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Grâce aux thérapies antirétrovirales, vieillir en contrôlant le VIH est possible. Cependant, l’impact de cette infection chronique pourrait ne pas être sans conséquences sur les fonctions cognitives. C’est pourquoi Alain Makinson (Unité « Recherche translationnelle sur le VIH et les maladies infectieuses », CHU de Montpellier, Université de Montpellier, Inserm, IRD) et son équipe se sont intéressés à la survenue de déficiences neurocognitives (DNC) -telles qu’une baisse de l’attention, de la mémoire et des capacités motrices- chez les patients vivant avec le VIH dans l’étude ANRS EP58 HAND 55-70. Dans leur dernier travail paru dans Clinical Infectious diseases, les chercheurs décrivent les résultats de leurs observations sur 200 personnes vivant avec le VIH recrutées dans six centres français. Les mesures collectées chez ces patients ont ensuite été comparées, en utilisant les mêmes méthodes d’évaluation neurocognitives, à celles d’une population témoin composée de 1 000 personnes de même âge, genre et niveau d’éducation issues de la cohorte Constances recrutées en population générale (comportant plus de 200.000 volontaires). Les chercheurs mettent en évidence que chez des personnes vivant avec le VIH, âgées de 55 à 70 ans, le risque de développer des déficiences neurocognitives légères (et dans certains cas, sans symptômes) est accru de 50%.
Grâce aux thérapies antirétrovirales, les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) peuvent contrôler le virus. Cependant, si la mortalité de ces personnes n’est plus majoritairement causée par le VIH et a beaucoup diminué depuis l’avènement de ces thérapies, d’autres risques sont à prendre en compte. Ainsi, quelques études récentes ont souligné l’augmentation de la prévalence des déficiences neurocognitives (DNC) chez les PVVIH par rapport aux personnes non-infectées par le virus. Cette augmentation est d’autant plus marquée chez les patients qui ne contrôlent pas le virus. Cependant, ces DNC pourraient également être dues à des facteurs cardiovasculaires ou encore à la survenue de dépression, plus fréquente dans cette population.
Pour tenter de préciser la nature de l’association entre le fait de vivre avec le VIH et être atteint de déficiences neurocognitives (telles qu’une baisse de l’attention, de la mémoire et des capacités motrices), Alain Makinson et ses collaborateurs ont étudié les données de 200 PVVIH, âgées de 55 à 70 ans et contrôlant le VIH, enrôlées entre janvier 2016 et octobre 2017 dans l’étude ANRS EP58 HAND (HIV-Associated Neurocognitive Disorder). Chaque patient a été comparé à cinq personnes non exposées au VIH de même âge, genre et niveau d’éducation, appartenant à la cohorte Constances recrutées en population générale. Les méthodes de passage des tests cognitifs et de recueil des données de l’étude étaient identiques dans les deux populations. Au total, 1 200 personnes ont donc été incluses dans le cadre de cette étude.
Bien que les déficiences observées dans l’étude soient légères ou sans symptôme apparent (c’est à dire n’impactant pas ou légèrement les activités de la vie malgré des résultats anormaux aux tests), les PVVIH étaient plus touchées par la DNC : 35% contre 24% pour le groupe contrôle.
Le risque de souffrir d’une DNC est donc augmenté de 50 % pour une personne infectée par le VIH, comparée à une personne non infectée, tous critères égaux par ailleurs (âge, genre, niveau d’éducation).
Les auteurs parviennent à la même conclusion après prise en compte de plusieurs facteurs de confusion potentiels (consommation d’alcool ou de tabac, activité physique, diabète, hypertension…), y compris en utilisant plusieurs méthodes d’évaluation des tests cognitifs.
Malgré ces résultats très solides, un lien de causalité entre le fait de vivre avec le VIH et la survenue de DNC ne peut pas être établi, et plusieurs hypothèses sont possibles. L’une est que l’infection par le VIH et ses traitements causent une inflammation récurrente du cerveau. Une deuxième est que les complications associées à l’immunodéficience ont pu impacter la cognition avant la mise sous traitement contre le VIH, mais sans aggravation plus rapide par la suite par rapport à la population générale. Enfin, la séropositivité pourrait être associée à d’autres facteurs de risques (consommation de drogues notamment) qui sont difficiles à mesurer pleinement dans les deux populations de cette étude.
Les auteurs souhaitent continuer à suivre la même population plus longtemps afin de mieux préciser les causes de DNC dans cette population vieillissante et tester l’hypothèse d’un vieillissement cognitif accéléré chez les PVVIH, d’autant que très peu d’études avec un groupe contrôle sont disponibles. Tester l’hypothèse de l’inflammation du cerveau en recueillant certains biomarqueurs spécifiques présents dans le sang constitue une autre perspective de l’équipe pour mieux comprendre les mécanismes causant les dommages au cerveau.
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