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Élodie Segura
Chercheuse Inserm
U932 – Immunité et cancer (Institut Curie, Inserm)
E-mail : rybqvr.frthen@phevr.se
Téléphone sur demande
Les scientifiques se sont spécifiquement intéressés à des composés alimentaires naturellement présents dans les légumes crucifères tels que le brocoli. © Unsplash
La sévérité des allergies cutanées peut varier en fonction de nombreux facteurs environnementaux, et notamment du régime alimentaire. Cependant, jusqu’à présent, la contribution de nutriments spécifiques n’avait pas été bien documentée. Dans une nouvelle étude, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm et de l’Institut Curie du laboratoire Immunité et Cancer[1] ont montré que l’absence dans l’alimentation de composés que l’on retrouve dans certains légumes, en particulier les brocolis et les choux, pouvait aggraver les allergies cutanées dans des modèles animaux. Ces résultats, publiés dans la revue Elife, soulignent l’importance d’une alimentation équilibrée en parallèle des interventions thérapeutiques proposées aux patients.
Les allergies cutanées sont causées par une réponse immunitaire inadaptée à des composés présents dans l’environnement, et leur degré de sévérité varie en fonction de nombreux facteurs, dont l’alimentation. Cependant, l’impact des différents composés présents dans les aliments est encore mal compris, ce qui complique la mise en œuvre de stratégies fondées sur la nutrition pour atténuer les symptômes des patients.
Dans ce travail, les scientifiques se sont spécifiquement intéressés à des composés alimentaires qui agissent sur une molécule présente dans l’organisme, appelée « récepteur des hydrocarbures aromatiques » (AhR). Ces nutriments sont naturellement présents dans les légumes crucifères, tels que le brocoli.
De précédentes études avaient déjà montré que ces composés alimentaires sont associés à une aggravation de maladies inflammatoires de l’intestin et la neuro-inflammation, mais leur effet sur les réactions immunitaires allergiques n’avait jusqu’ici pas été documenté.
Aggravation des allergies
L’équipe de recherche a travaillé à partir d’un modèle d’allergie cutanée chez la souris. Certains animaux ont reçu une alimentation ne contenant aucun composé activant le récepteur AhR, afin d’évaluer l’impact que cela pouvait avoir sur la sévérité de leur allergie.
Les scientifiques ont ainsi montré que l’absence de ces nutriments est associée à une augmentation de l’état d’inflammation dans la peau et à une aggravation de l’allergie cutanée, ce qui n’est pas le cas pour des souris ayant reçu une alimentation qui contenait ces composés.
Les scientifiques ont voulu aller plus loin afin de comprendre les mécanismes biologiques qui permettent d’expliquer l’action de ces nutriments. Lorsque ces derniers sont absents, ils ont constaté qu’il y avait une surproduction d’une molécule appelée TGF-beta dans l’épiderme des souris. Cette surproduction de TGF-beta perturbe le fonctionnement normal d’une population de cellules immunitaires, les « cellules de Langerhans », qui sont exclusivement présentes dans la peau et fonctionnent comme un modulateur des réponses immunitaires cutanées.
Les scientifiques ont ensuite validé ces résultats en montrant que les composés activant le récepteur AhR contrôlent également la production de TGF-bêta dans des cellules de peau humaines.
« Nos résultats suggèrent qu’un régime alimentaire déséquilibré pourrait augmenter les réactions allergiques cutanées chez l’humain par le biais de mécanismes que nous avons décrit précisément. En schématisant, on pourrait dire que notre travail permet d’expliquer pourquoi manger des légumes comme des brocolis et des choux peut limiter la sévérité des allergies cutanées et pourquoi il est donc important de les inclure dans son régime alimentaire », souligne Élodie Segura, chercheuse Inserm, qui a dirigé cette étude à l’Institut Curie.
Les résultats de cette étude pourraient aussi s’appliquer à d’autres maladies de peau où des mécanismes inflammatoires sont impliqués, comme le psoriasis. Par ailleurs, ils ouvrent aussi des pistes de recherche intéressantes pour mieux étudier l’axe intestin-peau dans le développement des maladies allergiques.
En s’appuyant sur ces données, l’équipe de recherche souhaite désormais s’intéresser au rôle des composés alimentaires activant le récepteur AhR dans d’autres contextes pathologiques inflammatoires, par exemple dans un contexte tumoral.
[1] Menés au sein de l’unité Immunité et Cancer (Inserm, Institut Curie), ces travaux ont pu être réalisés notamment grâce à la plateforme de pathologie expérimentale et à la nouvelle plateforme de métabolomique et lipidomique de l’Institut Curie.
Élodie Segura
Chercheuse Inserm
U932 – Immunité et cancer (Institut Curie, Inserm)
E-mail : rybqvr.frthen@phevr.se
Téléphone sur demande
Homeostatic activation of Aryl Hydrocarbon Receptor by dietary ligands dampens cutaneous allergic responses by controlling Langerhans cells migration
Elife, mai 2023
DOI : https://doi.org/10.7554/eLife.86413
Adeline Cros1, Alba de Juan1, Renaud Leclere2, Julio L Sampaio3, Mabel San Roman1, Mathieu Maurin1, Sandrine Heurtebise-Chretien1, Elodie Segura1*
1 Institut Curie, PSL Research University, INSERM, U932, 26 rue d’Ulm, 75005 Paris, France
2 Institut Curie, PSL Research University, Plateforme de Pathologie Experimentale, 26 rue d’Ulm, Paris, France
3 Institut Curie, PSL Research University, Plateforme de Metabolomique et Lipidomique, 26 rue d’Ulm, Paris, France