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Communiqués et dossiers de presse

Des retraités gardent des troubles cognitifs longtemps après une forte exposition professionnelle aux solvants

12 Mai 2014 | Par INSERM (Salle de presse) | Santé publique

L’exposition aux solvants durant la vie professionnelle peut avoir un impact négatif sur les performances cognitives. Mais ces effets s’atténuent-ils lorsque l’exposition a cessé ? Des chercheurs français, notamment de l’Unité Inserm 1061 « Neuropsychiatrie : recherche épidémiologique et clinique », et leurs collègues américains de Harvard, viennent de montrer que les retraités gardaient les traces de leur travail au contact des solvants en cas d’exposition forte. Les résultats sont publiés dans Neurology.

solvants

©Inserm M Depardieu

Les solvants sont fréquemment utilisés dans le milieu professionnel. Ils servent à nettoyer les métaux, diluer les peintures, décaper les vernis, purifier les parfums lors de leur fabrication… Mais une exposition répétée (ou chronique) à ces liquides peut provoquer des cancers et être néfaste pour la fertilité. Elle peut aussi être à l’origine de troubles de la motricité, de dépression et de troubles cognitifs (intellectuels). « Peu d’études ont jusqu’à présent évalué si cet impact sur les troubles cognitifs se prolongeait après la retraite, c’est-à-dire après l’arrêt de l’exposition professionnelle à ces solvants, et très peu d’études ont bien documenté les expositions», indique le Dr Claudine Berr, directeur de recherche dans l’unité Inserm 1061 « Neuropsychiatrie: recherche épidémiologique et clinique » à Montpellier. La chercheuse et ses collègues français et américains se sont donc penchés sur la question à travers la cohorte Gazel (20.000 salariés d’EDF-GDF suivis depuis 25 ans et dont les étapes de la vie professionnelle sont bien répertoriées). Leur étude publiée dans Neurology a porté sur 2.143 hommes âgés de plus de 55 ans, retraités en moyenne depuis 10 ans. Au total, 33% des participants avaient été exposés durant leur vie professionnelle à des solvants chlorés, 26% au benzène et 25% à des solvants pétroliers. Ces retraités ont fait l’objet d’une batterie de 8 tests cognitifs. Ils devaient par exemple citer en une minute le maximum de noms d’animaux ou de mots commençant par la lettre P.

Les chercheurs ont montré qu’une exposition élevée aux solvants était associée à de moins bonnes performances cognitives. Ainsi, rien que pour les doses élevées de solvants chlorés, les retraités avaient un risque supérieur de 20% à 50% de moins bonnes performances cognitives.

Cela montre que « ces salariés gardent les traces de leur exposition au travail, même s’ils sont à la retraite et même si cette exposition n’est plus présente depuis longtemps», conclut le Dr Berr. « Les médecins traitants doivent faire plus attention à ces patients, par exemple en prenant en charge les autres facteurs de risque de déclin cognitif sur lesquels on peut agir : les facteurs de risque vasculaire. Ils doivent aussi les encourager à avoir plus de loisirs stimulant leurs fonctions cognitives ».

Les résultats de cette étude seront à confirmer dans la cohorte Constances qui doit suivre 200.000 personnes de 18 à 70 ans dans la population générale. « Dans cette cohorte, 20 à 25% des personnes déclarent être exposées professionnellement à des solvants », indique Claudine Berr.

Contacts
Contact Chercheur
Dr Claudine Berr
Directeur de recherche Inserm
Unité mixte de recherche Inserm/Université de Montpellier 1, U1061 « Neuropsychiatrie: recherche épidémiologique et clinique », hôpital La Colombière à Montpellier
Tél. : 04 99 61 45 66
Mail : rf.mresni@rreb.enidualc Dr Marie Zins
UMS 011 Inserm-UVSQ, Villejuif
Tél. : 01 77 74 74 28
Mail : rf.mresni@sniz.eiram
Sources
Time may not fully attenuate solvent-associated cognitive deficits in highly-exposed workers Erika L. Sabbath1*, Laure-Anne Gutierrez2, Cassandra A. Okechukwu3, Archana Singh-Manoux4, Hélène Amieva5,6, Marcel Goldberg7,8 , Marie Zins7,8, Claudine Berr2,9 1. Harvard Center for Population and Development Studies, à Cambridge (Massachusetts, Etats-Unis)
2. Unité mixte Inserm et université de Montpellier 1, U1061 « Neuropsychiatrie : recherche épidemiologique et clinique », hôpital La Colombière à Montpellier
3. Department of Society, Human Development, and Health, Harvard School of Public Health, Boston (Massachusetts, Etats-Unis)
4. Unité Inserm, U1018, Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations, hôpital Paul Brousse à Villejuif
5. Université de Bordeaux, ISPED, centre Inserm U897 « Epidémiologie-Biostatistique », Bordeaux
6. Département de psychologie, université de Bordeaux
7. Unité Inserm UMS 011 « Cohortes épidémiologiques en population »,  Villejuif
8. Université de Versailles Saint-Quentin UMS 011
9. Centre mémoire de ressources et de recherche (CMRR) du Languedoc Roussillon, CHU Montpellier Neurology  13 mai 2014
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