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La Covid-19 entraine 3 fois plus de décès à l’hôpital que la grippe saisonnière

Coronavirus SARS-CoV-2 accrochés au niveau des cils de cellule épithéliale respiratoire humaine. © Manuel Rosa-Calatrava, INSERM ; Olivier Terrier, CNRS ; Andrés Pizzorno, Signia Therapeutics ; Elisabeth Errazuriz-Cerda UCBL1 CIQLE. VirPath (Centre International de Recherche en Infectiologie U1111 Inserm – UMR 5308 CNRS – ENS Lyon – UCBL1). Colorisé par Noa Rosa C.

Une étude de l’Inserm et du CHU de Dijon s’appuyant sur les données nationales françaises de près de 130 000 patients hospitalisés pour Covid-19 ou pour grippe saisonnière montre que le taux de mortalité parmi les patients hospitalisés pour Covid est trois fois plus élevé que celui de la grippe saisonnière. Ces résultats sont publiés dans The Lancet respiratory Medicine

Cette étude s’appuie sur les données issues de la base de données administratives nationale française (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information, PMSI) qui contient des informations sur tous les patients admis dans les hôpitaux publics ou privés en France, et qui détaille notamment les raisons de leur admission et les soins qu’ils ont reçus pendant leur séjour. Les chercheurs ont comparé les admissions à l’hôpital pour Covid-19 au printemps 2020 (entre le 1er mars et le 30 avril 2020) avec les admissions à l’hôpital pour la grippe saisonnière entre le 1er décembre 2018 et le 28 février 2019.

 

Cette étude montre :

 

  • Un taux de mortalité parmi les patients hospitalisés avec Covid-19 trois fois plus élevé que celui de la grippe saisonnière. 15 104 décès du Covid-19 sur 89 530 hospitalisations [16,9 %] contre 2640 décès sur 45 819 hospitalisations pour la grippe [5,8 %].

 

  • Un plus grand nombre de patients atteints de Covid-19 a dû être hospitalisés en soins intensifs avec un séjour moyen presque deux fois plus long (15 jours contre 8 jours).

 

  • Moins d’enfants de moins de 18 ans ont été hospitalisés pour Covid-19 par rapport à la grippe saisonnière mais une plus grande proportion de ceux âgés de moins de 5 ans ont dû être hospitalisés pour COVID-19 (14/ 613 personnes vs 65/ 6973 pour la grippe). Le taux de létalité chez les enfants de moins de 5 ans était similaire pour les deux groupes et était très faible (inférieur à 0,5 %).

 

  • Près de deux fois plus de personnes ont été hospitalisées pour Covid-19 au plus fort de la pandémie par rapport aux hospitalisations au plus fort de la saison grippale 2018/2019.

 

  • En outre, une plus grande proportion de patients Covid-19 ont souffert d’une maladie grave nécessitant des soins intensifs que ceux atteints de la grippe. Si on regarde le nombre d’admis aux soins intensifs : chez les patients Covid-19, 14 585 sur 89 530 ont été admis en soins intensifs [16,3 %] alors que pour la grippe, 4926 patients sur 45 819 y ont été admis [10,8 %].

 

  • Plus d’un patient sur quatre souffrant de Covid-19 a souffert d’une insuffisance respiratoire aiguë, contre moins d’un patient sur cinq souffrant de la grippe.

 

  • Conformément aux rapports précédents, les conditions médicales sous-jacentes les plus courantes parmi les patients admis avec Covid-19 étaient l’hypertension 33,1%, le surpoids ou l’obésité :11,3% et le diabète :19,0%.

 

Les chercheurs soulignent que leur étude comprend plusieurs limites. En particulier, les pratiques de dépistage de la grippe ont probablement été variables d’un hôpital à l’autre, alors que le dépistage de la Covid-19 a peut-être été plus standardisé. Cela peut expliquer en partie le nombre accru de patients admis à l’hôpital pour Covid-19 par rapport à la grippe saisonnière. Par ailleurs, la différence entre les taux d’hospitalisation peut être partiellement due à l’immunité existante contre la grippe dans la population, soit à la suite d’une infection antérieure ou de la vaccination.

Néanmoins, les conclusions de ces travaux confirment l’importance des mesures visant à prévenir la propagation des deux maladies. Elles sont particulièrement pertinentes alors que plusieurs pays se préparent à ce qu’en période hivernale, la pandémie de Covid-19 continue en parallèle aux flambées de grippe saisonnière.

« Cette étude est la plus importante à ce jour permettant de comparer les deux maladies et confirme que la Covid-19 est beaucoup plus grave que la grippe. Le constat selon lequel le taux de décès par Covid-19 était trois fois plus élevé que pour la grippe saisonnière est particulièrement frappant lorsqu’on rappelle que la saison grippale 2018/2019 avait été la pire des cinq dernières années en France en termes de nombre de décès », déclare Catherine Quantin, chercheuse à l’Inserm et Pr au CHU de Dijon.

« Pris ensemble, ces résultats indiquent clairement que la Covid-19 est beaucoup plus grave que la grippe saisonnière. Alors qu’à l’heure actuelle, aucun traitement ne s’est encore avéré efficace pour prévenir la maladie grave chez les patients atteints de Covid-19, cette étude souligne l’importance de toutes les mesures de prévention (mesures barrières) et met en évidence la nécessité d ’avoir accès à des vaccins efficaces », conclut Pascale Tubert-Bitter, directrice de recherche à l’Inserm.

Le microbiote intestinal participe au fonctionnement du cerveau et à la régulation des humeurs

© Pascal Marseaud

La dépression est un trouble mental qui touche plus de 264 millions de personnes de tous âges dans le monde. La compréhension de ces mécanismes est essentielle pour le développement de stratégies thérapeutiques efficaces. Des chercheurs de l’Institut Pasteur, de l’Inserm et du CNRS ont conduit une étude qui montre qu’un déséquilibre de la communauté bactérienne intestinale peut provoquer un effondrement de certains métabolites qui est responsable de l’état dépressif. Ces résultats, montrant qu’un microbiote intestinal sain contribue au fonctionnement normal du cerveau, ont été publiés dans Nature Communications le 11 décembre 2020.

La population bactérienne de l’intestin, ou microbiote intestinal, constitue le plus grand réservoir de bactéries de l’organisme. De plus en plus de travaux montrent combien l’hôte et son microbiote intestinal constituent un bel exemple de systèmes ayant des interactions mutuellement bénéfiques. De récentes observations ont d’ailleurs révélé une association entre troubles de l’humeur et altérations du microbiote intestinal. C’est ce qu’avait mis en lumière un consortium de chercheurs de l’Institut Pasteur, du CNRS et de l’Inserm en démontrant l’existence d’un lien entre le microbiote intestinal et l’efficacité de la fluoxetine, une molécule fréquemment utilisée comme antidépresseur. Pourtant, certains mécanismes de la dépression, première cause d’incapacité dans le monde, restaient encore inconnus.

Des chercheurs viennent de découvrir dans un modèle animal comment une modification du microbiote intestinal, engendrée par un stress chronique, peut être à l’origine d’un état dépressif notamment en provoquant un effondrement de métabolites lipidiques (petites molécules issues du métabolisme) dans le sang et le cerveau.

La baisse de ces métabolites lipidiques, appelés cannabinoïdes endogènes (ou endocannabinoïdes) se traduit par un profond défaut de fonctionnement du système de communication dérivé de ces mêmes métabolites.

 

© Pascal Marseaud

Ces métabolites se lient sur des récepteurs qui sont également la principale cible du THC, le composant actif le plus connu du cannabis.

Les chercheurs ont découvert que lorsque les endocannabinoïdes n’étaient plus présent dans une région clé du cerveau qui participe à la formation de nos souvenirs et des émotions, l’hippocampe, un état dépressif survenait.

Pour arriver à ces résultats, les chercheurs ont étudié les microbiotes d’animaux sains et d’animaux présentant des troubles de l’humeur. Comme l’explique Pierre-Marie Lledo, responsable de l’unité Perception et mémoire à l’Institut Pasteur (CNRS/Institut Pasteur) et co-dernier auteur de l’étude : « de façon surprenante, le simple transfert du microbiote d’un animal présentant des troubles d’humeur à un animal en bonne santé suffit à induire des modifications biochimiques, et conférer des comportements synonymes d’un état dépressif chez ce dernier ».

Les chercheurs ont identifié certaines espèces bactériennes qui sont fortement diminuées chez les animaux présentant des troubles d’humeur. A l’inverse, ils ont montré qu’avec un traitement oral avec ces mêmes bactéries, il est possible de restaurer un niveau normal de ces dérivés lipidiques et, par conséquent, traiter l’état dépressif.

Ainsi, ces bactéries pourraient agir en tant qu’antidépresseur. On parle alors de « psychobiotiques ».

« Cette découverte démontre comment le microbiote intestinal contribue au fonctionnement normal du cerveau» poursuit Gérard Eberl, responsable de l’unité Microenvironnement et immunité (Institut Pasteur/Inserm) et co-dernier auteur de l’étude. En cas d’un déséquilibre de cette communauté bactérienne, certains lipides essentiels au bon fonctionnement du cerveau disparaissent, ce qui favorise l’émergence d’un état dépressif. Dans ce cas précis, l’usage de certaines bactéries pourrait être un levier efficace pour rétablir un microbiote sain et lutter plus efficacement contre les troubles de l’humeur.

Une thérapie génique innovante pour redonner la vue à des patients atteints d’une maladie rare

Cette photo est issue de travaux de recherche sur la thérapie génique dans le traitement de la cécité. Rétine de primate non humain après le transfert d’un gène de protéine fluorescente par un virus adéno-associé (AAV). On distingue les cellules photoréceptrices à cônes (en vert) ayant intégré le gène. © Inserm/Dubus, Elisabeth.

 

Les personnes atteintes de neuropathie optique héréditaire de Leber perdent la vue dès l’adolescence avec un déclin soudain au niveau des deux yeux, jusqu’à la cécité. Alors que les options de traitements étaient jusqu’ici très limitées, des chercheurs de l’Inserm, de Sorbonne Université et du CNRS à l’Institut de la Vision à Paris ont conçu une approche de thérapie génique pour ces patients. Les résultats d’un essai clinique mené sur 37 patients et publiés dans la revue Science Translational Medicine, montrent que ce traitement améliore de façon significative la vision de ces patients. GenSight Biologics (EURONEXT: SIGHT), une start-up issue de l’Institut de la vision, a mis au point et réalisé le développement clinique de ce traitement. Celui-ci a ensuite été évalué dans un essai clinique international multicentrique produit par un consortium en Europe et aux Etats-Unis, comprenant les équipes de Patrick Yu-Wai-Man de l’UCL Institute of Ophthalmology et de José-Alain Sahel (professeur à Sorbonne Université et directeur de l’Institut de la Vision) à la Fondation Ophtalmologique Rothschild et du CHNO des Quinze-Vingts.

La neuropathie optique héréditaire de Leber (NOHL), est une maladie héréditaire qui se manifeste par une baisse brutale et bilatérale de la vision pouvant conduire à la cécité. Elle est causée par des mutations de l’ADN mitochondrial[1] qui affectent la production de la protéine ND4. Cette perte visuelle intervient généralement chez l’homme jeune sur un œil puis quelques mois plus tard sur le deuxième œil. La pathologie touche une personne sur 30 000 à 50 000.

Dans l’espoir d’aider ces patients, l’équipe de Marisol Corral-Debrinski avec José-Alain Sahel et Serge Picaud à l’Institut de la Vision (Inserm/Sorbonne Université/CNRS) a mis au point un traitement qui repose sur une nouvelle approche de thérapie génique, permettant pour la première fois au monde de corriger un défaut d’un gène mitochondrial (le gène ND4)[2].

La thérapie génique est une stratégie thérapeutique qui consiste à introduire du matériel génétique dans des cellules pour soigner une maladie. Pour permettre au traitement de pénétrer correctement dans les cellules d’un patient, les scientifiques utilisent dans la plupart des cas un vecteur viral qui assure son transport jusqu’au noyau. Mais pour utiliser cette stratégie dans la neuropathie optique héréditaire de Leber, les chercheurs étaient confrontés à un obstacle majeur : comment cibler la mitochondrie alors que le vecteur viral introduit l’ADN porteur du gène correct dans le noyau ?  

L’équipe a développé une approche innovante qui consiste à ajouter au gène des séquences d’ADN dites « séquences d’adressage ». Leur fonction est d’assurer que la traduction du matériel génétique en protéines fonctionnelles se fasse directement au contact des mitochondries.

Dans l’essai clinique baptisé REVERSE qui a été réalisé par un consortium international en Europe et aux États-Unis et portait sur 37 patients, les chercheurs ont démontré l’efficacité de cette approche par la mesure d’une réelle amélioration clinique.

En effet, ils ont montré que l’injection du vecteur de thérapie génique dans un œil permettait une amélioration bilatérale de la vision chez plus de ¾ des patients. L’amélioration se traduit par une augmentation moyenne de 15 lettres EDTRS pour l’œil traité (3 lignes sur le tableau de lettres utilisé pour déterminer l’acuité visuelle chez les ophtalmologistes).

Cet effet bénéfique sur les deux yeux suite à une injection dans un seul œil était inattendu. Pour mieux comprendre le phénomène, GenSight Biologics et les auteurs de l’étude ont testé à nouveau la thérapie chez l’animal et ont montré que cet effet bilatéral s’explique par le transfert du gène sain d’un œil à l’autre.

 « Cette découverte ouvre des perspectives nouvelles pour le traitement des patients atteints de neuropathie optique de Leber, alors qu’il n’en existait jusqu’à aujourd’hui aucun de réellement efficace. Nos résultats démontrent l’efficacité de cette thérapie génique innovante dans l’œil, ce qui offre une véritable option thérapeutique contre la cécité pour les patients. Ils ouvrent par ailleurs des perspectives pour son application pour d’autres maladies mitochondriales dans d’autres tissus », soulignent les auteurs de l’étude.

Suite à ces travaux, une demande d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) du vecteur de thérapie génique innovant, testé dans l’essai et appelé LUMEVOQ, a été déposée en septembre par GenSight Biologics auprès de l’Agence réglementaire européenne (EMA).

 

[1] Les mitochondries sont des organelles présentes dans les cellules, à l’extérieur du noyau. Elles sont essentielles à la production d’énergie. Elles possèdent leur propre matériel génétique, l’ADN mitochondrial, qui code pour un certain nombre de protéines, dont la protéine ND4, affectée dans la neuropathie optique de Leber.

[2] Le développement de cette thérapie a été réalisé par GenSight Biologics, en collaboration avec l’Institut de la vision, le CHNO des Quinze Vingts et la Fondation Ophtalmologique Rothschild. Des centres experts ont participé aux études cliniques, et plus largement un consortium international en Europe et aux Etats-Unis.

Découverte d’un mécanisme expliquant l’action bénéfique de l’anti-cancéreux tamoxifène sur le système cardiovasculaire

Image montrant le processus de cicatrisation endothéliale chez la souris 3 jours après l’agression de l’artère carotidienne. © Coralie Fontaine.

Très largement utilisé dans le traitement de certains cancers du sein, le tamoxifène agit sur les cellules cancéreuses en bloquant le récepteur des œstrogène (ER)a et en inhibant ainsi leur prolifération. L’action de ce médicament semble néanmoins plus complexe, avec en supplément des effets protecteurs sur les artères, ce qui pourrait diminuer le risque de maladies cardiovasculaires. Des chercheurs de l’Inserm et de l’université Toulouse III – Paul Sabatier à l’Institut des maladies métaboliques et cardiovasculaires se sont intéressés aux effets du tamoxifène sur les artères dans des modèles animaux afin de mieux comprendre son mode d’action et d’affiner son utilisation clinique. Leurs résultats sont publiés dans le journal Circulation Research.

Après un cancer du sein, les femmes sont plus à risque de développer des maladies cardiovasculaires. Plusieurs études ont confirmé cette association, soulignant des facteurs de risque communs aux deux types de pathologies, mais aussi la toxicité de certains traitements anticancéreux comme les chimiothérapies anti-cancéreuse sur le système cardiovasculaire. Des données expérimentales et cliniques suggèrent néanmoins que le tamoxifène, une hormonothérapie qui permet de réduire les risques de récidives de certains cancers du sein[1], aurait en même temps des effets protecteurs contre les maladies cardiovasculaires.

Dans les cellules cancéreuses, le tamoxifène agit comme un anti-œstrogène : sans supprimer la production de cette hormone, il prend sa place au niveau de leurs récepteurs (les récepteurs ERa), bloquant ainsi la prolifération de ces cellules.  

Toutefois, ce médicament ne se limite pas à bloquer les récepteurs des œstrogènes des cellules cancéreuses. En effet, dans d’autres types de cellules, il pourrait à l’inverse activer ces mêmes récepteurs, comme le font les œstrogènes.

Des mécanismes d’action différents

Dans leur étude, les chercheurs ont pu montrer que le tamoxifène accélérait la cicatrisation des artères en favorisant le renouvellement de la couche de cellules endothéliales qui protège les artères. Ils révèlent ainsi un nouvel effet bénéfique de ce médicament vis-à-vis du risque cardiovasculaire.

Pour expliquer cette nouvelle action bénéfique du tamoxifène, l’équipe montre que contrairement à son action bloquante sur les cellules cancéreuses, le tamoxifène mimerait l’action des œstrogènes au niveau des artères, ce qui entraînerait la cicatrisation artérielle.

Cependant, les mécanismes cellulaires en jeu seraient différents.

Tandis que l’estradiol (l’œstrogène majoritaire) induit cet effet en activant directement les récepteurs des œstrogènes dans les cellules endothéliales des artères, les chercheurs montrent que le tamoxifène produit ce même effet sur les artères en activant lui aussi le récepteur des œstrogènes, mais dans un autre type de cellules (les cellules musculaires lisses sous-jacentes).

Ces travaux apportent donc une nouvelle compréhension de l’action du tamoxifène, montrant que cette molécule peut mimer l’action des œstrogènes en ciblant des fonctions différentes de leurs récepteurs dans des types cellulaires différents.

Ces résultats pourraient avoir plusieurs implications cliniques, notamment parce qu’ils permettent de mieux appréhender le spectre d’action de ce médicament très largement prescrit à des milliers de patientes en cancérologie.

Ils devraient aussi susciter d’autres travaux sur cette molécule utilisée depuis 40 ans.

« La vision que l’on a aujourd’hui du tamoxifène, c’est qu’il s’agit d’une hormonothérapie qui bloque les récepteurs présents sur les cellules cancéreuses, mais ceci n’est qu’une explication partielle de son action. Notre étude souligne que ce médicament mime les œstrogènes en ciblant des voies qui ne sont pas toujours celles qu’on anticipe. Nous avons mis en évidence un effet protecteur des artères en jouant de manière indirecte sur les cellules endothéliales, mais cette action pourrait aussi avoir des effets sur les cellules du système immunitaire, qui jouent un rôle clé dans la surveillance immunitaire des tumeurs », soulignent Jean-François Arnal, professeur à l’université Toulouse III – Paul Sabatier, et Coralie Fontaine, chercheuse Inserm, qui ont coordonné ces travaux.

 

[1] Les cancers dits « hormonodépendants », pour lesquels les cellules cancéreuses expriment le récepteur des œstrogènes

Prix Inserm 2020 : L’excellence scientifique au service de la lutte contre la pandémie de Covid-19

La cérémonie annuelle des prix Inserm s’est tenue mardi 8 décembre. Dans le but de valoriser la recherche d’excellence, l’Inserm distingue cette année huit lauréats, scientifiques et administratifs dont les travaux ont contribué tout au long de l’année à améliorer les connaissances sur la Covid-19.

« Profondément marquée par la crise sanitaire liée à la Covid-19, l’année 2020 a bouleversé nos vies, tant professionnelles que personnelles. Dans ce contexte exceptionnel, tous les collaborateurs de l’Inserm ont su continuer à faire avancer la recherche biomédicale et ont redoublé de volonté et d’efforts. C’est pour mettre en lumière ce formidable élan collectif que l’Inserm a décidé d’attribuer ses Prix 2020 à huit acteurs impliqués dans la recherche sur la Covid-19 et, à travers eux, à leurs équipes, qui œuvrent ensemble contre cette maladie émergente », salue Gilles Bloch, PDG de l’Inserm.

Le Grand Prix Inserm 2020 a été décerné à Dominique Costagliola, Directrice de recherche à l’Inserm et adjointe de l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique. Spécialiste du VIH et des maladies infectieuses, l’épidémiologiste a été appelée sur le front de la lutte anti-Covid dès janvier 2020, avec pour mission d’éclairer de son expertise les efforts de recherche qui se sont rapidement mis en place. L’Inserm est ravi de récompenser sa chercheuse pour l’ensemble de sa carrière remarquable.

 

GRAND PRIX INSERM 2020

DOMINIQUE COSTAGLIOLA

Épidémiologiste, Directrice de recherche à l’Inserm, Directrice adjointe de l’Institut Pierre-Louis de santé publique

©Inserm/François Guénet

Épidémiologiste, Directrice de recherche à l’Inserm, Dominique Costagliola se lance dans la recherche sur le VIH dès 1986, au début de l’épidémie de sida. Tout au long de sa carrière, Dominique Costagliola développe plusieurs expertises déterminantes pour la compréhension du VIH et celle des infections en général. Ses travaux ont fortement contribué à faire reculer la progression du virus en améliorant les connaissances sur la maladie, les stratégies de traitement antirétroviraux ou encore la prévention de l’infection. « Je n’oublie jamais que derrière chaque chiffre, il y a des personnes. Au début des années 1990, l’espérance de vie des personnes séropositives était faible. J’avais des réunions régulières avec des membres d’associations de patients dont certains présents les fois précédentes avaient été emportés par la maladie lors de la réunion suivante. Cela m’était intolérable. Heureusement la recherche a fait d’énormes progrès sur le sujet. » Début 2020, le consortium REACTing de l’Inserm, chargé de coordonner la recherche sur les épidémies de maladies émergentes, appelle en renfort Dominique Costagliola pour rejoindre son comité scientifique et mettre son expertise de la recherche anti-VIH au service de la lutte anti-Covid.

 

PRIX RECHERCHE 2020

FLORENCE ADER

Médecin, Infectiologue et pneumologue à l’hôpital de la Croix-Rousse (Lyon) et chercheuse au Centre international de recherche en infectiologie

©Inserm/François Guénet

Clinicienne de terrain, Florence Ader est également chercheuse au sein d’une unité Inserm. Cette double casquette lui a valu de piloter le grand essai clinique Discovery lancé en mars 2020. Conduit sous l’égide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le cadre de son étude internationale Solidarity, cet essai français vise à tester plusieurs traitements contre la Covid-19 notamment par le biais de repositionnement de médicaments déjà existants. Si à ce jour, les premiers traitements proposés n’ont pas fait preuve d’efficacité, le formidable réseau de recherche clinique créé à cette occasion est opérationnel pour permettre d’essayer de nouveaux traitements candidats contre la covid-19.

France MENTRÉ

Biostatisticienne et épidémiologiste à l’Hôpital Bichat APHP/Inserm

©Inserm/François Guénet

Biostatisticienne, France Mentré dirige plusieurs équipes de recherche avant de cofonder son laboratoire en 2014 : l’unité 1137 « Infection, antimicrobiens, modélisation, évolution ». Depuis le début de la pandémie de la Covid-19, ce laboratoire multidisciplinaire s’est fortement mobilisé, avec notamment la mise en place et le suivi de grands projets de recherche. France Mentré est ainsi la responsable méthodologique de l’essai Discovery et co-responsable méthodologique de la cohorte French Covid, destinée à l’étude des formes graves de la maladie. En septembre 2020, elle devient la première française à intégrer le comité scientifique spécial Covid-19 du réseau de recherche international Isaric.

 

PRIX OPECST-INSERM

YAZDAN YAZDANPANAH

 Infectiologue et Directeur de l’Institut thématique immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie de l’Inserm

©Inserm/François Guénet

Dès le début de la crise sanitaire, l’équipe du consortium Inserm REACTing est montée au front pour coordonner les travaux de recherche sur la Covid-19 en France. À travers son directeur Yazdan Yazdanpanah, elle est lauréate du Prix Opecst-Inserm, qui récompense les liens entre science et société. Ses différents membres sont intervenus régulièrement dans les médias ou lors de conférences pour partager l’avancées des connaissances scientifiques sur le SARS-Cov2 avec le grand public. Une mission plus que jamais nécessaire à l’heure de la montée en puissance des fausses informations et de la défiance vaccinale.

 

PRIX INNOVATION

FRÉDÉRIQUE LESAULNIER

Déléguée à la protection des données de l’Inserm

©Inserm/François Guénet

Docteur en droit, spécialiste en protection des données dans la recherche médicale, Frédérique Lesaulnier est déléguée à la protection des données de l’Inserm. Dès le début de l’épidémie de la Covid-19, elle a travaillé aux côtés de la Cnil pour obtenir les autorisations nécessaire à la mise en place d’études dans le respect de la confidentialité des données et des personnes.

HÉLÈNE ESPÉROU

Responsable du Pôle recherche clinique de l’Inserm

©Inserm/François Guénet

Responsable du pôle recherche clinique de l’Inserm, Hélène Espérou et son équipe ont accompagné, depuis janvier, plus d’une dizaine de projets de recherches cliniques portant sur la Covid-19. Ils sont notamment chargés d’obtenir les autorisations réglementaires de les suivre jusqu’à la publication des résultats.

JEAN-CHRISTOPHE HÉBERT

Directeur du Département des affaires juridiques de l’Inserm

©Inserm/François Guénet

Lors de la crise sanitaire, Jean-Christophe Hébert, directeur du Département des affaires juridiques de l’Inserm et son équipe ont fortement contribué au montage des contrats notamment dans leur aspect juridique pour permettre aux projets de recherche en lien avec la Covid-19 de voir le jour.

 

PRIX INTERNATIONAL

ANTHONY FAUCI

Directeur de l’Institut américain des allergies et des maladies infectieuses (Bethesda / USA)

©NIAID

Expert des maladies infectieuses de renommée internationale, Anthony Fauci est à la tête de l’Institut américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID) depuis 36 ans. Il a travaillé sur les plus grands virus : VIH, Zika, Ebola… Découvert par le grand public en mars dernier, lors des briefings télévisés quotidiens sur l’évolution de l’épidémie aux Etats-Unis, il a été appelé par le Président américain pour être le principal conseiller médical et membre de son équipe Covid. Il joue un rôle déterminant dans l’information du public sur la Covid-19 et en matière de stratégies et de conseils pour contenir au mieux l’épidémie.

Des anticorps particulièrement actifs pour faire barrière au SARS-CoV-2

Image colorisée de cellules bronchiques humaines (bleues) infectées par le virus SARS-CoV-2 (orange). 

© Institut PasteurImage par Rémy Robinot, Mathieu Hubert, Vincent Michel, Olivier Schwartz & Lisa Chakrabarti, colors by Jean Marc Panaud

Des équipes de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP, de Sorbonne Université, de l’Inserm et de l’Institut Pasteur ont mené des travaux pour étudier le rôle que jouent les anticorps de type IgA dans la protection de l’organisme contre la Covid-19 au niveau des muqueuses, notamment respiratoires. Ces travaux sous presse dans Science Translational Medicine, et qui font l’objet d’une pré-publication le lundi 7 Décembre 2020 sur le site de la revue Science Translational Medicine, montrent que la réponse des anticorps IgA joue un rôle primordial pour neutraliser le virus SARS-CoV-2 de manière précoce et particulièrement efficace.

Les anticorps de type IgA jouent un rôle essentiel dans la protection de l’organisme au niveau des muqueuses, notamment respiratoires. Il était donc logique d’étudier cette réponse anticorps particulière chez les patients infectés par le virus SARS-CoV-2. Les chercheurs et cliniciens affiliés au Centre de Recherche CIMI (Sorbonne Université et Inserm) en collaboration avec plusieurs services cliniques de l’APHP-Sorbonne Université et des équipes de l’Institut Pasteur, montrent que la réponse IgA joue un rôle primordial pour neutraliser le virus SARS-CoV-2 de manière précoce et particulièrement efficace.

D’une manière un peu surprenante, les anticorps IgA sont même souvent les premiers anticorps spécifiques du virus détectables. Un profil inhabituel puisque le dogme immunologique veut que la réponse IgM soit dominante lors de la rencontre avec un pathogène inconnu. La stimulation induite par le virus induit une expansion très importante de jeunes cellules sécrétrices d’anticorps IgA (plasmablastes) qui circulent entre le sang et les muqueuses au niveau desquelles elles sont capables de résider. Toutefois, cette réponse des anticorps IgA est lentement déclinante, y compris au niveau salivaire.

Les équipes en charge de ces travaux montrent que dans les premières semaines qui suivent l’infection, les anticorps de type IgA assurent la majeure partie du travail de neutralisation du virus.

Le taux de ces anticorps diminue rapidement dans le sang pour devenir faiblement détectable chez la plupart des sujets 30 jours après le début des symptômes. Ces anticorps restent toutefois plus longtemps détectables et actifs dans la salive (jusqu’à 73 jours après le début des symptômes) même si ce niveau de protection locale semble lui aussi décliner lentement. Chez un sous-groupe de patients ayant présenté une forme ambulatoire peu sévère, il est en effet rapporté qu’environ 6 mois après le comptage, la salive n’exerce plus de pouvoir neutralisant sur le virus. Ces résultats préliminaires sur la salive n’impliquent pas forcément une absence de protection au niveau tissulaire, surtout chez les patients ayant présenté une forme plus sévère de la maladie.

En conclusion, ce travail met en évidence le caractère puissamment protecteur de l’IgA. Il pose la question du rôle possible de l’IgA sécrétoire dans la limitation de la transmission du virus.

Il sera donc intéressant d’évaluer dans quelle mesure les différents vaccins bientôt largement disponibles pourraient induire, ou pas, une réponse IgA systémique, voir mucosale.

Si nécessaire, il pourra être envisagé d’inclure à terme une stimulation locale dans nos stratégies vaccinales, sous la forme par exemple de nébulisations locales.

Les résultats de l’essai Solidarity/Discovery publiés dans le New England Journal of Medicine

© Adobe Stock

Dès le début de la pandémie, l’Inserm via son consortium REACTing a mis en place Discovery, un essai clinique européen visant à évaluer l’efficacité de quatre traitements antiviraux repositionnés dans l’indication de Covid-19 nécessitant une hospitalisation (le remdesivir, l’hydroxychloroquine, le lopinavir et l’interferon beta-1a). En parallèle, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a mis en place un grand consortium d’essais cliniques baptisé Solidarity, dont l’objectif était également de tester l’efficacité de ces quatre traitements. Discovery a donc rejoint Solidarity afin de contribuer à lui fournir des données solides et rigoureuses. Les premiers résultats de Solidarity sont désormais publiés dans le New England Journal of Medicine.

Lancé en mars 2020 sous l’égide de l’essais clinique mondial Solidarity de l’OMS, Discovery est un essai clinique d’efficacité et de tolérance. Il s’agit du seul essai académique européen de grande ampleur portant sur les traitements de la Covid-19.

Portant notamment sur des patients hospitalisés en France et dans d’autres pays européens pour Covid-19 sévère, cet essai est randomisé (les traitements sont attribués aléatoirement aux participants) et ouvert (soignants et patients sont informés du traitement attribué). Les données obtenues dans Discovery font partie des données analysées dans le cadre de Solidarity et présentées dans l’étude du New England Journal of Medicine.

L’analyse porte sur 11,330 patients adultes dans 405 hôpitaux répartis dans 30 pays et inclus les « essais filles » de Solidarity. Les patients étaient divisés en différents groupes pour recevoir soit :

  • La combinaison remdesivir + soins standards
  • La combinaison hydroxychloroquine + soins standards
  • La combinaison opinavir + soins standards
  • La combinaison interferon ou interferon et lopinavir + soins standards
  • Les soins standards administrés à tous les patients hospitalisés pour cause de Covid-19 sévère

Les résultats suggèrent qu’aucun de ces traitements n’a d’effet sur l’amélioration clinique des patients. Aucun d’entre eux ne diminue significativement la mortalité globale, le risque d’avoir recours à la ventilation mécanique ou encore la durée d’hospitalisation.

 Dans le cadre de Solidarity et Discovery, la décision a toutefois été prise de poursuivre les inclusions dans le groupe remdesivir. En effet, la métanalyse présentée dans l’étude suggère que, si la mortalité n’est pas réduite chez les personnes en réanimation sous ventilation mécanique ayant reçu du remdesivir, elle montre que le remdesivir pourrait diminuer légèrement la mortalité dans le sous-groupe des patients hospitalisés ne nécessitant pas de ventilation mécanique. De plus, alors que pour toutes les autres combinaisons thérapeutiques testées dans Solidarity, un consensus scientifique se dégage concernant leur absence d’efficacité contre la Covid-19, les données publiées dans d’autres études restent encore contradictoires concernant le remdesivir.

La décision des investigateurs de poursuivre les inclusions dans ce groupe vise donc à apporter de nouvelles données afin de trancher définitivement sur l’intérêt du remdesivir contre les formes sévères de Covid-19.

Discovery a bénéficié d’un financement de la part de la Commission Européenne et inclus actuellement des patients hospitalisés pour Covid-19 sévère dans cinq pays européens (d’autres pays européens vont bientôt suivre et sont en attente des autorisations réglementaires).

Cancer : un mécanisme clé de résistance à l’immunothérapie identifié

L’absence de la molécule CD226 est un frein qui empêche les lymphocytes tueurs de fonctionner normalement, et est associée à un mauvais pronostic dans diverses pathologies malignes telles que les mélanomes, les cancers du sein, du poumon ou du foie. Radiographie du cancer du poumon ©Inserm/U335

 

Une équipe internationale [1], dirigée par le Dr Ludovic Martinet (chercheur Inserm) et le Pr Hervé Avet-Loiseau du Centre de recherches en cancérologie de Toulouse (CRCT / Inserm, Université Toulouse III – Paul Sabatier, CNRS), vient de publier dans la revue Immunity une étude qui ouvre des perspectives pour améliorer l’efficacité de l’immunothérapie. L’absence d’une molécule chez certains patients atteints de cancer, le CD226, serait l’une des clés de compréhension de la résistance à l’immunothérapie.

Immunothérapie et résistance thérapeutique

Même si la plupart des cancers sont difficilement guérissables lorsqu’ils sont diagnostiqués à un stade avancé, une nouvelle stratégie thérapeutique semble pouvoir inverser la tendance ces dernières années : l’immunothérapie. Au lieu de s’attaquer directement aux cellules tumorales, cette approche vise à stimuler les « défenses » des patients, leur système immunitaire, afin de lutter contre les cellules tumorales.

L’immunothérapie a pour but de « réveiller » le système immunitaire des malades pour qu’il élimine les cellules cancéreuses. Les lymphocytes tueurs représentent les acteurs du système immunitaire les plus prometteurs contre le cancer.

Selon l’Institut national du cancer (INCa), on estime à 382 000 le nombre de nouveaux cas de cancer par an en France métropolitaine. Avec 150 000 décès par an, le cancer représente la première cause de mortalité prématurée en France. 

Ces dernières années, les chercheurs ont pu mettre en évidence que de nombreuses molécules augmentent ou freinent les capacités anti-cancéreuses des lymphocytes tueurs. Plusieurs traitements qui augmentent la destruction des cellules cancéreuses par le système immunitaire ont ainsi été générés dont certains ont déjà prouvé une efficacité importante dans le traitement des cancers.

Cette approche se fonde notamment sur l’utilisation d’anticorps monoclonaux appelés immunomodulateurs car ils lèvent les mécanismes d’inhibition du système immunitaire induits par la tumeur. Ces mécanismes sont communs à divers cancers et ces traitements récents ont des indications dans déjà sept types de cancers : poumon, rein, vessie, tête et cou, mélanome, maladie de Hodgkin et maladie de Merkel. Ils sont actuellement évalués dans de nombreux autres cancers. Injectés par voie sanguine, ces médicaments ont une action systémique sur les tumeurs primaires et les métastases.

L’analyse de 19 études internationales menées sur 11 640 patients atteints par différents types de cancers montre que 25 % de ceux traités par immunothérapie ont présenté une «réponse durable», contre seulement 11 % chez ceux qui ont reçu une autre famille de traitements (chimiothérapie ou thérapie ciblée).

Si ces médicaments sont prometteurs, ils ne sont malheureusement pas efficaces pour tous les patients et il est donc nécessaire d’identifier d’autres mécanismes qui régulent la destruction des cellules cancéreuses par les lymphocytes tueurs. Les recherches en cours cherchent donc à identifier et étendre le nombre de patients répondeurs aux immunothérapies.

Le CD226, une molécule indispensable

Grâce à des approches complémentaires, impliquant des échantillons de 177 patients atteints de divers cancers (poumon, sein, ovaire et myélome) et des modèles expérimentaux de tumeurs, l’équipe de recherche du Dr Ludovic Martinet et du Pr Hervé Avet-Loiseau a récemment identifié une molécule indispensable pour les fonctions des lymphocytes tueurs: le CD226. Elle permet aux lymphocytes tueurs de reconnaitre les cellules cancéreuses, une étape nécessaire à la destruction de ces dernières.

Les travaux de cette équipe de recherche ont également mis en évidence que la molécule CD226 était fréquemment absente à la surface des lymphocytes tueurs des patients atteints de cancer.

L’absence de la molécule CD226 est un frein qui empêche les lymphocytes tueurs de fonctionner normalement, cette absence étant associée à un mauvais pronostic dans diverses pathologies malignes telles que les mélanomes, les cancers du sein, du poumon ou du foie.

En collaboration avec des chercheurs australiens (équipe du Pr Smyth, QIMR Berghofer) l’équipe toulousaine a pu observer que l’expression de la molécule CD226 était nécessaire pour permettre aux immunothérapies de réactiver les lymphocytes tueurs et le niveau d’expression de la molécule CD226 semble être un indicateur de réponse à ce type de traitement dans le mélanome métastatique. Ces observations paraissent donc démontrer que l’absence de CD226 représente un mécanisme clé de résistance des tumeurs au système immunitaire. Cette molécule conditionne la réponse aux immunothérapies actuelles.

Une collaboration inter-institutions et internationale

Cette étude est le fruit de la collaboration entre les membres du CRCT et les cliniciens de l’IUCT-Oncopole mais aussi d’échanges avec le Centre de physiopathologie de Toulouse Purpan (Inserm, Université Toulouse III – Paul Sabatier, CNRS), des chercheurs australiens (QIMR berghofer, Brisbane) et belges (Bruxelles).

À terme, ces découvertes pourraient conduire à la mise au point de nouveaux traitements afin de rendre plus performante l’action des immunothérapies actuelles et de guérir un plus grand nombre de patients atteints de cancer. Cela ouvre également des perspectives d’autres types de pathologies telles que les maladies virales dont on sait que les lymphocytes tueurs sont les principaux effecteurs.

 

Ces travaux ont pu être réalisés grâce à l’aide de La Fondation ARC, l’Institut National du Cancer, le Cancer Research Institut (Bristol-Myers Squibb CLIP Grant) et la Fondation Toulouse cancer santé (IUCT-O translational research program).

 

[1]Le Centre de physiopathologie de Toulouse Purpan (CPTP – CNRS/Université Toulouse-III – Paul-Sabatier/INSERM) et le Centre international de recherche en infectiologie (CIRI – INSERM/CNRS/ENS Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1), Centre méditerranéen de médecine moléculaire (C3M – INSERM/Université Nice Sophia Antipolis, CHU de Nice et l’Institut universitaire du Cancer (IUCT) ont également participé à ces travaux.

Un dérèglement du microbiote est associé à la formation d’une molécule favorisant le diabète de type 2

L’alimentation joue un rôle important dans la composition du microbiote intestinal. En effet, à partir des aliments consommés, les bactéries intestinales produisent des composés organiques, les métabolites, qui peuvent avoir un impact sur la santé. © Adobe Stock

Une alimentation déséquilibrée est associée à un dérèglement du microbiote intestinal qui favorise les maladies métaboliques comme le diabète. Des chercheurs de l’Inserm, de Sorbonne Université, de l’AP-HP et d’INRAE en collaboration avec une équipe suédoise, montrent que des changements dans la composition du microbiote intestinal entraînent une augmentation des niveaux sanguins d’une molécule appelée le propionate d’imidazole, au sein d’une large cohorte européenne. Cette molécule est connue pour rendre les cellules de l’organisme résistantes à l’insuline et augmenter le risque de diabète de type 2. Les résultats sont publiés dans le journal Nature Communications.

L’alimentation joue un rôle important dans la composition du microbiote intestinal. En effet, à partir des aliments consommés, les bactéries intestinales produisent des composés organiques, les métabolites, qui peuvent avoir un impact sur la santé s’ils sont présents en trop grande ou trop faible quantité dans l’organisme.

Des études ont précédemment montré que les changements dans la composition du microbiote intestinal et la production de certains métabolites peut directement influencer le développement du diabète de type 2.

Elles ont par exemple mis en avant qu’une quantité plus faible des bactéries productrices d’un acide gras connu pour améliorer la sensibilité à l’insuline, le butyrate, est associé à un risque de diabète plus élevé.

D’autres travaux récents suggèrent qu’une altération du microbiote intestinal dérègle le métabolisme de l’histidine, un acide aminé présent dans de nombreux aliments, ce qui entraîne une élévation des niveaux d’un métabolite ; le propionate d’imidazole. Cette molécule bloque l’action de l’insuline, l’empêchant de diminuer les quantités de sucre dans le sang.

L’étude publiée dans Nature Communications confirme ces résultats initiaux dans une large cohorte européenne regroupant 1990 participants originaires de France, Allemagne et Danemark. Il s’agit de la cohorte METACARDIS pilotée par l’Inserm dont l’objectif est d’étudier l’impact des changements du microbiote intestinal sur l’apparition et la progression des maladies cardio-métaboliques et des pathologies associées. « METACARDIS est une base de données unique et précieuse dans le sens où elle nous permet d’accéder à des caractéristiques très détaillées sur chacune des personnes enrôlées dans la cohorte avec de nombreuses précisions phénotypiques, métaboliques et génétiques bactériennes », souligne Karine Clément, médecin, enseignante-chercheuse en nutrition à Sorbonne Université et coordinatrice du projet.

Avec ses collègues, la chercheuse montre que dans la cohorte, les sujets atteints de pré-diabète[1] ou de diabète de type 2 présentent effectivement des niveaux plus élevés de propionate d’imidazole dans le sang. Le microbiote intestinal de ces personnes est par ailleurs caractérisé par un appauvrissement important en bactéries.

Les chercheurs suggèrent que ces altérations de la composition bactérienne du microbiote seraient liées à une alimentation peu équilibrée. Elles entrainent un dérèglement du métabolisme de l’histidine qui entraîne à son tour l’augmentation du propionate d’imidazole et donc des problèmes de régulation de la glycémie. Il y a alors un risque plus élevé de développer un diabète de type 2.

 « Notre étude suggère que les individus qui ont une mauvaise alimentation ont une augmentation du propionate d’imidazole et qu’il y a une association claire entre la composition appauvrie du microbiote, l’alimentation et le diabète de type 2. Elle vise à faire passer un message de prévention, en soulignant qu’une alimentation plus variée permet d’enrichir le microbiote. Cette étude a aussi des implications thérapeutiques puisqu’on pourrait envisager à l’avenir développer des médicaments modifiant la synthèse de certains métabolites dont le propionate d’imidazole », explique Karine Clément.

Plusieurs questions de recherche continuent à se poser et devraient être élucidées dans de futurs travaux s’appuyant sur la cohorte METACARDIS. Les chercheurs veulent notamment comprendre comment l’élévation d’un ou plusieurs métabolites peuvent prédire, chez les personnes diabétiques, le risque de développer d’autres complications comme par exemple des problèmes cardiovasculaires. Ils veulent également étudier comment l’élévation des niveaux de propionate d’imidazole chez les personnes en situation de pré-diabète pourrait augmenter le risque de devenir diabétique plus tôt dans leur parcours clinique. 

Ce large projet de recherche, qui repose sur une étroite collaboration entre plusieurs équipes scientifiques européennes, a reçu un soutien de la communauté européenne (7ème projet cadre Européen FP7-Metacardis), ainsi que de la Fondation Leducq.

 

[1] Le pré-diabète est un trouble glycémique à un stade moins avancé que le diabète proprement dit.  Pour ces personnes, la glycémie à jeun se situe entre 1,10 g/L et 1,25 g/L (une glycémie normale à jeun est inférieure à 1,10 g/L). Le risque de développer un diabète de type 2 ultérieurement est augmenté. 

Trois premiers essais cliniques vaccinaux prévus à partir du mois de décembre via la plateforme COVIREIVAC de l’Inserm

Même si des vaccins sont autorisés dans les prochains mois, la poursuite des essais via COVIREIVAC est nécessaire. © Adobe Stock

A la demande du Ministère des Solidarités et de la Santé et du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, la France, forte de l’excellence de sa recherche clinique en matière de vaccination s’est organisée pour contribuer à l’évaluation des candidats vaccins contre la Covid-19 les plus prometteurs via la plateforme COVIREIVAC de l’Inserm. Trois essais cliniques vaccinaux devraient démarrer en France dès le mois de décembre sous réserve de l’accord des autorités réglementaires. Si les annonces de plusieurs laboratoires pharmaceutiques ces dernières semaines suscitent les espoirs quant à la possibilité de développer et de commercialiser rapidement un vaccin efficace contre la Covid-19, il est indispensable de développer plusieurs vaccins et de compléter la collecte de données, y compris sur ceux ayant des résultats préliminaires prometteurs.

Des accords pour lancer des essais cliniques vaccinaux en France via la plateforme COVIREIVAC de l’Inserm sont conclus avec les industriels Astra Zeneca, Janssen et Moderna. Ces derniers ont été scrupuleusement sélectionnés après avis du Comité scientifique vaccins Covid-19.

Les dossiers ont été déposés auprès de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité des Médicaments et des produits de santé) et d’un CPP (Comité des Protections des Personnes).  Les essais pourront donc démarrer en décembre sous réserve de l’accord de ces autorités réglementaires. 

Même si des vaccins sont autorisés dans les prochains mois, il est impératif de poursuivre les essais afin d’approfondir les connaissances scientifiques notamment sur la durée de la protection et la qualité de la réponse immunitaire. Quelle que soit la stratégie vaccinale adoptée en France et les vaccins qui seront autorisés par les autorités sanitaires, la tenue d’essais cliniques via COVIREIVAC sera poursuivie pour répondre à d’autres questions de recherche qui continuent de se poser.

En effet, afin de répondre au besoin mondial et aux différentes populations, il est impératif de développer plusieurs vaccins. La poursuite des travaux de recherches permet aussi d’élaborer des produits avec des efficacités complémentaires, plus faciles à administrer et/ou moins chers à produire. Par ailleurs, des interrogations scientifiques demeurent.

Quelle est la durée de l’immunité conférée par la vaccination ? Des rappels seront-ils nécessaires ? Les premiers vaccins autorisés pourront-ils être proposés à toutes les populations, des personnes âgées aux jeunes, en passant par les femmes enceintes ? Telles sont les questions auxquelles il convient encore de répondre.

Ces données scientifiques complémentaires permettront d’affiner la stratégie vaccinale qui sera mise en place sur notre territoire.

Le démarrage de trois essais vaccinaux en France grâce à la plateforme COVIREIVAC n’est donc qu’une partie d’un processus de recherche international sans précédent. Selon l’avancée des connaissances sur le SARS-cov2 et la disponibilité des vaccins, les protocoles de recherche pourront être adaptés en fonction de l’évolution de la situation sanitaire, toujours dans une logique de protection des volontaires, de rigueur scientifique et de transparence.  

 

A propos de Covireivac

Mise en place le 1er octobre 2020, la plateforme COVIREIVAC est pilotée par l’Inserm. Le volet opérationnel clinique des différents CHU fait l’objet d’une coordination prise en charge par l’AP-HP.

Depuis le lancement de la plateforme, 40 000 volontaires se sont déjà inscrits pour participer aux efforts de recherche et tester les vaccins. Il s’agit d’une initiative sans précédent en France.

Les inscriptions sont toujours ouvertes à ceux qui le souhaitent. Pour se porter volontaire, il suffit de se préinscrire sur le site www.covireivac.fr et de remplir un premier questionnaire de santé. Le volontaire sera ensuite contacté en fonction des besoins des différents protocoles de recherche (âge, conditions préexistantes, localisation géographique). Il pourra alors confirmer son accord pour participer à l’essai spécifique pour lequel il aura été appelé ou bien choisir d’y renoncer. Il est également possible qu’il ne soit jamais appelé. La participation aux essais cliniques ne garantit pas un accès prioritaire aux vaccins qui seront mis que le marché.

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