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Communiqués et dossiers de presse

Covid-19 : quel impact de l’infection au SARS-CoV-2 sur l’irrigation vasculaire du cerveau ?

21 Oct 2021 | Par INSERM (Salle de presse) | Covid-19 | Neurosciences, sciences cognitives, neurologie, psychiatrie

tissu cérébral humain post-mortem

Image fluorescente d’un tissu cérébral humain post-mortem montrant des noyaux cellulaires (bleu) mettant en évidence un vaisseau sanguin dans lequel les cellules endothéliales vasculaires expriment le matériel génétique du SARS-CoV2 (rouge). © Vincent Prévot/Inserm

 

De nombreux chercheurs et chercheuses sont actuellement mobilisés pour accroître les connaissances relatives au virus du SARS-CoV2, pour une meilleure prise en charge des patients infectés, mais également pour essayer de prévoir les conséquences futures d’une infection sur la santé.  Dans le cadre d’une collaboration internationale, des chercheurs de l’Inserm, de l’Université, du CHU et de l’Institut Pasteur de Lille, au sein du laboratoire « Lille neuroscience & cognition », et des collègues du CNRS[1], identifient pour la première fois un effet direct du SARS-CoV-2 sur les vaisseaux sanguins du cerveau. Certaines cellules, les cellules endothéliales vasculaires cérébrales, composantes essentielles de la barrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau sont affectées par un phénomène de mort cellulaire. Ces résultats, qui font l’objet d’une publication dans la revue Nature Neuroscience, interrogent notamment sur les conséquences à long terme de la maladie.

Les vaisseaux sanguins sont composés de cellules endothéliales. Parmi elles, les cellules endothéliales vasculaires du cerveau qui composent la barrière hémato-encéphalique (BHE). La fonction principale de la BHE est d’isoler le système nerveux central de la circulation sanguine, empêchant ainsi que des substances étrangères ou molécules potentiellement toxiques ne pénètrent dans le cerveau et la moelle épinière, tout en permettant le transfert de nutriments essentiels à leur activité. Participant à cet effort, les cellules endothéliales vasculaires du cerveau jouent donc un rôle primordial dans la bonne irrigation sanguine du cerveau et leur survie est essentielle à son bon fonctionnement.

Dans le cadre d’une collaboration internationale financée par le Conseil Européen de la Recherche[3], les auteurs de l’étude se sont intéressés aux cellules endothéliales vasculaires du cerveau et aux conséquences d’une infection par le SARS-CoV-2 sur leur fonctionnement.

Grâce à des modèles d’étude précliniques mais également en étudiant le cortex de patients décédés des suites d’une infection au SARS-CoV-2, les chercheurs montrent que l’infection entrainerait la mort des cellules endothéliales du cerveau, ce qui donnerait lieu à l’apparition de « vaisseaux fantômes » dans le cerveau (c’est à dire des tubes vides, sans cellules endothéliales).

En conséquence, ces cellules essentielles ne pourraient plus assurer leur fonction au niveau de la barrière hémato-encéphalique.

Comment cette mort des cellules endothéliales survient-elle ? Quels sont les mécanismes impliqués ? Grâce à des techniques de pointes[2], l’équipe a découvert que le SARS-CoV-2 fait fabriquer, à partir de son propre matériel génétique, des ciseaux moléculaires par les cellules endothéliales qu’il infecte. Ces ciseaux vont couper une protéine appelée NEMO, indispensable à la survie des cellules endothéliales qui vont donc mourir.

 

Les conséquences de la mort des cellules endothéliales sur le fonctionnement du cerveau

Selon les scientifiques, la mort des cellules endothéliales vasculaires du cerveau peut entrainer deux conséquences majeures :

  • Une rupture temporaire de la barrière hémato-encéphalique provoquant des microhémorragies dans des régions où le sang n’est pas censé accéder librement.
  • Une hypoperfusion de certaines régions du cerveau (due à la présence de vaisseaux fantômes non fonctionnels), c’est-à-dire une diminution du débit sanguin pouvant entrainer le décès des patients dans les cas les plus graves.

L’étude révèle toutefois que la situation serait réversible.

Par ailleurs, les scientifiques s’interrogent sur les conséquences à long-terme de cette phase de vulnérabilité au cours de laquelle le cerveau des patients est moins irrigué. Selon eux, même si cette hypothèse reste encore à vérifier, cette fenêtre de temps pourrait prédisposer certaines personnes ayant contracté la maladie à développer des troubles cognitifs, neurodégénératifs, voire des démences.

« Cette prise de conscience de la gravité de l’infection par le SARS-CoV2 et ses conséquences pour le bon fonctionnement de notre cerveau est capitale pour permettre la meilleure prise en charge possible des patients ayant été infectés dans les années à venir », conclut Vincent Prévot, directeur de recherche à l’Inserm.

 

[1] Au sein du Centre d’infection et d’immunité de Lille (CNRS/Inserm/Institut Pasteur de Lille/Université de Lille/CHU de Lille)

[2] Telles que la transgénèse, le séquençage de l’ARN en cellule unique, la spectrométrie de masse et la microscopie à super-résolution.

[3] Programme financé par le Conseil Européen de la Recherche (ERC Synergy) impliquant les Drs. Prévot (Inserm, France), Nogueiras (Université de Saint-Jacques de Compostelle, Espagne) et Schwaninger (Université de Lübeck, Allemagne).

Contacts
Contact Chercheur

Vincent Prévot

Directeur de Recherche Inserm

Responsable de l’équipe « Développement et plasticité du cerveau neuroendocrine »

Unité U1172 – Lille Neuroscience & Cognition – Lille 

E-mail : rf.mresni@toverp.tnecniv

Téléphone sur demande

Contact Presse

rf.mresni@esserp

Sources

The SARS-CoV-2 main protease Mpro causes microvascular brain pathology by cleaving NEMO in brain endothelial cells

 

Jan Wenzel1,2*, Josephine Lampe1,2*, Helge Müller-Fielitz1 *, Raphael Schuster1 , Marietta Zille1,2, Kristin Müller1 , Markus Krohn1,2, Jakob Körbelin3 , Linlin Zhang4,5, Ümit Özorhan1,2, Vanessa Neve1, Julian U. G. Wagner2,6, Denisa Bojkova7 , Mariana Shumliakivska6 , Yun Jiang1 , Anke Fähnrich8,9, Fabian Ott8,9, Valentin Sencio10, Cyril Robil10, Susanne Pfefferle11, Florent Sauve12, Caio Fernando Ferreira Coêlho12, Jonas Franz13,14,15, Frauke Spiecker1 , Beate Lembrich1 , Sonja Binder1 , Nina Feller1,2, Peter König16,17, Hauke Busch8,9, Ludovic Collin18, Roberto Villaseñor18, Olaf Jöhren1, Hermann C. Altmeppen19, Manolis Pasparakis20, Stefanie Dimmeler2,6, Jindrich Cinatl7 , Klaus Püschel21, Matija Zelic22, Dimitry Ofengeim22, Christine Stadelmann13, François Trottein10, Ruben Nogueiras23, Rolf Hilgenfeld4,5, Markus Glatzel19, Vincent Prevot12, Markus Schwaninger1,2

Nature Neuroscience, octobre 2021

https://www.nature.com/articles/s41593-021-00926-1

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