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Communiqués et dossiers de presse

De nouvelles courbes de croissance de référence françaises

06 Mar 2018 | Par INSERM (Salle de presse) | Santé publique

 

©AdobeStock

Grâce à un travail coordonné par l’Inserm et ses chercheurs au sein du Centre de Recherche Épidémiologie et Statistique Sorbonne Paris Cité (CRESS), les carnets de santé distribués à partir du 1er avril 2018 contiendront de nouvelles courbes de croissance de référence. Ces dernières ont été construites via une méthode totalement innovante qui a permis l’analyse de plus de 5 millions de mesures recueillies sur des enfants âgés de 0 à 18 ans. Comme attendu, les nouvelles courbes de taille, de poids et de périmètre crânien se situent au-dessus des courbes précédentes. De nombreuses innovations dans leur présentation vont aider les parents et les médecins à suivre la croissance des enfants.

La surveillance de la croissance des enfants est une activité essentielle. Elle peut avoir des buts variés, comme le suivi de l’adéquation des apports nutritionnels en situation normale ou pathologique, ou le repérage précoce de maladies dont certaines très graves. Cette surveillance repose sur des mesures régulières de poids, de taille, de périmètre crânien, le calcul de l’indice de masse corporelle (IMC) et leur comparaison à des données de références. Les courbes de croissance françaises contenues dans la version précédente du carnet de santé datent de 1979 et ont été établies à partir des mesures de quelques centaines d’enfants nés dans les années 50 et suivis jusqu’à l’âge adulte. Il a été démontré que ces courbes, ainsi que celles proposées par l’Organisation Mondiale de la Santé, n’étaient pas optimales pour le suivi de la croissance des enfants contemporains en France[1].

La Direction Générale de la Santé a donc chargé en octobre 2016 les chercheurs de l’unité Inserm 1153/CRESS de produire des courbes de croissance actualisées des enfants français pour la nouvelle édition du carnet de santé. Pour cela, ils ont opté pour une approche innovante de type « big data ». Un partenariat public/privé a été mis en place. L’extraction massive de données a permis de recueillir et d’analyser environ 5 000 000 de mesures de poids, de taille ou de périmètres crâniens, provenant de 261 000 enfants âgés de 0 à 18 ans. Ces données ont été obtenues auprès de 42 médecins tirés au sort ayant donné leur accord parmi les pédiatres de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA) et médecins généralistes, en tenant compte de la région et de la taille des villes d’exercice, et ce, afin d’assurer une bonne représentativité de l’ensemble du territoire métropolitain[2]. Puis, la construction des nouvelles courbes a été menée en concertation avec les représentants des futurs utilisateurs afin de répondre au mieux à leurs attentes.

Qu’est-ce qui a changé en pratique ?

Comme attendu, les courbes « AFPA- CRESS/Inserm -CompuGroup Medical 2018 » de taille et de poids se situent « nettement au-dessus » des courbes précédentes.

Par exemple, à 10 ans, la médiane de la taille des filles des nouvelles références est de 139,5 cm contre 134,7 cm sur les courbes précédentes, soit quasiment 5 cm. Même si ces différences se réduisent à la fin de la puberté, cette évolution pourrait théoriquement amener à s’inquiéter sur la normalité de la croissance d’un nombre plus important d’enfants, c’est pourquoi il est indispensable de prendre en compte dans leur interprétation la taille cible parentale dont la formule a été introduite dans les carnets de santé.

Concernant le poids et comme recommandé par la Haute Autorité de Santé, le repérage du surpoids et de l’obésité de l’enfant doit reposer sur le suivi de la courbe de corpulence (c’est-à-dire de l’IMC) et non de la courbe de poids. A partir de deux ans, les courbes de corpulence représentées dans le carnet de santé sont donc celles proposées par l’International Obesity Task Force (IOTF) mais le comité d’expertise a souhaité les faire précéder des courbes « AFPA-Inserm/CRESS-CompuGroup Medical 2018 » avant deux ans, afin de permettre la visualisation du pic de corpulence autour de neuf mois. » Les nouvelles courbes de référence doivent permettre de détecter précocement des maladies chez les enfants apparemment sains, sans pour autant inquiéter à tort les familles » explique Barbara Heude, chercheuse Inserm qui a coordonné ce travail avec Pauline Scherdel et Martin Chalumeau du service de pédiatrie générale et maladies infectieuses pédiatriques, hôpital Necker-Enfants malades, AP-HP.

De nombreux autres changements ont été introduits : des courbes de poids et de taille différentes pour les garçons et les filles dès la période 0-3 ans; des courbes de périmètre crânien 0 et 5 ans elles aussi spécifiques garçon/fille et la représentation de plus nombreux couloirs de croissance afin de mieux suivre les trajectoires individuelles. Enfin, le carnet contient des indications des périodes pubertaires normales pour inciter à leur utilisation dans l’interprétation des courbes. « Des messages courts au fil des pages visent à sensibiliser parents et médecins à l’importance d’un suivi régulier de la croissance et insistent sur les paramètres devant être pris en compte pour l’interprétation des mesures » concluent les chercheurs qui travaillent depuis 2016 à l’élaboration de ces nouvelles courbes et de nouveaux algorithmes de détection précoces d’anomalies de la croissance.

Au-delà de la création de nouvelles courbes qui seront utilisées quotidiennement en France, la prouesse technique et scientifique réalisée par cette approche « low-cost big data » va permettre à d’autres équipes dans le monde de reproduire et d’améliorer cette stratégie pour produire facilement des références anthropométriques calibrées.

Compte-tenu du caractère innovant de l’approche, les choix méthodologiques et épidémiologiques ont été faits en concertation avec un comité d’expertise composé notamment de des sociétés savantes et professionnelles suivantes : Société française de médecine générale, Société de formation thérapeutique du généraliste, Société française d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique, Groupe francophone d’hépato-gastroentérologie et nutrition pédiatrique, Société française de neuropédiatrie, Société de néphrologie Pédiatrique, Groupe de pédiatrie générale et Groupe de pédiatrie sociale de la Société française de pédiatrie et association française de pédiatrie ambulatoire.

[1] Scherdel et al. PLoS One 2015 et Lancet Diabetes Endocrinol 2016.

[2] Il a été nécessaire d’identifier un réseau de professionnels de santé assurant le suivi médical régulier d’un grand nombre d’enfants de la naissance à l’âge adulte et utilisant le même système informatique. Les chercheurs du CRESS ont donc mis en place un partenariat public/privé avec l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA) et l’entreprise CompuGroup Medical. C’est pourquoi les nouvelles courbes sont dénommées « AFPA-Inserm/CRESS-CompuGroup Medical 2018 ».

Contacts
Contact Chercheur
Barbara Heude, Pauline Scherdel et Martin Chalumeau Unité 1153 "Centre de recherche épidémiologie et statistique Sorbonne paris cité – CRESS" Equipes "Origines précoces de la santé du développement de l'enfant" et "Équipe de recherche en épidémiologie obstétricale, périnatale et pédiatrique" (Inserm/Université Paris Descartes) et pour Martin Chalumeau Service de pédiatrie générale et maladies infectieuses pédiatriques, hôpital Necker-Enfants malades, AP-HP rf.mresni@sserc.ecnassiorcedsebruoc
Contact Presse
Priscille RIVIERE rf.mresni@esserp 01 44 23  60 97
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