Le programme de recherche européen CHILD-INNOVAC, coordonné par l’Inserm, a permis de mettre au point un vaccin innovant, administrable par voie nasale, pour lutter contre la coqueluche qui connaît une forte recrudescence dans les pays développés ces dernières années. Le consortium de recherche, piloté par Camille Locht, directeur du Centre d’Infection et d’Immunité de Lille (Unité mixte Inserm -CNRS – Institut Pasteur de Lille – Université de Lille Nord de France), publie ce jour dans la revue en ligne PLOS ONE les résultats prometteurs des essais cliniques de phase I du vaccin chez l’Homme.
Les chercheurs du projet européen CHILD-INNOVAC qui réunissait 10 partenaires européens* ont évalué l’efficacité et l’innocuité d’un nouveau concept de vaccination par voie nasale contre la coqueluche. Ils ont également réalisé des essais cliniques chez l’Homme qui se sont révélés probants.
La coqueluche est une maladie injustement « oubliée », selon les termes de Camille Locht, Directeur de recherche à l’Inserm et Directeur Scientifique de l’Institut Pasteur de Lille. Or, la maladie touche plusieurs dizaines de millions de personnes et tue environ 300 000 enfants par an dans le monde. La morbidité et la mortalité associées sont en augmentation au niveau mondial. Sa recrudescence devient même inquiétante depuis 2010 dans certains pays développés comme les Etats-Unis, l’Australie, l’Angleterre, les Pays Bas et la France.
Le projet CHILD-INNOVAC s’est concentré plus spécifiquement sur la lutte contre deux pathogènes respiratoires majeurs : Bordetella pertussis (bactérie déclenchant la coqueluche) et le virus respiratoire syncytial (virus déclenchant les bronchiolites chez les nourrissons). Ces pathogènes atteignent principalement des enfants âgés de 0 à 6 mois, mal protégés par les vaccins actuellement disponibles. Le projet a aussi fourni la preuve de concept que ce vaccin peut être appliqué à d’autres infections respiratoires.
Le chercheurs du projet CHILD-INNOVAC sont parvenus à tester pour la première fois chez l’homme un vaccin bactérien vivant, génétiquement atténué, spécialement conçu pour une administration par voie nasale pour lutter contre les pathogènes respiratoires majeurs. « Ce mode d’administration original rendra le vaccin accessible au plus grand nombre et à moindre coût. » explique le coordinateur du projet Camille Locht.
Les essais de phase I chez l’homme ont permis de mesurer l’immunogénicité et l’innocuité du vaccin, comparé à un placebo, en double aveugle. Ils se sont déroulés en Suède, où la population est la plus « naïve » vis-à-vis du vaccin contre la coqueluche, étant donné que la vaccination avait été abandonnée pendant plusieurs années dans ce pays, pour cause d’inefficacité.
L’objectif principal de ces essais était de répertorier tous les éventuels effets secondaires : toux, éternuements, écoulements nasaux, effets sur l’état général, etc. Ces mesures ont été examinées par un comité indépendant (Independant Data Monitoring Committee).
Le second objectif était d’évaluer la prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale et le déclenchement d’une réponse immunitaire.
Trois doses différentes du vaccin ont pu être testées : une faible, une intermédiaire et une forte dose.
Après 6 mois de suivi des sujets vaccinés et l’analyse de 60 000 données, les résultats ont montré que le vaccin ne présentait aucun effet secondaire comparé au placebo, même à forte dose. La prise du vaccin au niveau du nez s’est révélée meilleure avec la forte dose. De plus, chez tous les sujets chez qui le vaccin avait pris, des réponses immunitaires ont été déclenchées. « Ce qui est particulièrement intéressant était qu’une seule administration nasale pouvait induire une réponse immunitaire qui se maintenait au moins pendant 6 mois, c’est-à-dire aussi longtemps que l’étude. » commente Camille Locht.
La prochaine étape consistera à administrer des volumes plus élevés pour tenter d’augmenter le taux de prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale. L’ambition de Camille Locht et de ses collaborateurs est aussi d’améliorer la stabilité du vaccin dans le temps, dans l’objectif d’un prochain développement industriel.
Inserm Transfert, en charge de la valorisation de la propriété intellectuelle liée à la technologie BPZE, a récemment conclu un accord avec un partenaire industriel pour développer cette dernière.
Pour en savoir plus
CHILD-INNOVAC
Le projet CHILD-INNOVAC visait à développer des vaccins innovants par voie nasale, contre les deux principaux agents pathogènes respiratoires qui sont la coqueluche et le virus respiratoire syncytial (VRS). Le projet a fourni des prototypes de vaccins multivalents, administrables par voie nasale sur la base de B.pertussis atténué. L’immunité induite par le vaccin BPZE1 a été étudiée en détail, ainsi que sa stabilité et sécurité génétique et biologique.
CHILD-INNOVAC a démarré en 2008 et a été soutenu par l’Union Européenne (FP7) pendant 4 ans. Il était coordonné par l’Inserm, comme 27 autres projets européens. Le projet impliquait 10 partenaires, dont 2 sociétés privées et 8 laboratoires, basés dans 7 pays européens :
Inserm (coordinateur), France : https://www.inserm.fr/
Inserm Transfert, France : https://www.inserm-transfert.fr/
Université Libre de Bruxelles, Belgique : https://www.ulb.be/
Innogenetics, Belgique : https://www.innogenetics.com
National University of Ireland-Maynooth, Irlande : www.immunology.nuim.ie
Istituto Superiore Di Sanità, Italie : https://www.iss.it/
Swedish Institute for Infectious Disease Control, Suède : https://www.smittskyddsinstitutet.se/in-english/
Netherlands Vaccine Institute, Pays-Bas
National Institute for Public Health and the Environment, Pays-Bas : https://www.rivm.nl/
Imperial College of Science, Technology and Medicine, Angleterre : https://www3.imperial.ac.uk/