©JORGE LOPEZ on Unsplash
Et si, selon l’âge à laquelle on la développe, l’hypertension artérielle avait des conséquences plus ou moins grandes sur le maintien de nos fonctions cognitives ? C’est ce que suggère l’étude d’une équipe Inserm en collaboration avec le Department of Epidemiology and Public Health du University College London qui suit, depuis 1985, l’évolution de la tension artérielle et la survenue de démences chez plus de 10 000 volontaires. Ces travaux parus dans European Heart Journal suggèrent qu’à 50 ans, une tension élevée mais toujours en-dessous du seuil de diagnostic de l’hypertension, pourrait être associée à une augmentation du risque de développer une démence plus tard dans la vie et ce, même pour les personnes ne présentant aucune autre pathologie cardio-vasculaire.
Bien qu’il existe déjà des études associant pression artérielle et risque accru de démence à un âge avancé, celles-ci portent sur les mesures de la pression artérielle chez une large catégorie de population dont l’âge varie de 35 à 68 ans et n’ont jamais été réalisées sur des tranches d’âge précises.
Des chercheurs de l’Inserm, en collaboration avec le Department of Epidemiology and Public Health du University College London (UCL) ont entrepris avec l’étude Whitehall II, de suivre sur le long terme une population de 10 000 volontaires âgés de 35 à 55 ans au lancement de l’étude en 1985, afin d’étudier le lien entre âge, hypertension et démence. En 1985, 1991, 1997 et 2003, les chercheurs ont mesuré la pression sanguine des participants. Ces derniers ont été suivis jusqu’en 2017 afin de détecter la possible survenue d’une démence.
Parmi les participants, moins de 5% ont développé une démence en vieillissant avec un âge moyen de diagnostic d’environ 75 ans.
L’équipe de recherche a étudié deux types de pressions artérielles distincts : la pression artérielle systolique – mesurée lors de la phase de contraction du cœur permettant d’éjecter le sang dans les artères (systole) – et la pression artérielle diastolique – mesurée lors de la phase de relâchement du cœur qui lui permet de se remplir de sang (diastole).
Selon Archana Singh-Manoux, directrice de recherche Inserm responsable du projet de recherche et professeur honoraire à l’UCL, ces analyses « suggèrent que l’impact de la pression artérielle sur la santé du cerveau est dépendant du temps d’exposition ; pour cette raison les personnes ayant une pression artérielle élevée dès 50 ans seraient plus susceptibles de développer une démence que celles qui développent une hypertension à 60 ou 70 ans ».
Ceci pourrait s’expliquer par le fait qu’une pression artérielle élevée est responsable de petits AVC qui, bien que souvent indétectables, sont dommageables pour le cerveau et peuvent entraîner à terme un déclin dans son fonctionnement.
« Dans cette étude, nous avons pu mettre en évidence différents schémas d’association selon les tranches d’âge étudiées », précise la première auteure de l’article Jessica Abell, post-doctorante à l’Inserm et chercheuse associée à l’UCL qui ajoute que « ces résultats pourraient ainsi permettre de redéfinir les tranches d’âge à étudier pour évaluer l’impact de l’hypertension sur la santé ». Elle conclut : « Il est important d’insister sur le fait que ces résultats sont issus d’une étude observationnelle d’un échantillon de la population et ne peuvent être directement utilisés comme des outils prédictifs pour chaque individu. La définition de la valeur seuil optimale permettant de diagnostiquer l’hypertension est actuellement au cœur du débat ».