Une étude observationnelle française réalisée par Jennifer Zeitlin et ses collaborateurs (Unité Inserm 1153, Équipe de recherche en épidémiologie obstétricale, périnatale et pédiatrique (EPOPé)) sur plus de 14 000 femmes, montre que seulement 21% des enfants porteurs d’un retard de croissance intra-utérin (RCIU) avaient été suspectés pendant la grossesse, malgré les recommandations nationales qui invitent les femmes à réaliser une échographie au troisième trimestre de la grossesse. L’étude montre que près de la moitié des enfants présentant une suspicion de RCIU avait un poids normal à la naissance (faux positifs). De plus, la suspicion d’un RCIU pendant la grossesse était associée à une augmentation du risque de césarienne programmée avant travail et de déclenchement du travail, indépendamment de l’existence ou non d’un faible poids à la naissance. Les résultats de cette étude, publiée dans BJOG: An International Journal of Obstetrics and Gynaecology, soulignent la nécessité de mener une réflexion autour des raisons de la faible performance du dépistage du RCIU et questionnent aussi sur les effets iatrogènes potentiels du dépistage chez les faux positifs.
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Le retard de croissance intra-utérin (RCIU) est une pathologie obstétricale responsable d’une morbidité et d’une mortalité périnatale importantes. Il se manifeste par une altération de la croissance fœtale qui peut être dépistée pendant la grossesse, principalement par l’estimation du poids fœtal mesurée à l’échographie. En France, l’échographie du troisième trimestre recommandée chez toutes les femmes enceintes sert à surveiller la croissance fœtale et à identifier les fœtus avec un RCIU. Le dépistage anténatal du RCIU permet d’adapter la surveillance de la grossesse pour prévenir les risques de décès in utero et néonataux, ainsi que les risques de séquelles neurologiques pour l’enfant.
Peu d’études avaient évalué jusqu’alors la performance et l’impact du dépistage du RCIU en population générale.
L’objectif des chercheurs a été d’estimer le pourcentage d’enfants pour lesquels un RCIU avait été suspecté en anténatal et de mesurer l’effet de cette suspicion sur les décisions médicales prises, en analysant un échantillon représentatif de naissances en France en 2010. Pour cela, ils ont estimé le nombre d’enfants nés avec un faible poids à la naissance (inférieur au 10ème percentile pour l’âge gestationnel) et, parmi eux, la proportion d’enfants ayant eu un RCIU suspecté en anténatal.
L’étude a montré que seulement 21% des enfants nés avec un faible poids de naissance avaient été suspectés pendant la grossesse. De plus, la moitié des enfants suspectés d’avoir un RCIU pendant la grossesse avait un poids normal à la naissance (≥ 10ème percentile). La suspicion anténatale d’un RCIU était associée à une augmentation de la probabilité d’avoir une césarienne programmée avant travail et un déclenchement du travail, indépendamment de l’existence ou non d’un faible poids à la naissance. Des résultats similaires ont été retrouvés dans le sous-groupe des femmes ne présentant aucune complication pendant la grossesse.
Pour Jennifer Zeitlin et son équipe :
« Les résultats de cette étude soulignent la nécessité de mener une réflexion autour des raisons de la faible performance du dépistage du RCIU en France. Ils questionnent également sur le risque de réaliser des interventions médicales non justifiées, dans le cas où une suspicion de RCIU pendant la grossesse n’a pas été confirmée à la naissance ».
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