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Institut Curie
Céline Giustranti
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La cellule se retrouve parfois confrontée à un choix “cornélien” : vivre ou mourir. Cette brique de l’organisme dispose de mécanismes lui permettant de survivre dans des conditions a priori néfastes. A l’inverse, face à une situation trop critique, elle peut être éliminée. Mais le dilemme ne s’arrête pas là pour la cellule, puisqu’elle peut aussi choisir parmi plusieurs façons de mourir. L’une d’elles lui permet de s’autodétruire lorsqu’elle est trop endommagée. Il s’agit de l’apoptose. Le dérèglement de ce mécanisme est indispensable à l’apparition des cancers. Il participerait aussi au développement du sida. L’autre voie conduisant à la mort de la cellule est la nécrose. La destruction de la membrane cellulaire entraîne alors le déversement de ses composants dans les tissus limitrophes. Elle peut être à l’origine d’une inflammation.
Ces décisions cellulaires sont la résultante de cascades de protéines, d’activation ou de désactivation de voies de signalisation faisant intervenir une multitude de molécules et de réactions chimiques dans la cellule. La représentation d’un seul de ces chemins conduisant la cellule à la mort se résume souvent par un réseau d’interactions entre des centaines de molécules, digne d’un plan de métro tentaculaire. “Alors si l’on tente de figurer les différentes options offertes à la cellule dans des conditions spécifiques, difficile de s’y retrouver. D’où l’idée de la biologie des systèmes de recourir à des modèles mathématiques pour décortiquer cet univers extrêmement complexe” explique Andrei Zinovyev, responsable de cette étude à l’Institut Curie.
L’équipe “Bioinformatique et biologie des systèmes du cancer” dirigée par Emmanuel Barillot(1) a tout d’abord identifié les clés “moléculaires” orientant la cellule dans ses choix. Un grand nombre de données de la littérature scientifique a ainsi été répertorié. Ensuite, bioinformaticiens, biologistes et mathématiciens en cumulant leur expérience ont pu modéliser ce choix. Les chercheurs de l’Institut Curie peuvent désormais prédire le choix d’une cellule dans telle ou telle situation. La cellule va-t-elle décider de mourir ou alors survivre ? Et si elle meurt, le fera-t-elle par apoptose ou par nécrose ? Ce modèle résume à la fois ces choix et les mécanismes sous-jacents. Il a d’ores et déjà permis d’identifier une protéine clé guidant la décision cellulaire.
Mais le recours à cette approche mathématique va aussi aider les biologistes à comprendre comment les cellules cancéreuses échappent à l’apoptose. Déjà, deux grandes catégories de gènes émergent : les gènes pro-apoptotiques (caspases-8 et -3, APAF1, cytochrome c, BAX, SMAC) et les gènes anti-apoptotiques (BCL-2, cIAP1/2, XIAP, cFLIP, NFKB1, RELA, IKBKG, IKBKB). Ces gènes ont, pour certains, déjà un lourd passif en cancérologie. Ce modèle va indéniablement accélérer la découverte de nouveaux gènes impliqués dans l’apparition des cancers.
En outre, il permet de reproduire parfaitement la réponse cellulaire aux molécules anti-cancéreuses. Ce modèle est construit pour répondre à une question biologique précise, ici, le choix de la cellule en réponse à un signal. Mais d’autres questions peuvent bien sûr être envisagées.
Ce schéma illustre les mécanismes par lesquels différentes espèces biochimiques participent à la décision cellulaire entre survie et mort par apoptose ou par nécrose.
© Institut Curie/Inserm, E. Barillo
Chaque rond bleu (noeud) est une composante du système qui peut représenter une protéine et ses différentes modifications, un complexe ou un processus cellulaire. Chaque flèche correspond à une influence d’un noeud sur un autre, influence activatrice en vert ou inhibitrice en rouge.
Avec ce modèle mathématique, l’équipe d’Emmanuel Barillot synthétise cet univers extrêmement complexe.
(1) Emmanuel Barillot est chercheur de l’Institut Curie où il dirige l’unité “Cancer et génome : bioinformatique, biostatistiques et épidémiologie d’un système complexe” Institut Curie/U 900 Inserm/Ecole des Mines.
Institut Curie
Céline Giustranti
01.56.24.55.24
"Mathematical Modelling of Cell-Fate Decision in Response to Death Receptor Engagement"
L. Calzone1,2,3, L. Tournier1,2,3, S. Fourquet1,2,3, D. Thieffry4, B. Zhivotovsky5, E. Barillot1,2,3, A.Zinovyev1,2,3
1 Institut Curie, Paris
2 Ecole des Mines ParisTech, Paris
3 Inserm U900, Paris
4 TAGC - Inserm U928 & Université de la Méditerranée, Marseille
5 Karolinska Institutet, Stockholm, Suède
PLoS Computational Biology, 5 mars 2010