendant cinq ans, grâce aux données épidémiologiques et cliniques recueillies auprès de neuf hôpitaux volontaires en France dont deux de l’AP-HP et avec le soutien de laboratoires sous-tutelle de l’Inserm, les chercheurs de l’Inra et de l’Anses ont mené une étude sur B. cereus à l’hôpital dans l’objectif d’une caractérisation approfondie (phénotypique et génotypique) des souches bactériennes. Cette étude a été menée sur 39 patients, pour la plupart immunodéprimés, infectés par B. cereus ; huit sont décédés.

Ces travaux ont mis en évidence des contaminations nosocomiales à B. cereus. Ils ont permis d’analyser de façon approfondie le profil génétique de souches de B. cereus identifiées à l’hôpital. La même souche de B. cereus a été retrouvée chez plusieurs patients sans qu’aucun lien n’ait pu être établi entre eux, ainsi que dans l’environnement de l’hôpital.

Huit groupes de patients porteurs de la même souche ont ainsi été identifiés, une souche infectant jusqu’à quatre patients. En particulier, une même souche de B. cereus a été identifiée à deux ans d’intervalle chez deux patients distincts dans un même hôpital. L’agent pathogène est donc une source d’infection pour les patients hospitalisés, probablement en raison de la capacité de B. cereus à sporuler et/ou à former des biofilms.

Par ailleurs, la caractérisation moléculaire des souches a permis de montrer qu’une souche de même profil génétique pouvait être identifiée chez plusieurs patients au sein d’un même hôpital, mais également entre différents établissements hospitaliers.

Ces résultats mettent en évidence la nécessaire vigilance vis-à-vis de B. cereus à l’hôpital, tout particulièrement chez les personnes immunodéprimées. Ils suggèrent une rigueur particulière en termes de procédure de nettoyage et désinfection. Ces travaux ouvrent également des pistes vers la mise au point de tests diagnostiques, basés sur les facteurs de virulence, capables de distinguer les souches de B. cereus présentant ou non un danger pour la santé humaine.

L’efficacité in vitro des traitements antibiotiques de première intention recommandés pour le traitement des infections à B. cereus a aussi été démontrée. Ainsi, afin d’améliorer la prise en charge des patients, un diagnostic précoce d’une infection grave à B. cereus pourrait permettre d’ajuster les traitements antibiotiques, sans attendre des résultats d’analyses complémentaires.

[1] Sont impliqués dans ces travaux : l’Institut Micalis et MaIAGE – Mathématiques et Informatique Appliquées du Génome à l’Environnement – (Inra, AgroParisTech), l’Anses, l’Institut de recherche en santé digestive (Université Toulouse III – Paul Sabatier, Inserm, Inra, ENVT), le Centre d’Immunologie et des Maladies Infectieuses (Inserm, UPMC), l’Hôpital Pitié-Salpêtrière, AP-HP, l’hôpital Antoine-Béclère, AP-HP, les CHU de Toulouse, Nice, Strasbourg, Chambéry, Grenoble.

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