Les nourrissons possèdent déjà à leur naissance une représentation de l’espace, du temps et des quantités. C’est ce qu’ont réussi à démontrer Dr Maria Dolores de Hevia, Dr Véronique Izard, Aurélie Coubart, Professeur Elizabeth Spelke et Professeur Arlette Streri du Laboratoire de psychologie de la perception (Université Paris Descartes/CNRS/ Inserm) dans une étude publiée dans la revue PNAS.
L’origine des concepts d’espace, de temps et de quantité est un sujet étudié par différentes disciplines comme la philosophie, la psychologie expérimentale, la psychologie du développement et les sciences cognitives. L’espace, le temps et les quantités sont reliés à la fois dans le monde et dans l’esprit humain, mais comment ces connections viennent-elles à l’esprit ? Apprend-on à relier ces concepts grâce à nos expériences sensorielles en observant leurs corrélations dans le monde qui nous entoure ou bien notre esprit permet-il d’emblée de les appréhender naturellement dès notre naissance ?
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Afin de répondre à cette question, un protocole expérimental a été mis en place, au sein de la maternité de l’hôpital Bichat, permettant d’enregistrer l’attention visuelle de 96 nouveau-nés âgés de 2 jours en moyenne (entre 7h et 96h). L’expérience les plaçait dans une situation sollicitant deux de leurs modalités sensorielles : la vision et l’audition. Dans une première phase, pendant une minute, les nouveau-nés entendaient une séquence de sons évoquant une quantité numérique (6 ou 18 syllabes) et/ou une durée (1.4 ou 4.2 secondes), pendant qu’ils voyaient sur un écran une ligne légèrement en mouvement. Dans une seconde phase, les expérimentateurs présentaient de nouveaux événements visuels et auditifs, modifiés par rapport à la première phase. Cependant, ces événements changeaient soit de manière congruente (1), tous dans la même direction (ex : ligne plus longue, et une quantité de sons plus élevé), soit de manière non congruente, dans des directions opposées (ex : ligne plus grande, quantité de sons réduit).
Les résultats ont montré que les nouveau-nés réagissent quand ces grandeurs changent de manière congruente. Ils sont donc capables de relier une quantité numérique et/ou une durée, à une longueur dans l’espace.
Reste à savoir si d’autres dimensions quantitatives (luminosité, sonorité, etc..) sont concernées et à déterminer les bases cérébrales de ces prédispositions.
(1) Qui est en rapport avec quelque chose.