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Grossesse gémellaire : favoriser l’accouchement par voie basse

Man Looking At Medical Team Operating Pregnant Woman

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Une étude prospective, promue par l’AP-HP, menée entre 2014 et 2015 par des équipes de chercheurs et cliniciens de l’Inserm, de l’Université Paris Descartes et de l’AP-HP, apporte un éclairage nouveau sur le mode d’accouchement en cas de grossesse gémellaire.

Selon les Prs Thomas Schmitz, et François Goffinet, qui ont coordonné cette étude intitulée JUMODA (« MOde D’Accouchement des JUmeaux »), la mise au monde par voie basse diminuerait le taux de mortalité et de morbidité néonatale des  deux enfants. Ces résultats sont parus dans le numéro de juin de la revue Obstetrics & Gynecology.

Si des progrès considérables ont été réalisés ces dernières années dans le domaine de la santé périnatale, la grossesse de jumeaux et leur mise au monde restent cependant des situations à haut risque. En effet, des complications parfois graves peuvent survenir à la fois chez la mère et les enfants, au cours de la grossesse (hypertension, retard de croissance, accouchement prématuré) mais également lors de l’accouchement, notamment du 2ème enfant (décollement placentaire, mauvais positionnement du cordon ombilical, contractions brutales de l’utérus au cours du travail, etc.). En France, alors que le taux de mortalité néonatale (décès dans les 27 premiers jours après la naissance) est de 2,3 pour 1000 naissances vivantes (selon une étude Inserm de 2013), celui-ci est 5 à 10 fois plus élevé en cas de grossesse gémellaire.

Jusqu’à très récemment, les pratiques d’une partie des obstétriciens français étaient guidées par les résultats d’études rétrospectives anglo-saxonnes allant à l’encontre de l’accouchement par voie vaginale en cas de grossesse gémellaire, particulièrement pour le 2ème enfant. En effet, dans ces études, l’état de santé néonatal du 2ème jumeau était meilleur après une naissance par césarienne qu’après un accouchement par les voies naturelles. Ces données ont participé à l’augmentation du taux de césariennes observé en France pour cette population depuis 20 ans, et qui était de 45% en 2010.

Selon le Pr Thomas Schmitz, les méthodes d’accouchement peuvent précisément être à l’origine de certaines complications et sont très différentes en France et dans les pays anglo-saxons. Il était donc nécessaire de réaliser dans notre pays une évaluation rigoureuse des pratiques obstétricales à l’accouchement des grossesses gémellaires.

Des chercheurs du CRESS –Inserm/Université Paris Descartes/AP-HP- ont lancé en 2014, une étude nommée JUMODA, pour « Etude prospective comparative nationale sur le MODe D’Accouchement des femmes enceintes de JUmeaux » menée par le Pr Thomas Schmitz et le Pr François Goffinet. Cette étude a eu pour but de mesurer la mortalité et la morbidité néonatale des jumeaux, selon la voie programmée d’accouchement (voie basse ou césarienne). Pour cela, les équipes ont analysé les naissances gémellaires dans 176 maternités françaises entre février 2014 et mars 2015. Un peu plus de 8 800 femmes ont pu être recrutées, soit 75% du nombre total d’accouchements de jumeaux en France sur la période analysée.

Globalement, l’étude a permis de mettre en avant qu’en France, 75% des femmes enceintes de jumeaux avaient eu dans les maternités participantes une tentative d’accouchement par voie basse et 25% une césarienne programmée. Surtout, la tentative d’accouchement par les voies naturelles était associée à un taux faible de mortalité et de morbidité néonatale lorsque le premier bébé était en position tête en bas. Pour la première fois, ce taux de complications était même rapporté comme étant plus élevé après césarienne programmée qu’après tentative de voie basse pour les enfants nés entre la 32ème et la 37ème semaine d’aménorrhée.

Si la césarienne reste une solution de secours incontournable lorsque surviennent certaines complications pendant les grossesses gémellaires, ces résultats récents montrent que l’accouchement par voie basse est à privilégier dans la très grande majorité des cas. Outre les complications opératoires et psychologiques associées à la césarienne qui seront évitées avec un accouchement par voie basse, l’accouchement naturel pourrait être, grâce au contact qui s’établit à ce moment-là entre le fœtus et les bactéries du vagin de la mère, le déclencheur de nombreux mécanismes immunitaires protecteurs, importants pour la santé et le développement de l’enfant à long terme. « Le message que nous souhaiterions faire passer aux patientes enceintes de jumeaux, est que la grossesse gémellaire n’est pas en soi une indication d’accouchement par césarienne. Il nous semble important que les patientes enceintes de jumeaux soient informées de ces résultats afin qu’elles puissent discuter au mieux avec leur obstétricien de leur voie d’accouchement. » conclut le PrThomas Schmitz.

 

Cette étude a été financée par le Programme hospitalier de recherche clinique national (PHRCN) en 2012.

La vitamine D, une nouvelle piste contre la maladie d’Alzheimer ?

Do you like the salad?

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Connue comme étant une cause possible de certaines maladies chroniques, une carence en vitamine D entraînerait également un risque majeur de développer une maladie d’Alzheimer, a fortiori lorsqu’elle est associée à une alimentation pauvre en «  bonnes graisses » et en caroténoïdes antioxydants. C’est ce que démontrent deux études menées par Catherine Féart et Cécilia Samieri, chercheuses Inserm de l’unité 1219 Bordeaux Population Health (BPH) (Inserm/ Université de Bordeaux). Les deux travaux sont parus récemment dans Alzheimer’s & Dementia.

Alors que le nombre de personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer ne cesse de croître avec l’augmentation de l’espérance de vie, la lutte contre cette maladie représente un défi majeur pour les décennies à venir. L’étude des Trois Cités (3C) est une cohorte qui a inclus en l’an 2000 près de 10 000 personnes âgées de 65 ans et plus, en bonne santé, ou du moins qui ne souffraient pas de la maladie d’Alzheimer. De multiples informations ont été recueillies, parmi elles des mesures sanguines qui ont été stockées dans une biobanque. Après leur inclusion dans la cohorte, les participants de l’étude 3C ont été revus à intervalles réguliers par des psychologues (le suivi est toujours en cours avec un recul de 17 ans aujourd’hui). Au cours de ces visites, ils ont passé une batterie de tests neuropsychologiques qui ont permis aux neurologues de la cohorte de diagnostiquer et de répertorier tous les nouveaux cas de démence, notamment de type Alzheimer. C’est à partir de la biobanque que Catherine Féart et Cécilia Samieri, deux chercheuses Inserm bordelaises, ont pu analyser les statuts sanguins des participants au moment de leur inclusion dans la cohorte, en s’intéressant tout particulièrement aux concentrations de nutriments : acides gras, caroténoïdes, vitamines E, D et A. Plusieurs de ces nutriments pourraient prédire le risque de démence, mais aucune étude ne s’est intéressée à leur rôle combiné.

Dans un premier temps, Catherine Féart et ses co-investigateurs dont Cécilia Samieri, se sont intéressés d’abord à la vitamine D1. Une baisse de la concentration sanguine de cette vitamine a auparavant été associée à plusieurs maladies chroniques ou encore à l’apparition d’ostéoporose, mais le  risque de développer une maladie neurologique n’avait pas été clairement établi. Les récents travaux menés au BPH ont dès lors mis en évidence que sur 916 participants non-déments en début de suivi, 177 avaient développé une maladie neurodégénérative, dont 124 cas d’Alzheimer, dans les 12 années de suivi.

Les participants avec une carence (25%) ou une insuffisance (60%) en vitamine D avaient un risque multiplié par 2 de développer une démence et un risque multiplié par près de 3 de développer une maladie d’Alzheimer par rapport à ceux ayant un statut satisfaisant en vitamine D.

Dans une seconde étude2, Cécilia Samieri et Camille Amadieu (premier auteur de la publication) ont taché d’établir des profils de biomarqueurs de nutriments (combinant la vitamine D avec d’autres marqueurs) associés au risque de survenue de démence à long-terme. Les chercheurs ont pour cela étudié la mesure de la concentration sanguine de 22 nutriments solubles dans les lipides (la vitamine D  mais aussi 12 acides gras, 2 formes de vitamine E, 6 espèces de caroténoïdes et la vitamine A) chez 666 participants non-déments de la cohorte 3C. Ces nutriments liposolubles ont un rôle important dans le fonctionnement cérébral et sont apportés par notre alimentation (poisson, noix, huiles végétales, fruits et légumes riches en carotènes…).

Un profil particulier est ressorti : les personnes âgées ayant les plus faibles concentrations sanguines combinées en vitamine D, en caroténoïdes et en acides gras polyinsaturés (« bonnes graisses ») avaient un risque multiplié par 4 de développer une démence et la maladie d’Alzheimer par rapport à ceux ayant les concentrations sanguines les plus élevées pour ces nutriments.

Grâce à la cohorte 3C, il est donc établi que la déficience en vitamine D est très fréquente chez le sujet âgé. Selon les chercheuses, « une telle déficience, a fortiori quand elle est associée à un profil défavorable aux « bonnes graisses » et à des apports faibles en caroténoïdes antioxydants, semble associée à un fort risque de développer une maladie d’Alzheimer. Le sur-risque conféré par cette déficience multiple en nutriments liposolubles apparaît bien supérieur au risque lié à la génétique ». Ainsi, maintenir un statut sanguin adéquat en vitamine D chez les personnes âgées pourrait contribuer à retarder ou à prévenir la démence, en particulier de type Alzheimer.

Consommation précoce de cannabis et influence sur les résultats scolaires : le lien se précise ?

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L’hypothèse d’un effet direct de la consommation de cannabis sur la concentration, la motivation, et à terme la réussite scolaire des jeunes, est soutenue par des données de recherches en neurosciences montrant des lésions spécifiques chez les adolescents consommateurs. Maria Melchior, Directrice de recherche Inserm (Institut Pierre Louis d’épidémiologie et de santé publique, Inserm-Université Pierre et Marie Curie, Paris) et ses collègues français et nord-américains, ont voulu étudier l’existence d’une éventuelle relation causale entre l’initiation précoce de la consommation de cannabis (avant 17 ans) et le niveau d’étude atteint plus tard. Leurs résultats, qui portent sur plus de 1000 personnes, sont publiés ce jour dans la revue International Journal of Epidemiology.

Les études actuellement disponibles montrent que la consommation de cannabis durant l’adolescence prédit le niveau d’études atteint plus tard. Cependant, de nombreux facteurs qui rendent certains jeunes plus susceptibles de consommer du cannabis de manière précoce que d’autres, n’avaient pas été pris en compte, tels que les caractéristiques familiales ou encore les difficultés psychologiques ou scolaires.

Les analyses des chercheurs sont basées sur les données de la cohorte TEMPO qui en 2009 a recueilli des informations auprès de 1103 personnes âgées de 25 à 35 ans. Les parents de ces jeunes adultes font partie de la cohorte GAZEL, une étude longitudinale qui a débuté en 1989. Ceci permet de documenter les caractéristiques de leur milieu social d’origine ainsi que leur comportement et parcours scolaire dans l’enfance. L’initiation précoce du cannabis a été définie par une consommation avant 17 ans. Le niveau d’études atteint a été défini par l’obtention ou non du baccalauréat.

Afin de comparer les consommateurs précoces (<17 ans) et non précoces (>=17 ans) de cannabis aux non consommateurs, des scores de « propension » ont été calculés à partir des caractéristiques sociodémographiques des participants et de leurs parents, et intégrés aux analyses.

Les chercheurs parviennent à établir plusieurs conclusions :

— En prenant en compte l’âge et le sexe des participants, par rapport aux non-consommateurs de cannabis, les consommateurs précoces ont une probabilité plus élevée de ne pas dépasser le baccalauréat (OR=1,77, IC95% 1,22-2,55).

— En prenant en compte les caractéristiques individuelles et familiales susceptibles de prédire l’initiation précoce du cannabis, cette association est légèrement diminuée mais reste statistiquement significative (OR=1,64, IC95% 1,13-2,40).

— Les jeunes ayant initié la consommation de cannabis après 17 ans ont un niveau de diplôme comparable aux non consommateurs.

— La consommation précoce de cannabis et le niveau d’études semblent plus fortement associés chez les jeunes filles que chez les jeunes garçons.

Pour Maria Melchior et ses co-auteurs, « La consommation précoce de cannabis peut donc  induire des difficultés scolaires, se traduisant à terme par un niveau d’études inférieur à celui obtenu par des jeunes non consommateurs, et ceci quel que soit le milieu social considérées, les difficultés psychologique ou scolaires des jeunes ».

« Les mécanismes par lesquels la consommation de cannabis à un âge précoce affecte le devenir scolaire peuvent avoir trait à la baisse de la motivation, aux problèmes de mémorisation et de concentration, entre autres »,  expliquent les chercheurs. « Dans un contexte où en France un collégien sur dix (un sur cinq en 3ème) et près d’un lycéen sur deux a déjà expérimenté le cannabis, le recul de l’âge d’initiation de l’usage de ce produit est un objectif de santé publique majeur », estiment-ils également.

L’étude TEMPO a reçu le soutien financier de la MILDECA, de l’INCA, de l’IRESP et de l’ANR.

Polluants organiques et obésité ne font pas bon ménage

Body disease and cancer.Use a magnifying glass concept to add interest.

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Une équipe de chercheurs de l’unité Inserm du Pr Robert Barouki (Unité 1124 Inserm/ Université Paris Descartes), dirigée par le Pr Xavier Coumoul, vient de montrer que la dioxine de Seveso, un polluant organique présent dans notre alimentation et dans l’atmosphère, endommage le foie chez des souris soumises à un régime riche en graisses. Un effet lié à son action sur une voie de signalisation également activée par les particules de diesel et de tabac. Les résultats sont parus en mars dernier dans Environnement Health and Perspectives.

Plusieurs polluants organiques pourraient contribuer à accroitre la survenue de maladies hépatiques chroniques chez les personnes obèses. C’est ce que suggère l’équipe de Xavier Coumoul qui a travaillé sur l’un d’eux : la dioxine de Seveso. Cette substance, qui tient son nom de la catastrophe de Seveso de 1976 en Italie près de la ville du même nom, est issue entre autres de l’activité industrielle tels que les incinérateurs de déchets, la métallurgie, etc. On la connait également pour avoir été l’une des substances libérée lors de l’utilisation d’agent Orange pendant la guerre du Vietnam. Classée comme cancérigène pour l’Homme, la dioxine de Seveso (ou TCDD) est d’autant plus redoutable qu’elle est très stable au cours du temps, persistant plusieurs années dans les écosystèmes et les organismes. Stockée notamment dans le tissu adipeux et dans le foie, elle active dans les cellules, la voie de signalisation AhR (pour Aryl hydrocarbon Receptor), qui permet en l’occurrence d’éliminer les polluants.

En 2014, alors que l’équipe travaillait sur les effets cancérigènes de cette substance, les chercheurs ont constaté que certaines souris exposées à des doses élevées de TCDD (25 µg/kg/semaine) développaient une inflammation du foie (fibrose hépatique) ; point de départ vers des maladies plus graves comme la cirrhose ou le cancer du foie. Or les maladies chroniques hépatiques non liées à la consommation d’alcool, s’observent habituellement chez les sujets obèses. Les chercheurs ont donc voulu clarifier l’impact possible de cette dioxine sur le foie dans un contexte d’obésité. Pour cela, ils ont travaillé avec un modèle murin pendant 14 semaines. Pendant cette période, deux groupes de souris ont subi des régimes différents.

L’association TCDD et obésité est nécessaire

Un premier groupe d’animaux a été soumis à un régime maigre. Durant les 6 dernières semaines du traitement, une partie de ces souris a été exposée à du TCDD (entre 1 et 10 µg/kg/semaine) tandis que l’autre partie n’a pas été exposée. Il en ressort qu’aucune fibrose n’est survenue, y compris en présence faible de TCDD (</=5 µg/kg/semaine). Seules quelques micros-lésions ont été observées pour des doses supérieures à 5 µg/kg/semaine. Ce syndrome n’était pas pathologique et était dénué de toute complication.

Parallèlement, un second groupe d’animaux a subi une alimentation riche en graisses, accompagnée d’une exposition au TCDD identique au premier groupe. Ces souris, étant devenues obèses du fait de leur régime, présentaient toutes des lésions dans le foie, caractérisées par une augmentation du stockage du gras. Par contre, en présence de TCDD, l’accumulation de gras était démultipliée et des cellules inflammatoires étaient recrutées localement. Sous l’effet de la TCDD, les lésions du foie se sont développées en inflammation chronique qui a ensuite évoluée vers la fibrose.

Au terme de ce suivi, les chercheurs ont étudié l’expression des gènes dans les cellules hépatiques. Ils ont constaté que les souris obèses exposées à la dioxine, surexprimaient plusieurs marqueurs d’inflammation et de fibrose.

« Les effets de l’obésité et de la dioxine se potentialisent et provoquent la survenue d’une fibrose. Les deux, ensemble, aboutissent à l’accumulation excessive de graisse dans le foie, au blocage de leur dégradation, à l’augmentation du stress oxydatif délétère pour les cellules et la survenue d’une inflammation », clarifie Xavier Coumoul, responsable des travaux.

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Tableau récapitulatif des effets sur le foie des différents régimes associés ou non à une exposition au TCDD (dioxine de Seveso)

A vérifier chez l’homme en cas d’exposition normale

Malgré ces observations, inutile de s’affoler à ce stade. La dose de TCDD utilisée dans cette étude est élevée, correspondant à celle d’une exposition massive comme pour la population Vietnamienne pendant la guerre. Un choix délibéré pour permettre d’en observer les effets sur une durée assez courte de quelques semaines. Reste à savoir ce qu’il en serait chez l’Homme, avec une dose plus faible et une exposition à long terme, conforme à celle de la population générale. Et plus généralement, reste à confirmer les données pour l’ensemble des activateurs de la voie AhR dont font également partie le diesel ou encore le tabac.

Ces travaux ont été financés par l’ANR et l’INCa.

La composition du microbiote intestinal prédit l’efficacité et la tolérance de l’immunothérapie du cancer chez l’homme

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Des équipes de l’AP-HP, de l’INRA, de Gustave Roussy et de l’Inserm montrent le rôle du microbiote dans la réponse aux immunothérapies du cancer. Elles révèlent que chez l’homme, la composition du microbiote intestinal aide à identifier les malades qui vont répondre favorablement ou non au traitement du mélanome, l’ipilimumab. Cette étude clinique, menée chez 26 patients, suggère qu’une modification de la composition du microbiote intestinal pourrait améliorer l’efficacité du traitement.

Ces résultats sont publiés dans la revue Annals of Oncology et constituent une nouvelle étape vers le traitement personnalisé des cancers.

Le microbiote intestinal est composé de plus de 100 000 milliards de bactéries et joue un rôle primordial dans le développement du système immunitaire. Il constitue un sujet de recherche en plein essor. Les équipes de recherche françaises se mobilisent pour connaître son rôle dans les maladies afin d’améliorer l’efficacité des traitements.

Dans cette étude réalisée chez l’homme, le Pr Franck Carbonnel, Chef du service de gastro-entérologie à l’hôpital Bicêtre, AP-HP, le Dr Patricia Lepage de l’INRA, le Pr Caroline Robert et le Pr Nathalie Chaput de Gustave Roussy ont étudié le microbiote intestinal de 26 patients atteints de mélanome avec des métastases et traités par l’anticorps monoclonal ipilimumab.

L’ipilimumab est une immunothérapie par anticorps anti-CTLA4 qui mobilise le système immunitaire du patient pour combattre la maladie. Le traitement est efficace chez une partie des malades, au prix d’effets indésirables sérieux, tels que des entérocolites qui ressemblent à la maladie de Crohn.

Les équipes ont montré que la composition du microbiote intestinal permet de reconnaître à l’avance les malades pour lesquels le traitement sera bénéfique ou non et ceux qui vont développer une entérocolite.

Les patients qui présentent une flore riche en bactéries Faecalibacterium et autres Firmicutes (notamment Faecalibacterium prausnitzii, Gemmiger formicilis et d’autres bactéries produisant du butyrate ; profil A) ont une meilleure réponse au traitement que les patients dont le microbiote est riche en bactéries du type Bacteroides (profil B). Par ailleurs, les patients présentant le profil A sont davantage sujets aux entérocolites que les patients du profil B.

Ces résultats confirment le rôle du microbiote dans la réponse aux immunothérapies du cancer. Ils ouvrent la voie à une meilleure identification des malades pouvant bénéficier de ces traitements. Enfin, ils constituent une étape majeure vers une manipulation de la composition de la flore intestinale afin d’améliorer l’efficacité de l’immunothérapie. Des recherches restent à mener pour limiter les effets secondaires induits par le traitement.

Ebola : un nouvel essai lancé en Afrique de l’Ouest pour évaluer trois stratégies de vaccination

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April 3, 2017: Study volunteer receives inoculation at Redemption Hospital in Monrovia on the opening day in Liberia of PREVAC, a Phase 2 Ebola vaccine trial in West Africa. Credit: NIAID

L’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) en France, les Instituts nationaux pour la santé (National Institutes of Health, NIH) aux États-Unis et la Faculté d’hygiène et de médecine tropicale de Londres (London School of Hygiene & Tropical Medicine, LSHTM), en collaboration avec les autorités sanitaires de Guinée et du Libéria, lancent un nouvel essai clinique de grande taille portant sur des candidats vaccins contre Ebola, sous l’égide du consortium international PREVAC (Partnership for Research on Ebola VACcination, Partenariat pour la recherche sur la vaccination contre Ebola). Cet essai vise à identifier les stratégies de vaccination les plus prometteuses pour protéger les personnes de la fièvre Ebola, afin de prévenir ou de maîtriser rapidement une future épidémie. Plus de 5 000 adultes et enfants vivant dans les pays d’Afrique de l’Ouest, proches de l’épicentre de l’épidémie de fièvre Ebola de 2014-2016, seront recrutés. Un centre supplémentaire est également prévu en Sierra Leone. L’essai PREVAC résulte d’un partenariat de recherche qui implique l’Inserm, les NIH, la LSHTM et le consortium de recherche clinique Ouest Africain (West african clinical research consortium)[1]. Les compagnies pharmaceutiques Janssen Vaccines & Prevention, B.V, une des entreprises Janssen Pharmaceutical de Johnson & Johnson, Bavarian Nordic et Merck Sharp & Dohme, Corp (MSD en dehors des Etats-Unis et du Canada) fournissent les vaccins testés dans l’essai PREVAC. L’essai comparera trois stratégies de vaccination contre Ebola à un placebo. Il sera réalisé en deux étapes, la première se déroulant en Guinée et au Libéria. En Guinée, l’Inserm est promoteur de l’essai, qui est le soutien des NIH et en collaboration avec les autorités guinéennes. Il implique un partenariat avec l’organisation non gouvernementale ALIMA (The Alliance for International Medical Action). Les NIH sont promoteurs de l’essai qui se déroule au Libéria, au titre de leur collaboration avec le Ministère de la Santé du Libéria et avec le Partenariat pour la recherche sur le virus Ebola au Liberia (Partnership for Research on Ebola Virus In Liberia, PREVAIL). Sous réserve de confirmation du financement, la LSHTM sera promoteur de l’essai en Sierra Leone, conduit par l’University of Sierra Leone’s College of Medicine and Allied Health Sciences.   Au cours de la première étape, l’essai évalue l’une des trois stratégies. Cette première stratégie consiste en une primovaccination suivie d’un rappel, combinant deux vaccins différents (l’un fabriqué par Janssen et l’autre par Bavarian Nordic). Elle sera comparée à un régime placebo. Le recrutement pour cette étape a démarré le 27 mars en Guinée et le 3 avril 2017 au Libéria. Lors de la seconde étape, qui devrait démarrer au second semestre 2017, l’essai évaluera les trois stratégies de vaccination, incluant ainsi deux autres stratégies impliquant le vaccin de Merck Sharp & Dohme, Corp. Le 29 mars 2016, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé la fin de l’urgence de santé publique de portée internationale relative à la flambée Ebola[2]. À la fin de cette épidémie, même si d’importants progrès ont été réalisés, plusieurs questions relatives à la durabilité de la réaction immunitaire des candidats vaccins en développement restent sans réponse. L’essai PREVAC évaluera la rapidité, l’intensité et la durée des réactions immunitaires générées par les différentes stratégies de vaccination, ainsi que l’innocuité et la tolérance des différents vaccins, en particulier chez les enfants.

Pour Yves Levy, PDG de l’Inserm, Anthony S. Fauci, directeur du NIAID (National Institute of Allergy and Infectious Diseases) des NIH et Peter Piot, directeur de la LSHTM, « nos établissements, l’Inserm, les NIH et la LSHTM, ont conçu et lancé ce partenariat de recherche international unique, avec nos collègues des pays d’Afrique de l’Ouest les plus touchés par la fièvre Ebola pour répondre aux questions qui subsistent sur l’innocuité et l’immunogénicité des stratégies des candidats vaccins contre Ebola. Cela nous permettra de mieux lutter contre les épidémies futures de fièvre Ebola. »

  La première étape de l’étude PREVAC évaluera une stratégie primovaccination-rappel (stratégie « prime-boost ») avec les vaccins expérimentaux de Janssen et de Bavarian Nordic : – Administration d’une première dose d’Ad26.ZEBOV, suivie 8 semaines plus tard d’une dose de rappel de MVA-BN-Filo[3]. Cette stratégie de vaccination sera comparée à un régime identique en termes de posologie et de durée, mais constitué de deux placebos. La deuxième étape de l’étude PREVAC évaluera les trois stratégies : celle utilisée dans la première étape et deux autres régimes impliquant le vaccin expérimental de Merck Sharp & Dohme, Corp: – Administration d’une première dose de rVSV∆G-ZEBOV-GP[4], suivie 8 semaines plus tard d’une dose de rappel de rVSV – Administration d’une première dose de rVSV ∆G-ZEBOV-GP, suivie 8 semaines plus tard d’un placebo inerte Chacune de ces stratégies de vaccination sera comparée à un régime identique en termes de posologie et de durée, mais constitué de deux placebos.   PREVAC en bref Il n’existe à l’heure actuelle aucun vaccin homologué pour prévenir la fièvre Ebola, même si certains vaccins sont parvenus aux derniers stades de développement. Pour mieux se préparer aux épidémies Ebola et pour contribuer à les contenir à l’avenir, il est essentiel de poursuivre les recherches sur la stratégie de vaccination afin de prévenir la fièvre Ebola. PREVAC (Partnership for Research on Ebola VACcination, Partenariat pour la recherche sur la vaccination contre le virus Ebola) est un consortium de recherche qui regroupe les autorités sanitaires de trois pays d’Afrique de l’Ouest, la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone, et leurs partenaires internationaux, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) en France, l’Institut national de l’allergie et des maladies infectieuses (National Institute of Allergy and Infectious Diseases, NIAD) des Instituts nationaux pour la santé (National Institutes of Health, NIH) (NIAID/NIH) aux États-Unis et la Faculté d’hygiène et de médecine tropicale de Londres (London School of Hygiene & Tropical Medicine, LSHTM) au Royaume-Uni. L’ONG ALIMA (The Alliance for international medical Action) est partenaire de ce consortium. Les sociétés pharmaceutiques Janssen Vaccines & Prevention, une des entreprises de Janssen Pharmaceutical de Johnson & Johnson, Bavarian Nordic et Merck Sharp & Dohme, Corp (MSD hors des États-Unis et du Canada) fournissent les vaccins expérimentaux testés dans l’essai PREVAC. L’essai PREVAC est une étude clinique de phase 2 réalisée en Afrique de l’Ouest. Il s’agit d’un essai randomisé qui vise à comparer trois stratégies expérimentales de vaccination contre Ebola à la prise de placebos, pour déterminer si ces stratégies sont sûres et capables de déclencher une réaction immunitaire durable capable de protéger contre la fièvre Ebola. Pendant la première étape, l’essai prévoit de recruter un maximum de 600 participants âgés de 12 ans et plus. Durant la seconde étape, 4 900 participants devraient être inclus : 3 500 adultes en bonne santé âgés de 18 ans ou plus et 1 400 enfants âgés de 1 à 17 ans. L’étude sera menée au départ dans deux centres en Guinée (Conakry/Landréah et Maférinyah) et dans un centre au Libéria (Monrovia), avec un centre supplémentaire en Sierra Leone en attente de confirmation.   Les principaux objectifs de l’essai PREVAC sur le vaccin contre Ebola sont les suivants :

  • Continuer à étudier l’innocuité de trois stratégies de vaccination contre Ebola et leur capacité à déclencher une réaction immunitaire durable protégeant contre le virus Ebola
  • Évaluer ces stratégies de vaccination dans la population générale et dans des groupes importants, tels que les enfants, pour lesquels on ne dispose que de données limitées
  • Obtenir des informations sur la durée de la réponse immunitaire induite par le vaccin.

En Guinée, deux centres de vaccination ont été mis en place, l’un à Conakry (dans une zone urbaine) et l’autre à Maferinyah (dans une zone rurale). Le Libéria disposera d’un centre de vaccination à Monrovia. Selon Yazdan Yazdanpanah, investigateur principal de l’essai PREVAC, « la difficulté réside dans l’identification d’au moins un vaccin sûr, efficace et durable afin de prévenir ou de maîtriser la prochaine épidémie de fièvre Ebola chez les adultes et chez les enfants. »

« Les équipes médicales d’ALIMA ont été en première ligne pour soigner les patients atteints de la fièvre Ebola en Guinée. Aujourd’hui, nous savons que ce virus peut réapparaître à tout moment. Par conséquent, nous souhaitons continuer à aider la population en poursuivant la recherche d’un vaccin capable de la protéger des futures épidémies » a indiqué Solenne Barbe, responsable du programme pour ALIMA.

Après la période de recrutement, les participants seront suivis fréquemment lors de visites régulières pendant au moins 12 mois. Des équipes de médecins, chercheurs et anthropologues collaboreront sur le terrain pour s’assurer que l’essai se déroule sans incident et pour répondre aux questions des participants à l’étude et des volontaires potentiels. Le personnel de l’étude surveillera l’état de santé des participants, consignera les éventuels évènements indésirables et recueillera des échantillons de sang lors des visites de suivi après les vaccinations. Un comité indépendant de surveillance des données et de l’innocuité (CISDI) surveillera étroitement les données d’innocuité et de réaction immunitaire pendant toute la durée de l’essai. Les enfants âgés de moins de 12 ans ne seront pas recrutés au départ. Le CISDI commencera par examiner les données des enfants âgés de 12 à 17 ans afin de déterminer si l’essai peut être étendu en toute sécurité aux enfants âgés de 5 à 11 ans. Après un autre examen des données d’innocuité, le CISDI examinera si la vaccination des enfants âgés d’un à 4 ans peut démarrer. Les participants à cet essai ne courent aucun risque d’infection par le virus Ebola avec les vaccins de l’étude. Les vaccins à l’étude ne contiennent pas de virus Ebola vivant. Ils contiennent un seul gène codant pour une seule protéine du virus Ebola. Cette protéine ne peut pas entraîner une infection. Le principe est le même que pour de nombreux autres vaccins existants. Le site ClinicalTrials.gov contient d’autres informations sur l’essai sous l’identifiant NCT02876328.   Comment fonctionne un vaccin préventif ? La vaccination préventive implique généralement l’administration d’une forme atténuée ou inactivée d’un agent infectieux (ou d’un ou plusieurs de ses composants) à une personne en bonne santé. L’objectif est de déclencher une réaction immunitaire qui implique le développement de cellules « mémoire » du système immunitaire capables de reconnaître immédiatement le pathogène s’il infecte la personne par la suite. [1] Etabli en 2015 par des scientifiques du Liberia, de Guinée, et de Sierra Leone, et désormais du Mali, le consortium conduit des recherches collaboratives pour prévenir et aider à la réponse aux futures flambées d’Ebola et d’autres maladies infectieuses, et donc à la préparation anticipée du dispositif de santé de cette sous-région de l’Afrique de l’Ouest. [2] http://www.who.int/mediacentre/news/statements/2016/ihr-emergency-committee-ebola/fr/ [3] Le vaccin Ad26.ZEBOV est développé par Janssen Vaccines & Prevention B.V., une des entreprises Janssen Pharmaceutical de Johnson & Johnson et le vaccin MVA-BN-Filo a été développé par Bavarian Nordic S/A. Ce régime expérimental de vaccin contre Ebola a été développé dans un programme de recherche collaborative avec les NIH. Les autres financeurs qui ont soutenu le développement de ce régime de vaccin comprennent l’Initiative pour des médicaments innovants (IMI) en Europe et l’autorité pour la recherche et le développement biomédicaux avancés (Biomedical Advanced Research and Development Authority, BARDA), un bureau du Département de la santé et des services humains (Department of Health and Human Services) aux États-Unis. [4] Le vaccin rVSV ∆G-ZEBOV-GP a été développé par l’Agence de santé publique du Canada. NewLink Genetics a obtenu une licence du vaccin, et le 24 novembre 2014, Merck Sharp & Dohme, Corp. et NewLink Genetics Corp. ont conclu un accord de licence international exclusif dans lequel Merck assume la responsabilité de la recherche, du développement, de la fabrication et de la distribution du vaccin expérimental. Les gouvernements canadien et américain, entre autres, ont contribué par un soutien financier.

« Funding provided in part by NCI contract HHSN261201500003I through the Frederick National Laboratory for Cancer Research. The content of this publication does not necessarily reflect the views or policies of the Department of Health and Human Services, nor does mention of trade names, commercial products, or organizations imply endorsement by the U.S. Government. »

Agir sur les comportements nutritionnels, une expertise collective de l’Inserm

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Le rôle des facteurs nutritionnels (alimentation et activité physique) dans le développement du surpoids et de l’obésité et dans la survenue de nombreuses maladies chroniques telles que les cancers, les maladies cardiovasculaires, le diabète et l’arthrose est à ce jour scientifiquement bien établi. Ces maladies constituent la première cause de mortalité à l’échelle de la planète et le nombre de patients concernés ne cesse d’augmenter.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’en 2014 plus de 1,9 milliard d’adultes étaient en surpoids, dont 600 millions d’obèses. En France environ un tiers des adultes sont en surpoids et 15% (7 millions) sont obèses. Au-delà des difficultés que rencontrent ces individus, le surpoids et l’obésité ont également un coût sociétal important. Dans le cas de la France, leur coût financier a été estimé à 4 milliards d’euros en 2008. Selon l’OMS, les projections effectuées prévoient qu’en 2030, 25 % des Français et 29 % des Françaises pourraient être obèses.

Pour faire face à cette hausse de l’obésité en France, l’État a mis en place dès 2001, une politique publique de santé nutritionnelle en lançant le Programme National Nutrition Santé (PNNS).En 2007, un décret de la loi de santé publique de 2004 impose que les publicités en faveur des produits alimentaires manufacturés et des boissons avec ajouts de sucres, sel, édulcorants de synthèse, doivent contenir une information à caractère sanitaire. Cette disposition s’applique quels que soient les médias (télévision, radio ou affichage publicitaire).

Ces messages sont à présent bien connus du public (5 fruits légumes par jour…). Cependant au fil du temps, des enquêtes montrent qu’ils attirent de moins en moins l’attention et que leur visibilité est inégale selon les supports. De plus, le mode de diffusion des messages engendre des problèmes de compréhension et ils sont parfois perçus comme une caution des produits présentés dans la publicité.

L’Inserm a été sollicité fin 2013 par Santé Publique France pour réaliser une expertise collective afin de de disposer d’un bilan des connaissances scientifiques et d’analyser l’impact de messages sanitaires diffusés par les médias de masse sur les cognitions, attitudes, intentions et comportements.

Cette expertise s’appuie sur une analyse critique de la littérature scientifique internationale faite par un groupe pluridisciplinaire de dix experts, chercheurs dans les domaines du marketing et des sciences de gestion, du droit, de la science politique, de l’économie, de la psychologie cognitive, de la psychologie sociale, des sciences de l’information et de la communication et des neurosciences.

Les textes de cette expertise sont regroupés en trois parties : une première partie donne des éléments de contexte au niveau législatif et sur l’impact du marketing sur les comportements alimentaires ; la deuxième partie fait le point sur différentes dimensions de l’évaluation des campagnes nutritionnelles basées sur les médias ; enfin, une troisième partie analyse les mécanismes psycho-cognitifs en jeu dans la réception et les traitements de messages sanitaires (« Mangez 5 fruits et légumes par jour », « Ne mangez pas trop gras, trop sucré, trop salé », etc.) par les individus.

Retrouvez l’intégralité du dossier de presse en téléchargement ci-contre.

Agir sur les comportements nutritionnels : Principales recommandations

Recommandations d’actions :

  • Mettre en place des lois restreignant les actions de marketing alimentaire auxquelles sont exposés les enfants. Le groupe d’experts recommande de réduire l’exposition des enfants au marketing pour des produits de mauvaise qualité nutritionnelle et d’en limiter les effets en interdisant par par exemple les publicités télévisées pour certains produits alimentaires durant les plages horaires visionnées par un nombre important d’enfants.
  • Reconsidérer  le dispositif des messages sanitaires sur les publicités en dissociant les messages et le contenu publicitaire. Plutôt qu’un bandeau, le groupe suggère par exemple de placer les messages sanitaires en plein écran en début et/ou en fin de publicité. Si le dispositif des messages sanitaires n’est pas modifié dans sa forme actuelle, le groupe d’experts propose alors d’étendre la mise en place du dispositif à d’autres supports de communication.
  • Concevoir des messages sanitaires qui pourront solliciter les différents niveaux d’attention :

    • Optimiser la voie des influences implicites (non-conscientes) et en faible attention, en améliorant la structure et en unifiant les messages pour permettre une bonne fluidité perceptive et conceptuelle.
    • Maximiser la voie des influences explicites (conscientes), le groupe d’experts recommande l’utilisation de messages nutritionnels simples, compréhensibles, spécifiques et faciles à mettre en application. Ces messages doivent également être personnalisés et émis par une source crédible (le gouvernement, les professionnels de santé ou la recherche académique).
  • Pré-tester de façon systématique toutes les stratégies de communication envisagées en contexte naturel et avant le lancement.

 

Recommandations de recherche :

  • Mieux connaître les populations cibles, ses motivations, ses attentes ;
  • Poursuivre les recherches sur les effets possibles des messages sanitaires inclus dans les publicités (dispositif actuel) comme les effets implicites ;
  • Mieux comprendre les mécanismes cognitifs et comportementaux en lien avec des messages nutritionnels ;
  • Mieux analyser les stratégies de « marketing intégré » des industries.

Attention à la prise d’ibuprofène pendant la grossesse

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Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Inserm au sein de l’Irset « Institut de recherche en santé, environnement et travail »[1] montre que l’ibuprofène est susceptible d’entraîner des perturbations du système hormonal dans le testicule fœtal humain avec des conséquences éventuelles sur le développement du tractus urogénital masculin. Ce médicament supprime la production de différentes hormones testiculaires, dont la testostérone, qui contrôle les caractères sexuels primaires et secondaires et la descente des testicules. Ces effets sont obtenus à des doses analogues à la posologie classique. Ces résultats sont publiés dans Scientific Reports.

L’ibuprofène, que l’on peut se procurer sans ordonnance, est l’un des médicaments les plus consommés par les femmes enceintes. Si près d’une femme sur dix déclare en avoir pris au cours de sa grossesse, elles seraient en réalité jusqu’à 3 sur 10 à en prendre en automédication selon les études.

Les recherches épidémiologiques menées ces dernières années ont montré une association entre la prise d’antalgiques pendant la grossesse et la survenue d’effets indésirables chez l’enfant (petit poids de naissance, asthme, prématurité etc). D’autres recherches combinant épidémiologie, expérimentation in utero chez le rat et ex vivo sur des organes de rat et humains, entreprises au sein de l’Irset en collaboration avec des chercheurs danois de l’Université de Copenhague) ont montré que le paracétamol et l’aspirine pouvaient perturber le système endocrinien testiculaire fœtal avec comme conséquence une augmentation du risque de non-descente des testicules (cryptorchidie). Seuls les effets de l’ibuprofène n’avaient pas encore été testés.

Pour cela, les chercheurs de l’Irset – avec l’appui de collègues du CHU de Rennes, de l’Université de Copenhague, de chercheurs du Laberca de Nantes, et de collègues écossais du  MRC Edinburgh – ont articulé deux séries de tests pour étudier les effets de l’ibuprofène sur le testicule fœtal humain. Dans la première série d’études, ces testicules sont mis en culture, dans la seconde, ils sont greffés sur des souris[2]. Les effets de l’ibuprofène ont été étudiés sur des périodes correspondant aux 1er et 2ème trimestres de grossesse.

Lorsque les testicules correspondant au 1er trimestre de grossesse sont exposés à l’ibuprofène, la production de testostérone par les cellules de Leydig diminue fortement. Au cours de la même période (jusqu’à 12 semaines de développement), les chercheurs observent pour la première fois que l’ibuprofène affecte aussi la production d’hormone anti-müllérienne par les cellules de Sertoli. Cette hormone joue un rôle clé dans la masculinisation du tractus génital.

En outre, l’expression des gènes codant pour le fonctionnement des cellules germinales, à l’origine de la formation des spermatozoïdes, est largement réduite en présence d’ibuprofène.

Enfin, la production de prostaglandine E2 (connue pour être produite par les testicules et pour intervenir dans de nombreux processus biologiques) et les gènes correspondants sont eux aussi inhibés par la présence d’ibuprofène à ces mêmes âges de développement.

Tous ces effets sont observés très tôt au cours du premier trimestre, et aucun n’est retrouvé sur les tests effectués au cours du second trimestre.

Pour Bernard Jégou, directeur de recherche Inserm et coordinateur de cette étude et Séverine Mazaud-Guittot, chargée de recherche Inserm, les conclusions de ce travail soutenu par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) sont à prendre au sérieux : « il existe une fenêtre de sensibilité bien précise au cours du 1er trimestre de développement du fœtus pendant laquelle l’ibuprofène présente, semble-t-il, un risque pour le futur appareil génital et reproducteur de l’enfant. Tous les faisceaux d’indices convergent vers une grande prudence quant à l’utilisation de ce médicament lors du 1er trimestre de grossesse. En outre, si on prend aujourd’hui en compte le corps de données disponibles, il apparaît que la prise de plusieurs antalgiques pendant la grossesse représente un danger encore accru pour l’équilibre hormonal du fœtus masculin. »


[1] Les xénogreffes consistent à transplanter des cellules ou fragments d’organes d’un organisme vivant (par exemple des cellules humaines) dans l’organisme d’une autre espèce (ici la souris) pour comprendre leur développement.

[2] Institut de recherche en santé, environnement et travail ; Inserm ; Ecole des hautes études en santé publique, Université de Rennes 1.

Drépanocytose : rémission des signes de la maladie chez le premier patient au monde traité par thérapie génique

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Une équipe dirigée par le Pr. Marina Cavazzana a réalisé à l’hôpital Necker-Enfants malades, AP-HP et à l’Institut Imagine (AP-HP/Inserm/Université Paris Descartes) en octobre 2014 une thérapie génique dans le cadre d’un essai clinique de phase I/II chez un patient de 13 ans atteint de drépanocytose sévère. Menée en collaboration avec le Pr. Philippe Leboulch (CEA/Facultés de médecine de l’université Paris-Sud et de l’université d’Harvard) qui a mis au point le vecteur utilisé et dirigé les études précliniques, ce traitement novateur a permis la rémission complète des signes cliniques de la maladie ainsi que la correction des signes biologiques. Les résultats (suivi de 15 mois après la greffe) font l’objet d’une publication dans le New England Journal of Medicine le 2 mars 2017 et confirment l’efficacité de cette thérapie d’avenir. 

La drépanocytose, forme grave d’anémie chronique d’origine génétique, est caractérisée par la production d’une hémoglobine anormale et de globules rouges déformés (falciformés), dus à une mutation dans le gène codant pour la β-globine. Cette maladie entraîne des épisodes de douleurs très importantes provoqués par des crises vaso-occlusives. Elle cause également des lésions de tous les organes vitaux, une grande sensibilité aux infections, ainsi qu’une surcharge en fer et des troubles endocriniens. On estime que les hémoglobinopathies touchent  7% de la population mondiale. Parmi elles, la drépanocytose est considérée comme la plus fréquente avec 50 millions de personnes porteuses de la mutation – ayant un risque de transmettre la maladie – ou atteintes. Les anomalies génétiques de la β-globine, drépanocytose et β-thalassémie, sont les maladies héritées les plus répandues dans monde, plus fréquentes que toutes les autres maladies génétiques additionnées.

L’essai clinique, coordonné par le Pr Marina Cavazzana*, a été mené à l’hôpital Necker-Enfants malades de l’AP-HP et à l’Institut Imagine.

La première phase a consisté à prélever des cellules souches hématopoïétiques, à l’origine de la production de toutes les lignées de cellules sanguines, au niveau de la moelle osseuse du patient. Un vecteur[1] viral porteur d’un gène thérapeutique, déjà mis au point pour traiter la ß-thalassémie, a ensuite été introduit dans ces cellules afin de les corriger. Ce vecteur lentiviral, capable de transporter de longs segments d’ADN complexes, a été développé par le Pr Philippe Leboulch** et est produit à grande échelle par la société américaine bluebird bio[2].

Les cellules traitées ont ensuite été réinjectées au jeune patient par voie veineuse en octobre 2014. L’adolescent a ensuite été pris en charge durant son hospitalisation dans le service d’immunohématologie pédiatrique de l’Hôpital Necker-Enfants malades en collaboration avec le Pr. Stéphane Blanche et le Dr. Jean-Antoine Ribeil.

Quinze mois après la greffe des cellules corrigées, le patient n’a plus besoin d’être transfusé, ne souffre plus de crises vaso-occlusives, et a complètement repris ses activités physiques et scolaires. « Nous notons aussi que l’expression de la protéine thérapeutique provenant du vecteur, hautement inhibitrice de la falciformation pathologique, est remarquablement élevée et efficace » explique le Pr Philippe Leboulch.

« Nous souhaitons, avec cette approche de thérapie génique, développer de futurs essais cliniques et inclure un nombre important de patients souffrant de drépanocytose, en Ile-de-France et sur le territoire national » indique le Pr. Marina Cavazzana.

[1] Un vecteur est une molécule d’ADN ou d’ARN capable de s’autorépliquer (plasmide, cosmide, ADN viral) dans laquelle on introduit de l’ADN étranger et que l’on utilise ensuite pour faire pénétrer cet ADN dans une cellule cible.

[2] Société fondée par le Pr. Philippe Leboulch et promotrice de l’essai clinique.

Charcuterie et asthme : meilleurs ennemis ?

Cold cuts: ham, roast ham, salami with buffalo mozzarella, olives and red wine Chianti

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Une consommation élevée de charcuterie (au moins 4 fois par semaine) est associée à une aggravation des symptômes de l’asthme au cours du temps. Ces résultats, publiés dans  la revue Thorax par une équipe de chercheurs de l’Inserm (Unité Inserm 1168  » Vieillissement et maladies chroniques : approches épidémiologiques et de santé publique), ont été obtenus d’après les données recueillies auprès de 1000 personnes suivies pendant 7 ans en moyenne.

La consommation de charcuterie – récemment classée cancérogène par l’OMS – a déjà été associée à une augmentation du risque de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), mais son association avec l’asthme n’avais jamais été mise en évidence. Certains faisceaux d’indices, comme le fait qu’une modification des habitudes alimentaires ou que l’augmentation de l’obésité au cours du temps étaient impliqués dans l’asthme ont conduit les chercheurs de l’Inserm à s’intéresser de plus près à cette question.

Une analyse a été conduite, grâce aux données de l’étude EGEA[1], sur presque 1000 participants suivis pendant sept ans. Les personnes incluses dans la cohorte étaient âgées en moyenne de 43 ans. Au cours du suivi, 20% ont rapporté une aggravation de leurs symptômes d’asthme. Afin d’en comprendre les raisons, les chercheurs de l’Inserm se sont intéressés à leur régime alimentaire.

Il fallait avant cela éliminer le paramètre « obésité » qui aurait pu fausser les résultats. Comme l’IMC est un facteur de risque déjà identifié dans la survenue l’asthme, il était effectivement plausible qu’il représente un intermédiaire causal entre les effets du régime alimentaire que souhaitaient regarder les chercheurs (en l’occurrence la consommation de charcuterie) et l’asthme. Les scientifiques ont donc pris en compte ce paramètre pour ajuster leurs résultats en utilisant une méthode d’épidémiologie récente dite de MMS[2] (modèles marginaux structuraux).

Les résultats de l’étude ont montré qu’une consommation élevée de charcuterie (au moins 4 fois par semaine) était associée de façon directe à l’aggravation des symptômes de l’asthme.

Et seulement 14% de l’association entre la consommation de charcuterie et l’asthme était expliqué par l’obésité (effet indirect).

« Ces nouveaux résultats élargissent l’effet direct de l’alimentation sur l’asthme chez les adultes. Afin de préserver la santé respiratoire des populations, il conviendrait de mettre en place rapidement des messages de santé publique visant à limiter la consommation de charcuterie » explique Zhen Li principale coauteur de ces travaux.

[1] Etude épidémiologique des facteurs génétiques et environnementaux de l’asthme, l’hyperactivité bronchique et l’atopie.

[2] Cette méthode  permet la prise en compte d’un chemin causal sur lequel se trouve un facteur de confusion afin de mesurer l’effet direct un facteur A sur un autre facteur B (cf figure 2 de l’article scientifique)

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