L’épidémie d’Ebola continue de s’étendre en Afrique de l’Ouest. En mars 2014, la Guinée notifiait ses premiers cas de maladies à virus Ebola à l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Celui-ci s’est depuis répandu au-delà des frontières, au Liberia, en Sierra Leone, au Nigeria et au Sénégal.
Selon le dernier bilan de l’OMS (version anglaise), daté du 18 septembre, 5 762 cas d’Ebola ont été recensés et 2 793 personnes en sont décédées.
Qu’est-ce que le virus Ebola ?
Le virus Ebola est un virus mortel très contagieux. Après 2 à 21 jours d’incubation, la maladie se manifeste par des symptômes non spécifiques (fièvre, fatigue, douleurs musculaires et articulaires) avant d’évoluer vers une phase caractérisée par des signes gastro-intestinaux à type de diarrhées sanglantes, vomissements, des signes respiratoires et parfois neurologiques. Dans 40 à 80% des cas, l’évolution est fatale.
Des chercheurs de l’Inserm (du Laboratoire P4 de Lyon), de l’Institut Pasteur et du Centre International de recherche en infectiologie (CIRI) ont révélé, dans un article paru en avril dernier dans The New England Journal of Medicine, à partir d’échantillons originaires de Guinée, que le virus se propageant actuellement en Afrique de l’Ouest est en fait une variante du virus Ebola identifiée en République du Congo et au Gabon. En effet, l’analyse n’a montré que 97% de similitudes avec les souches prélevées dans ces deux pays. Les 3% restants démontrent donc qu’il s’agit d’une nouvelle « forme » du virus Ebola en Guinée.
Comment s’organise la recherche sur le virus Ebola à l’Inserm ?
- Le Centre international de recherche en infectiologie (CIRI)
Le CIRI (Unité mixte créée à l’initiative de l’Inserm, du CNRS, de l’ENS de Lyon et de l’Université Claude Bernard Lyon 1 en janvier 2013) regroupe une vingtaine d’équipes scientifiques ayant pour objectif commun une meilleure compréhension et un meilleur contrôle des maladies infectieuses, comme le virus Ebola. Il représente une force très importante de recherche fondamentale, diagnostique et thérapeutique dans plusieurs domaines (notamment en virologie, en bactériologie ou en immunologie).
En France, le CIRI est le seul centre de recherche impliqué dans l’étude de ce type de virus à fièvre hémorragique. Quatre de ses équipes travaillent actuellement sur ce dernier au laboratoire P4 Inserm-Jean Mérieux ( il s’agit des équipes “Unité de biologie des infections virales émergentes”, “Bases moléculaires de la pathogénicité virale”, “Virus enveloppés, vecteurs et réponse innée” et “Biologie cellulaire des infections virales”)
Centre international de recherche en infectiologie (Unité Inserm 1111) ©Inserm/Guénet, François
L’équipe de Vincent Lotteau (“Biologie cellulaire des infections virales”), directeur de recherche Inserm, s’est vu par exemple récemment confier un projet de recherche sur le virus Ebola. Ses travaux consistent plus généralement à identifier les fonctions cellulaires manipulées par les virus pour se répliquer.
L’équipe de Vincent Lotteau a notamment créé, au sein du centre d’infectiologie de Lyonbiopôle, une plateforme de biologie systémique unique. Dotée d’une connaissance approfondie de la manière dont les virus perturbent les fonctions cellulaires, celle-ci permet d’étudier les réseaux d’interaction protéique et d’identifier de nouvelles cibles et molécules thérapeutiques. Cette année, Vincent Lotteau et ses collègues ont créé la start-up Enyo Pharma afin d’effectuer les premières preuves de concept de cette approche sur les virus de grippe et de l’hépatite B.
A l’initiative de l’Institut de Microbiologies et de Maladies Infectieuses (IMMI), l’équipe de Vincent Lotteau et Enyo Pharma travaillent actuellement à l’identification de médicaments qui bénéficient déjà d’une autorisation de mise sur le marché et qui pourraient être repositionnés dans une indication thérapeutique contre Ebola. Une fois ces molécules identifiées, elles seront testées in vitro et in vivo au laboratoire P4 Inserm-Jean Mérieux.
- Le Laboratoire P4 Jean Mérieux-Inserm
Le laboratoire P4 Jean Mérieux-Inserm est un laboratoire de haut confinement dédié à l’étude des agents pathogènes de classe 4. Le niveau de sécurité biologique qui y est appliqué est de 4, niveau le plus élevé. Les chercheurs y travaillent équipés d’un scaphandre maintenu en surpression pour les protéger de toute contamination. Le laboratoire est lui-même maintenu en dépression afin de protéger l’environnement. De plus, tous les déchets produits sont totalement inactivés et l’air extrait est purifié par un système de double filtration absolue. Ce laboratoire est encore aujourd’hui la structure de ce niveau de confinement offrant la plus grande capacité d’expérimentation en Europe.
Laboratoire P4 Mérieux-Inserm ©Inserm/Guénet, François
Des agents hautement pathogènes : les agents pathogènes de classe 4 (ou de groupe de risque 4) sont des microorganismes hautement pathogènes caractérisés par un taux de mortalité très élevé, l’absence d’outils prophylactiques ou thérapeutiques pour s’en protéger et leur facilité de transmission. Les agents pathogènes de classe 4 connus à ce jour sont tous des virus responsables notamment de fièvres hémorragiques ou d’encéphalites. On compte parmi eux les virus Ebola, Marburg, Lassa, Junin, Machupo, Guanarito, Sabia, Crimée-Congo, Nipah et Hendra.
Le laboratoire P4 Jean-Mérieux est le partenaire français du projet européen « EMP4 », coordonné par des chercheurs allemands. Dans ce cadre, un laboratoire P4 mobile a été déployé en Guinée pour apporter sur le terrain une aide à la réalisation du diagnostic des cas d’Ebola. Six spécialistes des maladies infectieuses dangereuses du projet de laboratoire mobile européen (EMLab) sont arrivés à Guéckédou en avril dernier, relayés fin juillet dernier par sept nouveaux experts.
L’unité de laboratoire mobile installée sur place met à disposition du matériel facilement transportable afin de permettre une manipulation sécurisée du virus enfermé dans des boîtes. Ceci améliore considérablement la quantité d’échantillons disponibles pour analyse et favorise la confirmation des cas d’Ebola, contribuant ainsi à réduire le nombre de cas non-diagnostiqués et à empêcher la propagation de la maladie.
- L’Alliance pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan)
A l’échelle nationale, l’Alliance pour les sciences de la vie et de la santé, dont l’Inserm est membre fondateur, mobilise ses experts, lors de points réguliers, afin de définir les besoins et d’envisager des pistes de recherche pour face aux épidémies futures.
Des traitements contre Ebola sont-ils disponibles ?
Les recherches sur le virus Ebola doivent en priorité permettre d’améliorer la prise en charge thérapeutique des malades, qu’il s’agisse de traitements limitant la réplication du virus ou renforçant la protection de l’hôte. C’est un besoin majeur car en dehors d’un traitement symptomatique (permettant de soulager la douleur mais non de traiter sa cause), il n’y a à ce jour aucun traitement efficace et aucune molécule n’a été testée en situation d’épidémie. L’enjeu est donc de développer des antiviraux contre Ebola.
Il existe plusieurs vaccins et traitements expérimentaux contre le virus ayant donné des résultats prometteurs en laboratoire. Plusieurs vaccins candidats ont en effet montré une certaine efficacité lorsqu’ils sont administrés très tôt après l’infection mais aucun dans un délai de plus de deux jours après l’infection. Récemment, une étude publiée par des équipes allemandes, a montré sur un modèle souris que l’administration per os d’un dérivé de la pyrazinecarboxamide (T-705) six jours après le début de l’infection avait un effet de 100% sur la survie des animaux.
En France, des recherches sont notamment menées sur d’autres molécules antivirales ainsi que sur l’utilisation d’anticorps polyclonaux.
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