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Communiqués et dossiers de presse

Résultats préliminaires de l’essai clinique JIKI visant à tester l’efficacité du favipiravir pour réduire la mortalité chez les personnes infectées par le virus Ebola en Guinée.

Les données préliminaires de l’essai clinique JIKI, qui teste l’efficacité du favipiravir[1] pour réduire la mortalité liée à Ebola, donnent deux informations importantes :

• une absence d’efficacité chez les personnes qui arrivent aux centres de soin avec un niveau très élevé de réplication virale et qui ont déjà des atteintes viscérales graves,
• et des signes d’efficacité encourageants chez les personnes qui arrivent dans les centres de soins avec un niveau élevé ou moyen de réplication virale et qui n’ont pas encore développé de lésions viscérales trop sévères.

Avec cette catégorisation en deux groupes, on comprend beaucoup mieux la maladie à virus Ebola, et on peut recadrer la place des monothérapies antivirales dans l’arsenal thérapeutique contre la maladie.

L’essai, promu par l’Inserm et financé par la Commission Européenne dans le cadre du projet européen REACTION de l’Initiative Horizon 2020, est soutenu par deux ONG, Médecin Sans Frontière (MSF) et Alliance for International Medical Action (ALIMA), deux réseaux de laboratoires, Belgian First Aid & Support Team (B-FAST) et European Mobile Laboratory (EMLab), la Croix Rouge Française, et le Service de Santé des Armées.

Ces données préliminaires sont présentées mercredi 25 février en “late breaker” lors du congrès international CROI (Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections) à Seattle.

Essai clinique JIKI Inserm – Centre de traitement anti-ébola à Guékédou en Guinée © X Anglaret & D Sissoko /Inserm

Compte tenu de la forte mortalité due au virus Ebola malgré des soins de base symptomatiques de qualité, l’étude de thérapeutiques spécifiques innovantes est indispensable. Parmi les médicaments potentiellement utiles pour lutter contre le virus se trouve le favipiravir (T705), un antiviral déjà testé (et bien toléré) chez l’humain adulte contre le virus de la grippe. Celui-ci n’a (pas plus que les autres traitements envisageables) jamais été testé chez l’homme pour traiter Ebola, mais a démontré son efficacité in vitro et chez la souris.

Dans le cadre de la mission qui a été confiée à Aviesan d’organiser la recherche en situation d’urgence, l’essai clinique JIKI, essai de phase II, multicentrique et non comparatif, a débuté le 17 décembre 2014 en Guinée pour tester la capacité du favipiravir à réduire la mortalité chez les personnes infectées par le virus Ebola.
Promu par l’Inserm, co-financé par la commission européenne, l’essai JIKI est mené en partenariat avec MSF, ALIMA, la Croix Rouge française, EMLab, B-Fast, et le Service de Santé des Armées, et se déroule dans quatre centres de traitements Ebola à Guekedou (MSF), Nzérékoré (ALIMA), Macenta (Croix Rouge Française) et Conakry (centre de traitement des soignants).

Dans ces centres, les adultes et enfants de plus de un an présentant un test PCR Ebola positif et acceptant de participer (pour les mineurs : consentement parental), reçoivent un traitement par favipiravir pendant 10 jours en plus des soins de base. Le Favipiravir est fourni par FUJIFILM Corporation/Toyama Chemical Co., Ltd. Le favipiravir se présente sous la forme de comprimés de 200 mg (les comprimés peuvent être dissous dans une boisson) et est administré selon la posologie suivante[2] :
– Adultes : Jour 0 : 2400 mg à H0, 2400 mg à H8 et 1200 mg à H16, puis 1200 mg deux fois par jour pendant 9 jours ;
– Enfants : doses adaptées aux poids.

L’essai JIKI est suivi par un comité indépendant de surveillance, qui s’est réuni les 11 décembre 2014, 5 janvier, 14 janvier et 26 janvier 2015. Lors de cette dernière réunion, le comité a autorisé les investigateurs à publier les données intermédiaires, jugeant qu’elles contenaient des messages à partager rapidement avec la communauté internationale.
Ces messages, obtenus chez les 80 premiers participants (69 adolescents ou adultes, et 11 enfants) sont les suivants :

– 42% des participants sont arrivés dans les centres de soin avec un test PCR très positif (« cycle threshold », CT, <20) reflétant une charge virale très élevée . Parmi ces patients, 81% avaient une insuffisance rénale réfractaire et 93% d’entre eux sont décédés. Dans les trois mois précédant la mise en place de l’essai, la mortalité parmi les personnes se présentant avec les mêmes caractéristiques était de 85%[3] .La comparaison entre l’essai et les données précédant l’essai montre qu’il est très peu probable qu’on puisse prouver ultérieurement que la monothérapie par favipiravir réduise la mortalité dans cette population en stade avancé.

– 58% des participants sont arrivés dans les centres de soin avec un « cycle threshold », CT, >20,reflétant une charge virale très élevée[4]. Parmi ces patients, 42 % avaient une insuffisance rénale mais seuls 15% sont décédés. Dans les trois mois précédant la mise en place de l’essai, la mortalité parmi les personnes se présentant avec une CT >20 était de 30%. La comparaison entre l’essai et les données précédant l’essai laisse donc espérer que la monothérapie par favipiravir puisse réduire la mortalité dans cette population en stade moins avancé.

Pour les chercheurs, ces données préliminaires encouragent :
– à poursuivre l’essai en s’attachant à donner le traitement par favipiravir le plus tôt possible après le début des symptômes, de façon à traiter des malades chez lesquels la multiplication virale est contrôlable et qui n’ont pas encore développé de lésions viscérales trop sévères (notamment rénales) ;
– à explorer d’autres options thérapeutiques pour les patients qui se présentent dans les centres de traitement à un stade trop avancé de la maladie.

Pour Yves Levy, président directeur général de l’Inserm “Ces résultats d’un essai non comparatif doivent être confortés sur un plus grand nombre de malades. Ils ouvrent cependant d’autres voies thérapeutiques, par des associations de médicaments, surtout chez les malades plus avancés. Enfin ils montrent que la place de la recherche est entière pour répondre à une crise sanitaire. Il faut souligner la qualité de la collaboration Guinéenne et Française, le rôle pionnier de MSF dans cette recherche, la qualité du partenariat avec toutes les ONG concernées, et la réactivité de la Commission Européenne sans lesquels ces progrès n’auraient pas pu être obtenus.”

“MSF est heureux de voir que le Favipiravir semble avoir un effet positif chez certains patients souffrant du virus Ebola. Mais il semble aussi que les patients les plus vulnérables, ceux qui ont le plus de risques de décéder de la maladie, ne bénéficient pas du tout des effets du favipiravir. Ceci et le fait qu’il ne s’agit que de résultats préliminaires, font qu’il est bien trop tôt pour commencer à utiliser le favipiravir en dehors du cadre d’un essai clinique. La recherche sur le favipiravir, et sur d’autres traitements potentiels contre le virus Ebola, doit être poursuivie et MSF est prêt à jouer un rôle dans ces essais cliniques”, dit le Dr Bertrand Draguez, directeur médical chez MSF.”

Pour Augustin Augier, secrétaire général de Alima : “Ces résultats encourageants vont permettre de renforcer le lien de confiance entre les populations touchées par la maladie ebola et le système de santé car enfin, même si c’est incomplet, une solution thérapeutique est disponible. C’est un pas important pour éteindre les dernières poches de l’épidémie.

Le commissaire européen chargé de la recherche, des sciences et de l’innovation, M. Carlos Moedas, a déclaré: « Je suis ravi des résultats encourageants de l’un des projets soutenus par l’Union européenne pour affronter Ebola. Nous disposons des premiers éléments de preuve que le traitement « favipiravir » serait efficace contre la maladie à un stade précoce. Si ces résultats sont confirmés par l’étude clinique toujours en cours, ce serait le premier traitement à être déployé pour lutter contre cette maladie mortelle durant l’épidémie actuelle. Ces résultats montrent le succès de la réaction rapide de la Commission européenne à l’épidémie, en soutenant la recherche urgente de plusieurs traitements et vaccins potentiels contre Ebola via les fonds du programme de recherche européen Horizon 2020. Ceci est un incroyable exemple de ce que les meilleurs scientifiques peuvent réaliser avec le soutien de l’UE quand il y a tant en jeu. Cela montre que le financement par l’Union européenne peut conduire à des découvertes qui sauvent des vies et qui sont le résultat d’une coopération rapide, européenne, internationale et industrielle. »

‘Ce projet a reçu le soutien du programme de recherche et d’innovation Horizon 2020 de l’Union Européenne’

____

[1] Le Favipiravir est fourni par FUJIFILM Corporation/Toyama Chemical Co., Ltd

[2] Le détail de cette posologie a fait l’objet d’une communication dans la revue The Lancet Infectious Diseases.

[3] Sur cet échantillon, un taux de mortalité de 93 % n’est pas significativement différent des 85% obtenus parmi les personnes qui s’étaient présentées avec les mêmes caractéristiques (p=0,39)

[4] Dans les laboratoires participants à l’essai, une CT <20 équivaut à une charge virale de plus de 108 copies de virus par ml de sang.

 

Contacts
Contact Presse
cerffr@vafrez.seMatérielPhotos et rushs vidéo de l'essai JIKI disponibles sur demande auprès du service de presse de l'Inserm
Sources
Late-breaking abstract "Favipiravir in Patients with Ebola Virus Disease: Early Results of the JIKI trial in Guinea"Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections (CROI) Abstract Number: 103-ALB Session Title: Factors Affecting HIV Care and Outcome: Global Perspective Session date and time: February 25, 2015from 10:00 AM to 12:30 PMDaouda SISSOKO1, Elin FOLKESSON2, M'lebing ABDOUL3, Abdoul Habib BEAVOGUI4, Stephan GUNTHER5, Susan SHEPHERD3, Christine DANEL3, France MENTRE6, Xavier ANGLARET1, Denis MALVY11Inserm U897, University of Bordeaux, France 2Médecins Sans Frontières (MSF), Belgium 3Alliance for International Medical Action (ALIMA), France 4Centre de Formation et de Recherche en Santé Rurale de Maférinyah, Guinea 5Bernhard-Nocht-Institut für Tropenmedizin, Germany 6Inserm U1137, Paris Diderot University, France
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