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Communiqués et dossiers de presse

La carrière des plus grands joueurs de tennis passée à la loupe

17 Mai 2011 | Par INSERM (Salle de presse) | Santé publique

Démarrer un sport tôt est il synonyme de plus haute performance ? Les chercheurs de l’Inserm et de l’IRMES (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport) ont analysé les carrières de toutes les joueuses et joueurs de tennis figurant dans les 10 meilleurs mondiaux depuis 1968. Les carrières ayant débuté avant 1985 ont été comparées à celles des joueurs ayant démarré après 1985. Plus de 50 000 matchs féminins et 92 000 matchs masculins ont été recensés. Résultats ? Les femmes atteignent leur plus haut niveau deux années avant les hommes, toutes générations confondues. Les joueurs d’aujourd’hui atteignent leur pic de performance presque 2 ans plus tôt que la génération qui a débuté il y a plus de 25 ans. Toutefois, cette précocité n’augmente pas le potentiel de victoire. Ces travaux ont été publiés dans la revue Medicine & Science in Sports & Exercice.

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© Fotolia

Lors de la finale du tournoi de Wimbledon en juillet 2008, Rafael Nadal bat Roger Federer sur son terrain, avant de devenir n°1 mondial. Alors âgé de 22 ans, il est en pleine progression, tandis que Federer semble, à 27 ans, montrer les premiers signes de faiblesse. Pourtant 5 années seulement séparent les deux hommes.

Pour essayer de mieux comprendre les trajectoires individuelles au tennis, les chercheurs de de l’IRMES et de l’Inserm ont analysé les résultats des 241 joueurs et joueuses ayant fait partie du Top 10 depuis 1968. Leur travail a permis de modéliser l’évolution des performances en fonction de l’âge pour tenter de mesurer le potentiel de chacun, le taux de réussite et de mettre en évidence les facteurs déterminants de la longévité sur le circuit. Pour cela, les chercheurs ont utilisé comme nouvel indicateur le pourcentage de matchs gagnés en fonction de l’âge.

La durée des carrières des joueurs est elle identique depuis 1968 ?

La durée de carrière moyenne est de 16 ans pour le Top 10 masculin et de 15 ans et 9 mois pour les femmes ; ces chiffres n’ont que très peu évolué en 40 ans. En revanche, l’âge des joueuses au 1er match est passé de seize ans et demi à quinze ans. Pour les hommes, la même évolution est constatée puisque la génération actuelle commence à 17 ans contre 17 ans et 10 mois avant 1985. Comme la natation dans les années 1970, le développement du jeu attire des athlètes de plus en plus jeunes. La raison souvent mise en avant serait celle d’un impact favorable de la précocité sur le déroulement et la réussite d’une carrière.

Quant à l’âge de la retraite, alors qu’il était pour les hommes de 33 ans et 7 mois avant 1985, il est de 31 ans et 2 mois après 1985. Le dernier match se déroule maintenant près de deux ans et demi plus tôt qu’avant 1985. De fait, même si les carrières commencent désormais plus tôt, leur durée reste la même. Et le nombre de matchs joués au cours d’une carrière reste stable avec une moyenne de 529 pour les femmes et 674 matchs pour les hommes.

Y a-t-il un âge auquel les joueurs sont plus performants ?

Les femmes n°1 mondiales atteignent un pourcentage de victoires maximum de 82% à 21 ans et demi ; ce score est de 78% à 23 ans et 8 mois pour les n°1 masculin. C’est dire qu’à 21 et 23 ans les numéros 1 mondiaux femmes et hommes gagnent 8 matchs sur 10. Cela montre une plus grande précocité mais aussi un déclin plus précoce chez les femmes. Et ceci est vrai, toutes générations confondues. Les femmes atteignent leur plus haut niveau plus tôt que les hommes, conformément à leur évolution biologique plus précoce, tant du côté hormonal que du point de vue de la maturité psychologique.

La carrière des joueurs de tennis du Top 10 se déroule donc le plus souvent en forme de parabole, avec deux phases distinctes : la progression vers le succès et, inexorablement, une lente diminution des capacités qui s’accélère jusqu’à l’arrêt de carrière. La mise au point de ces indicateurs physiologiques, qui suivent les tendances du développement et du vieillissement, permet de comparer et de quantifier avec précision les performances au tennis. A travers eux, nous démontrons que la précocité n’augmente pas le potentiel de victoires, ce qui pose aussi la question de la pérennité des joueurs arrivés très tôt sur le circuit.

Les numéros 1 mondiaux sont ils des joueurs comme les autres ?

Pour les meilleurs joueurs, la durée de carrière est un indicateur évident de succès, mais la modélisation de leur courbe de carrière tennistique complète (investissement physique et mental) permet d’exprimer une mesure temporelle (exprimée en %.an) qui peut être considérée comme le « capital tennis » d’un joueur. Cette valeur représente donc l’ensemble des victoires réelles et potentielles (futures) d’un joueur au cours de sa carrière. Le capital tennis est par exemple de 12,3 pour Björn Borg. Il est de 12,6 pour Pete Sampras, 13,6 pour Ivan Lendl ; 14,3 pour John McEnroe et 17,5 pour André Agassi. Chez les femmes, le capital tennis de Monica Seles est de 14,3 ; celui de Stefanie Graf de 17 ; Chris Evert est à 20,3 tandis que Martina Navratilova domine toutes les autres joueuses et joueurs du circuit avec un capital de 24,9.

Par ailleurs, la meilleure joueuse (ou le meilleur joueur), celle (celui) qui deviendra la (le) n°1, commence habituellement plus tôt que les autres. L’âge au pic de performance se produit aussi plus tôt pour elle ou lui par rapport aux autres de sa génération et son « capital tennis » est beaucoup plus important. Ces différences contribuent à caractériser leur carrière exceptionnelle.

A quoi pourra servir ce nouvel indicateur de performance élaboré par votre équipe ?

Nos études antérieures analysaient des disciplines quantifiables (cyclisme, natation, athlétisme, haltérophilie) et utilisaient les records du monde comme indice de performance mais le tennis ne fournit pas d’indicateur aussi précis. Avec ce nouvel outil (le pourcentage de victoire selon l’âge), nous pouvons nous intéresser à tous les sports individuels d’opposition, ainsi qu’aux sports collectifs, mais aussi à d’autres domaines en dehors du sport, reposant sur l’évolution des capacités physiologiques. Enfin, une meilleure compréhension des variations des carrières dans le temps pourrait aider les entraîneurs et les médecins à planifier un entrainement encore plus approprié aux joueuses et joueurs avec un gain, ou un recul, attendu pour chaque âge, afin de prévenir au mieux les éventuelles blessures.

Afin de faire évoluer les connaissances concernant la pratique sportive et la santé, les Ministères de la Santé et des Sports, l’INSERM, l’Université Paris Descartes, l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l’Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance (INSEP) ont créé l’Institut de Recherche bioMédicale et d’Epidémiologie du Sport (IRMES). Ses axes de recherche portent notamment sur l’épidémiologie de la performance, la physiopathologie du sport de haut niveau et sur les bénéfices sanitaires de l’activité physique ou sportive.
Contacts
Contact Chercheur
Marion Guillaume Tél. : 01 41 74 41 29 ou 41 89
Contact Presse
Priscille Rivière Tél. : 01 44 23 60 97
Sources
Success and Decline: Top 10 Tennis Players Follow A Biphasic Course Medicine & Science in Sports & Exercise http://dx.doi.org/10.1249/MSS.0b013e31821eb533
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