Des chercheurs de l’Inra de Jouy-en-Josas ont montré il y a quelques années que la bactérie intestinale, Faecalibacterium prausnitzii, avait tendance à diminuer dans l’intestin de l’Homme à l’apparition d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI). Est-ce que la disparition de F. prausnitzii fait partie des causes de l’inflammation ou est-ce que la disparition de F. prausnitzii est une conséquence de la maladie ? La même équipe de l’Inra, en collaboration avec une équipe américaine (Berkeley), AgroParisTech, l’Inserm, l’AP-HP et l’UPMC, répond aujourd’hui à ces questions. Leurs résultats montrent non seulement que F. prausnitzii a un rôle actif pour protéger l’inflammation intestinale mais ils proposent également des explications concernant des mécanismes d’action. Ces travaux sont publiés le 21 avril 2015 dans la revue mBio.
Il y a 7 ans, des chercheurs de l’Inra avaient attiré l’attention des scientifiques et du public sur une bactérie particulière que l’on retrouve au niveau de notre intestin. Cette bactérie, Faecalibacterium prausnitzii, est abondante dans l’intestin de l’Homme en bonne santé mais dès qu’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) apparaît, elle a tendance à diminuer. Une question taraude depuis la communauté scientifique : est-ce que la disparition de F. prausnitzii fait partie des causes de l’inflammation ou est-ce que la disparition de F. prausnitzii est une conséquence de la maladie ? En d’autres termes, F. prausnitzii serait-elle une bactérie capable de protéger notre tractus digestif d’une pathologie inflammatoire ?
Pour cela, les chercheurs ont utilisé des souris qui hébergent seulement deux types de bactéries dans leur tractus digestif, contrairement à plusieurs milliards en temps normal. Suite à un traitement provoquant l’inflammation, la présence de F. prausnitzii protège à elle seule du développement d’une inflammation intestinale. Cela démontre le potentiel anti-inflammatoire de F. prausnitzii.
Les chercheurs de l’Inra et leurs collègues de Berkeley, en collaboration avec AgroParisTech, l’Inserm, l’AP-HP et l’UPMC, proposent également de nouvelles pistes pour expliquer comment cette bactérie pourrait nous protéger. La présence de cette bactérie est en effet associée à de nombreuses molécules anti-inflammatoires dans l’intestin et dans le sang des animaux. F. prausnitzii serait capable d’assurer une protection de notre tractus digestif par un arsenal varié d’activités métaboliques. Par exemple, l’acide salicylique, précurseur de molécules utilisées dans le traitement des patients atteints de MICI, est retrouvé dans l’intestin des souris portant F. prausnitzii. Les bactéries que nous hébergeons seraient vraisemblablement acteurs de notre santé par l’intermédiaire des mêmes stratégies que l’on utilise dans le milieu médical.
Dès qu’il y a une inflammation intestinale, la diminution de la présence de la bactérie F. prausnitzii aggrave donc la pathologie. De façon à entraver ce cercle vicieux conduisant à l’inflammation chronique du tractus digestif, les scientifiques envisagent de restaurer la présence de F. prausnitzii grâce à de nouveaux compléments alimentaires qui contiennent la bactérie (probiotiques) et/ou qui favorisent le développement de la bactérie (prébiotiques).
Cette étude qui vient enrichir notre connaissance fondamentale dans le domaine de la microbiologie est aussi à l’interface de nouvelles applications industrielles et médicales.
Images en microscopie électronique à balayage de F. prausnitzii © Plateforme MIMA 2, T. Meylheuc)
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