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Communiqués et dossiers de presse

L’hydrocortisone administrée précocement améliore la survie des patients dans les pneumonies communautaires graves

31 Mar 2023 | Par INSERM (Salle de presse) | Santé publique

L’hydrocortisone administrée précocement améliore la survie des patients dans les pneumonies communautaires graves admises en réanimation. © Adobestock

Dans son édition en ligne du 21 mars, le New England Journal of Medicine a publié les résultats de l’étude CAPE COD (Community-Acquired Pneumonie : Evaluation of COrticosteroiDs). Des résultats prometteurs, puisque l’étude, portée par des scientifiques du CHRU et de l’Université de Tours, avec l’Inserm, a démontré que l’hydrocortisone administrée précocement améliore la survie des patients dans les pneumonies communautaires graves admises en réanimation. Ce médicament, qui contient une hormone proche de la cortisone naturelle est déjà régulièrement utilisé comme traitement substitutif pour remplacer la cortisone.

Au vu de la prévalence élevée des pneumonies en population générale et de la bonne maîtrise de l’hydrocortisone, ces résultats sont très encourageants.

 

Le contexte de l’étude CAPE COD

On sait que des corticoïdes de synthèse facilitent l’évolution de pneumonies communautaires moins sévères (non hospitalisées en soins intensifs). Pour les formes sévères, une amélioration de la survie a déjà été évoquée, mais sans preuve définitive, le dernier essai publié, réalisé avec un corticoïdes de synthèse, n’ayant pas pu amener de preuve statistique d’un bénéfice. CAPE COD devait donc permettre de déterminer si l’hydrocortisone pouvait apporter un bénéfice dans la prise en charge des formes sévères.

 

La méthode

CAP COD consiste en un essai multicentrique (31 centres), en double aveugle, randomisé et contrôlé, sur des patients adultes admis en unité de soins intensifs (USI) tirés au sort pour recevoir soit de l’hydrocortisone, soit un placebo, en double aveugle (ni le patient, ni l’investigateur et les équipes médicale et soignante ne connaissaient le groupe tiré au sort).

L’originalité du projet réside dans le fait que le traitement ou le placebo étaient administrés à la même dose pour tous les 4 premiers jours, puis la durée totale du traitement et le rythme de diminution de dose étaient modulés en fonction de l’amélioration du patient. Le critère d’évaluation principal était la survie ou le décès à 28 jours.

1200 patients devaient être inclus, avec deux analyses intermédiaires planifiées après inclusion de 400 et 800 patients. Au vu des résultats significatifs, le comité de surveillance a recommandé l’arrêt de l’essai après inclusion de 800 patients.Outre une plus forte survie, la tolérance du traitement a été bonne : notamment, il n’y a pas eu plus d’infection acquise en réanimation chez les patients sous hydrocortisone (ce qui pouvait être redouté avec les traitements corticoïdes).

 

Le résultat principal

La mortalité 4 semaines après l’inclusion était de 6,2% chez les patients ayant reçu de l’hydrocortisone, et de 11,9% chez ceux ayant reçu le placebo, différence statistiquement significative (p=0,006). La mortalité à 90 jours restait plus basse dans le groupe traité à l’hydrocortisone.

La proportion de patients ayant été intubés et celle de ceux ayant reçu des médicaments vasoconstricteurs étaient également plus basses dans le groupe hydrocortisone.

Ainsi, cette étude montre bien une augmentation de survie chez les patients atteints de pneumonie communautaire grave admis en réanimation. C’est un résultat majeur car cet effet suspecté n’avait jamais été prouvé à ce jour. Or les pneumonies sont les infections les plus fréquentes, en population générale (mais toutes ne sont pas graves) et en réanimation.

De plus, l’hydrocortisone est un médicament ancien, au profil de sécurité parfaitement connu, peu coûteux, et disponible facilement.

Les mécanismes expliquant cette efficacité sont à ce stade assez mal connus. Il y a sans doute un effet de réduction de l’inflammation pulmonaire, une modulation de la réponse du système immunitaire, et sans doute d’autres mécanismes. Des échantillons biologiques prélevés à différents moments et conservés seront prochainement analysés dans les laboratoires du Centre d’Étude des Pathologies Respiratoires pour essayer demies de mieux comprendre ces mécanismes.

 

L’essai a été financé par le Programme Hospitalier de Recherche Clinique (PHRC), et promu par le CHRU de Tours.

Cette étude a été imaginée et conduite par le Pr Pierre-François Dequin, chef de service de médecine intensive – réanimation au CHRU de Tours, et membre de l’équipe 1 du Centre d’Etude des Pathologies Respiratoires / Inserm UMR 1100, avec l’aide des bio statisticiens au Centre d’Investigation Clinique (CIC) de Tours, du conseil scientifique du réseau de recherche CRICS-TriG- GERSep, et l’implication de beaucoup de personnes des centres investigateurs, de la délégation régionale à la recherche cli- nique de Tours, des CIC de Tours et Limoges, de la pharmacie et de l’unité de pharmacovigilance des essais du CHRU de Tours. Il a impliqué 31 services de réanimation français, dans des hôpitaux universitaires ou non universitaires, la plupart membres du réseau de recherche CRICS-TriGGERSep.

Sources

New England Journal of medicine

Pierre-François Dequin, M.D., Ph.D., Ferhat Meziani, M.D., Ph.D., Jean-Pierre Quenot, M.D., Ph.D., Toufik Kamel, M.D., Jean-Damien Ricard, M.D., Ph.D., Julio Badie, M.D., Jean Reignier, M.D., Ph.D., Nicholas Heming, M.D., Ph.D., Gaëtan Plantefève, M.D., Bertrand Souweine, M.D., Ph.D., Guillaume Voiriot, M.D., Ph.D., Gwenhaël Colin, M.D., Jean-Pierre Frat, M.D., Ph.D., Jean-Paul Mira, M.D., Ph.D., Nicolas Barbarot, M.D., Bruno François, M.D., Guillaume Louis, M.D., Sébastien Gibot, M.D., Ph.D., Christophe Guitton, M.D., Ph.D., Christophe Giacardi, M.D., Sami Hraiech, M.D., Ph.D., Sylvie Vimeux, M.D., Erwan L’Her, M.D., Ph.D., Henri Faure, M.D., Jean-Etienne Herbrecht, M.D., Camille Bouisse, M.D., Aurélie Joret, M.D., Nicolas Terzi, M.D., Ph.D., Arnaud Gacouin, M.D., Charlotte Quentin, M.D., Mercé Jourdain, M.D., Ph.D., Marie Leclerc, M.Sc., Carine Coffre, M.Sc., Hélène Bourgoin, Pharm.D., Céline Lengellé, Pharm.D., Caroline Caille-Fénérol, M.Sc., Bruno Giraudeau, Ph.D., and Amélie Le Gouge, M.Sc. for the CRICS-TriGGERSep Network

DOI: 10.1056/NEJMoa2215145

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