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Cancers de l’ovaire : Découverte d’une double signature prédictive de l’agressivité tumorale et de la réponse au traitement

Dans les cancers de l’ovaire, l’équipe de Fatima Mechta-Grigoriou vient de découvrir deux signatures moléculaires exclusives ayant une valeur pronostique. La signature de « stress oxydant » permet d’identifier des tumeurs, certes agressives, mais plus sensibles au traitement. La signature de type « fibrose » caractérise les tumeurs à fort risque de dissémination tumorale. La signature « stress oxydant » est donc de meilleur pronostic que la signature « fibrose ». Cette découverte publiée online dans Nature Medicine du 20 novembre 2011 devrait faire évoluer le pronostic et la prise en charge des cancers de l’ovaire.

La contrepartie de la respiration est la production de dérivés de l’oxygène qui peuvent agresser la cellule. C’est le stress oxydant. Le plus souvent, la cellule élimine ce stress. Toutefois lorsque les cellules sont débordées ou qu’elles ne disposent pas de ressources anti-oxydantes suffisantes, le stress oxydatif provoque des altérations, favorisant le développement des cancers.

Ces mécanismes sont au cœur des recherches de l’équipe « stress et cancer », dirigée à l’Institut Curie par Fatima Mechta-Grigoriou, directrice de recherche Inserm. Elle vient de mettre en évidence, dans les cancers de l’ovaire, deux signatures moléculaires, qui permettent d’émettre un pronostique sur l’évolution de la maladie. En effet, les tumeurs de l’ovaire présentent soit une signature « stress oxydant » soit une signature « fibrose ». La fibrose est le résultat d’une modification de certaines propriétés des cellules cancéreuses, augmentant leur capacité à migrer.

Adapter le traitement selon la signature moléculaire identifiée chez la patiente

Dans les modèles animaux étudiés, l’existence de la signature « stress oxydant » accélère la croissance tumorale. Le stress oxydant est donc bien un accélérateur du développement des cancers de l’ovaire. Néanmoins, il améliore aussi la réponse au traitement. Ainsi, si des cellules tumorales souffrant d’un stress oxydant se multiplient très vite, elles meurent aussi plus facilement des suites du traitement. Au contraire, la signature « fibrose », favorise la migration des cellules tumorales, et est donc propice à la dissémination métastatique. La signature « stress oxydant » est donc de meilleure pronostique que la signature « fibrose ».

« Quoique hautement prolifératives, les tumeurs présentant la signature « stress oxydant » sont plus sensibles à certaines chimiothérapies, notamment le paclitaxel (taxol®) et ses dérivés. » précise Fatima Mechta-Grigoriou. Les chercheurs observent alors une diminution de la taille de la tumeur et une augmentation de la mort des cellules tumorales.

En collaboration avec les médecins de l’Institut Curie, le Dr Xavier Sastre-Garau, pathologiste, et le Dr Paul Cottu, oncologue, un test permettant d’identifier facilement si chaque nouvelle patiente atteinte d’un cancer de l’ovaire est porteuse d’une tumeur de type « stress oxydant » ou « fibrose » est envisagé pour pouvoir adapter la prise en charge thérapeutique.

Le point de vue de Fatima Mechta-Grigoriou

La cancérogénèse, un ensemble de paradoxes

F.-Mechta-Grigoriou

© Pedro Lombardi/Institut Curie

« Ces travaux sont une nouvelle preuve du fait que la cancérologie n’est pas une discipline manichéenne. Tout n’est pas blanc ou noir, il y a de nombreux paradoxes au cours du développement d’un cancer. Pour citer d’autres exemples de cette dualité, prenons la tumeur. Cet amas de cellules tumorales n’est pas un tout homogène. Il est constitué de cellules tumorales et de différents types de cellules saines. Or ces cellules, bien que saines, vont jouer un rôle actif dans le développement tumoral. Parmi ces cellules saines, les fibroblastes servent ainsi souvent de locomotives aux cellules tumorales : ils peuvent les tracter hors du foyer tumoral initial et les aider à franchir le premier pas vers la dissémination tumorale et les métastases.
Les cellules tumorales vont aussi « détourner » les cellules immunitaires de leur fonction initiale. Venues détruire les cellules tumorales, les cellules immunitaires vont finir paradoxalement par contribuer à leur développement. Ces paradoxes expliquent toutes les difficultés inhérentes à la compréhension de la cancérogénèse et à la découverte de solutions thérapeutiques adaptées. »

Pour en savoir plus sur le cancer de l’ovaire
– Le cancer de l’ovaire touche 4 600 femmes chaque année en France.
– Du fait de la situation anatomique des ovaires, une tumeur ovarienne peut atteindre un volume important avant de provoquer des symptômes incitant à consulter, ce qui explique que ce cancer est souvent diagnostiqué à un stade avancé.
– Le traitement repose sur une combinaison principalement de chirurgie et de chimiothérapie. Le choix entre les différentes options thérapeutiques est fonction de la morphologie des cellules tumorales, de leur taux de prolifération, de l’extension de la maladie… et l’analyse des altérations génétiques (signature moléculaire) pourraient bientôt participer à cette décision.

Prix Inserm 2011 : La persévérance à l’honneur

Pour la douzième année consécutive, la cérémonie des Prix de l’Inserm récompensera, le 6 décembre prochain au Collège de France, sept chercheurs et ingénieurs de recherche. Zoom sur les lauréats du Grand Prix, du Prix international et du Prix d’honneur.

Alain Prochiantz, Grand Prix : Un chercheur intuitif et acharné

Copyright Inserm, P.Latron - Alain Prochiantz, Grand Prix Inserm 2011

© Inserm, P.Latron – Alain Prochiantz, Grand Prix Inserm 2011

Le lauréat de la plus haute distinction décernée par l’Inserm est un authentique érudit. Titulaire de la chaire « Processus morphogénétiques » du Collège de France, le neurobiologiste Alain Prochiantz a en effet toujours nourri ses réflexions et ses recherches de la lecture des auteurs classiques de la biologie, de celle aussi de nombreux philosophes et écrivains. L’écriture, en particulier de pièces de théâtre avec le metteur en scène Jean-François Peyret, est aussi pour lui une véritable source d’inspiration (cf. encadré).

En 1991, alors directeur de recherche au CNRS, il émet l’hypothèse que la forme des neurones du cerveau est régulée génétiquement par l’action d’ « homéoprotéines » (1) ces mêmes protéines qui déterminent l’ensemble du plan d’organisation d’un être vivant. Une expérience révèle alors des résultats inattendus : ces protéines sont capables de migrer d’une cellule vers une autre qui traduit alors directement cette information en décisions touchant sa physiologie ou son développement. Il faudra quinze ans à Alain Prochiantz pour démontrer in vivo la réalité de cette voie de signalisation inédite. Des recherches qui ont des conséquences en physiopathologie et sont à l’origine du fructueux champ pharmaceutique des vecteurs peptidiques, sortes de véhicules facilitant le transport d’agents thérapeutiques à l’intérieur des cellules.

Alain Prochiantz, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, membre de l’Académie des sciences depuis 2003, étudie désormais les fonctions de ces homéoprotéines et de leur transfert : guidage axonal, régionalisation du système nerveux, plasticité du cortex cérébral, protection contre la dégénérescence neuronale ou étiologie des maladies neurologiques et psychiatriques.
Tenace et toujours exigeant, Alain Prochiantz est l’homme des chemins inexplorés.

Un spectacle de Jean François Peyret et Alain Prochiantz

« Ex vivo/In vitro » : du 17 novembre au 17 décembre au théâtre de la Colline.
Qu’est-ce qu’engendrer, être engendré, d’où viennent les enfants ? Les nouvelles méthodes de procréation relancent les questions qui n’ont jamais lâché l’humanité. Après /Tournant autour de Galilée/ et /Les Variations Darwin,/ Jean-François Peyret et Alain Prochiantz continuent de croiser avec ludisme et humour l’imaginaire du théâtre et celui de la science, et reprennent la question « naître ou ne pas naître », là où ils l’avaient laissée.
Extrait du site http://www.colline.fr/fr/spectacle/ex-vivo-vitro

Susan Gasser, Prix International : Le goût de l’abstraction

Inserm, P. Latron - Susan Gasser, Prix International Inserm 2011

© Inserm, P. Latron – Susan Gasser, Prix International Inserm 2011

Originaire d’une petite ville des Etats-Unis, Susan Gasser est convaincue qu’il faut traduire le monde en langue mathématique. La biologiste décrypte les mouvements intracellulaires à partir d’outils statistiques et informatiques innovants. En 2001, son équipe parvient à filmer par microscopie à haute résolution le mouvement des gènes dans le noyau d’une cellule de levure. Une première ! Ces résultats et l’étude du lien entre les lésions et les erreurs de positionnement chromosomique aident à mieux comprendre le vieillissement et le cancer.

Susan Gasser est très attachée à l’Europe et à la France, qu’elle a découverte étudiante lors d’un séjour décisif près de Nice : c’est là qu’elle a décidé de devenir biologiste. Après un doctorat à l’Université de Chicago, elle suit, en 1979, son futur mari en Suisse. Elle y mène une impressionnante carrière : directrice d’un laboratoire de biologie à l’Institut suisse de recherche expérimentale sur le cancer (ISREC), professeur à l’Université de Genève, puis, en 2004, directrice du prestigieux Institut Friedrich Miescher de Bâle. Ses recherches actuelles portent principalement sur la dynamique de réparation de l’ADN et sur les processus épigénétiques (2) impliqués dans la différenciation cellulaire.

Ethel Moustacchi, Prix d’honneur : Une aventurière engagée

Copyright Inserm, P. Latron - Ethel Moustacchi, Prix d’honneur Inserm 2011

© Inserm, P. Latron – Ethel Moustacchi, Prix d’honneur Inserm 2011

Jusqu’en 1985, Ethel Moustacchi analyse, sur des levures, les mécanismes biologiques de lésion et de réparation de l’ADN. Elle s’intéresse aux cellules humaines en culture. Elle fait ainsi des découvertes majeures sur les facteurs génotoxicologiques qui prédisposent au cancer. Elle consacre plus de dix ans à l’anémie de Fanconi (3) et lance l’alerte qui permettra de réduire fortement l’usage des psoralènes – des génotoxiques – en dermatologie et dans les crèmes à bronzer. Aujourd’hui conseillère scientifique pour le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, elle milite pour le développement de la recherche sur les effets sanitaires des faibles doses de rayonnements ionisants sur les travailleurs du nucléaire et les professionnels de santé.

Quatre autres chercheurs et ingénieurs de recherche ont été honorés : Pierre Léopold (4) (Prix Recherche) pour ses travaux fondamentaux sur le système drosophile ; Geneviève de Saint Basile (5) (Prix Recherche), dont les découvertes sur le système immunitaire relient recherche clinique et fondamentale ; Frédéric Fiore (6) (Prix Innovation), responsable technique d’une plate-forme originale de création de souris OGM ; Claude Delpuech (7) (Prix Innovation), qui conduit le département de magnétoencéphalographie du CERMEP (8) à Lyon.

Notes :
(1) Homéoprotéines : facteurs de transcription qui régulent l’expression de gènes impliqués dans la morphogenèse.
(2) Processus épigénétiques : processus par lesquels l’environnement et l’histoire individuelle influent sur l’expression des gènes.
(3) Anémie de Fanconi : maladie génétique rare touchant la moelle osseuse qui ne parvient plus à produire suffisamment de cellules sanguines.
(4) UMR6543 Institut de signalisation, biologie du développement et cancer, Université Nice Sophia-Antipolis
(5) Unité 768 Inserm/Paris 5, Développement normal et pathologique du système immunitaire, hôpital Necker-Enfants malades
(6) Unité 631 Inserm/Aix-Marseille 2, Plateforme KO-KI Booster, Centre immunologique Marseille-Luminy (CIML)
(7) Unité 1028 Inserm/Lyon 1-Claude-Bernard, Centre de recherche en neurosciences de Lyon
(8) Centre d’étude et de recherche multimodal et pluridisciplinaire en imagerie du vivant

Signature d’un accord-cadre entre les membres fondateurs de l’AIRD

Le Cirad, le CNRS, la CPU, l’Inserm, l’Institut Pasteur et l’IRD, membres fondateurs de l’Agence inter-établissements de recherche pour le développement (AIRD), ont signé, le 10 novembre 2011, un accord-cadre de coopération. Ils pérennisent et renforcent ainsi leur engagement en faveur de la recherche pour le développement.

Renforcer l’engagement par un accord-cadre

Ayant fait preuve de leur motivation sur la nécessité d’agir collectivement sur les questions de recherche pour le développement, les six membres fondateurs de l’AIRD ont souhaité pérenniser et renforcer leur engagement en concluant un accord-cadre, pour une durée de trois ans. Ce dernier a ainsi été signé le 10 novembre 2011, par Gérard Matheron, Président du Cirad, Alain Fuchs, Président du CNRS, Louis Vogel, Président de la CPU, André Syrota, Président Directeur général de l’Inserm, Alice Dautry, Directrice générale de l’Institut Pasteur et Michel Laurent, Président de l’IRD. Regroupés au sein d’un Comité de coordination, les partenaires contribueront à la réflexion stratégique de l’agence, à la programmation des activités et à la mutualisation des moyens (humains, financiers, infrastructures scientifiques, expertise…).

Une agence d’objectifs, de programmes et de moyens

Créée en 2006, l’AIRD compte six membres fondateurs : le Cirad, le CNRS, la CPU, l’Inserm, l’Institut Pasteur et l’IRD. Désormais intégrée au sein de l’IRD (décret n°2010-594 du 3 juin 2010), elle a vocation à mobiliser, animer et coordonner les organismes et établissements de recherche et d’enseignement supérieur français sur toute question de science pour le développement, afin de co-construire une société de la connaissance au sud.

Ses champs d’action sont :

  • la recherche, pour faire avancer les connaissances et obtenir un réel impact au sud
  • la formation et le renforcement des capacités scientifiques
  • l’innovation, pour assurer la meilleure valorisation culturelle, économique et sociétale des résultats de recherche au Sud, la meilleure coordination de la recherche et la mise en place de moyens mutualisés


Agence d’objectifs
, l’AIRD recueille les problématiques et attentes du sud tant à partir de ses réseaux au sud qu’en s’appuyant sur son Conseil d’orientation, composé à parité Nord-Sud. Elle utilise ces attentes pour générer des programmes « Sud » dans les feuilles de route programmatiques françaises, voire européennes, des organismes de recherche et des agences de financement de la recherche.

Agence de programmes, l’AIRD apporte un soutien à l’ingénierie des grands programmes de recherche réalisés en partenariat Nord-Sud, en particulier en contribuant à assurer le tour de table financier. Elle a vocation à porter les grands programmes de recherche régionaux, multi-organismes et multithématiques, tels la Grande Muraille Verte (Afrique), Guyamaz (Brésil) ou la gestion des centres de recherche et de veille en matière de santé. Elle agit pour réaliser des programmes ou remplir des missions pour le compte de ses deux ministères de tutelles (recherche et affaires étrangères), telle la coordination des actions des organismes français de recherche pour l’aide à la reconstruction du système de recherche en Haïti. Elle procède en coordonnant des projets ou programmes et en gérant des appels d’offre.

Agence de moyens, l’AIRD dispose de la capacité à mobiliser les forces scientifiques françaises, en premier lieu celles de ses membres fondateurs, dont les équipes actives au Sud regroupent de l’ordre de 7000 personnes. Elle s’appuie aussi sur les implantations au sud de ses membres fondateurs, laboratoires, observatoires, stations satellitaires, centres de documentation… Elle dispose de représentants institutionnels installés dans les pays du Sud, au plus près des partenaires et à l’écoute de leurs besoins, qui :

  • assurent la liaison entre les acteurs locaux de la science, organismes ou ministères, et l’AIRD
  • apportent un soutien aux travaux réalisés par l’AIRD et ses membres ;
  • contribuent à faire remonter les problématiques et attentes du sud ;
  • suivent les axes et programmes du partenariat ;
  • sont garants de l’application régionale de la politique de l’AIRD et de la mise en œuvre des programmes en partenariat.


Le Cirad

Le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement est le centre de recherche français qui répond, avec les pays du Sud, aux enjeux internationaux de l’agriculture et du développement. Il produit et transmet, en partenariat avec ces pays, de nouvelles connaissances, pour accompagner le développement agricole et contribuer au débat sur les grands enjeux mondiaux de l’agronomie. Le Cirad concentre ses recherches autour de 6 axes scientifiques prioritaires, partagés et développés dans de nombreux dispositifs de recherche à travers le monde, qui s’adossent à 12 directions régionales. Le Cirad emploie 1 800 agents, dont 800 ingénieurs chercheurs. Son budget s’élève à 214 millions d’euros dont les deux tiers proviennent de l’Etat français. www.cirad.fr

Le CNRS
Le Centre national de la recherche scientifique est un organisme public de recherche (Etablissement public à caractère scientifique et technologique, placé sous la tutelle du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche). Il produit du savoir et met ce savoir au service de la société. Avec plus de 34 000 personnes (dont 25 630 statutaires – 11 450 chercheurs et 14 180 ingénieurs, techniciens et administratifs), un budget primitif pour 2011 de 3,204 milliards d’euros dont 677 millions d’euros de ressources propres, une implantation sur l’ensemble du territoire national, le CNRS exerce son activité dans tous les champs de la connaissance, en s’appuyant sur plus de 1100 unités de recherche et de service. Des chercheurs éminents ont travaillé, à un moment ou à un autre de leur carrière, dans des laboratoires du CNRS. Avec 17 lauréats du prix Nobel et 11 de la Médaille Fields, le CNRS a une longue tradition d’excellence. www.cnrs.fr/

La CPU
Définie dans le code de l’Education, la Conférence des présidents d’université (CPU) rassemble les dirigeants des universités, des instituts nationaux polytechniques, des écoles normales supérieures, de grands établissements, et des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). Depuis 40 ans, elle représente et défend les intérêts des établissements qu’elle regroupe. Véritable acteur du débat public sur toutes les questions universitaires, la CPU est force de proposition et de négociation auprès des pouvoirs publics, des différents réseaux de l’enseignement supérieur et de la recherche, des partenaires économiques et sociaux et des institutions nationales et internationales. Dans un contexte de profondes mutations du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, la CPU a également un rôle de soutien aux présidents dans leurs nouvelles missions et de promotion de l’Université française et de ses valeurs. www.cpu.fr

L’Inserm
Créé en 1964, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) est un établissement public à caractère scientifique et technologique, placé sous la double tutelle du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la Santé. Ses chercheurs ont pour vocation l’étude de toutes les maladies, des plus fréquentes aux plus rares, à travers leurs travaux de recherches biologiques, médicales et en santé des populations. L’Inserm soutient plus de 300 laboratoires répartis sur le territoire français. L’ensemble des équipes regroupe près de 13 000 chercheurs, ingénieurs, techniciens, gestionnaires…Afin de consolider son rôle de premier plan dans la recherche clinique, l’Institut privilégie la mise en place d’infrastructures dédiées à la recherche clinique et la promotion d’essais cliniques toujours plus innovants. L’Inserm est membre fondateur d’Aviesan, l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé. www.inserm.fr

L’Institut Pasteur
Centre de recherche biomédicale de renommée internationale, l’Institut Pasteur créé en 1887 par Louis Pasteur, est une fondation privée reconnue d’utilité publique. Il a pour mission de contribuer à la prévention et à la lutte contre les maladies, en France et dans le monde, par la recherche scientifique et médicale, l’enseignement et des actions de santé publique. Près de 2600 personnes travaillent sur son campus à Paris. Parallèlement à des recherches sur le fonctionnement du vivant, une grande partie de ses travaux est consacrée à l’étude des maladies infectieuses, de maladies génétiques, neuro-dégénératives ou de certains cancers. L’Institut Pasteur est au cœur d’un Réseau international qui regroupe 32 instituts sur les 5 continents. Depuis sa création, 10 chercheurs ont reçu le Prix Nobel de Physiologie ou Médecine. www.pasteur.fr ; www.aiderpasteur.fr

L’IRD
Etablissement public français à caractère scientifique et technologique, l’Institut de Recherche pour le Développement déploie ses activités à l’international depuis son siège, à Marseille, et ses deux centres métropolitains de Montpellier et de Bondy. Grâce à son action de recherche, de formation et d’innovation en partenariat, il rayonne dans plus d’une cinquantaine de pays en Afrique, sur le pourtour méditerranéen, en Asie, en Amérique latine et en outre-mer. Fondés sur l’interdisciplinarité, les projets menés conjointement traitent de questions cruciales pour les Suds : maladies tropicales et de civilisation, relations entre santé et environnement, changements climatiques, ressources en eau, sécurité alimentaire, écosystèmes tropicaux et méditerranéens, risques naturels, pauvreté, vulnérabilité et inégalités sociales, migrations, évolution du marché du travail…www.ird.fr

Les cellules dendritiques contrôlent la porte d’entrée des lymphocytes dans les ganglions lymphatiques

Les cellules dendritiques, sentinelles du système immunitaire (découvertes en 1973 par Ralph Steinman, Prix Nobel de Médecine 2011), jouent un rôle essentiel dans le mécanisme de fabrication des vaisseaux sanguins HEV, véritables portes d’entrée des lymphocytes dans les ganglions lymphatiques, les tissus enflammés et les tumeurs cancéreuses. C’est ce que viennent de montrer Christine Moussion et Jean-Philippe Girard (1), chercheurs à l’Institut de pharmacologie et de biologie structurale (CNRS/Université Toulouse III – Paul Sabatier). Ces travaux (2) sont publiés en ligne par la revue Nature le 13 novembre 2011. Mieux connaître ces mécanismes pourrait conduire à des applications importantes pour le traitement des maladies inflammatoires chroniques et du cancer.

Afin de lutter contre les infections virales et bactériennes, les lymphocytes, globules blancs circulants dans le sang, s’acheminent vers les ganglions lymphatiques (3). Ils pénètrent dans les ganglions grâce à un type particulier de vaisseaux sanguins, appelés HEV. Ces vaisseaux HEV constituent des portes d’entrée très efficaces puisque l’on estime que dans l’organisme, à chaque seconde au moins 5 millions de lymphocytes entrent dans les ganglions via les vaisseaux HEV.

Depuis plusieurs années, l’équipe de Jean-Philippe Girard, directeur de recherche Inserm, s’efforce de mieux comprendre comment un vaisseau sanguin normal se transforme en vaisseau HEV (et vice versa). En étudiant les cellules présentes au voisinage des vaisseaux HEV, les chercheurs toulousains viennent de mettre en évidence le rôle fondamental des cellules dendritiques dans la fabrication des vaisseaux HEV. Grâce à de longs prolongements, ces cellules de forme étoilée entrent en contact avec les vaisseaux sanguins afin de leur délivrer un signal indispensable à leur transformation en vaisseaux HEV. Sous l’action des cellules dendritiques, les vaisseaux sanguins qui constituaient une barrière infranchissable pour les lymphocytes deviennent alors capables de les faire entrer massivement dans les ganglions lymphatiques. Ce processus est un élément nécessaire à la surveillance immunitaire de l’organisme.

Visualisation en microscopie multiphotonique d’un vaisseau sanguin HEV (en vert) dans un ganglion lymphatique. Les autres vaisseaux sanguins du ganglion sont colorés en rouge. Les vaisseaux HEV permettent l’entrée dans le ganglion des lymphocytes circulant dans le sang.

© Jean-Philippe Girard – IPBS (CNRS/Université de Toulouse) – Visualisation en microscopie multiphotonique d’un vaisseau sanguin HEV (en vert) dans un ganglion lymphatique. Les autres vaisseaux sanguins du ganglion sont colorés en rouge. Les vaisseaux HEV permettent l’entrée dans le ganglion des lymphocytes circulant dans le sang.

En effet, les cellules dendritiques connues comme les sentinelles du système immunitaire, sont chargées de collecter et de présenter les antigènes étrangers provenant de virus, de bactéries ou de cellules cancéreuses, aux lymphocytes T. En contrôlant aussi l’accès des lymphocytes aux ganglions via les vaisseaux HEV, les cellules dendritiques vont permettre la rencontre entre les lymphocytes et les antigènes étrangers contre lesquels ils sont dirigés. Les cellules dendritiques jouent ainsi un nouveau rôle essentiel dans le système immunitaire, rôle insoupçonné jusqu’alors.

Les chercheurs ont également étudié les mécanismes mis en jeu dans le dialogue entre les cellules dendritiques et les vaisseaux HEV. Une meilleure connaissance de ces mécanismes pourrait avoir des applications importantes pour le traitement des maladies inflammatoires chroniques et du cancer.

En effet, des vaisseaux HEV apparaissent dans la plupart des maladies inflammatoires chroniques (polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn, dermatite atopique, psoriasis, asthme, …) et contribuent à l’inflammation du tissu. Bloquer la fabrication des vaisseaux HEV permettrait donc de diminuer l’inflammation. A l’inverse, dans le cancer, les vaisseaux HEV ont un effet bénéfique car ils facilitent l’entrée dans les tumeurs des lymphocytes tueurs.

Mieux comprendre les mécanismes de fabrication des vaisseaux HEV pourrait permettre d’augmenter la quantité de ces vaisseaux dans les tumeurs afin d’améliorer l’éradication des cellules cancéreuses par les cellules tueuses.

Notes
(1) Directeur de recherche Inserm.
(2) Ces travaux ont bénéficié du soutien financier de la Ligue Nationale Contre le Cancer (Equipe Labellisée Ligue 2009), et de l’Association pour la Recherche contre le Cancer (ARC) et de la Fondation RITC (bourses doctorale et post-doctorale).
(3) Les ganglions lymphatiques sont le lieu de prolifération et de différenciation des cellules immunitaires. Les vaisseaux lymphatiques amènent un antigène (souvent issu d’un pathogène), du tissu jusqu’aux ganglions, permettant ainsi d’entraîner une réponse immunitaire spécifique en activant les lymphocytes T et B.

Hépatite alcoolique sévère: une combinaison de deux traitements efficace

Une étude multicentrique française coordonnée par le service d’Hépato-Gastroentérologie du CHU d’Amiens et l’équipe de recherche Inserm 24 « Alcoolisation précoce et vulnérabilité à la dépendance » (Université de Picardie), démontre l’efficacité d’un traitement associant un anti-oxydant et un anti-inflammatoire, chez 174 patients atteints d’hépatite alcoolique sévère. Leurs travaux sont publiés dans la revue The New England Journal of Medicine datée du 10 novembre 2011.

L’hépatite alcoolique aiguë sévère est une des formes les plus graves de la maladie alcoolique du foie, touchant des personnes ayant une consommation excessive et chronique d’alcool, généralement supérieure à 50 grammes d’alcool par jour (5 verres) pendant plus de 3 à 6 mois. La maladie est caractérisée par une défaillance du foie (une insuffisance hépatique) et une jaunisse intense (ictère), pouvant conduire à un coma par défaillance du foie (une encéphalopathie hépatique), puis de 40 à 45% de décès dans les 6 premiers mois. Le traitement de référence associe l’arrêt de la consommation d’alcool (abstinence alcoolique) et de la cortisone (corticothérapie de 1 mois), en raison du caractère très inflammatoire de la maladie. Malgré ce traitement, 30 à 35 % des malades ayant une hépatite alcoolique aiguë sévère meurent encore au terme d’un suivi de 6 mois, car le traitement par la cortisone reste insuffisant.

Le but de l’étude coordonnée par le Professeur Nguyen-Khac (CHU Amiens et Equipe de recherche Inserm) a été d’associer un traitement anti oxydant avec le traitement anti inflammatoire classique, compte tenu du déficit fréquent en capacité anti-oxydante du foie alcoolique déjà documenté, associé à l’inflammation. Les résultats montrent une amélioration de la survie des patients souffrant d’une hépatite alcoolique aiguë sévère et ayant reçu les 2 médicaments, avec significativement moins de décès à 1 mois de traitement par rapport au groupe ayant reçu la cortisone seule. La tolérance du traitement était bonne. Le nouveau médicament (N-acétylcystéine) est une très ancienne molécule, utilisée dans les hépatites dues à certains médicaments tels que le paracétamol, ou comme mucolytique pour fluidifier les sécrétions bronchiques, avec un coût très faible.

Ces résultats améliorent le pronostic vital de l’hépatite alcoolique aiguë sévère.

Effacer les marques de vieillissement des cellules : c’est possible

L’équipe AVENIR Inserm « Plasticité génomique et vieillissement » dirigée par Jean Marc Lemaitre, chargé de recherche Inserm à l’Institut de génomique fonctionnelle (Inserm/CNRS/Université de Montpellier 1 et 2), vient de parvenir à rajeunir des cellules de donneurs âgés, vieilles de plus de 100 ans. Ces cellules âgées, reprogrammées in vitro en cellules souches pluripotentes (iPSC pour « Induced pluripotent stem cells ») ont retrouvé leur jeunesse et les caractéristiques des cellules souches embryonnaires (hESC): elles peuvent se différencier à nouveau en cellules de tous types après une véritable cure de « jouvence ». Ces résultats constituent une avancée significative pour la recherche sur les cellules iPSC et une nouvelle étape vers la médecine régénérative. Les résultats sont publiés dans la revue Genes & Development datée du 1er novembre 2011.


© Inserm/Disc/ F.Koulikoff/F.Launay – Figure 1: Differenciation cellulaire

Les cellules souches embryonnaires humaines (hESC) sont des cellules « à tout faire » qui sont indifférenciées. Par leurs divisions, elles assurent la mise en place de toutes les cellules adultes différenciées de l’organisme (neurones, cellules cardiaques, cellules de peau, cellules du foie…cf. figure 1).

Depuis 2007, quelques équipes de recherche dans le monde sont capables de reprogrammer des cellules adultes humaines en cellules souches pluripotentes (iPSC), qui présentent des caractéristiques et un potentiel similaires aux cellules souches embryonnaires humaines (hESC). Cette reprogrammation (cf. figure 1 ci-contre en rouge), offre la possibilité de reformer tous les types cellulaires de l’organisme en dehors des contraintes éthiques liées à l’utilisation de cellules souches de type embryonnaires. Jusqu’alors, les résultats de recherches publiés montraient que la sénescence, point ultime du vieillissement cellulaire, restait une limite à l’utilisation de cette technique pour des applications thérapeutiques chez des patients âgés.

Aujourd’hui, Jean Marc Lemaitre, chargé de recherche à l’Inserm et son équipe, viennent de franchir cette limite. Les chercheurs sont parvenus à rajeunir des cellules de donneurs âgés, jusqu’à plus de 100 ans, et ont ainsi démontré la réversibilité du processus du vieillissement cellulaire.
Pour ce faire, ils ont utilisé une stratégie adaptée qui consiste à reprogrammer des cellules, grâce à un « cocktail » spécifique de 6 facteurs génétiques tout en effaçant les marques du vieillissement. Les chercheurs ont montré que les cellules souches iPSC obtenues ont alors la capacité de reformer tous les types cellulaires de l’organisme. Elles possèdent des caractéristiques physiologiques de cellules « jeunes », tant du point de vue de leur capacité proliférative que de leur métabolisme cellulaire.

Un cocktail de 6 facteurs génétiques…


© Inserm/Disc/F.Koulikoff/F.Launay – Figure 2 : reprogrammation de cellules sénescentes âgées

Les chercheurs ont d’abord multiplié des cellules de la peau (fibroblastes) d’un donneur de 74 ans pour atteindre la sénescence caractérisée par l’arrêt de la prolifération des cellules. Ils ont ensuite procédé à la reprogrammation in vitro de ces cellules. Dans cette étude, Jean Marc Lemaitre et son équipe ont d’abord confirmé que cela n’était pas possible avec le lot de 4 facteurs génétiques classiquement utilisé (OCT4, SOX2, C MYC et KLF4) et ont ajouté 2 facteurs supplémentaires (NANOG et LIN28) qui ont permis de franchir cette barrière (cf. figure 2).

Grâce à ce nouveau « cocktail » de 6 facteurs, les cellules sénescentes, reprogrammées en cellules souches pluripotentes iPSC fonctionnelles, réacquièrent les caractéristiques de cellules souches pluripotentes de type embryonnaires. En détail, elles ont retrouvé leur capacité d’autorenouvellement et leur potentiel de différentiation d’antan, ne conservant aucune trace de leur vieillissement antérieur.

Pour vérifier les caractéristiques « rajeunies » de ces cellules, les chercheurs ont testé le processus inverse. Les cellules iPSC rajeunies ont été à nouveau différenciées en cellules adultes (cf. figure 1) et comparées aux cellules âgées d’origine ainsi qu’à celles obtenues à partir de cellules souches pluripotentes de type embryonnaires (hESC). « Les marqueurs de l’âge des cellules ont été effacés et les iPSC, que nous avons obtenues peuvent produire des cellules fonctionnelles, de tous types avec une capacité de prolifération et une longévité accrues », explique Jean Marc Lemaitre qui dirige l’équipe AVENIR de l’Inserm.

…testé sur des cellules âgées de plus de 100 ans


© Inserm – Cure de jouvence pour cellules par Jean Marc Lemaitre

Les résultats obtenus ont conduit l’équipe de recherche à tester le cocktail sur des cellules plus âgées de 92, 94, 96 jusqu’à 101 ans. « Notre stratégie a fonctionné sur les cellules de centenaires. L’âge des cellules n’est définitivement pas une barrière à la reprogrammation », conclut-il. « Ces travaux ouvrent la voie à l’utilisation thérapeutique des iPS à terme, en tant que source idéale de cellules adultes tolérées par le système immunitaire, pour réparer des organes ou des tissus chez des patients âgés », ajoute le chercheur.
Ce travail a fait l’objet d’une demande de brevet auprès d’Inserm Transfert.

Pourquoi le virus de la rougeole est-il si contagieux ?

Une collaboration internationale impliquant l’Inserm (Unité Inserm 891 « Centre de recherche en cancérologie de Marseille ») a permis de comprendre comment le virus de la rougeole quitte un organisme infecté pour contaminer un nouvel individu. Les chercheurs ont identifié un récepteur clé, localisé au niveau de la trachée, permettant au virus de propager très rapidement l’infection d’un organisme à l’autre et ce par voie aérienne. Ce récepteur appelé nectine-4 est également connu pour être un biomarqueur de certains cancers. Ces travaux font l’objet d’une lettre dans la revue Nature datée du 2 novembre 2011.

Le virus de la rougeole est un des pathogènes humains les plus contagieux et peut entraîner de graves complications, parfois mortelles. Il est transmis d’hôte à hôte principalement par voie aérienne (postillons, éternuements…). Ce phénomène est à l’origine de la propagation rapide de ce virus dans les populations à risque (non ou mal vaccinées) et interfère avec les programmes mondiaux de vaccination visant à l’éradiquer. Ainsi, on dénombre plus de 10 millions d’enfants malades et 120 000 décès par an dans le monde. La France est également confrontée à une épidémie de rougeole préoccupante. Alors qu’une quarantaine de cas seulement étaient déclarés chaque année en 2006 et 2007, on assiste, depuis 2008 à une nette augmentation (déjà 14 600 cas recensés depuis le début de l’année 2011) (1).

La découverte rapportée dans la revue Nature explique pourquoi ce virus se propage si rapidement. Les virus se servent généralement de récepteurs cellulaires pour initier et propager l’infection dans l’organisme. C’est le cas pour le virus de la rougeole qui infecte les cellules immunitaires présentes au niveau des poumons pour entrer et se propager dans l’organisme. L’étude montre, pour la première fois, comment le virus de la rougeole « sort » de son hôte en utilisant un autre récepteur (la nectine-4). La nectine-4 est spécifiquement localisée au niveau de la trachée, un site anatomique « privilégié » pour faciliter la contagion par voies aériennes.

Des perspectives intéressantes dans le domaine du traitement des cancers

La nectine-4 est un biomarqueur dans certains cancers comme le sein, l’ovaire et le poumon. Des thérapies utilisant une souche vaccinale modifiée du virus de la rougeole sont actuellement en cours de développement pour le traitement de certains cancers. En effet, ce virus se réplique préférentiellement dans les cellules cancéreuses et induit leur destruction. Ainsi, la prise en compte de la présence de ce biomarqueur dans les tumeurs est essentielle à l’amélioration de l’efficacité de ces thérapies innovantes.

 

Note
(1) Source INPES octobre 2011 – Epidémie de rougeole : présentation de la campagne de communication

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