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L’Inserm célèbre ses 50 ans : les dates à retenir en cette fin d’année

Dans le cadre de son 50ème anniversaire, l’Inserm vient à la rencontre du grand public et organise de nombreux événements à travers la France. L’occasion de mieux comprendre les enjeux actuels de la recherche grâce à l’intervention des personnels, partenaires et tutelles de l’institut.

Les temps forts de cette fin d’année :

Les prochaines Conférences citoyennes et gratuites « Santé en questions », organisées par l’Inserm et Universcience, auront lieu de 19h à 20h30 les 25 septembre, 16 octobre et 27 novembre à la Cité des sciences et de l’industrie de Paris en duplex avec les acteurs régionaux de la culture scientifique et technique. Elles auront respectivement pour thème « Santé mentale : les nouvelles approches », « Pollution, perturbateurs endocriniens : quels risques ? » et « VIH : quels progrès médicaux en France ? ».
Pour en savoir plus sur la programmation des conférences, rendez-vous sur le blog Inserm « Santé en questions » et sur le site de la Cité des sciences et de l’industrie.

Depuis le mois de juillet, le Science Tour, un dispositif pédagogique itinérant sillonne la France à la rencontre du grand public et des scolaires. Des outils pédagogiques et ludiques (exposition interactive, expériences, jeux, modélisations, investigations, films) sont proposés.
Pour en savoir plus sur le programme et son passage près de chez vous, consultez le site du Science Tour.

Après le succès des deux premières journées « Les Chercheurs Accueillent les Malades« , l’Inserm ouvre à nouveau ses laboratoires aux personnes malades et à leur famille afin d’encourager le dialogue, l’échange et les questions. Le vendredi 3 octobre sur le thème Nutrition Métabolisme, plus de 80 chercheurs de l’Inserm accueilleront, avec de nombreux délégués des 9 associations de malades partenaires, les personnes concernées par le diabète, l’obésité, l’hémochromatose, les lipodystrophies, les maladies intestinales chroniques et le cancer du sein.
Le vendredi 28 novembre, il sera question de maladies neurologiques et dégénératives. Les chercheurs de l’Inserm, en partenariat avec 10 associations de malades, ouvriront 30 laboratoires pour parler des avancées de la recherche et des enjeux de leurs travaux.
Informations et inscriptions sur le site des CAM.

La cérémonie de remise des Prix Inserm de la recherche médicale aura lieu le mardi 2 décembre au Collège de France. Pour clôturer ce cinquantenaire, 8 prix seront décernés aux femmes et aux hommes qui construisent au quotidien l’excellence scientifique de l’Institut.

Retrouvez l’ensemble du dossier consacré aux 50 ans de l’Inserm sur la salle de presse

L’étude INSIGHT : mieux comprendre les facteurs de déclenchement de la maladie d’Alzheimer

Plus de 35 millions de personnes dans le monde souffrent de démence, incluant la maladie d’Alzheimer [1]. En France, en 2014, environ 900.000 personnes sont atteintes et la prévalence de la maladie va considérablement augmenter : on estime que 1,3 million de personnes seront atteintes en 2020 [2] et plus de 2 millions en 2040 [3], avec plus de 225.000 nouveaux cas déclarés chaque année.

La Journée Mondiale de la Maladie d’Alzheimer qui aura lieu le dimanche 21 septembre, est l’occasion de faire un état des lieux de l’avancée de la recherche et de présenter INSIGHT, une étude inédite lancée par des équipes de l’Inserm et de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) au sein de l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer (IM2A) et de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière (ICM), rassemblées au sein de l’IHU-A-ICM, et en collaboration avec Pfizer, visant à observer et comprendre l’histoire naturelle de la maladie d’Alzheimer. INSIGHT est une étude ancillaire de la cohorte nationale MEMENTO.Etude de la maladie d'Alzheimer

Etude de la maladie d’Alzheimer – Atrophie de l’hémisphère cérébral consécutif à la maladie d’Alzheimer.

INSIGHT est une étude innovante sur la maladie d’Alzheimer, et l’une des 1ères au monde à suivre des sujets sains à risque. Porteuse de grandes ambitions en matière de compréhension de la maladie, ses résultats pourraient apporter la promesse de traitements futurs pour les malades.

« Les recherches sur la maladie d’Alzheimer, et plus globalement sur les pathologies liées aux troubles de la mémoire, sont en pleine évolution. Nous sommes aujourd’hui en mesure de reconnaître la maladie très tôt grâce à une signature biologique identifiable chez tous les patients. Ce que nous cherchons désormais à explorer, ce sont les conditions endogènes et exogènes de l’évolution de la maladie : pourquoi et comment elle se déclare chez certains sujets mais pas chez d’autres » précise le Professeur Bruno Dubois, Directeur de l’IM2A (l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer, hébergé à la Pitié Salpêtrière à Paris) et Directeur de l’Equipe Inserm « Cognition, Neuro-imagerie et Maladies du Cerveau » à l’ICM, qui dirige cette étude en tant qu’investigateur principal.

Méthode d’investigation
Le projet est de suivre 400 sujets sains volontaires âgés de 70 ans à 85 ans, dont les bilans de mémoire sont normaux. Il ne s’agit ni de dépister ni de traiter la maladie mais d’observer l’évolution de ces sujets sains. Ont-ils des lésions dans le cerveau ? Vont-ils déclarer la maladie ? Quelles sont les délais d’apparition des premiers symptômes ? Ces sujets bénéficient tout au long de l’étude du suivi et de l’accompagnement d’une des meilleures équipes mondiales sur les pathologies liées à la mémoire. A ce jour, près de 220 sujets ont déjà été recrutés.
Cette étude monocentrique, qui se déroulera dans sa totalité à l’IM2A (l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer hébergé à la Pitié-Salpêtrière, AP-HP), constitue en soi un défi sans précédent.

INSIGHT est une étude ambitieuse rendue possible grâce à un dispositif innovant inédit dans la recherche médicale : un socle pluri-partenarial associant notamment les investissements d’avenir à travers l’IHU-A-ICM et Pfizer aux côtés des équipes de l’IM2A et de l’ICM autour d’un objectif commun, mieux comprendre la maladie d’Alzheimer

[1] Voir à ce sujet le rapport 2013 d’Alzheimer’s Disease International
[2] Chiffres issus du dossier d’information Inserm dédié à la maladie d’Alzheimer
[3] Plus d’informations sur le site de France Alzheimer & maladie apparentées

Un ver plat « immortel » ouvre une voie inédite contre les bactéries

Une nouvelle voie de défense contre des bactéries comme l’agent de la tuberculose et le staphylocoque doré a été identifiée chez l’Homme grâce à l’étude d’un petit ver plat aquatique, le planaire. Cette découverte a été réalisée par des chercheurs de l’Unité de recherche sur les maladies infectieuses et tropicales émergentes (CNRS/IRD/Inserm/Aix-Marseille Université), en collaboration avec le Centre méditerranéen de médecine moléculaire (Inserm/Université Nice Sophia Antipolis), et d’autres laboratoires français et étrangers (1). Leurs travaux, publiés dans la revue Cell Host and Microbe le 10 septembre 2014, soulignent l’importance d’étudier des organismes modèles alternatifs, et ouvrent la voie vers de nouveaux traitements contre les infections bactériennes.

ver plat

© Eric Ghigo Le planaire Dugesia japonica infecté par des bactéries Legionella pneumophila rendues fluorescentes (en vert, dans les intestins de l’animal).

En étudiant un organisme modèle original, un ver plat aquatique appelé planaire, des chercheurs ont réussi à identifier une nouvelle voie de défense contre des bactéries comme l’agent de la tuberculose (Mycobacterium tuberculosis). Présent à l’état latent chez l’Homme, ce mécanisme pourrait être stimulé de manière pharmacologique.

Les chercheurs de l’équipe Infection, Genre et Grossesse (I2G) dirigée par Eric Ghigo ont eu l’idée de travailler sur la planaire Dugesia japonica en constatant un certain essoufflement des découvertes faites sur les modèles classiques en immunologie (la mouche Drosophila melanogaster, le ver rond Caenorhabditis elegans). Précédemment, ce ver plat était surtout connu pour ses extraordinaires capacités de régénération (2), qui en font un être potentiellement immortel (il ne peut pas mourir de vieillesse). Il est aussi capable de résister à des bactéries très pathogènes voire mortelles pour l’Homme, comme l’a découvert l’équipe de chercheurs, la seule au monde à s’être lancée dans des études d’immunologie sur cet organisme.

Pour comprendre les raisons d’une défense immunitaire si efficace, les chercheurs ont étudié les gènes exprimés par la planaire suite à l’infection par des bactéries pathogènes pour l’Hommetelles que M. tuberculosis, le staphylocoque doré (Staphylococcus aureus) et l’agent de la légionellose (Legionella pneumophila). Ils ont ainsi identifié 18 gènes qui lui confèrent une résistance à ces agents pathogènes

Les scientifiques se sont penchés sur l’un de ces gènes – MORN2 – essentiel à l’élimination de tous les types de bactéries testées, et présent dans le génome humain. Ils ont surexprimé ce gène dans des macrophages humains, des globules blancs chargés d’éliminer les agents pathogènes en les digérant (un processus appelé phagocytose). Ainsi stimulés, les macrophages sont devenus capables d’éliminer les bactéries S. aureus, L. pneumophila et M. tuberculosis et bien d’autre agent pathogènes.

L’étude détaillée du mécanisme d’action de MORN2 a montré qu’il favorise la séquestration (3) de M. tuberculosis dans une cavité intracellulaire (le phagolysosome) où la bactérie est détruite. Or, l’agent de la tuberculose réussit habituellement à échapper à ce destin : la bactérie peut alors rester à l’état latent dans les cellules, et ressurgir lorsque le système immunitaire est affaibli. Cette découverte ouvre donc une nouvelle piste d’action contre M. tuberculosis, dont les souches résistantes aux antibiotiques sont de plus en plus répandues.

Ces travaux montrent aussi l’intérêt des organismes modèles « exotiques », comme la planaire. En effet, le gène MORN2 a été perdu au cours de l’évolution menant aux organismes modèles classiques tels que la mouche D. melanogaster, alors qu’il est conservé chez l’Homme. Le mécanisme de la réponse immunitaire humaine découvert dans cette étude serait donc resté inconnu sans le recours à ce nouveau modèle.

Ces recherches ont notamment bénéficié d’un soutien du CNRS au travers d’un PEPS (Projet Exploratoire Premier Soutien), financement destiné à soutenir des projets de recherche exploratoires, faisant appel à la créativité des équipes

(1) en France, le Centre commun de microscopie appliquée (Université Nice Sophia Antipolis) ; en Italie, le Département de clinique et médecine expérimentale, à Pise ; en Nouvelle-Zélande, le Département de Génomique et Bioinformatique, à Otago

(2) En 1814, JG Dalyell a découvert qu’un planaire coupé en 279 fragments se régénère, en 15 jours, pour donner 279 vers.

(3) via un mécanisme appelé « LC3-associated phagocytosis »

Benzodiazépine et Alzheimer : le risque augmente avec la durée de l’exposition

Les chercheurs de l’Unité Inserm 657 « Pharmaco épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de sante sur les populations » rendent compte de nouveaux résultats concernant l’association entre les benzodiazépines et la démence. Dans une étude publiée dans le British Medical Journal (BMJ), ils confirment que l’utilisation de benzodiazépines pendant trois mois ou plus était associée à un risque accru de développer la maladie d’Alzheimer après 65 ans. L’étude cas-témoins révèle que la force de l’association augmente avec la durée de l’exposition. C’est pourquoi les chercheurs recommandent de contrôler la bonne utilisation de ces molécules en limitant les prises aux périodes pour lesquelles elles sont recommandées.

Les benzodiazépines sont prescrites par les médecins dans le cadre de symptômes anxieux et de troubles du sommeil pour une durée recommandée de quelques semaines. En 2012, une étude de l’Unité Inserm 657 « Pharmaco épidémiologie et évaluation de l’impact des produits de sante sur les populations » avait montré, sur une cohorte française, que les sujets consommant des benzodiazépines présentaient environ 50% plus de risque de développer une démence comparés à ceux qui n’en ont jamais consommé. Dans cette nouvelle étude, les chercheurs se sont attachés à confirmer l’association dans une nouvelle cohorte en étudiant en particulier la potentielle relation dose-effet.

Les chercheurs ont étudié la base de données de la Régie d’Assurance Maladie du Québec (RAMQ) pour analyser le développement de la maladie d’Alzheimer chez un échantillon de patients âgés de plus de 66 ans résidant au Québec (Canada) et ayant eu une prescription de benzodiazépines. 1 796 cas de maladie d’Alzheimer ont été identifiés sur une période d’au moins 6 ans. Pour réaliser l’étude cas-témoins, ils ont ensuite comparé chacun de ces cas avec 7 184 personnes en bonne santé dont l’âge, le sexe et la durée de suivi correspondaient.

Les résultats montrent que l’utilisation de benzodiazépines pendant trois mois ou plus était associée à un risque accru (jusqu’à 51 %) de développer ultérieurement la maladie d’Alzheimer. 

« La force de l’association augmente avec la durée de l’exposition et avec l’utilisation de benzodiazépines à longue durée d’action, par opposition aux benzodiazépines à courte durée d’action » explique Sophie Billioti de Gage, chercheur à l’Inserm.

En conclusion, les chercheurs rappellent que même si le lien de cause à effet n’est pas prouvé, l’association plus forte observée avec des expositions à long terme « renforce la suspicion d’un lien direct possible, même si l’usage des benzodiazépines peut également être un marqueur précoce d’un état associé à un risque accru de démence. »

Le recours aux benzodiazépines est fréquent et préférentiellement chronique au sein de la population âgée. Pourtant les benzodiazépines sont des molécules utiles pour la prise en charge des troubles anxieux et de l’insomnie transitoires. Les auteurs incitent donc à la sensibilisation et au respect des bonnes pratiques associées à leur utilisation telles que des prescriptions justifiées et de courte durée.

« Cela permettrait de veiller à limiter l’utilisation de ces molécules à quelques semaines, une durée pour laquelle les chercheurs n’ont pas observé d’effets délétères sur le risque de démence ultérieur » souligne Sophie Billioti de Gage.

Alim Louis Benabid reçoit le prix Lasker 2014

Le Prix Lasker 2014 vient d’être décerné à Alim-Louis Benabid, directeur de l’Unité Inserm 318 « Neurobiologie préclinique » de 1988 à 2006 et lauréat en 2008 du prix d’honneur de l’Inserm, pour ses travaux sur la stimulation cérébrale profonde dans le traitement de la maladie de Parkinson.

Le Prix Lasker récompense depuis 1945 les chercheurs les plus brillants ayant contribué à de grandes avancées dans le diagnostic, le traitement et la prévention des maladies humaines. Il est considéré par l’ensemble de la communauté internationale comme l’antichambre du prix Nobel. Le Pr Benabid est le 8ème Français à obtenir ce prix.

Prix d'Honneur Inserm 2008 : Alim-Louis Benabid

© Inserm/Latron, Patrice

Né le 2 mai 1942 à la Tronche, près de Grenoble, Alim-Louis Benabid a passé son enfance à Sétif, en Algérie. Il revient en France mener ses études secondaires à Grenoble et ses études supérieures aux facultés de médecine et des sciences de Paris.

Interne des hôpitaux, docteur en médecine (1970), Docteur ès sciences en physique (1978) et professeur de de biophysique à l’université Joseph-Fourier de Grenoble, il dirige l’unité de recherche 318 de l’Inserm « Neurobiologie préclinique » de 1988 à 2006.

Alim-Louis Benabid a centré ses recherches sur plusieurs pathologies du cerveau, en particulier les tumeurs et les mouvements anormaux, et développé la chirurgie dite « stéréotaxique », qui permet de cibler de façon très précise certaines zones du cerveau. Il en a étendu les applications au traitement de patients atteints de la maladie de Parkinson résistants aux médicaments et à celui d’autres troubles cérébraux.

Entre 1987 et 1991, Alim-Louis Benabid et ses collaborateurs développent une technique visant à implanter des électrodes dans le cerveau de patients atteints de la maladie de Parkinson en vue de procéder à des stimulations électriques à haute fréquence. Ils obtiennent ainsi la disparition des symptômes moteurs (tremblement, akinésie, rigidité) de la maladie. Cette intervention présente une efficacité remarquable, une très faible morbidité et permet de diminuer les traitements médicaux. Elle constitue actuellement le traitement chirurgical le plus efficace de la maladie de Parkinson et apporte également des données fondamentales d’un intérêt théorique considérable.

Alim-Louis Benabid a également élargi les indications de la stimulation électrique profonde à d’autres pathologies : dystonies, épilepsie rebelle, troubles obsessionnels compulsifs.

L’introduction d’électrodes dans le cerveau, technologie mise au point sous sa direction, a été saluée par le monde scientifique international comme étant une découverte majeure.

Alim-Louis Benabid oriente ensuite ses travaux vers la compréhension des mécanismes d’action de la stimulation cérébrale profonde à haute fréquence et la mise en évidence de ses possibles effets à long terme, notamment neuroprotecteurs, sur l’évolution naturelle de la maladie de Parkinson. Il s’attache également à l’identification précise des cibles efficaces et des réseaux neuronaux mis en jeu lors de cette intervention.

Yves Lévy, Président-Directeur général de l’Inserm tient à adresser toutes ses félicitations à Alim Louis Benabid : « Ce prix prestigieux est à l’image de ses brillants travaux sur la maladie de Parkinson qui améliorent significativement le quotidien des malades. L’attribution de ce prix internationalement reconnu confirme l’excellence de la recherche biomédicale française. Il souligne également l’importance de mener en parallèle une recherche fondamentale et une recherche clinique de haut niveau. »

Conseiller scientifique auprès du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) depuis 2007,il associe aujourd’hui ses recherches dans ce domaine à celles menées dans le champ des nanotechnologies, dans le cadre du projet CLINATEC. Développé par la direction de la recherche technologique du CEA, en partenariat avec le CHU de Grenoble, l’Inserm et l’université Joseph Fourier de Grenoble, ce laboratoire de recherche biomédicale dédié aux applications des micro-nanotechnologies pour la santé répond à un enjeu de santé public majeur : développer de nouvelles approches thérapeutiques des maladies cérébrales.

L’exposition des femmes enceintes à certains phénols pourrait perturber la croissance des garçons durant la période fœtale et les premières années de vie

Un consortium de recherche associant des équipes Inserm, les Centres Hospitalo-Universitaires de Nancy et Poitiers, le Center for Disease Controls and Prevention (CDC, Atlanta, USA), et coordonné par l’équipe d’épidémiologie environnementale de l’Inserm et de l’Université de Grenoble (Unité 823), vient de publier une étude épidémiologique montrant que l’exposition pendant la grossesse à certains phénols, notamment les parabènes et le triclosan, pourrait perturber la croissance des petits garçons durant la vie fœtale et les premières années de vie. Le bisphénol A n’était pas associé à une modification nette de la croissance. Ces résultats sont parus dans la revue Epidemiology datée de ce mois de septembre 2014.

bébé

©Fotolia



Les femmes enceintes sont exposées à plusieurs composés très largement produits et présents dans notre environnement. C’est le cas des parabènes (utilisés comme conservateurs dans les cosmétiques et produits de soin), le triclosan (un pesticide antibactérien retrouvé dans certains dentifrices et savons), la benzophénone-3( utilisée dans les produits de protection solaire comme filtre anti ultra-violet), les dichlorophénols (dont les précurseurs entrent dans la composition de désodorisants d’intérieur) ainsi que le bisphénol A (utilisé, entre autres, pour la fabrication de plastiques de type polycarbonate (bouteilles plastiques, CD…) et des résines époxy (revêtement intérieur des boîtes de conserve, amalgames dentaires)[1].Ces composés appartiennent à la famille des phénols et sont des perturbateurs endocriniens.

Des études expérimentales in vitro et chez l’animal ont mis en évidence que ces composés interagissent avec des systèmes hormonaux impliqués dans la croissance et le gain de poids.

L’étude s’est appuyée sur 520 petits garçons de la cohorte mère-enfant EDEN

 mise en place par l’Inserm et soutenue, pour ce projet précis, par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). Les femmes enceintes participant à cette cohorte ont été recrutées entre 2003 et 2006 dans les Centres Hospitalo-Universitaires de Nancy et Poitiers, avant la mise en place de la réglementation actuelle sur le bisphénol A. La croissance de leur enfant a été évaluée à l’aide des échographies pendant la grossesse ainsi que des mesures de poids et de tailles réalisées depuis la naissance jusqu’aux 3 ans de l’enfant. Un échantillon d’urine prélevé durant la grossesse a permis le dosage de biomarqueurs d’exposition aux phénols dans le Laboratoire de Santé Environnementale des CDC d’Atlanta en charge des campagnes de biosurveillance américaines.

Les résultats obtenus par Rémy Slama, Claire Philippat et leurs collègues montrent que plus de 95% des femmes enceintes étaient exposées à ces substances et que l’exposition maternelle à certains phénols pourrait perturber la croissance des petits garçons. En particulier, les chercheurs relèvent que les niveaux de triclosan étaient négativement associés aux paramètres de croissance mesurés à l’examen échographique du troisième trimestre de la grossesse et que les parabènes étaient associés à une augmentation du poids à la naissance et à trois ans.

 On sait qu’une croissance accélérée dans les premières années de vie peut augmenter le risque d’obésité plus tard durant l’enfance. L’étude n’a pas identifié d’association claire entre les concentrations urinaires des autres phénols et la croissance pré- et post-natale des garçons. Le BPA, du fait de sa très grande variabilité dans les urines, n’a pas été quantifié avec précision dans cette étude reposant sur un unique prélèvement urinaire par femme.

Pour les chercheurs, « il s’agit de la première étude concernant ces contaminants environnementaux, qui s’appuie sur des données de croissance recueillies durant la grossesse, à la naissance et jusqu’à trois ans. Les études précédentes se concentraient sur une seule de ces périodes et étaient en général restreintes à l’étude du bisphénol A, sans inclure les autres phénols ».

Les équipes de recherche vont maintenant s’attacher à répliquer ces résultats au sein d’une nouvelle cohorte couple-enfant (la cohorte SEPAGES) pour laquelle de nombreux échantillons d’urine par participante (mère et nouveau-né) sont recueillis durant la grossesse et les premières années de vie de l’enfant. Cette approche permettra de limiter les erreurs de mesure de l’exposition et d’identifier de potentielles périodes de plus grande influence des phénols sur la croissance des enfants durant leur enfance. Les petites filles, dont la sensibilité aux phénols pourrait différer de celle des garçons, seront aussi considérées dans cette nouvelle cohorte couple-enfants.


[1] L’utilisation du bisphenol A dans les conditionnements à usage alimentaire pour les nourrissons et enfants en bas âge, a été interdite en 2013. Cette interdiction devrait s’appliquer à tous les conditionnements à usage alimentaire au 1er janvier 2015.

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