Au cours des dernières décennies, de nombreuses études indiquent une augmentation de la prévalence des troubles de la reproduction de l’homme adulte dans plusieurs pays occidentaux. L’incidence du cancer du testicule a augmenté régulièrement depuis une cinquantaine d’années ; deux types de malformations relativement fréquentes chez le petit garçon, l’hypospadias et la cryptorchidie, semblent également en augmentation même si d’importantes variations géographiques sont observées ; une détérioration des caractéristiques spermatiques chez l’homme adulte (concentration, mobilité des spermatozoïdes) est constatée avec, là encore, des différences régionales. Par ailleurs, le cancer de la prostate et le cancer du sein, deux cancers hormono-dépendants sont en augmentation.
L’impact de l’environnement sur ces évolutions temporelles suscite de nombreux débats de société. L’exposition aux substances chimiques et en particulier aux “perturbateurs endocriniens” est actuellement au coeur de ces débats.
Des substances chimiques reconnues toxiques pour la reproduction sont aujourd’hui interdites ou réglementées. D’autres sont classées à ce jour substances reprotoxiques de catégorie 3, c’est-à-dire jugées “préoccupantes pour la fertilité de l’espèce humaine” en raison “d’effets toxiques possibles” mais non démontrés sur la reproduction.
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Face aux interrogations de la société sur une possible dangerosité de telles substances chimiques auxquelles le grand public est exposé, le Ministère de la Santé a sollicité l’Inserm pour une analyse des données disponibles sur leurs effets sur la reproduction.
Pour répondre à cette demande, l’Inserm a réuni un groupe pluridisciplinaire d’experts composé d’épidémiologistes, de toxicologues, de chimistes, d’endocrinologues, de biologistes spécialistes de la reproduction, du développement et de la génétique moléculaire, afin de mener une analyse critique de la littérature scientifique internationale publiée sur 5 grandes familles de substances chimiques : le Bisphénol (1), les phtalates, les composés polybromés (retardateurs de flamme), les composés perfluorés et les parabènes.
A partir de quelque 1200 articles, le groupe a rédigé un rapport dont la synthèse est consultable sur le site de l’Inserm, ainsi qu’un tableau récapitulatif des principales conclusions.
Fruit d’un travail mené depuis l’automne 2009 cette expertise collective rassemble les données épidémiologiques, toxicologiques et mécanistiques qui constituent un faisceau d’indices sur d’éventuelles conséquences pour la reproduction humaine. Le groupe d’experts souligne la nécessité d’amplifier l’effort de recherche au plan national et international pour lever les incertitudes concernant les effets d’expositions combinées et permanentes aux substances chimiques présentes de façon ubiquiste dans l’environnement humain.
Des approches par des disciplines complémentaires et l’interaction entre les épidémiologistes, les physiologistes, toxicologistes, les biologistes de la reproduction devraient conduire à une vision plus intégrée des effets des substances et devraient permettre de répondre aux défis sociétaux de la santé reproductive grâce à un ensemble de méthodologies aujourd’hui disponibles.
Note
(1) Le rapport préliminaire « Bisphénol A : Effets sur la reproduction » publié en juin 2010 s’inscrivait dans le cadre de cette expertise collective.
Coordination scientifique de l’expertise Centre d’expertise collective de l’Inserm