Les résultats publiés dans The Lancet le 14 septembre 2012.
Ces dernières années, le rôle d’une série de facteurs psychologiques (la personnalité, la cognition, le stress) a été étudié dans la survenue de maladies cardiovasculaires. Le stress psychologique a été le facteur plus examiné, en particulier le stress au travail, combinaison d’une forte demande de travail avec peu de marges de manœuvre. Des études précédentes ont mis en exergue une association entre le stress au travail et un risque de survenue d’évènements coronariens multiplié par deux. D’autres travaux suggèrent un risque bien plus modeste. Pour améliorer les connaissances sur le sujet, le consortium européen IPD-WORK (Individual-Participant-Data Meta-analysis in Working Populations) a été initié en 2008.
13 cohortes à l’étude, près de 200 000 participants
Le consortium regroupe treize cohortes européennes, dont la cohorte française GAZEL constituée de près de 20 000 agents d’EDF-GDF suivie depuis 1989. Des chercheurs de l’Inserm, Marcel Goldberg, Archana Singh Manoux et Marie Zins de l’unité Inserm 1018 ” Centre de recherche en épidémiologie et sante des populations” et de l’université Versailles Saint Quentin, ont contribué à la plus large analyse jamais conduite sur l’association entre le stress au travail et la survenue d’événements coronariens.
La particularité de cette grande analyse est qu’elle regroupe les données individuelles de 197 473 participants inclus dans les cohortes européennes, permettant aux chercheurs de mieux cerner l’association étudiée sur un grand nombre de cas.
Les cohortes étudiées, initiées de 1985 à 2006, sont celles de 7 pays: Belgique, Danemark, Finlande, France, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suisse.
La moyenne d’âge des participants est de 42.3 ans et la population étudiée présente autant de femmes que d’hommes. Le stress au travail a été évalué par des questionnaires portant sur les aspects psychosociaux liés au travail. Il s’agit par exemple d’analyser la demande, l’excès de travail des individus, les demandes conflictuelles auxquelles ils sont confrontés, le temps restreint pour accomplir les tâches qui leur sont confiées.
La proportion d’individus exposés au stress au travail variait entre 12.5% et 22.3% selon les précédentes études. Sur cette grande population, elle représente 15.3%.
En parallèle, sur les 200 000 individus, les chercheurs ont recensé 2358 événements coronariens, sur une période de 7 ans de suivi en moyenne.
Prévenir le stress au travail, un facteur non négligeable
En harmonisant les données,
Quand on prend en compte des modes de vie, l’âge, le sexe, le statut socioéconomique et la répartition géographique des participants, les résultats sont pratiquement inchangés.
Si l’on étudie la population globale (stressée et non stressée), les chercheurs considèrent que le stress au travail est associé à une augmentation du risque relativement modeste de faire un infarctus, mais qui n’est pas négligeable : “Dans notre étude, 3.4% des infarctus recensés parmi les 200 000 individus sont attribuables au stress au travail. Sur les 100 à 120 000 infarctus survenant en France chaque année, cela correspondrait tout de même à environ 3 400 à 4 000 accidents imputables à ce facteur de risque”, souligne Marcel Goldberg.
L’équipe de recherche européenne suggère de renforcer la prévention du stress au travail pour réduire ce risque existant. De telles mesures préventives pourraient avoir également un impact positif sur d’autres facteurs de risque, tels que le tabac et l’alcool dont la consommation est partiellement liée au stress selon des études récentes réalisées par ce même consortium.