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Virus Ebola : Fiche détaillée de l’essai clinique lancé en Guinée

08 Déc 2014 | Par INSERM (Salle de presse) | International

En Guinée, l’épidémie d’infection par Ebola est toujours en phase active presque un an après son début. Parallèlement aux mesures de surveillance, de contrôle et de prise en charge, l’étude de thérapeutiques innovantes pour réduire la mortalité est indispensable. Parmi les médicaments potentiellement utiles se trouve le favipiravir (T705), un antiviral déjà testé (et bien toléré) chez l’humain adulte contre le virus de la grippe. Celui-ci n’a (pas plus que les autres traitements envisageables) jamais été testé chez l’homme pour traiter la fièvre hémorragique Ebola, mais a démontré son efficacité in vitro et chez la souris.

L’essai clinique pilote porté par l’Inserm vise à tester l’efficacité du favipiravir pour réduire la mortalité chez les personnes infectées par le virus Ebola en Guinée. Il a débuté le 23 décembre à Gueckedou.


        ●  En quoi consiste cet essai clinique ?

L’essai mené par l’Inserm est un essai de phase IIb multicentrique ouvert et non randomisé. Tous les patients recevront la molécule pendant 10 jours. La molécule favipiravir, qui se présente sous la forme d’un comprimé sécable de 200 mg (le comprimé peut être pilé et dissous dans une boisson), sera administrée selon la posologie suivante :
– Adultes : J0 : 2400 mg à H0, 2400 mg à H8 et 1200 mg à H16, puis 1200 mg deux fois par jour pendant 9 jours ;
– Enfants : doses adaptées aux poids.

Le détail de cette posologie a fait l’objet d’une communication dans la revue The Lancet Infectious Diseases.

        ●  A qui s’adresse-t-il ?

Tous les patients entrant dans ces différents centres au moment de l’essai pourront s’ils le souhaitent prendre la molécule favipiravir. L’analyse principale de l’essai portera sur les patients qui prendront le traitement en début de maladie (moins de 48h depuis le début des symptômes), l’hypothèse étant que la molécule est d’autant plus active qu’elle sera administrée précocement. Cependant, toutes les personnes capables d’avaler le médicament se verront proposer le traitement, quelle que soit la durée des signes à leur arrivée.

Avant leur inclusion dans l’essai, chacun des participants donnera son consentement. Celui-ci traduira le fait qu’ils ont bien compris cette démarche clinique. L’explication préalable à ce consentement sera délivrée dans la langue appropriée, par des professionnels du conseil psycho-social.

Puisque les symptômes sont peu spécifiques (fièvres, diarrhée, vomissement), les chercheurs réaliseront une PCR (test s’appuyant sur une méthode d’amplification génique) qui devra être positive à Ebola virus avant que le traitement soit proposé.

Pour que les résultats soient interprétables, les chercheurs devront inclure 60 personnes avec ces critères, ce qui pourrait conduire à traiter en tout plusieurs centaines de personnes toutes durées de symptômes confondues. Des analyses intermédiaires seront faites tous les 20 patients traités pour « sonder » la sécurité et l’efficacité du traitement et décider de la pertinence de la poursuite de l’essai à l’identique ou avec des adaptations.

        ●  Où cet essai aura-t-il lieu ?


L’essai aura lieu dans trois Centres de Traitement du virus Ebola (CTE) en Guinée :
Gueckedou (géré par MSF),
Macenta (géré par la Croix Rouge Française),
Nzéréckoré (géré par l’association Alima).

        ●  L’équipe

L’équipe menant l’essai clinique est basée à Guekedou au sein du centre de soin Ebola mis en place par Médecins Sans Frontières (MSF). Elle devrait comprendre une 30aines de personnes au total dont des chercheurs, des personnels soignants et des anthropologues. La coordination sera assurée par des chercheurs français de l’Inserm, et des chercheurs guinéens du Centre de Formation et de Recherche en Santé Rurale, sous l’autorité de la Coordination Nationale de riposte à Ebola en Guinée.

Les relations avec la communauté seront une préoccupation centrale des chercheurs, dans un contexte épidémique fort et de crise sanitaire majeure, auquel s’ajoute un climat de méfiance légitime des populations envers les interventions venues de l’extérieur. Un comité de suivi communautaire de l’essai sera mis en place avant le démarrage de l’étude.

Investigateur coordonnateur : Pr Denis Malvy et Dr Sakoba Keita
Responsables scientifiques : Dr Xavier Anglaret et Pr France Mentré

        ●  Calendrier prévisionnel

Période d’inclusion prévue du 15 décembre 2014 au 15 mars 2015.
Durée de la participation de chaque participant : 30 jours
Durée totale prévue du protocole : 4 mois
Durée totale de la recherche : 8 mois
Les 1ers résultats seront communiqués au mieux en mars 2015.

        ●  Financements

La commission européenne finance cet essai à hauteur de 700 k€ d’euros.

Questions fréquentes :

Pourquoi ne pas administrer la molécule vs un placebo ?
Pour une maladie à très fort risque de mortalité, le signal qu’un traitement est efficace peut être jugé convainquant sur la constatation d’une mortalité plus faible qu’attendue, sans avoir besoin de recourir à un essai comparatif contre placebo. Les principes du plan expérimental de cet essai sont ceux retenus pour tous les autres essais qui se mettent en place.

Peut-il y avoir des effets secondaires au traitement et comment les surveiller ?
Le favipiravir a été bien toléré dans les essais contre la grippe. La dose utilisée contre Ebola étant plus élevée, les effets secondaires seront cependant particulièrement surveillés, même si on ne s’attend à priori pas à des problèmes de toxicité.

Et si les résultats n’étaient pas probants ?
En fonction des 1ers résultats intermédiaires, l’essai pourra être interrompu pour passer à une autre molécule, poursuivi seul, ou associé à d’autres antiviraux ou d’autres interventions.

Quels sont les termes du contrat avec la firme japonaise qui commercialise le favipiravir ?
Les termes de ce contrat sont confidentiels, mais la filiale privée de l’Inserm Inserm-transfert est garante des intérêts de l’Inserm et des populations.

Quelles sont les questions éthiques soulevées par cet essai ?
Cet essai est réalisé dans des conditions particulièrement difficiles, mais le souci de l’éthique impose de se confronter à ces conditions pour avancer, plutôt que de ne rien faire. Les populations victimes d’Ebola ont le droit comme toute population de ce que des pistes thérapeutiques prometteuses soient explorées avec des méthodes rigoureuses.

 

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