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Communiqués et dossiers de presse

De l’ADN non codant au secours des maladies des globules rouges

11 Mar 2014 | Par Inserm (Salle de presse) | Cancer | Génétique, génomique et bio-informatique

Des régions non codantes du génome semblent diminuer la sévérité de deux maladies des globules rouges : la bêta thalassémie et la drépanocytose. Une équipe de chercheurs dirigée par Eric Soler (Unité Inserm 967 “ Stabilité génétique, cellules souches et radiations “, hébergée au CEA de Fontenay-aux-Roses[1]) en collaboration avec une équipe anglaise et une équipe néerlandaise[2] est parvenue à élucider les mécanismes expliquant comment des séquences d’ADN non codant, autrefois appelé “ADN poubelle”, et situées sur des régions très éloignées des gènes, exercent leur action pour améliorer les symptômes des bêta thalassémies et des drépanocytoses.

Ces travaux seront publiés dans la revue Journal of Clinical Investigation et seront accessibles en ligne à partir du 10 mars 2014.

Les bêta thalassémies et la drépanocytose font partie des troubles héréditaires les plus fréquents touchant les globules rouges. La drépanocytose, qui affecte 300 000 nouveau-nés chaque année, est sur le point de devenir la maladie génétique la plus fréquente en Europe. Leurs troubles sont causés par des mutations du gène de la β globine, conduisant à des altérations de l’hémoglobine adulte, responsable du transport d’oxygène dans le sang. Malgré l’implication d’un gène unique, ces deux maladies peuvent être plus ou moins sévères. De nombreux facteurs peuvent en modifier la gravité, en particulier la capacité de certains patients à produire de l’hémoglobine fœtale normalement maintenue ‘silencieuse’ chez l’adulte. Chez certains individus elle ‘échappe’ à cette répression naturelle sans aucune conséquence sur leur santé. Mais, spécifiquement chez les patients thalassémiques et drépanocytaire elle produit un effet bénéfique en compensant les défauts d’hémoglobine adulte.

Etude de la drépanocytose. © C Feo/Inserm

Les régions non codantes du génome, autrefois appelées “ADN poubelle”, ont un rôle aujourd’hui reconnu dans la régulation des gènes. Leurs mutations ou variations peuvent ainsi être impliquées dans la survenue ou la sévérité de nombreuses pathologies (diabètes, maladies cardiovasculaires, cancers). Etonnamment, ces variants génétiques présents en grand nombre dans les régions non codantes du génome sont fréquemment localisés à des distances considérables des gènes.

Une équipe de chercheurs dirigée par  Swee Lay Thein avait identifié il y a plus de 10 ans, des variants génétiques liés à la production d’hémoglobine fœtale chez l’adulte. Leurs mécanismes d’action étaient restés néanmoins inexpliqués jusqu’à aujourd’hui. En effet, ces variants ne sont pas localisés sur les chromosomes qui contiennent les gènes produisant l’hémoglobine, mais se trouvent dans un ‘désert génétique’ non codant du chromosome 6q23, à des dizaines de milliers de paires de bases des gènes les plus proches.

A partir de prélèvements effectués chez des patients thalassémiques, les chercheurs ont combiné l’utilisation de techniques d’analyse de repliement des chromosomes, à des analyses d’ADN à haut débit pour élucider les mécanismes moléculaires expliquant comment les variants non codants exercent leur action et améliorent les symptômes des thalassémies et drépanocytoses.

Les chercheurs ont montré que ces variants, dans un contexte normal, interagissent physiquement avec le gène MYB, distant de plus de 80 000 paires de bases, grâce au repliement des chromosomes. ” Il faut imaginer notre ADN comme une pelote de laine. Si on déroule cette pelote ces deux régions sont très éloignées l’une de l’autre, mais au sein de la pelote, elles peuvent être très proches.” explique Eric Soler.

Or, chez les patients atteints de bêta-thalassémie ou de drépanocytoses et porteurs de ces variants, on constate une diminution des repliements des chromosomes. Les variants accèdent plus difficilement au gène MYB et l’activent moins efficacement. Cette baisse d’expression du gène MYB chez les patients thalassémiques et porteurs de ces variants, conduit à une réactivation des globines fœtales saines (normalement silencieuses chez l’adulte) permettant de reconstituer une hémoglobine fonctionnelle. « La diminution de l’expression du gène MYB permet ainsi de compenser le défaut de globines adultes et d’améliorer significativement les symptômes des bêta thalassémies et de la drépanocytose », expliquent les auteurs.

Ainsi, « le gène MYB représente une nouvelle cible thérapeutique majeure pour le traitement des bêta thalassémies et de la drépanocytose, pour lesquelles une réactivation de l’hémoglobine fœtale constitue une stratégie thérapeutique de choix », suggèrent Eric Soler et Swee Lay Thein.

Eric Soler est lauréat du programme ATIP-Avenir qui permet à de jeunes chercheurs de mettre en place et d’animer une équipe, de promouvoir la mobilité et d’attirer dans les laboratoires de jeunes chefs d’équipes de haut niveau.

Depuis leurs créations, ces deux programmes (Atip au CNRS et Avenir à l’Inserm) ont permis à plus de 406 chercheurs de constituer leur propre équipe de recherche dans les domaines des sciences de la vie et de la santé. En 2009, dans le cadre d’un partenariat, l’Inserm et le CNRS ont réuni leurs 2 programmes en un seul : Atip-Avenir


[1] CEA/DSV/iRCM – Institut de radiobiologie cellulaire et moléculaire, Fontenay-aux-Roses

[2] Les équipes de Swee Lay Thein, directeur clinique du ‘Red Cell Centre’ du King’s College Hospital de Londres, et de Frank Grosveld, professeur en spécialité Biologie Cellulaire à L’Erasmus Medical Center de Rotterdam

Contacts
Contact Chercheur
Eric Soler
Chargé de recherche Inserm Unité Inserm 967 « Stabilité génétique, cellules souches et radiations »
revp.fbyre@prn.se
+33 (0)1 46 54 89 39
Contact Presse
cerffr@vafrez.se
Sources
HBS1L-MYB intergenic variants modulate fetal hemoglobin via long-range MYB enhancersRalph Stadhouders1*, Suleyman Aktuna2*, Supat Thongjuea3,4, Ali Aghajanirefah1, Farzin Pourfarzad1, Wilfred van IJcken5, Boris Lenhard3,6, Helen Rooks2, Steve Best2, Stephan Menzel2, Frank Grosveld1,7, Swee Lay Thein2,8# and Eric Soler1,7,9#The Journal of Clinical Investigation, 10 mars 2014
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