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Hormones et cancer. Lignée cancéreuse MCF7 (lignée de cellules tumorales mammaires) et immunohistochimie de la cathepsine D hyperexprimée © Inserm/Rochefort, Henri
Publiée dans le Journal of Clinical Oncology, une analyse de la cohorte CANTO, réalisée par des médecins-chercheurs de Gustave Roussy, de l’Inserm et de l’université Paris-Saclay, démontre pour la première fois à l’aide d’une mesure biologique que les jeunes femmes qui ne suivent pas leur traitement d’hormonothérapie (tamoxifène) pour le cancer du sein rechutent davantage. Le risque de rechute locale et à distance (apparition de métastases) est multiplié par 2,31 et intervient très précocement à seulement trois ans de la fin des traitements curatifs du cancer (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie). L’étude identifie aussi les femmes les plus à risque de ne pas adhérer au traitement hormonal : elles ont plus d’effets indésirables ressentis du médicament (fatigue, douleurs musculaires et articulaires), ont moins souvent reçu une chimiothérapie pour leur cancer, vivent plus fréquemment seules ou souffrent d’autres problèmes de santé.
Pour diminuer le risque de rechute du cancer, l’hormonothérapie est prescrite pour une durée de cinq à dix ans après la prise en charge d’un cancer du sein localisé lorsqu’il est « hormonosensible » (présence de récepteurs aux hormones sur les cellules cancéreuses). « C’est le cas de 80 % des cancers du sein », indique le Dr Barbara Pistilli, oncologue à Gustave Roussy, « le traitement d’hormonothérapie, qui peut provoquer des effets secondaires variables en particulier des symptômes de ménopause, n’est malheureusement pas toujours suivi par les femmes, alors que ceci les pénalise. Cela peut en effet provoquer une augmentation du risque de rechute et de décès », déplore-t-elle.
Cette analyse de la cohorte nationale CANTO s’est concentrée sur 1 177 femmes non ménopausées traitées pour un cancer du sein localisé, et qui avaient accepté de prendre un traitement d’hormonothérapie (tamoxifène) – indiqué dans leur situation.
« Les résultats du dosage sanguin du Tamoxifène après un an de traitement ont montré qu’une femme sur six (16 %) ne suit pas la prescription médicale après seulement un an de traitement, ce qui est élevé par rapport à ce qui avait été décrit auparavant», rappelle le Dr Pistilli qui a présenté ces premiers résultats de l’étude au congrès de l’ESMO en septembre 2018. Elle ajoute que la moitié d’entre elles ne l’avaient pas mentionné dans le questionnaire de suivi où la question était posée. « Nous observons une importante dissociation entre ce que ces femmes osent nous dire et la réalité. Il faut que nous puissions comprendre pourquoi, afin de leur proposer une aide mieux adaptée et une approche plus personnalisée. Il est important de changer la manière dont on prend en charge ces patientes pour améliorer leur adhésion au traitement » appuie le Dr Inès Vaz-Luis, oncologue à Gustave Roussy qui a dirigé l’étude au sein de l’unité 981 « Biomarqueurs et nouvelles cibles thérapeutiques en oncologie » (Inserm/Gustave Roussy/Université Paris-Saclay).
Les résultats publiés aujourd’hui démontrent de plus un lien direct et rapide entre perte de chance et non-adhésion à l’hormonothérapie. À trois ans, le risque de rechute de la maladie, localement et à distance (métastases), augmente de 131 %. « Il est multiplié par 2,31 lorsque les femmes ne prennent pas leur hormonothérapie la première année, ce qui est considérable », souligne Barbara Pistilli, « à trois ans, 95 % des femmes qui ont suivi le traitement n’ont pas rechuté, alors que c’est seulement 89,5 % de celles qui ont moins bien adhéré ». « Selon les nouvelles mesures que nous sommes en train de réaliser, l’écart semble se creuser encore davantage tant sur le risque de rechute que sur la mortalité après cinq à dix ans de traitement d’hormonothérapie non suivi », complète Inès Vaz-Luis.
L’étude a également analysé les facteurs associés à une moins bonne adhésion au traitement.
Les principaux facteurs associés retrouvés sont l’apparition d’effets indésirables relatifs aux traitements telles que la fatigue ou des douleurs musculaires et articulaires, la présence d’autres maladies, le fait de ne pas avoir reçu de chimiothérapie lors du traitement du cancer et le fait de ne pas vivre en couple.
Il n’a pas été observé de lien direct avec les types de traitements locaux (chirurgie et radiothérapie), la gravité du cancer (son stade), l’indice de masse corporelle, les autres effets secondaires des traitements (autre que la fatigue et les douleurs musculaires et articulaires), l’anxiété ou la dépression. « L’interprétation de ces résultats est plus complexe qu’il n’y paraît. Le fait d’avoir été traitée par chimiothérapie provoque de la fatigue et celle-ci semble être un frein à la prise régulière du traitement hormonal. Paradoxalement, ne pas avoir reçu de chimiothérapie – indiquée pour diminuer le risque de récidive – semble aussi diminuer l’adhésion au traitement », analyse le Dr Pistilli.
12 000 femmes atteintes d’un cancer du sein localisé prises en charge dans 26 centres français, ont accepté de participer à la grande cohorte nationale prospective CANTO (pour CANcer TOxicities), promue par Unicancer, qui réunit l’ensemble des Centres de lutte contre le cancer (CLCC). CANTO est dirigée par le Pr Fabrice André, directeur de la recherche de Gustave Roussy, Professeur à l’Université Paris-Saclay, et directeur de l’unité 981 « Biomarqueurs et nouvelles cibles thérapeutiques en oncologie » (Inserm/Gustave-Roussy/Université Paris-Saclay). Elle a pour objectif de décrire les toxicités associées aux traitements, d’identifier les populations susceptibles de les développer et d’adapter les parcours thérapeutiques en conséquence pour garantir une meilleure qualité de vie dans l’après-cancer. La cohorte CANTO bénéficie du soutien de la Ligue contre le cancer.
Institut Gustave Roussy
Claire Parisel
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Adélaïde Brion
Inserm
Serum Detection of Nonadherence to Adjuvant Tamoxifen and Breast Cancer Recurrence Risk
Publié dans le Journal of Clinical Oncology du 19 juin 2020 https://doi.org/10.1200/JCO.19.01758
Barbara Pistilli, MD1; Angelo Paci, PharmD, PhD1,2; Arlindo R. Ferreira, MD, MSc1,3,4; Antonio Di Meglio, MD1,3; Vianney Poinsignon, PharmD1; Aurelie Bardet, MSc1,5; Gwenn Menvielle, PhD6; Agnes Dumas, PhD5,7,8; Sandrine Pinto, MS6; Sarah Dauchy, MD1; Leonor Fasse, PhD1,9; Paul H. Cottu, MD, MSc10; Florence Lerebours, MD, PhD10; Charles Coutant, MD11; Anne Lesur, MD12; Olivier Tredan, MD, PhD13; Patrick Soulie, MD14; Laurence Vanlemmens, MD15; Christelle Jouannaud, MD16; Christelle Levy, MD17; Sibille Everhard, PhD18; Patrick Arveux, MD, PhD5,11; Anne Laure Martin, PharmD18; Alexandra Dima, PhD19; Nancy U. Lin, MD20; Ann H. Partridge, MD, MPH20; Suzette Delaloge, MD, MSc1; Stefan Michiels, PhD1,5; Fabrice André, MD, PhD1,3; and Ines Vaz-Luis, MD, PhD1
1 Institut Gustave Roussy, Villejuif, France 2 Université Paris-Saclay, Faculté de Pharmacie, Chatenay-Malabry, France 3 INSERM-Unit 981, Villejuif, France 4 Fundacao Champalimaud, Lisbon, Portugal 5 INSERM-Unit 1018, Villejuif, France 6 Institut Pierre Louis d’Epidemiologie et de Santé Publique, Paris, France 7 UMR-Unit 1123, Paris, France 8 Université Paris Diderot UFR de Médecine, Paris, France 9 Université Paris Decartes, Paris, France 10 Institut Curie, Paris, France 11 Georges-Francois Leclerc Centre, Dijon, France 12 Institut de Cancerologie de Lorraine, Nancy, France 13 Centre Léon Bérard, Lyon, France 14 Institut de Cancerologie de L’Ouest, Saint Herblain, France 15 Centre Oscar Lambret, Lille, France 16 Institut Jean Godinot, Reims, France 17 Centre Francois Baclesse Centre Lutte Contre le Cancer, Caen, France 18 UNICANCER, Paris, France 19 Université Claude Bernard, Villeurbanne, France 20 Dana-Farber Cancer Institute, Boston, MA