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Un médicament efficace contre la dystonie myoclonique, une maladie rare du système nerveux

Une équipe coordonnée par le Pr Emmanuel Flamand-Roze de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, AP-HP, a testé au centre d’investigation clinique de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (Inserm /CNRS/UPMC) l’efficacité du zonisamide, un médicament utilisé aujourd’hui pour traiter certaines formes d’épilepsie, chez 23 patients atteints d’une maladie rare du système nerveux, la dystonie myoclonique. Les résultats prometteurs de cette étude, financée par l’AP-HP, font l’objet d’une publication dans la revue Neurology le 6 avril 2016.

Healthy Brain Pills

(c) Fotolia

La dystonie myoclonique est une maladie rare qui reflète un mauvais contrôle des mouvements par le cerveau, entraînant des contractions anormales des muscles. Elle se traduit par deux types de symptômes : des secousses musculaires (myoclonies) et une posture anormale de certaines parties du corps (dystonie). Les secousses musculaires imprévisibles qui accompagnent chacun des mouvements du patient constituent le symptôme le plus handicapant. Elles prédominent habituellement au niveau des membres supérieurs et du cou. Les difficultés motrices, liées à cette maladie, peuvent être très gênantes dans les gestes de la vie quotidienne. Il est fréquent que ces troubles bien visibles entraînent une stigmatisation, une perte de l’estime de soi et un retrait social des patients. Il n’existe pour le moment aucun médicament efficace dans cette maladie. Il existe cependant un traitement neurochirurgical donnant de bons résultats mais il est invasif et réservé aux formes sévères de la maladie.

L’équipe scientifique, composée de médecins et de chercheurs, a conduit une étude randomisée, en double aveugle, contre placebo, pour tester l’efficacité du zonisamide chez 23 patients atteints de dystonie myoclonique. Le zonisamide est un médicament utilisé en Europe depuis une dizaine d’années pour traiter certaines formes d’épilepsie. Il est bien toléré chez la plupart des patients qui l’utilisent dans ce contexte.

Les résultats de cette étude montrent que le zonisamide réduit de façon très significative les myoclonies et le handicap s’y rapportant. La dystonie des patients est également améliorée par ce traitement.

« Il s’agit du premier essai démontrant l’efficacité d’un médicament dans cette maladie » explique le Pr Flamand-Roze.

«Le zonisamide pourra donc être proposé aux patients dans les formes légères et modérées de dystonie myolonique, et chez tous les patients qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas bénéficier d’un traitement neurochirugical».

Les gènes sauteurs : tous coupables ?

Les éléments transposables, aussi appelés « gènes sauteurs », sont des fragments d’ADN capables de se déplacer ou de se copier d’un endroit à un autre sur les chromosomes. Ils ont envahi le génome de la plupart des organismes vivants, des bactéries aux humains, en passant par les plantes. Lorsqu’ils sautent, ils provoquent des modifications complexes des gènes près desquels ou dans lesquels ils s’insèrent, ce qui peut modifier ou abolir leur fonction. Ce phénomène contribue à l’évolution et à l’adaptation des espèces.

Cependant, à plus court terme, les « gènes sauteurs » peuvent avoir des effets néfastes. Chez l’Homme, la seule famille actuellement active, les rétrotransposons de type LINE-1, est à l’origine de nouveaux cas de maladies génétiques, comme des hémophilies ou des dystrophies musculaires. C’est pourquoi leur activité est normalement strictement contrôlée. Cependant, dans près de la moitié des cancers épithéliaux, ils parviennent à échapper aux nombreux mécanismes de défense cellulaires qui protègent notre ADN, et ils sautent activement contribuant à l’émergence et à la progression des cancers. D’ailleurs de nombreuses études les utilisent comme biomarqueurs tumoraux à des fins diagnostiques ou pronostiques.

DNA Structure 

©fotolia

L’une des difficultés majeures soulevée par l’étude des « gènes sauteurs » est liée à leur nature extrêmement répétée. Notre ADN en contient des centaines de milliers de copies  presque identiques entre elles, et chaque individu possède des centaines de copies non répertoriées dans la carte de référence du génome humain. Aussi, jusqu’à présent, il était impossible de savoir si l’activation des « gènes sauteurs » résultait d’un dérèglement général conduisant à une mobilisation massive de toutes les copies, ou si, au contraire, seul un petit nombre d’entre elles parvenaient à échapper aux contrôles de protection. Grâce à une nouvelle approche, publiée dans la revue eLife, et intégrant séquençage à haut-débit, génomique, épigénomique et bioinformatique, l’équipe de Gaël Cristofari, chargé de recherche à l’Inserm, et ses collaborateurs de l’Unité 1081 « Institut de Recherche sur le Cancer et le Vieillissement de Nice (IRCAN) », sont parvenus à mesurer l’activité des « gènes sauteurs » dans des cellules normales ou cancéreuses à une résolution inégalée.

D’après leurs résultats, seul un petit nombre de copies seraient réellement coupables : celles situées dans des régions permissives de nos chromosomes.  Or ces régions seraient différentes selon les types cellulaires. Qui plus est, toutes ces copies actives ne sont pas présentes chez tous les individus !

« La notion importante ici, c’est que le petit groupe de LINE-1 qui échappe au contrôle est différent d’un type cellulaire à un autre: dans certains cancers, tel groupe est important, dans un autre type de cancer, ce sera un autre groupe de copies. Cette observation suggère qu’il y a derrière chaque groupe de LINE-1 un mécanisme et des signaux qui sont propres à un type d’organe ou de tissu particulier. » explique Gaël Cristofari.

Ces résultats permettent de mieux comprendre comment de nouvelles mutations peuvent apparaître, suggèrent l’existence de facteurs génétiques derrière ce phénomène, et apportent des données nouvelles pour utiliser de façon rationnelle les rétrotransposons LINE-1 comme biomarqueurs en cancérologie en se focalisant sur les copies actives dans un type cellulaire donné.

 

Ces travaux ont été rendus possibles grâce, notamment, au support financier de la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer, de la Fondation pour la Recherche Médicale, du Cancéropôle PACA, du Conseil Européen de la Recherche, de l’Agence Nationale de la Recherche (Labex Signalife), et du Groupement de Recherche sur les Eléments Transposable (CNRS, GDR 3546).

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