Contact Chercheur
Benoît Gamain
Directeur de recherche CNRS
UMR-S 1134, Inserm/Université de Paris
Tel : +33 (0)1 44 49 31 47
E.mail: benoit.gamain@inserm.fr
©Benoît Gamain. Le paludisme gestationnel est associé à un faible poids de naissance pour le bébé et à un sur-risque de mortalité néonatale.
Le paludisme pendant la grossesse représente un problème de santé publique majeur dans les régions où la maladie est endémique, augmentant de manière substantielle les risques pour la santé de la mère et de l’enfant à naître. La pathologie est notamment associée à un faible poids de naissance pour le bébé et à un sur-risque de mortalité néonatale. Pour protéger cette population, une équipe de chercheurs Inserm et Université de Paris dirigée par Benoît Gamain, directeur de recherche CNRS, développe un vaccin à l’Institut national de transfusion sanguine. Baptisé PRIMVAC, celui-ci a fait l’objet d’un essai clinique pour étudier la tolérance au vaccin et obtenir des données préliminaires sur sa capacité à induire une réponse immunitaire adaptée. Les résultats de cet essai clinique promu par l’Inserm[1] sont publiés dans la prestigieuse revue Lancet Infectious Diseases.
Dans les régions du monde où le paludisme est endémique, les individus acquièrent une immunité contre la maladie tout au long de l’enfance. Lorsqu’ils atteignent l’âge adulte, ils sont donc généralement protégés contre les conséquences les plus graves du paludisme. Les femmes enceintes font néanmoins figure d’exception, car les globules rouges infectés par le parasite Plasmodium falciparum à l’origine du paludisme s’accumulent au niveau du placenta, favorisant l’anémie et l’hypertension maternelle. La maladie est aussi associée à un risque plus élevé de fausses couches spontanées, d’accouchements prématurés et de retards de croissance intra-utérin qui induisent une insuffisance pondérale à la naissance et un taux de mortalité infantile important. En Afrique Sub-Saharienne, 11 millions de femmes enceintes ont ainsi été infectées par le paludisme en 2018. Elles ont donné naissance à près de 900 000 enfants en insuffisance pondérale.
C’est pour lutter contre ce fléau sanitaire qu’une équipe de chercheurs Inserm et Université de Paris menée par le directeur de recherche CNRS Benoît Gamain travaille depuis vingt ans au développement d’un vaccin contre le paludisme gestationnel. Celui-ci a pour objectif de prévenir jusqu’à 10 000 décès maternels et 200 000 décès infantiles par an. « Développer un vaccin efficace à destination des jeunes femmes avant leur première grossesse est une priorité afin de réduire la mortalité liée au paludisme. La stratégie vaccinale efficace pourrait cibler une population similaire à celle ciblée par la vaccination HPV par exemple, avant le premier rapport sexuel », souligne Benoît Gamain.
Un vaccin sûr et efficace
Baptisé PRIMVAC, le vaccin avait récemment été produit en grande quantité conformément à la réglementation en vigueur. Dans un essai clinique publiée dans Lancet Infectious Diseases, les chercheurs apportent à présent des données sur la sécurité du vaccin et sur sa capacité à induire une réponse immunitaire adaptée, jusqu’à 15 mois après la vaccination initiale.
Le vaccin a été évalué chez 68 femmes non enceintes âgées de 18 à 35 ans à Paris au centre d’investigation clinique Cochin Pasteur puis au Burkina Faso au Centre national de recherche et de formation sur le paludisme à Ouagadougou. Les participantes ont été réparties et randomisées en 4 cohortes, recevant le vaccin à différentes doses, à 3 reprises sur une période de 3 mois. Ces femmes ont ensuite été suivies pendant 15 mois afin d’identifier et de prendre en charge d’éventuels effets indésirables et d’étudier la réponse immunitaire induite par la vaccination.
Anticorps (en vert) d’une volontaire vaccinée se fixant à la surface d’un globule rouge humain parasité par le parasite Plasmodium falciparum (en bleu). Crédits : Inserm/Chêne, Arnaud et Semblat, Jean-Philippe
« Nous avons pu montrer que le vaccin est bien toléré, à toutes les doses testées. Les effets indésirables relevés concernent principalement des douleurs au site d’injection. Par ailleurs, nous avons mis en évidence que la quantité d’anticorps générés par le vaccin augmente après chaque vaccination et que ceux-ci persistent pendant plusieurs mois. Il semble donc que le vaccin ait une capacité à déclencher une réponse immunitaire durable et potentiellement protectrice », souligne Benoît Gamain.
Etudier cette réponse immunitaire à plus long terme et la protection associée fera l’objet de futurs essais cliniques. Les chercheurs veulent notamment continuer à suivre les 50 volontaires burkinabées afin d’évaluer si cette réponse immune induite par la vaccination se maintient jusqu’à leur première grossesse.
[1] L’essai est coordonné par le Centre d’Investigation Clinique Cochin Pasteur à Paris et la plateforme d’essais cliniques EUCLID/F-CRIN à Bordeaux en collaboration avec le Centre national de recherche et de formation sur le paludisme à Ouagadougou et European Vaccine Initiative (EVI). Financement : Bundesministerium für Bildung und Forschung, through Kreditanstalt für Wiederaufbau, Germany; Inserm, and Institut national de transfusion sanguine, France; Irish Aid, Department of Foreign Affairs and Trade, Ireland.
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Sources PRIMVAC vaccine adjuvanted with Alhydrogel or GLA-SE to prevent placental malaria: a first-in-human, randomised, double-blind, placebo-controlled study Sodiomon B. Sirima1,2, Laura Richert3,4,5, Arnaud Chêne6,7,8, Amadou T. Konate1, Cécilia Campion3, Sébastien Dechavanne6,7,8, Jean-Philippe Semblat6,7,8, Nadine Benhamouda9, Mathilde Bahuaud10, Pierre Loulergue11, Alphonse Ouédraogo1, Issa Nébié1,2, Moïse Kabore2, Désiré Kargougou1, Aïssata Barry1, San Maurice Ouattara1, Valérie Boilet3, Florence Allais3, Gwenaelle Roguet11, Nicolas Havelange12, Elvira Lopez-Perez13, Alexis Kuppers13, Eleine Konaté11, Caroline Roussillon3,14, Myriam Kanté3, Linda Belarbi11, Amidou Diarra1,2, Noelie Henry1, Issiaka Soulama1, Amidou Ouédraogo1, Helene Esperou13, Odile Leroy12, Frederic Batteux10, Eric Tartour9, Nicola K. Viebig12, Rodolphe Thiebaut3,4,5*, Odile Launay11*, Benoît Gamain6,7,8 1 Centre national de recherche et de formation sur le paludisme, 01 P.O. Box 2208, Ouagadougou 01, Burkina Faso. 2 Groupe de Recherche Action en Santé (GRAS) 06 BP 10248 Ouagadougou 06, Burkina Faso. 3 Univ. Bordeaux, Inserm, Bordeaux Population Health Research Center, UMR 1219; CHU Bordeaux; CIC 1401, EUCLID/F-CRIN Clinical Trials Platform, F-33000, Bordeaux, France. 4 CHU Bordeaux ; Pôle de Santé Publique, F-33000, Bordeaux, France. 5 Inria SISTM team, F-33405, Talence, France. 6 Université de Paris, Biologie Intégrée du Globule Rouge, UMR_S1134, BIGR, INSERM, F-23 75015, Paris, France. 7 Institut National de la Transfusion Sanguine, F-75015, Paris, France. 8 Laboratory of excellence GR-Ex, F-75015, Paris, France. 9 INSERM U970, Paris Cardiovascular Research Centre, Université de Paris, Faculté de médecine, Hôpital Européen Georges Pompidou, Service d’Immunologie Biologique, F-75015, Paris, France. 10 Assistance Publique Hôpitaux de Paris (AP-HP), Hôpital Cochin, Plateforme d’immuno-monitoring vaccinal, Laboratoire d’Immunologie, F-75679, Paris, France. 11 Université de Paris, Faculté de médecine, INSERM, CIC 1417; F-CRIN I-REIVAC; AP-HP, hôpital Cochin, CIC Cochin Pasteur, F-75679 Paris, France. 12 European Vaccine Initiative, UniversitätsKlinikum Heidelberg, 69115 Heidelberg, Germany. 13 INSERM, Institut de Santé Publique, Pôle de Recherche Clinique, F-75013, Paris, France. 14 Direction de la Recherche Clinique et de l’Innovation, Unité de sécurité et vigilance des Essais Cliniques, CHU de Bordeaux, F-33000, Bordeaux Lancet Infectious Diseases, Février 2020 DOI : https://doi.org/10.1016/S1473-3099(19)30739-X