Menu

Régénérer les neurones perdus, un pari réussi pour la recherche

neurones

Image de microscopie confocale montrant des neurones induits (rouges avec un noyau jaune) exprimant le marqueur neuronal NeuN (vert) au sein d’un hippocampe de souris épileptique. © Extrait de: Lentini et al., Cell Stem Cell, 2021.

 

De nombreuses pathologies du système nerveux central sont associées à une mort de neurones sans que le cerveau ne soit capable de les régénérer. Ce phénomène est notamment observé dans la maladie de Parkinson ou d’Alzheimer, suite aux accidents vasculaires cérébraux mais aussi dans certaines formes d’épilepsies. Comment régénérer ces neurones perdus ? C’est à cette question qu’a répondu une équipe de chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de l’Université Claude Bernard Lyon 1 à l’Institut Cellule Souche et Cerveau, en collaboration avec le King’s College de Londres. En utilisant un modèle animal d’épilepsie, les chercheurs et chercheuses sont parvenus à transformer des cellules non-neuronales présentes dans le cerveau en nouveaux neurones inhibiteurs qui permettent de diminuer de moitié l’activité épileptique chronique. Ces travaux permettent d’envisager à terme un effet thérapeutique de cette stratégie. Les résultats de cette étude font l’objet d’une publication dans la revue Cell Stem Cell

Notre cerveau est globalement dépourvu de capacités régénératives pour remplacer les neurones endommagés ou perdus. L’objectif de la médecine régénérative est de remplacer les cellules perdues afin de corriger les troubles fonctionnels associés à la perte de ces cellules. La reprogrammation cellulaire directe (par opposition à la reprogrammation en cellules souches pluripotentes induites) a émergé comme une stratégie innovante qui consiste à « reprogrammer » l’identité de certaines cellules non-neuronales présentes au sein même du cerveau malade pour les transformer en neurones. Pour que cette stratégie puisse être efficace, les défis sont nombreux. Les nouveaux neurones doivent s’intégrer dans les réseaux de neurones survivants et prendre le relai des neurones qu’ils remplacent afin de corriger les troubles pathologiques.

C’est cette stratégie qui est explorée dans une nouvelle étude publiée dans la revue Cell Stem Cell. Une équipe de chercheurs associant l’Inserm, le CNRS et de l’Université Claude Bernard Lyon 1 est ainsi parvenue à transformer des cellules gliales du cerveau en nouveaux neurones dans un modèle de souris atteint d’épilepsie mésio-temporale, la forme d’épilepsie pharmaco-résistante la plus fréquente chez l’Homme.

Les cellules gliales en prolifération : une source cellulaire pour générer des neurones

Lors de la mort neuronale, comme observée dans le cas de l’épilepsie mésio-temporale, la forme la plus fréquente d’épilepsie focale de l’adulte, les cellules gliales présentes dans l’environnement direct des neurones endommagés réagissent en se multipliant sans que cette réponse gliale ne résolve le problème.

Dans le cadre de l’étude, les chercheurs ont eu l’idée de tirer parti de cette prolifération et d’utiliser ces cellules gliales surnuméraires. Dans un premier temps, il a fallu identifier des gènes permettant de transformer ces cellules gliales en neurones inhibiteurs, dont la perte joue un rôle clé dans la survenue des crises épileptiques, afin de rétablir l’équilibre des activités neuronales qui a été impacté. Les chercheurs ont ainsi sélectionné des gènes connus pour être impliqués dans la genèse de ces neurones inhibiteurs durant le développement.

En forçant l’expression de ces gènes, ils ont pu reprogrammer l’identité des cellules gliales pour en faire des neurones dits « neurones induits », dont les propriétés sont comparables à ceux disparus dans la maladie. Grâce à une chirurgie stéréotaxique[1], les gènes ont été insérés directement dans le cerveau des souris au niveau du foyer épileptique à l’aide de vecteurs viraux désactivés induisant la reprogrammation des cellules gliales. En quelques semaines, la grande majorité de ces cellules gliales ayant reçu les gènes s’étaient transformées en nouveaux neurones.

Des neurones fonctionnels intégrés dans le réseau épileptique

Les résultats de l’étude indiquent que les neurones induits adoptent une identité de neurones inhibiteurs qui présentent un ensemble de caractéristiques moléculaires comparables à celles des neurones qui ont dégénéré dans l’épilepsie. 

Grâce à des enregistrements électrophysiologiques, les scientifiques ont pu confirmer qu’il s’agissait bien de neurones fonctionnels, capables d’inhiber les neurones voisins responsables des crises, réduisant ainsi leur activité. Puis, grâce à des traçages des connexions entre les neurones, ils ont pu déterminer que les neurones induits étaient pleinement intégrés dans le réseau épileptique mais également plus largement dans le cerveau.

Enfin, grâce à des enregistrements électroencéphalographiques (EEG) réalisés dans le foyer des crises, les chercheurs ont pu montrer chez les souris reprogrammées une réduction de moitié des crises épileptiques.

« Ces résultats révèlent ainsi le potentiel thérapeutique de cette stratégie de reprogrammation cellulaire pour combattre une pathologie comme l’épilepsie mésio-temporale. Une aubaine dans le cas précis de cette maladie alors que 30% des patients qui en sont atteints sont réfractaires aux traitements pharmacologiques », explique Christophe Heinrich, concepteur de l’étude.

Même si la route est encore longue avant d’aboutir à une réelle transposition de ces recherches aux patients, cette étude met en lumière la reprogrammation des cellules gliales en neurones comme une nouvelle stratégie capable de modifier une pathologie telle que l’épilepsie, mais qui pourrait se généraliser à d’autres pathologies dévastatrices de notre cerveau.

 

[1] Technique utilisée en neurochirurgie pour atteindre des zones du cerveau de manière précise grâce à un système de coordonnées 3D dans l’espace.

« Fake news santé » : le livre de l’Inserm pour que tout le monde ait accès à une information scientifique rigoureuse et crédible concernant sa santé

 

chocolat et santé

Le chocolat noir, meilleur pour la santé que le chocolat au lait ? L’Inserm s’attaque aux fake news et idées reçues dans son nouveau livre. © JP Courbaize

Alors que les effets de la crise sanitaire continuent de se faire ressentir, comment répondre aux nombreuses interrogations des citoyens en matière de santé et faire place à une parole scientifique utile au quotidien ? Plus que jamais mobilisé sur cette question, soucieux de fournir une information scientifique solide à tous et à toutes, l’Inserm publie un livre aux éditions du Cherche midi afin de déconstruire toutes les « fake news » et idées reçues en santé.

Jeûner serait bon pour lutter contre le cancer, les stérilets rendraient stériles ou encore le VIH serait transmis par les piqûres de moustiques : dans le domaine de la santé, les fausses informations ont toujours existé. Toutefois, la démultiplication des canaux de communication et notamment l’essor des réseaux sociaux leur ont donné une visibilité nouvelle et plus forte. Nous l’avons tous constaté, la crise sanitaire a été le théâtre de polémiques virulentes, mettant en avant des paroles individuelles parfois au détriment de la parole scientifique collective.

Face à cette problématique, l’Inserm s’est mobilisé de manière très précoce contre les fausses informations, avec la diffusion de sa série de vidéos Canal Détox, dès 2018. Ces vidéos scientifiques pédagogiques visent à établir pour chacun une information scientifique fiable sur des sujets de santé qui préoccupent les citoyens. Avec la pandémie de Covid-19, l’initiative a été étendue à la publication de textes informatifs pour réagir rapidement à certaines informations erronées devenues virales, toujours en s’appuyant sur la parole scientifique rigoureuse et mesurée des dirigeants, chercheurs et chercheuses de l’Inserm.

Afin d’intensifier les efforts pour ouvrir la science au plus grand nombre, l’Inserm s’est associé aux éditions du Cherche midi pour décliner son label Canal Détox en livre. A travers une approche didactique et thématique, le recueil décortique près de 80 fausses informations en santé. Covid bien entendu, mais aussi alimentation, cancer, santé mentale, VIH… de nombreuses idées reçues sont battues en brèche, en s’appuyant sur les données scientifiques les plus récentes et sur l’expertise des chercheurs et chercheuses de l’Inserm.

« Alors que la crise sanitaire a révélé le besoin pour chaque citoyen de s’informer et de pouvoir prendre des décisions éclairées pour protéger sa santé, la devise de l’Inserm ‘La Science pour la Santé’ est plus que jamais d’actualité. Ce projet de livre illustre notre volonté de continuer à faire de l’Inserm une référence pour dialoguer avec la société et rendre la science biomédicale accessible au plus grand nombre », souligne le Dr. Gilles Bloch, P-DG de l’Inserm.

En librairie à partir du 30 septembre, ce livre à destination du grand public conserve l’angle ainsi que le ton quotidien et moderne des vidéos du label Canal Détox, en abordant les questions scientifiques les plus sérieuses et complexes. Au-delà d’apporter des réponses aux interrogations des lecteurs en matière de santé, il entend aussi partager avec toutes et tous les méthodes de la démarche scientifique rigoureuse, éthique et transparente à l’œuvre dans les 300 laboratoires de l’Inserm.

SARS-CoV-2 : des réponses immunitaires différentes observées dans la muqueuse nasale et dans le sang

©Adobe Stock

 

Les manifestations cliniques développées à la suite d’une infection par le SARS-CoV-2 sont variables chez les individus, et les mécanismes pouvant expliquer cette variabilité restent encore méconnus. La muqueuse nasale étant un des premiers points d’entrée du virus, des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Inserm, en collaboration avec l’Hôpital Cochin AP-HP, ont étudié en parallèle les réponses immunitaires dans la muqueuse nasale et dans le sang de personnes infectées par le SARS-CoV-2. Les scientifiques ont montré que chez ces personnes atteintes de Covid-19, les réponses immunitaires dans la muqueuse et dans le sang faisaient l’objet d’une régulation différente et indépendante. Ils ont également observé une perturbation du microbiote nasal, favorisant le développement de bactéries pathogènes opportunistes pouvant être à l’origine d’infections bactériennes secondaires. Ces résultats ont fait l’objet d’une publication dans Nature Immunology, le 1er septembre 2021.

La réponse à l’infection par le SARS-CoV-2 est variable selon les individus, allant de symptômes légers à une pneumopathie grave. Les mécanismes à l’origine de cette variabilité, d’un point de vue immunologique, restent encore peu connus et documentés.

La muqueuse nasale étant le plus souvent un des premiers points d’entrée du virus, des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Inserm, en collaboration avec l’Hôpital Cochin AP-HP, ont étudié les réponses immunitaires dans la muqueuse nasale (réponses locales) et dans le sang (réponses systémiques) de patients ayant contracté la Covid-19.

Les scientifiques se sont intéressés à plusieurs éléments liés à la réponse immunitaire : les anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2, les cytokines et les populations bactériennes (ou microbiote nasal) présents dans des échantillons d’écouvillons nasopharyngés et de plasma provenant de patients infectés par le SARS-CoV-2. Ces échantillons proviennent d’une cohorte de patients de l’Hôpital Cochin et ont été prélevés 8 à 12 jours après l’apparition des premiers symptômes.

Les résultats montrent que la réponse immunitaire liée à la production d’anticorps anti-SARS-CoV-2 et à leur capacité neutralisante n’est pas la même dans la muqueuse nasale et dans le sang. « Étonnamment, les patients ayant des anticorps dans le nez n’avaient pas toujours des anticorps dans le sang et vice versa » complète Darragh Duffy, responsable du laboratoire d’Immunologie translationnelle à l’Institut Pasteur et co-dernier auteur de l’étude. Les réponses immunitaires locales (muqueuse) et systémiques (sang) face au virus pourraient donc faire l’objet d’une régulation indépendante.

Les auteurs de l’étude se sont d’autre part intéressés à la production de cytokines. Ils ont observé que la production de cytokines était également différente dans la muqueuse nasale et dans le sang. « L’ensemble de ces résultats suggère que les réponses cytokiniques sont régulées, comme les anticorps anti-SARS-CoV-2, de manière tissu-dépendante », précise James Di Santo, responsable de l’unité Immunité innée/Inserm U1223, à l’Institut Pasteur et co-dernier auteur de l’étude.

Par ailleurs, les scientifiques ont identifié chez les patients atteints de Covid-19 des changements importants au niveau des espèces microbiennes peuplant la muqueuse nasale.

Chez ces mêmes patients, ils ont observé une augmentation de micro-organismes potentiellement pathogènes qui sont souvent impliqués dans les infections respiratoires secondaires. « L’infection par le SARS-CoV-2 pourrait induire des perturbations dans le microbiote nasal, et laisse supposer un lien entre ce dernier et les voies antivirales protectrices », précise James Di Santo.

« Nos résultats permettent de mieux comprendre les réponses immunitaires locales de la muqueuse nasale, un des premiers sites d’infection du virus SARS-CoV-2 », conclut Darragh Duffy.

Ces observations suggèrent que des approches de modulation des défenses immunitaires locales, telles que la vaccination par voie nasale, pourraient représenter des pistes de prévention de la COVID-19

Cancer du sein : la rupture du noyau des cellules tumorales favorise leur dissémination

cellules tumorales humaines

Images de cellules tumorales humaines qui envahissent une matrice de collagène. Les noyaux sont colorés en bleu et la partie de la matrice extracellulaire dégradée par les cellules en rouge.© Guilherme Nader/ Institut Curie

 

Quand les cellules se multiplient et migrent, elles peuvent être comprimées et leur noyau se briser. Ce phénomène entraine des détériorations de leur ADN et des scientifiques du CNRS, de l’Institut Curie et de l’Inserm viennent de montrer qu’il facilite ainsi la dissémination des cellules cancéreuses des tumeurs mammaires. Les résultats de ces recherches sont publiés le 21 septembre dans la revue Cell.

Le noyau d’une cellule remplit une fonction cruciale : protéger l’ADN et permettre son utilisation correcte. Mais il peut être déformé, voire temporairement fracturé, si la cellule est elle-même comprimée et déformée, en cas de migration ou de prolifération par exemple. La compression entraîne alors des détériorations de l’ADN. Avec pour conséquences un vieillissement accéléré des cellules saines et l’acquisition de propriétés invasives par les cellules de tumeurs mammaires, comme vient de le montrer une équipe de recherche du CNRS, de l’Institut Curie et de l’Inserm1.

Les scientifiques ont ici mis en évidence que les ruptures du noyau induites par la compression des cellules permettent à l’ADN d’entrer en contact avec une enzyme destructrice pour lui, appelée TREX1. Sa fonction est normalement de protéger la cellule en détruisant l’ADN des virus qui tenteraient de l’infecter, mais dans ces conditions inhabituelles elle s’attaque à l’ADN de la cellule.

Dans un tissu sain, les cellules montrent alors des signes de vieillissement et stoppent leurs divisions. Toutefois, l’équipe de recherche a observé que les conséquences sont différentes dans une tumeur mammaire : au lieu de tuer les cellules cancéreuses, les dégâts engendrés par TREX1 vont au contraire les rendre plus invasives. Ainsi, lorsque la tumeur grossit trop, les cellules se trouvent compressées et acquièrent alors la capacité de détruire leur environnement pour envahir les tissus voisins, avec des risques de métastases accrus.

Ces résultats révèlent l’importance de l’enzyme TREX1 dans le développement du cancer du sein et aussi dans le vieillissement. Les scientifiques souhaitent maintenant identifier et tester des molécules qui pourraient bloquer son activité. Comme TREX1 a un rôle important dans la modulation de l’inflammation et de l’immunité, ces inhibiteurs pourraient avoir de nombreuses applications en thérapie.

 

1- En France, ont participé à ces travaux des chercheurs et chercheuses du laboratoire Biologie cellulaire et cancer (CNRS/ Institut Curie / Sorbonne Université), du laboratoire Immunité et cancer (Inserm/Institut Curie), du laboratoire Physico-chimie Curie (CNRS/Sorbonne Université/Institut Curie), du laboratoire Processus d’activation sélectif par transfert d’énergie uni-électronique ou radiatif (CNRS/ENS – PSL/Sorbonne Université) et du Centre de recherche des Cordeliers (Inserm/Université de Paris/Sorbonne Université).

Covid-19 : étude sur l’efficacité de la mémoire immunitaire après vaccination ARNm pour reconnaître les variants du SARS-CoV2

Cette étude démontre que les patients infectés lors de la première vague maintiennent une réponse mémoire stable jusqu’à 12 mois. Crédits : Adobe Stock

Les équipes de l’hôpital Henri-Mondor AP-HP et de l’Université Paris-Est Créteil, de l’Inserm, du CNRS, d’Université de Paris, au sein de l’Institut Necker-Enfants malades, et de l’Institut Pasteur ont mené des travaux sur la capacité de la mémoire immunitaire générée après vaccination ARNm à reconnaître et neutraliser les variants du SARS-CoV-2.

Ces travaux, coordonnés par le Pr Mahévas, le Dr Reynaud, le Pr Weill, le Dr Chappert, le Dr Rey et le Dr Bruhns, montrent que des personnes vaccinées avec un vaccin à ARN messager contre le SARS-CoV-2 développent des défenses contre les variants Beta et Delta. Leur système immunitaire produit en effet des cellules à mémoire capables de reconnaitre et neutraliser les variants préoccupants. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication le 20 septembre 2021 au sein de la revue Immunity.

La mémoire immunitaire est un mécanisme qui protège les individus contre la réinfection. Cette stratégie de défense de l’organisme qui est à la base du succès des vaccins comprend la production d’anticorps protecteurs dans le sang (détectés par sérologie) ainsi que la formation de cellules à mémoire, capables de se réactiver rapidement en cellules productrices d’anticorps lors d’une nouvelle infection.

Les équipes de l’hôpital Henri-Mondor AP-HP et de l’Université Paris-Est Créteil, de l’Inserm, du CNRS, d’Université de Paris, au sein de l’Institut Necker-Enfants malades, et de l’Institut Pasteur, ont étudié le devenir des cellules B à mémoire* chez des patients vaccinés par le vaccin à ARN messager et leur capacité à reconnaitre et à neutraliser les variants du SARS-CoV-2.

Cette étude démontre que les patients infectés lors de la première vague maintiennent une réponse mémoire stable jusqu’à 12 mois, et développent, après une dose de vaccin, une excellente mémoire sérologique et cellulaire capable de reconnaitre et de neutraliser les variants Beta et Delta du SARS-Cov-2.

Chez les patients « naïfs » de toute infection, c’est à dire n’ayant jamais été infectés par le virus, la qualité de la réponse sérologique est initialement moins efficace vis-à-vis de ces variants. Néanmoins le pool de cellules à mémoire généré après la vaccination s’améliore au cours du temps et surtout contient des cellules capables de reconnaître et de neutraliser les variants actuels du SARS-CoV-2.

Ces résultats ont été obtenus en étudiant la maturation de cellules B à mémoire de 47 patients ayant contracté la Covid-19 lors de la première vague et de 25 soignants « naïfs » n’ayant pas été infectés par le virus.

Ceci suggère très fortement que les cellules à mémoire des personnes vaccinées avec deux doses de vaccins (ou une seule pour ceux ayant préalablement contracté la COVID-19) protègent des formes graves dues aux variants du Covid-19, en soutien des anticorps protecteurs présents dans le sang. Ce résultat très encourageant suggère aussi qu’en cas de forte circulation virale due aux variants du SARS-CoV-2, une troisième dose de vaccin, en utilisant les vaccins actuellement disponibles contenant la Spike originale de Wuhan, devrait permettre de générer rapidement des anticorps neutralisant les variants Beta et Delta présents actuellement et de réduire la circulation virale.

Ces travaux ont bénéficié d’un financement de la Fondation pour la Recherche Médicale dans le cadre de l’appel de l’ANR-Flash Covid (Projet Memo-Cov-2) et d’un financement ERC (European Research Council Advanced Grant B-response).

*La rencontre avec un nouveau microorganisme pathogène active des lymphocytes B naïfs et induit leur transformation en plasmocytes, des cellules spécialisées dans la production d’anticorps. L’organisme conserve alors une population de lymphocytes B à mémoire et de plasmocytes mobilisables très rapidement en cas de réinfection par le même pathogène ou des pathogènes présentant de fortes similarités.

Covid-19 : identification de cellules immunitaires associées à la survie dans les formes sévères de la maladie

 

lymphocyte immunité

La réponse immunitaire cellulaire est fondée sur la reconnaissance par les lymphocytes T de cellules infectées par le virus. © Adobe Sock

 

Mieux appréhender les mécanismes précis de la réponse immunitaire face au SARS-CoV-2 est essentiel afin d’améliorer la prise en charge des patients et de continuer à développer de nouveaux vaccins efficaces. Depuis le début de la pandémie, de nombreux travaux ont notamment tenté d’expliquer ce qui différencie la réponse immunitaire des personnes atteintes de formes graves et qui décèdent de la Covid-19 de celle des autres patients. Dans une nouvelle étude, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm et de Sorbonne Université au Centre d’immunologie et de maladies infectieuses, en collaboration avec des médecins chercheurs de l’AP-HP, se sont intéressés à un type de réponse immunitaire dite cellulaire. Ils montrent que certaines cellules impliquées dans cette réponse, des lymphocytes T CD8+, sont présents en moindre quantité chez des patients décédés de la Covid-19. Certains de ces lymphocytes constitueraient des marqueurs prédictifs de la survie. Ces travaux sont publiés dans la revue JCI Insight.

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, la réponse immunitaire déclenchée suite à une infection par le virus SARS-CoV-2 a fait l’objet de nombreux travaux de recherche. Alors que le variant Delta s’est propagé à travers le monde, comprendre les mécanismes précis de la réponse immunitaire adaptative[1] face au virus apparait essentiel pour continuer à développer des vaccins efficaces et moins sensibles à l’émergence de nouveaux variants.

Dans la plupart des cas, l’infection par le SARS-CoV-2 n’entraine que des symptômes relativement bénins (voire même des formes asymptomatiques). Toutefois, dans certains cas, des formes graves se développent, associées à des symptômes sévères qui menacent la vie du patient et nécessitent parfois une prise en charge dans un service de réanimation.

De nombreuses publications ont déjà montré que différents profils de réponses immunitaires sont associés à la gravité des symptômes. Cependant, il manque encore des données pour mieux comprendre le rôle des réponses humorales et cellulaires qui constituent la réponse immunitaire adaptative (voir encadré), ainsi que leur implication dans la survie ou le décès des patients présentant les symptômes les plus graves.

Dans leur étude, les scientifiques de l’Inserm, de Sorbonne Université et de l’AP-HP se sont intéressés au profil des réponses immunitaires de 56 patients hospitalisés en réanimation, dont un tiers sont décédés de la Covid-19, avec une attention particulière portée aux réponses de type cellulaire, médiées par les lymphocytes T.  

 

Les réponses immunitaires adaptatives sont classées en deux grandes catégories : les réponses dites humorales, fondées sur la production d’anticorps reconnaissant le virus et capables de l’empêcher d’infecter ses cellules cibles et les réponses dites cellulaires, fondées sur la reconnaissance par les lymphocytes T de cellules infectées par le virus. Ces lymphocytes T vont, via divers mécanismes, contribuer à la destruction des cellules infectées par le virus pour ainsi contrôler l’infection virale et contribuer à l’élimination du virus de l’organisme. Dans le cadre de cette étude, c’est cette réponse cellulaire qui a été au cœur du travail des chercheurs.

Les lymphocytes T sont une population de cellules hétérogènes pouvant être subdivisés en différentes sous populations selon leur phénotype (les molécules qu’ils expriment à leur surface) et leur fonction (destruction de cellules infectées, production de messagers moléculaires, soutient et activation d’autre cellules…). On compte deux grandes familles de lymphocytes : les lymphocytes CD4+ qui soutiennent la production des anticorps et les lymphocytes CD8+, spécialisés dans la destruction de cellules infectées par la production de molécules cytotoxiques.

De nombreuses publications au cours des dernières décennies ont montré le rôle essentiel des réponses de type cellulaire notamment celui des « cellules CD8 effectrices cytotoxiques » (CD8+) dans le cadre d’infections virales comme la grippe chez les personnes âgées ou le VIH.

Des marqueurs de la survie

Dans l’étude, l’équipe a pu observer des différences significatives en ce qui concerne les quantités de certaines sous populations de lymphocytes T, entre les individus ayant survécu et ceux décédés de la Covid-19.

Tout d’abord, les chercheurs ont constaté une perte importante des lymphocytes CD8+ capables de reconnaître la nucléocapside du SARS-CoV-2 chez les individus décédés, par rapport aux individus ayant survécu à l’infection.

La nucléocapside est une molécule interne du virus, très immunogène (c’est-à-dire capable d’induire une réponse immunitaire) et bien conservée d’un variant du SARS-CoV-2 à l’autre.

Par ailleurs, les individus décédés de la Covid-19 présentaient une très faible proportion de lymphocytes CD8+ exprimant deux molécules à leur surface (les molécules PDL1 et CXCR3), par rapport aux individus ayant survécu. Le fait de posséder des lymphocytes CD8+ présentant ces molécules PDL1 et CXCR3 pourrait donc être une signature moléculaire prédictive de la survie.

« Nous avons démontré que la simple combinaison du taux de lymphocytes CD8 spécifiques de la nucléocapside et du taux global de lymphocytes CD8+ exprimant les molécules CXCR3 et PDL1 pouvait prédire la survie ou le décès des patients Covid-19 critiques avec une précision de plus de 90%. Ces deux facteurs sont significativement importants comptes tenus des autres facteurs potentiellement importants dans la gravité, comme par exemple l’âge ou l’obésité, et prédisent de manière plus précise le risque de décès chez les patients atteints de formes graves », souligne la chercheuse Inserm Béhazine Combadière, qui a coordonné l’étude.

Ces résultats ont par ailleurs des implications importantes en ce qui concerne le développement de futurs vaccins. En effet, des vaccins capables de cibler la nucléocapside – une protéine très conservée communes aux coronavirus –  et de produire un taux élevé de lymphocytes CD8+ spécifiques contre cette molécule pourraient être utiles en vaccination préventive mais probablement aussi en vaccination thérapeutique afin de favoriser la survie des patients atteints de formes graves, quel que soit le variant avec lequel ils ont été infectés.

Pour l’équipe, la prochaine étape est de travailler avec des personnes déjà vaccinées, afin de vérifier si elles produisent les cellules immunitaires qui étaient prédictives de la survie chez les patients étudiés dans le cadre de ces travaux.

 

[1] L’immunité innée est une réponse immédiate qui survient chez tout individu en l’absence d’immunisation préalable. Il s’agit de la première barrière de défense vis-à-vis de divers agents pathogènes. Elle fait principalement intervenir des anticorps préformés (naturels) et des lymphocytes ne présentant pas de récepteurs spécifiques à l’antigène.  L’immunité adaptative se met en place au bout de quelques jours après le contact avec l’agent pathogène et constitue la deuxième ligne de défense de l’organisme. Contrairement à l’immunité innée, l’immunité adaptative est spécifique d’un antigène donné.

Absence d’efficacité du remdesivir chez les patients hospitalisés atteints de Covid-19 et poursuite de l’essai DisCoVeRy pour tester un nouveau médicament antiviral

SARS-CoV-2

Microscopie électronique d’une cellule infectée par le SARS-CoV-2 © Philippe Roingeard, Anne Bull-Maurer, Sonia Georgeault, unité Inserm U1259 MAVIVH & Université de Tours, France

 

L’essai clinique Discovery a été initialement lancé en mars 2020 par l’Inserm en France, pour évaluer plusieurs traitements possibles contre la Covid-19. Son expansion européenne a été rendue possible par le projet EU-RESPONSE[1], financé par l’Europe. Une analyse intermédiaire des données de l’essai avait conduit à recommander de suspendre le recrutement des patients dans le groupe testant le remdesivir pour futilité c’est à dire en raison d’une probabilité très faible de conclure au bénéfice de ce traitement même en poursuivant les inclusions. Dans un article publié cette semaine dans la revue The Lancet Infectious Diseases, l’analyse scientifique finale ne met pas en évidence d’amélioration des patients hospitalisés atteints de COVID-19, présentant des symptômes respiratoires requérant de l’oxygène et traités par le remdesivir.

Les données de 832 patients hospitalisés entre mars 2020 et janvier 2021, recrutés dans 5 pays d’Europe (418 patients bénéficiant d’une prise en charge habituelle et 414 recevant en plus le remdesivir) ont été analysées. L’analyse ne montre pas de différence entre les deux groupes sur l’état clinique des malades 15 et 29 jours après avoir reçu la 1ère dose de remdesivir, sur le délai de sortie de l’hôpital ou sur le taux de décès au 28ème jour. Aucune différence entre les groupes n’a non plus été mise en évidence sur la vitesse d’élimination du virus au niveau naso-pharyngé. Les effets secondaires sévères étaient répartis de façon similaire entre les deux groupes de patients. Ces données viennent conforter celles de l’essai Solidarity mené par l’OMS notamment en apportant des résultats sur un nombre plus important de critères de jugement.

Afin de poursuivre l’analyse de l’efficacité des traitements évalués sur un effectif de patients plus important, les données collectées au cours de l’essai Discovery sont utilisées pour la réalisation de méta-analyses. Les données permettant l’analyse de l’efficacité du remdesivir sont ainsi partagées, dans le cadre du projet EU-RESPONSE, avec celles d’autres grandes études internationales, pour préciser les résultats à plus grande échelle.

« 18 mois après son lancement, Discovery a permis de conclure à l’absence de bénéfice thérapeutique de 4 molécules différentes chez des patients hospitalisés pour Covid-19, c’est un énorme travail qui a été mené et qui permet de faire avancer les connaissances sur des bases scientifiques solides. Même si, comme tout le monde, nous aurions préféré prouver qu’un traitement était efficace, nous poursuivons nos recherches avec une approche ciblant spécifiquement le virus », explique Florence Ader, principale investigatrice de l’essai.

Alors que l’épidémie est toujours là, il est en effet primordial de poursuivre l’effort de recherche d’un traitement de la Covid-19, efficace sur le virus et ses nouveaux variants.

L’essai DisCoVeRy se poursuit ainsi dans 14 pays européens, au sein de 80 centres hospitaliers, pour évaluer l’efficacité de la combinaison de deux anticorps monoclonaux ciblant le virus SARS-CoV-2 et ses variants. Ce traitement développé par le laboratoire AstraZeneca apparaît efficace dans un récent essai préventif en réduisant de 77% le risque de développer un COVID symptomatique et donc une hospitalisation et une évolution potentiellement péjorative.

Par ailleurs, un autre essai a démontré une diminution de la mortalité chez des patients hospitalisés avec la COVID-19 n’ayant pas développé d’anticorps naturels et recevant un traitement par anticorps monoclonaux  différent de celui testé dans Discovery. De manière générale, les traitements par les anticorps monoclonaux (plusieurs combinaisons en cours d’essais cliniques) sont donc les premiers antiviraux à montrer une efficacité dans la prévention et le traitement de la Covid-19 chez des patients non immunisés. Poursuivre l’évaluation de l’efficacité de ces anticorps monoclonaux pour des patients hospitalisés est donc importante pour identifier des traitements curatifs permettant de diminuer le nombre de formes graves et la mortalité.

De plus, dans le cadre d’EU-RESPONSE, désormais la plateforme européenne d’essais cliniques en réponse aux maladies infectieuses émergentes, l’essai SolidACT a débuté dans trois pays européens avec comme objectif l’évaluation du Baricitinib chez les patients hospitalisés pour des formes graves de COVID-19.

 

[1] https://cordis.europa.eu/project/id/101015736

Financé par l’Europe ( European Union Horizon 2020 programme for research and innovation), DisCoVeRy est désormais l’axe de recherche 1 du projet EU-RESPONSE (European Reasearch and Preparedness Network for Pandemics and Emerging Infectious Diseases, qui regroupe 21 partenaires (cliniques, centres hospitaliers, universités…) de 13 pays de l’Union Européenne, de la Norvège, de la Suisse et de la Turquie.

[2] https://www.recoverytrial.net/results/monoclonal-antibody-combination-results

Rappel vaccinal Covid-19 : une étude de phase 3 avec le vaccin à protéine recombinante de Sanofi et GSK

Vaccination© Adobe Stock

© Adobe Stock

Plus de 18 mois après la déclaration de la pandémie, le coronavirus SARS-CoV-2 circule encore activement. Afin d’assurer une protection prolongée contre la Covid-19, les autorités sanitaires françaises se sont prononcées en faveur d’une injection de rappel pour les personnes âgées ou vulnérables. Un nouvel essai mené via Covireivac, plateforme coordonnée par l’Inserm, évalue l’immunogénicité (c’est-à-dire la capacité à déclencher une réponse immunitaire) et la tolérance d’un candidat vaccin de Sanofi et GSK en dose de rappel. Cet essai, promu par Sanofi et GSK est mené en lien avec 10 centres hospitaliers en France dont l’AP-HP qui coordonne le volet opérationnel clinique.

Neuf mois après le début de la campagne vaccinale, près de 70% de la population française est vaccinée avec un schéma vaccinal complet contre la Covid-19. Quatre vaccins sont utilisés : deux vaccins ARNm (Pfizer et Moderna) et deux vaccins à vecteur viral (AstraZeneca et Johnson&Johnson). Mais même si plusieurs vaccins contre la Covid-19 sont disponibles, il est impératif de poursuivre les recherches pour compléter et offrir des alternatives aux vaccins existants. Il est notamment important d’en savoir plus sur la nécessité d’avoir recours à des doses de rappels, pour quelle population et à quelle fréquence. Dans ce contexte, plusieurs laboratoires évaluent l’efficacité d’une dose de rappel pour les vaccins existants ou sur le développement de nouveaux vaccins.

« On peut estimer qu’une troisième dose sera utile pour « booster » le système immunitaire, en particulier chez les personnes les plus vulnérables, 6 à 12 mois après la 2ème dose. Le but est de s’assurer que la protection vaccinale est durable et optimale sur le long terme, notamment pour faire face aux nouveaux variants plus contagieux, » indique la Pr Odile Launay, responsable du Centre d’investigation clinique de l’hôpital Cochin à Paris (AP-HP), responsable du réseau I-Reivac et de la plateforme COVIREIVAC.

Un nouvel essai clinique évalue le vaccin de Sanofi et GSK en injection de rappel

Le candidat vaccin de Sanofi et GSK a démontré des résultats encourageants dans un essai de phase 2  lancé en février 2021 auprès de 722 volontaires recrutés aux États-Unis et au Honduras. Le candidat vaccin a induit une production importante d’anticorps neutralisants chez les adultes. Toutes tranches d’âge confondues (18 à 95 ans), cette production atteint des niveaux comparables à ceux observés chez des personnes infectées et rétablies d’une infection COVID-19, et des concentrations encore plus élevées chez les adultes plus jeunes (18 à 59 ans). Chez les participants ayant déjà été infectés par le virus, l’administration d’une seule dose vaccinale entraine une forte réponse immunitaire, soulignant le fort potentiel que représente le développement de ce candidat pour une vaccination de rappel.

A ce titre, un essai vaccinal de phase III, promu par Sanofi et GSK et respectant les standards habituels de la recherche (essai randomisé en double aveugle), a démarré fin juillet aux Etats-Unis et commence en septembre et dans plusieurs pays en Europe, dont la France. L’objectif est d’évaluer l’immunogénicité et la tolérance du vaccin recombinant de Sanofi et GSK contre le SARS-CoV-2 en tant que vaccination de rappel chez des adultes de 18 ans et plus.

En France, il s’agira d’implémenter 2 cohortes conduites dans 10 centres. La première qui a débuté vendredi 3 septembre vise à recruter un maximum de 80 participants qui recevront une dose de rappel avec une première formulation du vaccin déjà testée dans l’étude clinique de phase 2 lancée en février 2021. Une deuxième cohorte devrait débuter en octobre 2021. Les participants recevront la même formulation ou deux autres versions du vaccin incluant une protéine spike différente, issue du variant Beta, apparu pour la première fois en Afrique du Sud. 

La participation à l’essai clinique est ouverte aux adultes âgés de 18 ans ou plus ayant été vacciné contre la Covid 19 par un schéma vaccinal complet, quel que soit le vaccin reçu, la dernière injection devant se situer entre 4 et 10 mois précédent l’inclusion dans l’étude.

Pour participer à ces cohortes, rendez-vous sur le site de la plate-forme d’étude vaccinale Covireivac : www.covireivac.fr

Les particularités du candidat vaccin de Sanofi et GSK

Le candidat vaccin à protéine recombinante adjuvantée de Sanofi et GSK contre la COVID-19 utilise la protéine spike du virus SARS-CoV-2 pour aider l’organisme à reconnaître et combattre le virus si une personne est infectée.

Le candidat s’appuie sur la même technologie éprouvée que celle utilisée pour l’un des vaccins de Sanofi contre la grippe saisonnière, et dont la production à grande échelle est aisée. De plus, les molécules dans le vaccin sont relativement stables ce qui veut dire que ce dernier peut être conservé dans un réfrigérateur à une température comprise entre 2°C et 8°C.

Si l’essai clinique en cours s’avérait concluant, cela octroierait une certaine flexibilité quant à la vaccination. En effet, avec des vaccins de rappels efficaces et interchangeables, les patients seraient moins tributaires de la disponibilité et de la production des doses vaccinales.

Covid-19 : les confinements ont eu un impact délétère sur la sévérité du cancer colorectal métastatique

médecin

Une première visite tardive des patients chez un oncologue et la réduction des tests de dépistage pendant les confinements apparaissent comme les principales causes de la différence de charge tumorale. © Adobe Stock

 

La pandémie de Covid-19 a très fortement fragilisé la lutte globale contre le cancer. Les confinements successifs ont limité l’accès au soin et ont conduit à une réduction significative du dépistage, du diagnostic et de l’orientation vers les hôpitaux des patients atteints de cancer. Des scientifiques de l’Inserm, de l’Université de Montpellier et de l’Institut du Cancer de Montpellier (ICM) ont étudié les conséquences de ces restrictions sur la prise en charge du cancer colorectal en France pendant le premier confinement du printemps 2020. Ils montrent pour la première fois que la charge tumorale, que l’on peut définir comme l’étendue de l’atteinte cancéreuse dans l’organisme, était plus élevée chez les patients ayant eu leur diagnostic de cancer colorectal métastatique après confinement. Ces résultats, publiés dans la revue JAMA, sont clés pour mieux orienter les politiques de santé publique et guider l’accompagnement des patients cancéreux au cours d’éventuels épisodes pandémiques futurs.

Quel est l’impact des confinements sur le diagnostic et la prise en charge d’autres pathologies ? Depuis le début de la pandémie de Covid-19, cette question est régulièrement soulevée par les professionnels de santé. Dans le domaine du cancer notamment, des données suggèrent que les restrictions se sont accompagnées d’un moindre recours au dépistage, d’un retard au diagnostic des patients symptomatiques et d’un accès réduit aux traitements dans de nombreuses régions du monde. 

Afin de mieux accompagner les patients et de mettre en place des mesures adaptées pour faciliter l’accès aux soins, il est nécessaire de disposer de données quantitatives solides sur le sujet. Dans leur nouvelle étude, des chercheurs et des médecins travaillant à l’Inserm, à l’Université de Montpellier et dans différents centres anti-cancéreux à travers la France ont ainsi évalué les conséquences du confinement lié à la pandémie de la Covid-19 sur la charge tumorale de patients diagnostiqués avec un cancer colorectal métastatique.

 

Charge tumorale élevée, survie réduite

Les scientifiques ont recruté 80 patients atteints de cancer colorectal métastatique (48 hommes et 32 femmes) dans 18 centres cliniques français. La moitié d’entre eux avait été diagnostiquée avant le confinement et l’autre moitié après.

La charge tumorale de ces patients a été évaluée par la concentration plasmatique totale d’ADN tumoral circulant, un biomarqueur de l’étendue du cancer dans l’organisme. Plus cette charge est élevée, plus le cancer est évolué et des données préalables montrent que cela s’accompagne d’une probabilité de survie réduite.

Les données obtenues concluent que la charge tumorale était statistiquement beaucoup plus élevée chez les patients nouvellement diagnostiqués d’un cancer colorectal métastatique après le confinement, que chez ceux diagnostiqués avant le confinement. Si cette étude n’offre qu’un instantané d’une situation en évolution, elle met néanmoins clairement en évidence l’importance du diagnostic précoce des patients, et la nécessité de déterminer des actions qui minimiseraient les retards de diagnostic et de prise en charge en période de pandémie.

Afin de poursuivre ces travaux et consolider les résultats, l’équipe est actuellement en train d’étudier les données issues du deuxième confinement.

« Les conséquences délétères de la pandémie sur la prise en charge des cancers avaient jusque-là été surtout théorisées et modélisées. Notre étude est une des premières à les objectiver de manière concrète ce qui me fait craindre des répercussions négatives sur le pronostic des patients pris en charge pour un cancer colorectal métastatique au cours de cette période. Plus globalement, elle vient renforcer l’importance majeure du dépistage et du diagnostic précoce de ce type de pathologies » indique le Dr Thibault Mazard, oncologue médical à l’Institut du Cancer de Montpellier et coordonnateur médical de l’étude.

« Une première visite tardive des patients chez un oncologue et la réduction des tests de dépistage pendant les confinements apparaissent comme les principales causes de la différence de charge tumorale et du risque de survie réduite qui en résulte. Nos données soulignent donc l’importance cruciale d’une détection précoce et du maintien des programmes de dépistage et de l’efficience des services et des professionnels impliqués dans le diagnostic et le traitement des cancers pendant une pandémie. Par ailleurs, il semble nécessaire de mettre en place des interventions de communication adaptées pour minimiser les craintes des patients et encourager l’accès aux soins dans ces périodes », conclut Alain Thierry, chercheur Inserm et coordinateur scientifique de l’étude.

Covid-19 : découverte d’une signature moléculaire des myocardites pédiatriques

enfant masqué

© Adobe Stock

 

Dans de très rares cas, des enfants ayant contracté la COVID-19 développent une inflammation sévère 4 à 6 semaines suivant leur infection par le virus SARS-CoV-2. Pour les deux tiers, ce syndrome inflammatoire atteint le cœur, entraînant des cas de myocardite. Dans une étude parue dans la revue MED, des chercheurs, médecins et enseignants chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP et d’Université de Paris à l’Institut Imagine, en collaboration avec l’Institut Pasteur, ont analysé le sang d’une cohorte de 56 patients jeunes ayant été hospitalisés à l’Hôpital Necker Enfants-Malades AP-HP. Ils ont ainsi pu identifier l’expression anormale de plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre d’identifier les enfants à risque de développer cette inflammation cardiaque rare.

Certains enfants infectés par le SARS-Cov-2 développent des inflammations sévères quatre à six semaines après leur infection, avec des symptômes variés : fièvre, douleurs gastriques, éruptions cutanées… Dans environ 70% des cas, ce syndrome inflammatoire dit « multisystémique » s’étend au myocarde, muscle assurant les contractions cardiaques. Ces cas sévères de myocardites ont été signalés pour la première fois en Angleterre, au mois de mars 2020, avant d’être observés en Italie, en France, puis partout dans le monde. Comment expliquer ces formes rares ?

 

Des analyses de pointe

Dans une étude parue dans MED, nouveau journal créé par la revue Cell, menée par les chercheurs Inserm Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager (*) au sein de deux laboratoires de l’Institut Imagine (Inserm, Université de Paris, AP-HP), en collaboration avec des médecins de l’Hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP et de l’Institut Pasteur, ont mené des investigations moléculaires de pointe pour répondre à cette question. Résultat : ils ont identifié plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite chez ces enfants.

Pour y arriver, les auteurs ont analysé les prélèvements sanguins de 56 enfants hospitalisés entre le 6 avril et le 30 mai 2020. Au total, 30 avaient développé un syndrome inflammatoire multisystémique consécutif à une infection au SARS-CoV-2, dont 21 avec une forme sévère de myocardite, et 9 sans myocardite. « Pour comprendre la différence entre ces deux groupes de patients, nous avons mené plusieurs analyses utilisant des techniques de pointe : un dosage ultra-sensible des cytokines – les hormones du système immunitaire permettant une réponse adaptée en cas d’infection –, une caractérisation de la composition des cellules du sang, et une analyse de l’expression des gènes cellule par cellule », explique Mickaël Ménager.

 

Trois anomalies moléculaires

Résultat : dans les deux groupes, les chercheurs ont mis en évidence une diminution du nombre de monocytes et de cellules dendritiques (globules blancs), ainsi qu’une augmentation du taux de cytokines inflammatoires et une suractivation de ce qu’on appelle « la voie NF-kB » au sein de ces cellules.

« Il s’agit d’une voie moléculaire permettant d’activer un ensemble de gènes, aboutissant à la production de protéines chargées d’orchestrer la réponse immunitaire, résume Frédéric Rieux-Laucat. Or, c’est précisément la suractivation de ce système qui, chez ces patients, déclenche une hyperinflammation ».

En comparant plus finement les cellules dendritiques et les monocytes des deux groupes, les auteurs ont observé trois anomalies spécifiques des patients avec myocardite : un défaut d’inhibition dans la voie NF-kB, une surproduction de « TNF-α » (cytokine impliquée dans l’activation de la voie NF-kB), et enfin un défaut de réponse aux interférons de type I et II (cytokines impliquées dans la régulation de l’inflammation).

Toutes ces anomalies peuvent s’expliquer par une expression anormale de certains gènes. Afin d’identifier ces gènes, les auteurs ont procédé à une analyse génétique cellule par cellule. « Nous avons ainsi pu identifier et valider plus d’une centaine de gènes surexprimés spécifiquement dans les monocytes et les cellules dendritiques de patients avec formes sévères de myocardite », explique Mickaël Ménager. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre la mise au point de tests pour identifier les patients à risque de développer ces inflammations cardiaques sévères.

 

(*) Frédéric Rieux-Laucat est directeur du laboratoire d’Immunogénétique des maladies auto-immunes pédiatriques. Mickaël Ménager est directeur du laboratoire « réponses inflammatoires et réseaux transcriptomiques dans les maladies » et responsable du LabTech Single-Cell@Imagine, plateforme dédiée à l’étude de l’expression des gènes cellule par cellule.

fermer