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Le groupe sanguin « O » associé à un risque moindre de développer un diabète de type 2

Existe-t-il une relation entre le groupe sanguin et le risque de diabète de type 2 ? C’est ce qu’ont étudié Guy Fagherazzi et ses collaborateurs de l’Unité mixte de recherche 1018 « Centre de recherche en épidémiologie et sante des populations » (Inserm/Université Paris-Sud) à Gustave Roussy. L’analyse, menée auprès de 82 104 femmes de la cohorte E3N suivies pendant 18 ans, suggère pour la première fois que le risque de diabète de type 2 serait plus faible pour les individus de groupe « O », que pour les groupes A, B et AB.
Ces résultats sont publiés dans le journal Diabetologia.

Groupe sanguin  ©fotolia

Le diabète touche plus de 382 millions de personnes dans le monde dont 90% sont atteintes du diabète de type 2. Environ 4,6% de la population française est affectée par cette pathologie, et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Les facteurs de risque connus sont l’obésité, l’inactivité physique, un apport calorique trop élevé, le tabagisme, l’hypertension ou l’hypercholestérolémie. Les chercheurs estiment qu’il est aujourd’hui capital d’identifier de nouveaux facteurs qui permettront de mieux comprendre cette maladie et ainsi de ralentir son développement.

Dans cette étude, 82 104 femmes françaises de la cohorte E3N ont été suivies pendant 18 ans, entre 1990 et 2008.

« Nous montrons, pour la première fois dans une si grande population, que les femmes ayant le groupe sanguin O – environ 43% des Français sont de ce groupe aujourd’hui –  ont un risque moindre de développer un diabète de type 2 » explique Guy Fagherazzi, épidémiologiste à l’Inserm.

En détail, les femmes avec d’autres groupes sanguins avaient un risque accru de développer un diabète, allant de 10% pour le groupe A, 17% pour le groupe AB et 21% pour le groupe B, par rapport au groupe O.

Lorsque le rhésus de la personne était pris en compte, les chercheurs notent que les femmes ayant un groupe sanguin O- (seuls 6% de la population en France) avaient un risque de diabète plus faible que les autres.

Comment peut-on expliquer ces résultats ?

Peu de mécanismes biologiques permettent aujourd’hui de relier le groupe sanguin et le risque de diabète de type 2, mais certaines hypothèses déjà identifiées permettraient d’expliquer en partie l’association observée :

  • Il semblerait que certains marqueurs endothéliaux et marqueurs d’inflammation soient présents en plus grande quantité chez les personnes qui ne sont pas du groupe O. Or ces marqueurs sont associés à un risque accru de diabète de type 2.
  • Le groupe sanguin ABO a déjà été identifié comme étant un des facteurs génétiquement déterminés qui module la composition du microbiote intestinal, qui à son tour joue un rôle dans le métabolisme du glucose, la balance énergétique ainsi que l’inflammation chronique.

« Malgré la robustesse de nos données, il est nécessaire de répliquer cette étude dans d’autres grandes populations, en particulier avec d’autres patrimoines génétiques, chez les hommes, même si les mécanismes proposés ne sont pas dépendants du sexe » souligne Guy Fagherazzi, premier auteur de l’étude.

Si ces observations sont confirmées, le groupe sanguin pourrait être une information pertinente à recueillir dans la pratique courante, dans les futures études portant sur le diabète de type 2 et dans le cadre du suivi de personnes à risque. Les chercheurs devront déterminer pourquoi les individus du groupe O ont un risque plus faible de développer un diabète de type 2.

Pour en savoir plus :

LES ETUDES E3N (www.e3n.fr) ET E4N (www.e4n.fr)

L’étude E3N, ou Etude Epidémiologique auprès de femmes de la MGEN (Mutuelle Générale de l’Education Nationale), dirigée par Françoise Clavel-Chapelon, directrice de recherche à l’Inserm, est une étude de cohorte prospective portant sur environ 100 000 femmes volontaires françaises nées entre 1925 et 1950 et suivies depuis 1990.

Depuis 1990, les femmes remplissent et renvoient des auto-questionnaires tous les 2 à 3 ans. Elles sont interrogées sur leur mode de vie (alimentation, prise de traitements hormonaux…) d’une part, et sur l’évolution de leur état de santé d’autre part.

Les données sur les facteurs de risque ont fait l’objet de plusieurs études de validation. Le taux de « perdues de vue » est très faible du fait de la possibilité qu’offre la MGEN de suivre les non-répondantes. Mais c’est avant tout grâce à la fidélité et à la constance des participantes, et grâce à la collaboration des médecins traitants, que l’étude E3N peut fournir tous ces résultats.

L’étude E3N est soutenue par quatre partenaires fondateurs : l’Inserm, la Ligue contre le Cancer, l’Institut Gustave Roussy et la MGEN.

L’étude E4N vient d’être lancée et vise à prolonger l’étude E3N en suivant les membres de la famille des femmes E3N. A terme, E4N rassemblera trois générations : les femmes E3N et les pères de leurs enfants constituent la première génération, leurs enfants, la deuxième, et leurs petits-enfants formeront la troisième génération. Le suivi des trois générations permettra de recueillir des informations sur les facteurs comportementaux et environnementaux à différentes périodes de la vie. L’objectif principal de l’étude E4N est d’étudier la santé en relation avec l’environnement et le mode de vie moderne chez des sujets d’une même famille ayant un terrain génétique et un environnement communs.

 

Un mécanisme d’élimination des protéines localisées par erreur dans le noyau cellulaire

Une collaboration internationale coordonnée par le Centre allemand de recherche contre le cancer (Université d’Heidelberg), associant en France des chercheurs de l’Institut de Génétique et Développement de Rennes (CNRS/Université de Rennes 1) sous la direction de Gwenaël Rabut, chercheur à l’Inserm, ainsi que des équipes suédoise et canadienne vient de mettre en évidence un nouveau mécanisme moléculaire qui permettrait aux cellules de détruire les protéines localisées par erreur dans leur noyau. Ces travaux sont publiés dans la revue Nature.

Les processus biologiques sont loin d’être parfaits. Malgré des millions d’années de perfectionnement, les mécanismes moléculaires qui assurent le fonctionnement des êtres vivants font de nombreuses erreurs qui, si elles ne sont pas détectées et corrigées, peuvent avoir de graves conséquences. Par exemple, de nombreux cancers ont pour origine des erreurs de copie de notre matériel génétique. De même, un mauvais repliement de certaines protéines neuronales entraîne la formation d’agrégats toxiques qui perturbent le fonctionnent du système nerveux et provoquent des maladies neurodégénératives, comme Alzheimer ou Parkinson.

Pour éviter d’en arriver là, les cellules ont mis en place des mécanismes moléculaires complexes qui contrôlent la qualité des protéines et éliminent celles qui sont défectueuses. Ces mécanismes sont localisés et mis en œuvre principalement dans le cytoplasme (compartiment des cellules où les protéines sont synthétisées).
En travaillant sur plusieurs facteurs impliqués dans le contrôle de qualité des protéines, les chercheurs se sont aperçus que certains d’entre eux étaient également localisés dans le noyau des cellules (le compartiment qui renferme le matériel génétique) et qu’ils permettaient de dégrader des protéines anormalement présentes dans ce compartiment.

cellule

Lors de cette étude, les chercheurs de l’Institut de génétique et de développement de Rennes (dont Gwenaël Rabut, chercheur Inserm, coordinateur et responsable du projet à Rennes et Ewa Blaszczak, doctorante, co-première auteure de l’article) ont pu observer que ces facteurs impliqués dans le contrôle de qualité des protéines interagissaient entre eux au niveau du noyau et qu’ils entraînaient l’ubiquitylation (l’étape précédant la dégradation) d’une protéine localisée par erreur dans le noyau.

En utilisant une méthode d’observation basée sur un décalage de fluorescence des protéines d’intérêt développée à l’Université d’Heidelberg, les chercheurs ont pu identifier une vingtaine de protéines dont la dégradation dépendait des facteurs de contrôle de la qualité localisés dans le noyau. Comme plusieurs de ces protéines sont normalement localisées dans le cytoplasme, et qu’elles s’accumulent au niveau du noyau lorsqu’elles ne sont plus dégradées, les chercheurs proposent que ce système de contrôle de qualité serve à éliminer non seulement des protéines défectueuses, mais aussi les protéines localisées par erreur dans le noyau.

Ces découvertes ont été réalisées en utilisant un organisme modèle, la levure de boulanger, mais il est vraisemblable que des mécanismes similaires existent également chez l’homme.

Valérie Mazeau-Woynar, nommée directrice du Département des Partenariats et Relations Extérieures (DPRE) de l’Inserm

Valérie Mazeau-Woynar succède à Claire Giry à la tête du Département des Partenariats et Relations Extérieures (DPRE) de l’Inserm. Elle contribuera, à ce titre, à la mise en œuvre des partenariats institutionnels de l’Inserm au niveau régional et national, européen et international, sous l’impulsion de la Direction générale, et en coordination avec les Instituts thématiques.
PhotoCP web

Valérie Mazeau-Woynar

De formation multidisciplinaire en médecine, en recherche biomédicale et en politiques de santé publique, acquise en France et aux Etats-Unis, Valérie Mazeau-Woynar était auparavant directrice des recommandations et de la qualité de l’expertise de l’Institut national du cancer (INCa). Elle a notamment coordonné pour l’INCa la rédaction du Plan cancer 2014-2019, définissant la stratégie nationale de lutte contre le cancer. Valérie Mazeau-Woynar est, par ailleurs, auteur ou responsable de plus de 60 rapports publiés par cet institut entre 2008 et 2014 : recommandations nationales pour les équipes spécialisées, guides pour les médecins généralistes, guides pour les patients et rapports scientifiques.

Forte d’une grande expérience des relations institutionnelles avec les administrations centrales, les agences sanitaires et de recherche, les sociétés savantes, les associations de patients et les fondations, Valérie Mazeau-Woynar met aujourd’hui au service du Département des Partenariats et Relations Extérieures de l’Inserm sa capacité d’analyse des situations, à la fois médicale, scientifique et stratégique.

« Profondément attachée à contribuer à améliorer la santé des populations, je suis heureuse et honorée de rejoindre l’Inserm et de mettre mes compétences au service de la recherche qui permettra de mieux prévenir les maladies et d’améliorer la prise en charge des patients de demain », Valérie Mazeau-Woynar.

Elle contribuera, par ses missions, à la promotion d’une politique de site, au développement de coopérations institutionnelles au niveau régional, national, européen et international, ainsi qu’à la définition de la stratégie de l’Inserm auprès de la direction générale.

Le processus diabétique mieux compris grâce au gène Rfx6

Pour la première fois, l’équipe de Gérard Gradwohl, directeur de recherche Inserm à l’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire d’Illkirch (IGBMC/Inserm-CNRS-Université de Strasbourg), montre que le gène Rfx6 est essentiel au fonctionnement des cellules productrices d’insuline, les cellules bêta du pancréas. Chez la souris adulte, ce gène s’avère non seulement important pour permettre la sécrétion d’insuline, mais de surcroît il joue un rôle majeur dans l’identité de la cellule beta. Dans la suite logique de ce travail mené chez le rongeur, l’équipe de Raphaël Scharfmann directeur de recherche Inserm (Unité 1016 « Institut Cochin »/Inserm-Université Paris Descartes-CNRS) confirme ces résultats sur des cellules β pancréatiques humaines et chez un enfant de 6 ans atteint de diabète néonatal.
Ces  deux travaux sont publiés dans la revue Cell Reports du 11 décembre 2014.

ilots langherans 

Immunofluorescence, coupe histologique ilot de Langerhans d’un pancréas de souris adulte montrant l’expression du facteur de transcription Rfx6 (rouge) dans le noyau des cellules β (marquée par l’insuline en vert) ©Julie Piccand 

Dès 2010, les scientifiques apportaient la preuve que le gène Rfx6, jouait un rôle clé dans la formation des cellules productrices d’insuline. Chez les souris portant des mutations ou des délétions (absence) de ce gène, un diabète grave apparaît à la naissance entrainant la mort des souriceaux. Tandis que chez les nouveau-nés humains présentant des mutations, un diabète néonatal est très vite diagnostiqué puis pris en charge par traitement à l’insuline.

De facteur impliqué dans le diabète néonatal, Rfx6 est en train de passer au statut de gène essentiel dans le contrôle de la sécrétion d’insuline et donc potentiellement impliqué dans le processus diabétique chez l’adulte. En effet, les chercheurs de l’IGBMC ont créé des modèles animaux de souris, dont les cellules β matures ont été modifiées de façon à inactiver leur gène Rfx6. Résultat : ces souris mutées présentent une intolérance au glucose (prédiabète). Par quels mécanismes? Sans expression de Rfx6 dans les cellules β plusieurs étapes cruciales de la sécrétion d’insuline induite par le glucose sont perturbées comme la détection du glucose, l’activité électrique des cellules β et les flux d’ions calcium.

Rfx6 régule en fait directement l’expression de gènes clés contrôlant ces processus. L’enchainement de ces étapes aboutit à une sécrétion d’insuline adaptée aux fluctuations de la glycémie, leur altération provoque une production d’insuline défectueuse.

Encore plus surprenant, en allant voir dans le transcriptome  des souris mutantes (sans Rfx6), l’équipe de Gérard Gradwohl a remarqué que des gènes normalement réprimés dans les cellules β deviennent actifs. Ces gènes, connus sous l’appellation « disallowed » (interdits), au lieu de rester silencieux, se manifestent ici. Leur activation induit alors la perte d’identité des cellules β. En quelque sorte, elles subissent une dédifférenciation et « oublieraient » leur raison d’être et leur fonction.

Des observations validées chez l’homme

Dans la suite logique de ce travail mené chez le rongeur, l’équipe de Raphaël Scharfmann confirme les résultats sur des cellules β pancréatiques humaines. Depuis 30 ans, les chercheurs du monde entier tentaient sans succès de reproduire ces cellules β en laboratoire pour les étudier et comprendre leurs dysfonctionnements. En 2011, Raphaël Scharfmann et ses collaborateurs académiques et industriels de la société EndoCells avaient été les premiers au monde à produire in-vitro des lignées de cellules β humaines fonctionnelles. Ils étaient donc en possession de  la « boîte à outils » nécessaire pour explorer le rôle de Rfx6 chez l’homme.

De plus, leurs analyses génétiques d’enfants atteints de diabète néonatal avaient montrées des mutations dans le gène Rfx6 sans savoir quel pouvait être son rôle dans la maladie.

Les chercheurs ont donc tenté de percer le mystère Rfx6 à la fois sur des cellules β humaines classiques et fonctionnelles, sur des cellules β chez lesquelles le gène Rfx6 n’était pas exprimé et chez un enfant de 6 ans atteint de diabète néonatal.

Leurs travaux montrent, tout comme ceux des chercheurs de Strasbourg, que Rfx6  joue un rôle central en contrôlant à la fois la production d’insuline dans les cellules β mais aussi sa sécrétion dans le sang.

Dans le détail, Rfx6 agit au niveau de la membrane de la cellule β en contrôlant l’ouverture et la fermeture de canaux calciques Ca2+. En temps normal, le glucose pénètre par diffusion facilitée dans la cellule β pancréatique. Cette entrée entraine des réactions en cascade qui conduisent à l’ouverture des canaux calciques qui permettent la libération d’insuline dans le sang. Dans le cas où Rfx6 est muté et non fonctionnel, il empêche l’ouverture des canaux Ca2+ et bloque la sécrétion d’insuline qui en résulte.

Pour les chercheurs ce travail présente un triple intérêt : il confirme les résultats obtenus chez le rongeur. Il permet également de valider scientifiquement l’intérêt des cellules β produites en laboratoire comme un véritable outil d’exploration des mécanismes du diabète. Enfin d’un point de vue thérapeutique, un traitement modulant l’ouverture et la fermeture des canaux Ca2+ pourrait être intéressant à développer.

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