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Signature d’un accord cadre entre Santé publique France et l’Inserm

Accord cadre Inserm SPF

Santé publique France et l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) signent aujourd’hui un accord visant à encadrer, renforcer et développer leur collaboration. © Inserm

 

Santé publique France et l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) signent aujourd’hui un accord visant à encadrer, renforcer et développer leur collaboration. Plusieurs thématiques prioritaires ont été identifiées pour les 5 prochaines années : maladies infectieuses émergentes et modélisation, facteurs environnementaux et santé, nutrition, inégalités sociales et santé périnatale. Cet accord permettra une alliance scientifique renforcée de la recherche avec la surveillance et la prévention-promotion de la santé, en appui aux décisions publiques.

Une collaboration confortée entre deux acteurs aux missions complémentaires

La surveillance épidémiologique génère de nombreuses données descriptives qui contribuent à la connaissance sur l’état de santé des populations en situation réelle. Les actions de prévention et promotion de la santé doivent s’appuyer sur des interventions ayant montré leur efficacité. Ces champs majeurs de la santé publique mobilisent ainsi des interactions permanentes et indispensables avec la recherche.

La surveillance et la recherche se nourrissent en effet mutuellement. La surveillance permet notamment de soulever des hypothèses scientifiques nouvelles qui doivent être testées par des travaux de recherche ; la recherche pouvant identifier des problématiques de santé devant être quantifiées précisément et faire l’objet d’une surveillance dédiée. De plus, les connaissances nouvelles issues de la recherche nourrissent les expertises et analyses produites en appui à la décision publique, contribuent à des innovations à la promotion d’environnements favorables à la santé, et génèrent également des hypothèses concernant des dangers émergents.

De par la complémentarité de leurs activités et les synergies à développer, Santé publique France et l’Inserm ont établi des domaines de coopération prioritaires, afin de renforcer les échanges et les modalités de coopération, à l’interface de la recherche, de la surveillance, des interventions en prévention et promotion de la santé, et de l’expertise, en appui à la décision en santé publique. 

Des thèmes partagés et des outils communs renforcés

Cette ambition vient renforcer des collaborations existantes et parfois déjà anciennes, sur de nombreuses thématiques, comme dans le champ de la nutrition. S’appuyant également sur une coopération de longue date, le champ des maladies infectieuses et leur modélisation, a été particulièrement soutenu lors de la crise sanitaire liée au Sars-CoV-2, en lien avec l’ANRS|MIE, et fait l’objet de nouveaux projets de collaboration. Les inégalités sociales de santé constituent également un sujet majeur mis en exergue au cœur de la crise sanitaire et qui nécessite des travaux de fond au carrefour de la recherche, de la surveillance, de la promotion de la santé et de l’expertise.

Il s’agit ainsi, sur ces différentes thématiques, à la fois de renforcer la production scientifique en mobilisant la recherche pour l’appui aux interventions et politiques publiques. Enfin, les deux établissements s’engagent également ensemble sur des grands enjeux de santé publique, comme celui de l’impact des facteurs environnementaux, et en particulier du changement climatique, sur la santé, la santé mentale ou encore la santé périnatale. L’ambition est ici de mobiliser les acteurs de la recherche, qu’elle soit fondamentale ou appliquée, en appui à la décision interventionnelle.

Pour porter ces ambitions scientifiques, cet accord fixe un cadre opérationnel pour la collaboration des personnels scientifiques, tout en garantissant la qualité et l’indépendance de l’expertise ainsi que le respect des droits de propriété intellectuelle des deux établissements. Ces coopérations concernent notamment la mise à disposition d’experts, la réalisation d’expertises, la production de données et la création d’équipes associées.

La collaboration entre les deux organismes porte également sur les outils et infrastructures en appui aux missions et enjeux des deux entités :

  • les cohortes, infrastructures de données, et grandes enquêtes en santé ;
  • les registres de morbidité, et les stratégies de surveillance, de description des pathologies, de description évaluative des prises en charge diagnostique et thérapeutique ;
  • le registre national des causes médicales de décès (ou CépiDc).

 

 « Pour agir efficacement et sur la durée en santé publique, le dialogue entre connaissance et action doit être permanent. La signature de cet accord avec l’Inserm ouvre de nouvelles perspectives pour répondre à la nécessité de connecter encore plus fortement la surveillance et la prévention/promotion de la santé avec la recherche et l’innovation, au service de la santé des français. »

Pr Geneviève Chêne, Directrice générale de Santé publique France

 

« Je suis ravi de signer cet accord cadre qui met en lumière le nécessaire apport de la recherche à la surveillance et prévention en santé et l’aide à la décision publique. Il souligne les collaborations fortes qui existent déjà entre nos deux établissements sur les maladies infectieuses, la nutrition ou encore les inégalités de santé et en ouvre de nouvelles comme celle de l’impact du changement climatique sur la santé. Je suis convaincu que c’est en menant de telles synergies de haut niveau, que l’on réussira notre mission d’améliorer durablement la santé de nos concitoyens ».

Dr. Gilles Bloch, Président de l’Inserm

Choc toxique menstruel : favoriser le bon usage des tampons périodiques pour limiter les risques

L’Inserm propose une vidéo de prévention sur le choc toxique staphylococcique. © Camille Henry/Inserm

Le choc toxique staphylococcique est lié à la présence d’une bactérie, Staphylococcus aureus ou staphylocoque doré, dans le microbiote vaginal de certaines femmes. Chez ces dernières, un mauvais usage d’une protection intravaginale (tampon, coupe menstruelle…) pourrait augmenter la probabilité de le développer. Le choc toxique est caractérisé par de multiples symptômes, notamment par des troubles digestifs, une forte fièvre et des éruptions cutanées. Dans les cas les plus graves, il peut conduire à des défaillances multi-organes et au décès.

Si l’incidence du choc toxique reste très rare, des chercheurs de l’Inserm, du CNRS, des Hospices Civils de Lyon, de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et de l’ENS Lyon au sein du Centre International de recherche en infectiologie et du Centre National de référence des staphylocoques, ont identifié les facteurs de risque pouvant dans certains cas le favoriser. Dans une étude parue au mois de mars 2020 dans le journal EClinical Medicine, l’équipe menée par le Pr Gérard Lina propose des mesures simples à mettre en place pour un meilleur usage des tampons périodiques pendant les règles.

Retrouvez tous les conseils dans la nouvelle vidéo pédagogique de l’Inserm visant à sensibiliser et à rassurer les femmes concernées par le port du tampon. N’hésitez pas à partager cet outil de prévention sur vos plateformes et à le diffuser largement. 

Pour obtenir le fichier vidéo au format mp4, merci de contacter le service de presse. 

Un indicateur pour prédire la sortie du coma

A la suite d’un traumatisme crânien ou d’un arrêt cardiaque récupéré, il est difficile de déterminer l’évolution des patients dans le coma. Des chercheurs de l’unité 825 “Imagerie cérébrale et handicaps neurologiques” (Inserm – Université Toulouse III – Paul Sabatier) en collaboration avec le CHU de Toulouse, montrent que la qualité de la communication entre deux structures du cerveau prédit la récupération du patient à 3 mois. Ce nouvel indicateur obtenu grâce à l’analyse IRM du cerveau de patients au repos, serait une aide supplémentaire pour établir un pronostic.

Les résultats de cette étude sont publiés dans la revue Neurology le 11 novembre 2015.

© Inserm

La conscience apparait comme un processus mental complexe et indissociable de notre existence. Cette capacité́ est en effet relativement instable. Elle disparaît de manière cyclique dans la journée (veille-sommeil) et peut être modifiée par l’administration de certains médicaments (anesthésie). Enfin, elle peut être abolie, de manière plus ou moins complète et définitive suite à une agression cérébrale : c’est le coma. Dans cette situation, il est très difficile de déterminer quels sont les patients qui en sortiront et récupéront un état de conscience normal, ou au contraire garderont des séquelles neurologiques lourdes, à l’origine d’un handicap important (état végétatif, état de conscience minimale).

Dans cette étude, les chercheurs se sont intéressés aux anomalies cérébrales responsables de la perte de la conscience observée pendant le coma. Ils ont comparé l’activité cérébrale au repos de 27 patients dans cet état et des sujets contrôles du même âge, à l’aide des enregistrements en Imagerie par Résonance Magnétique Fonctionnelle.

Deux régions cérébrales ne communiquent plus ensemble

Les scientifiques ont analysé en particulier les communications de l’ensemble du cerveau avec une structure située en arrière du cerveau appelée Cortex Postéro-Médian (CPM). Pendant le sommeil ou lors d’une anesthésie, cette région charnière a une activité diminuée. Cette structure est composée de deux zones que les chercheurs ont étudiées (le précuneus et le cortex cingulaire postérieur).

Une perte de communication majeure entre le CPM, particulièrement au niveau du cortex cingulaire postérieur, et la partie antérieure du cerveau (Cortex Frontal Médian, CFM) est constatée chez tous les patients dans le coma. Cette mauvaise connexion est présente quel que soit le mécanisme qui en est à l’origine (un traumatisme crânien ou un arrêt cardiaque récupéré). Cette observation suggère le rôle majeur de l’interaction entre ces deux structures dans l’émergence de la conscience chez l’homme.

Mauvaise connexion

Représentation 3D du cerveau et des zones impliquées (en bleu le cortex cingulaire postérieur, en jaune le cortex frontal médian) ©Unité Inserm 825

L’équipe est allée plus loin en évaluant le niveau d’altération de cette connexion (CPM-CFM) au cours du temps. Les chercheurs de l’Inserm ont comparé les enregistrements quelques jours après l’agression cérébrale et le début du coma à l’évolution neurologique des patients trois mois après. Il s’avère que la récupération des patients est étroitement liée au degré d’atteinte de cette connexion.

“Les patients qui vont récupérer un état de conscience présentent des niveaux de connexions comparables à ceux observés chez les sujets sains. A l’opposé, une diminution de la communication entre les deux zones prédit une évolution défavorable vers un état végétatif ou un état de conscience minimale,”

expliquent Stein Silva et Patrice Péran, à l’origine de cette découverte.

Ces résultats constituent une étape importante pour comprendre l’émergence des perceptions conscientes du monde extérieur. Ils sont prometteurs car les neurologues pourraient utiliser ce paramètre pour l’évaluation du pronostic et l’adaptation des traitements du patient dans le coma. Néanmoins, les recherches devront se poursuivre pour décrypter les mécanismes sous-jacents du coma qui restent aujourd’hui peu connus.

Des bactéries intelligentes pour détecter les maladies

Un pas de plus vient d’être franchi dans le domaine de la biologie synthétique. Des équipes de chercheurs de l’Inserm et du CNRS de Montpellier, associées au CHRU de Montpellier et à luniversité de Stanford ont transformé des bactéries en espions détecteurs” capables de signaler une pathologie sur la simple présence dans lurine ou le sang de molécules caractéristiques. Pour réaliser cette prouesse, les chercheurs ont introduit l’équivalent d’un programme informatique dans l’ADN des cellules. Les bactéries ainsi programmées détectent notamment la présence anormale de glucose dans les urines de patients diabétiques. Ces travaux publiés dans la revue Science Translational Medicine marquent les premiers pas de lutilisation de cellules programmables pour le diagnostic médical.



Les bactéries ont mauvaise réputation et sont souvent considérées comme nos ennemis causant de nombreuses maladies comme la tuberculose ou le choléra. Cependant, elles peuvent aussi être des alliées comme en témoignent les travaux de plus en plus nombreux sur notre flore bactérienne, ou microbiote, qui joue un rôle majeur dans le fonctionnement de l’organisme. Depuis l’avènement des biotechnologies, les chercheurs ont modifié des bactéries pour produire des molécules thérapeutiques ou des antibiotiques. Dans ce nouveau travail, elles deviennent un véritable outil de diagnostic.

Le diagnostic in vitro est basé sur la présence dans les liquides physiologiques (sang, urine par exemple) de molécules caractéristiques d’une pathologie donnée. Du fait de sa non-invasivité et facilité d’usage, le diagnostic in vitro est un enjeu majeur pour la détection précoce des maladies ainsi que pour leur suivi. Cependant, les tests in vitro sont parfois complexes et nécessitent des technologies sophistiquées souvent uniquement disponibles dans les centres hospitaliers.

C’est à ce stade que les systèmes biologiques entrent en jeu. Les cellules vivantes sont de véritables nano-machines capables de détecter et traiter de nombreux signaux et d’y répondre. Elles représentent donc des candidats évidents pour le développement de nouveaux tests diagnostiques puissants. Encore faut-il leur fournir le “programme” adéquat pour réussir à leur faire accomplir les tâches souhaitées.

Pour cela, l’équipe de Jérôme Bonnet au Centre de Biochimie Structurale de Montpellier (Inserm/CNRS/Université de Montpellier) a eu l’idée d’utiliser des concepts de biologie synthétique[1] dérivés de l’électronique pour construire des systèmes génétiques permettant de “programmer” les cellules vivantes à la manière d’un ordinateur.

Le transcriptor : pièce maitresse de la programmation génétique

Le transistor est l’élément central des systèmes électroniques modernes. Il joue à la fois le rôle d’interrupteur et d’amplificateur de signal. En informatique, en combinant plusieurs transistors, il est possible de construire des “portes logiques”, c’est à dire des systèmes répondant à différentes combinaisons de signaux selon une logique prédéterminée. Par exemple une porte logique “ET” à deux entrées produira un signal uniquement si deux signaux entrant sont présents. Tous les calculs effectués par les appareils électroniques que nous utilisons quotidiennement, comme les smartphones, reposent sur l’utilisation de transistors et des “portes logiques”.

Lors de son séjour postdoctoral à l’université de Stanford aux Etats-Unis, Jérôme Bonnet a inventé un transistor génétique, le transcriptor.

L’insertion d’un ou plusieurs transcriptors dans les bactéries les transforme en calculateurs microscopiques. Les signaux électriques utilisés en électronique sont remplacés par des signaux moléculaires contrôlant l’expression génétique. Ainsi, il est à présent possible d’implanter dans les cellules vivantes des “programmes” génétiques simples en réponse à différentes combinaisons de molécules[2].

Dans ce nouveau travail, les équipes de Jérôme Bonnet (CBS, Inserm U1054, CNRS, Université de Montpellier), de Franck Molina (SysDiag, CNRS) associées au professeur Eric Renard (CHRU de Montpellier) et de Drew Endy (Université de Stanford) ont appliqué cette nouvelle technologie à la détection de signaux pathologiques dans des échantillons cliniques.

Les échantillons cliniques sont des milieux complexes dans lesquels la détection de signaux est difficile. Les auteurs ont utilisé les capacités d’amplification du transcriptor pour détecter des marqueurs pathologiques présents même en très petite quantité. Ils ont aussi réussi à stocker plusieurs mois le résultat du test dans l’ADN des bactéries.

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Figure 1: Principe de l’utilisation de bactéries modifiées pour le diagnostic médical. ©J. Bonnet/ Inserm.

Les cellules deviennent ainsi capables de réaliser différentes opérations en fonction de la présence de plusieurs marqueurs, ouvrant la voie à des tests diagnostiques plus précis reposant sur la détection de “signatures” moléculaires.

Nous avons standardisé notre méthode puis confirmé la robustesse de nos systèmes bactériens synthétiques dans les échantillons cliniques. Nous avons aussi mis au point une technique rapide pour connecter le transcriptor à de nouveaux systèmes de détection. Tout ceci devrait faciliter la réutilisation de notre système précise Alexis Courbet, étudiant en thèse et premier auteur de l’article.

Les auteurs ont connecté au transistor génétique un système bactérien répondant au glucose et détecté la présence anormale de glucose dans les urines de patients diabétiques.

Nous avons déposé les éléments génétiques utilisés dans ce travail dans le domaine public pour permettre leur libre réutilisation par dautres chercheurs publics ou privés[3]” précise Jérôme Bonnet.

Nos travaux se concentrent à présent sur lingénierie de systèmes génétiques artificiels pouvant être modifiés à la demande pour détecter différentes molécules marqueurs de maladie ajoute-t-il. Dans le futur, ces travaux pourraient aussi être appliqués à l’ingénierie de la flore microbienne pour le traitement de diverses pathologies, notamment les maladies intestinales.

Ces travaux ont bénéficié du soutien financier de l’Inserm, du CNRS, du Centre Stanford-France pour la recherche interdisciplinaire, de l’université de Stanford. Jérôme Bonnet est lauréat du programme Atip-Avenir, et est soutenu par la fondation Bettencourt-Schueller.

[1] Disponible sur : https://biobricks.org/bpa/

[2] Bonnet et al. Science, 2013

[3] Qui vise à l’ingénierie rationnelle de systèmes et fonctions biologiques artificiels

 

Un anti-hypertenseur améliore les traitements cutanés à base de corticoïdes

Des recherches fondamentales sur la tension artérielle ont conduit des chercheurs de l’Inserm (Unité Inserm 1138 “Centre de Recherche des Cordeliers”) à obtenir des résultats inattendus : les médicaments utilisés pour l’hypertension réduisent les effets secondaires des crèmes à base de corticoïdes que l’on utilise pour certaines maladies de peau.

Ces travaux sont publiés dans the Journal of Investigative Dermatology

Les crèmes dermatologiques à base de corticoïdes sont indiquées pour le traitement symptomatique des affections cutanées inflammatoires telles que la dermatite atopique et le psoriasis par exemple. Elles entrainent néanmoins des effets secondaires fréquents comme des sensations de brûlure légère et finissent très souvent par induire une atrophie cutanée (un amincissement de la peau qui devient fragile), très gênant pour les patients et sans traitement actuel.

Les chercheurs de l’Inserm ont formulé l’hypothèse selon laquelle cet effet délétère pouvait être lié à l’activation inappropriée par ces crèmes de récepteurs minéralocorticoïdes situés dans l’épiderme. Ces récepteurs, présents notamment dans le rein, le cœur, l’œil, et certains neurones, réagissent à l’aldostérone, une hormone qui régule la pression sanguine. Or, des études menées précédemment ont montré qu’ils étaient également très sensibles aux corticoïdes.

L’application de corticoïdes sur de la peau en culture provoque son amincissement : en 6 jours, l’épaisseur de l’épiderme était réduite d’un tiers. Les chercheurs ont alors provoqué le blocage pharmacologique des récepteurs grâce à des antagonistes spécifiques ajoutés au traitement corticoïde. L’impossibilité pour le corticoïde de se fixer sur les récepteurs minéralocorticoïdes restaure la prolifération des cellules de l’épiderme et corrige en partie son atrophie.

D’un point de vue clinique, il s’avère que le spironolactone, médicament utilisé depuis très longtemps comme anti-hypertenseur (et qui dispose d’une AMM), est un antagoniste du récepteur minéralocorticoïde. Les chercheurs ont donc testé un traitement à base de spironolactone pendant 28 jours chez 23 volontaires sains. Différentes compositions de crèmes leur ont été appliquées sur 4 zones de leurs bras :

– une crème contenant un corticoïde puissant utilisé en dermatologie
– une crème contenant de la spironolactone
– la combinaison des deux molécules
– un placebo

Les résultats obtenus montrent que l’ajout de spironolactone au corticoïde améliore l’atrophie cutanée.

Pour Nicolette Farman “Il s’agit d’un travail très original, à la croisée des chemins entre l’endocrinologie et la dermatologie, qui associe des chercheurs fondamentaux et des cliniciens. Il reste désormais à reformuler ce médicament ancien pour une nouvelle application, et à tester ce produit chez des patients atteints de différentes maladies de peau pour confirmer la diminution des effets secondaires sans pour autant empêcher l’efficacité des corticoïdes.”

Female hands using skin cream

© fotolia

Anorexie / boulimie : une protéine bactérienne mise en cause

Les troubles du comportement alimentaire (TCA) tels que l’anorexie mentale, la boulimie, l’hyperphagie touchent environ 5% à 10% de la population générale sans que l’on connaisse les mécanismes biologiques en cause. Des chercheurs de l’Unité Inserm 1073 « Nutrition, inflammation et dysfonction de l’axe intestin-cerveau » (Inserm/Université de Rouen) révèlent l’implication d’une protéine produite par certaines bactéries intestinales qui serait à l’origine de ces troubles. Les anticorps produits par l’organisme contre cette protéine réagissent aussi avec la principale hormone de la satiété en raison d’analogies de structures. Selon les chercheurs, ce mécanisme qui induit des variations de la prise alimentaire pourrait à terme être corrigé.

Ces résultats sont publiés dans la revue Translational Psychiatry, publiée on-line le 7 octobre 2014. Voir la découverte en vidéo :

L’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie sont des troubles du comportement alimentaire (TCA). Si l’on ajoute les formes moins bien définies ou atypiques, les TCA concernent 15-20% de la population, en particulier chez l’adolescent et l’adulte jeune. Malgré différentes études psychiatriques, génétiques ou neurobiologiques, le mécanisme moléculaire à l’origine de ces troubles reste mystérieux. La caractéristique commune aux différentes formes de TCA est la dérégulation de la prise alimentaire, diminuée ou augmentée selon les cas.

L’équipe de Sergueï Fetissov au sein de l’unité mixte de recherche 1073 « Nutrition, inflammation et dysfonction de l’axe intestin-cerveau » (Inserm/Université de Rouen) dirigée par Pierre Déchelotte, étudie les liens entre l’intestin et le cerveau qui pourraient expliquer ce dérèglement.

Le sosie de l’hormone de la satiété

Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont identifié une protéine qui s’avère être le sosie de l’hormone de la satiété (mélanotropine). Cette protéine (ClpB) est fabriquée par certaines bactéries telles qu’Escherichia coli présentes naturellement dans la flore intestinale. En présence de la protéine, des anticorps sont produits par l’organisme et dirigés contre celle-ci. Ils vont aussi se lier à l’hormone de la satiété du fait de son homologie de structure et donc modifier l’effet satiétogène de l’hormone. La sensation de satiété est atteinte (anorexie) ou n’est plus atteinte (boulimie – hyperphagie). Par ailleurs, la protéine bactérienne apparait elle-même avoir des propriétés anorexigènes.

Des variations de la prise alimentaire en présence de la protéine bactérienne

Pour aboutir à ces résultats, les chercheurs ont modifié la composition de la flore intestinale de souris pour étudier leur réponse immunologique et comportementale. La prise alimentaire et le taux d’anticorps contre la melanotropine du 1er groupe de souris, ayant reçu des bactéries E.coli mutées (pas de production de ClpB), n’ont pas changé. Au contraire, le taux d’anticorps et la prise alimentaire varient pour le 2ème groupe d’animaux ayant reçu des E. coli produisant des protéines ClpB.

L’implication probable de cette protéine bactérienne dans les troubles du comportement alimentaire chez l’homme a été établie grâce à l’analyse des données de 60 patients.

L’échelle standardisée « Eating disorders inventory-2 » a permis le diagnostic des patients et l’évaluation de la sévérité de leurs troubles à partir d’un questionnaire sur leurs comportements et leurs émotions (envie de maigrir, boulimie, peur de la maturité…). Les taux plasmatiques d’anticorps dirigés contre ClpB et la mélanotropine sont plus élevés chez ces patients. De plus, leur réponse immunologique va déterminer le développement des troubles alimentaires vers l’anorexie ou la boulimie.

Ces données valident ainsi l’implication de la protéine bactérienne dans la régulation de l’appétit et ouvre de nouvelles perspectives de diagnostic et de traitement spécifique des troubles du comportement alimentaire.

Corriger l’action du sosie de l’hormone de la satiété

“Nous travaillons actuellement au développement d’un test sanguin basé sur la détection de la protéine bactérienne ClpB. Si nous y arrivons, il permettrait la mise en place de thérapies spécifiques et individualisées des troubles du comportement alimentaire” soulignent Pierre Déchelotte et Sergueï Fetissov, auteurs de cette étude.

En parallèle, les chercheurs étudient chez la souris comment corriger l’action de la protéine bactérienne pour empêcher la dérégulation de la prise alimentaire qu’elle engendre. “D’après nos premières observations, il serait en effet possible de neutraliser cette protéine bactérienne par des anticorps spécifiques sans affecter l’hormone de la satiétéconcluent-ils.

Cette étude a été réalisée en collaboration avec d’autres équipes et plateformes de l’Institut de Recherche et de l’Innovation de Normandie (IRIB) à Rouen et avec l’Université de Tartu (Estonie). Elle étude prolonge d’autres travaux de l’équipe de recherche publiés en 2013 qui révélaient des mécanismes moléculaires d’augmentation de l’appétit par des immunoglobulines protégeant l’hormone de la faim (ghréline) au cours de l’obésité.

Ces travaux ont fait l’objet de deux demandes de brevets déposés par Inserm Transfert.

Maladie d’Alzheimer : un diagnostic simplifié, avec les critères les plus fiables

Combien de patients ont un diagnostic erroné de la maladie d’Alzheimer ? La réponse surprend par son importance: plus d’un tiers ! Pour limiter les erreurs, les critères de diagnostic doivent être les plus fiables possibles, en particulier au stade très précoce de la maladie. C’est ce sur quoi planche, depuis une dizaine d’années, une équipe internationale de neurologues, coordonnée par Bruno Dubois (UMRS 975 Inserm/Université Pierre et Marie-Curie/AP-HP). Dans la revue The Lancet Neurology de juin, les chercheurs sont parvenus à un diagnostic simplifié avec les critères les plus spécifiques de la maladie. Un enjeu principalement pour la recherche, mais aussi pour la clinique.

La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative. C’est la plus fréquente (70%) des démences. En France, le nombre de personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer et d’autres démences est estimé entre 750.000 et un million et devrait atteindre 1,29 à 1,40 million de patients en 2030. La maladie d’Alzheimer est due à une perte de neurones. C’est l’accumulation de certaines protéines cérébrales qui est à l’origine des lésions. La pathologie commence par des troubles de la mémoire. Puis viennent des difficultés à s’orienter dans l’espace et le temps, des troubles du comportement et une perte d’autonomie. Mais ces symptômes ne sont pas spécifiques de la maladie d’Alzheimer. Et tout l’enjeu est de savoir distinguer cette pathologie d’autres démences, de poser le diagnostic le plus fiable et le plus précoce possible.

En 2005, un groupe international de neurologues, coordonné par Bruno Dubois à l’Inserm, s’est réuni pour redéfinir les critères diagnostiques établis en 1984. Jusqu’alors, il fallait attendre la mort d’un patient pour pouvoir établir avec certitude le diagnostic de maladie d’Alzheimer, après l’examen des lésions dans son cerveau. Et de son vivant, on ne pouvait évoquer qu’une probabilité de pathologie et seulement à un stade tardif, à partir d’un certain seuil de sévérité de démence.

En 2007, l’équipe internationale a fait voler en éclats ces concepts. Les chercheurs ont introduit de nouveaux critères diagnostiques, en particulier des biomarqueurs. Il s’agit de véritables signatures de la pathologie, présentes dès les premiers symptômes (stade prodromal).

La publication de ces résultats a constitué une révolution. Des chercheurs se sont alors aperçus qu’avec ces nouveaux critères, « 36% de leurs patients inclus dans un essai thérapeutique sur la base d’anciens critères cliniques n’avaient pas la maladie d’Alzheimer », rapporte Bruno Dubois. Et même si cette analyse n’a porté que sur un sous-groupe de patients, l’enjeu est important. Des patients n’ont pas reçu le bon traitement et/ou la bonne prise en charge. Et la mauvaise sélection des patients a peut-être eu un impact sur l’absence d’efficacité du nouveau traitement qui a été observée.

Depuis 2007, beaucoup d’études ont été publiées. Et le groupe international a décidé d’analyser cette littérature pour rendre plus simple et plus fiable l’algorithme de diagnostic de la maladie d’Alzheimer.

« On est au bout du chemin, on arrive à l’essentiel, à quelque chose d’épuré, émanant d’un consensus international», indique le Pr Dubois. Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer repose désormais sur « un seul couple de critère clinico-biologique pour tous les stades de la pathologie » (cf encadré).

Cet algorithme plus simple et plus fiable est important, tout d’abord pour la recherche (essais thérapeutiques, caractérisation de la pathologie, suivi de cohortes de patients…). En dehors de la recherche, l’utilisation des biomarqueurs, qui est onéreuse et/ou invasive, reste pour l’instant limitée aux patients jeunes ou aux cas difficiles ou complexes dans des centres experts.

Le diagnostic de la maladie d’Alzheimer repose la plupart du temps d’abord sur un profil clinique évocateur. Il est ensuite confirmé ou infirmé par un biomarqueur.

Pour le profil clinique, trois situations existent :

–        cas typiques (80 à 85% de tous les cas): troubles de la mémoire épisodique à long terme (appelés syndrome amnésique de type hippocampique et correspondant par exemple à la difficulté de se rappeler d’une liste de mots même avec des indices)

–        cas atypiques (15 à 20% des cas): atrophie de la partie arrière du cortex cérébral ou aphasie logopénique (trouble de la mémoire verbale où le patient répète un mot en inversant les syllabes par exemple) ou atteinte de la partie avant du cerveau (qui donne des troubles du comportement)

–        états précliniques: asymptomatiques à risque (patients sans symptôme mais pour lesquels on découvre fortuitement dans le cadre d’études scientifiques qu’ils ont des biomarqueurs positifs) et présymptomatiques (ayant une mutation génétique)

L’un des deux biomarqueurs suivants est nécessaire :

–        dans le liquide céphalorachidien (issu d’une ponction lombaire) : teneurs anormales de protéines cérébrales (en baisse pour la  protéine bêta amyloïde et en hausse pour la protéine tau)

–        dans le cerveau par neuro-imagerie TEP (tomographie par émission de positons) : rétention élevée du traceur amyloïde

Tablet mit der Diagnose Alzheimer auf dem Display

Pourquoi le cerveau se souvient-il des rêves?

Certaines personnes se souviennent de leurs rêves tous les matins alors que d’autres s’en souviennent rarement. L’équipe de Perrine Ruby, chargée de recherche Inserm, au sein du centre de recherche en neurosciences de Lyon (Inserm / CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1) a étudié l’activité cérébrale de ces rêveurs afin de comprendre ce qui les différencient. Dans une étude publiée dans la revue Neuropsychopharmacology, les chercheurs montrent que la jonction temporo-pariétale, un carrefour du traitement de l’information dans le cerveau, est plus active chez les grands rêveurs. Elle induirait une plus grande réactivité aux stimulations extérieures, faciliterait ainsi le réveil au cours du sommeil, ce qui favoriserait la mémorisation des rêves.

L’origine du rêve continue d’être un mystère pour les chercheurs qui étudient la différence entre les “grands rêveurs”, qui parviennent à se souvenir de leurs rêves régulièrement, et les “petits rêveurs” pour lesquels cet événement est plus rare. En janvier 2013 (travaux publiés dans la revue Cérébral Cortex), l’équipe de Perrine Ruby, chargée de recherche à l’Inserm et ses collaborateurs du centre de recherche en neurosciences de Lyon, ont réalisé deux constats : les “grands rêveurs” comptabilisent 2 fois plus de phases de réveil pendant le sommeil que les “petits rêveurs” et leur cerveau est plus réactif aux stimuli de l’environnement. Cette sensibilité expliquerait une augmentation des éveils au cours de la nuit et permettrait ainsi une meilleure mémorisation des rêves lors de cette brève phase d’éveil. Dans cette nouvelle étude, l’équipe de recherche  a cherché quelles régions du cerveau différencient les grands des petits rêveurs en mesurant l’activité cérébrale spontanée en Tomographie par Emission de Positons (TEP) à l’éveil et pendant le sommeil chez 41 rêveurs volontaires.

Les volontaires ont été classés en 2 groupes : 21 “grands rêveurs” se souvenant de leur rêve en moyenne 5.2 fois par semaine et 20 “petits rêveurs” rapportant en moyenne 2 rêves par mois.

Les chercheurs ont mesuré avec le scanner TEP l’activité cérébrale des grands et petits rêveurs pendant l’éveil et pendant le sommeil. (Voir vidéo).
Les résultats révèlent que les grands rêveurs présentent une activité cérébrale spontanée plus forte pendant leur sommeil au niveau du cortex préfrontal médian (MPFC) et de la jonction temporo-pariétale (JTP), une zone cérébrale impliquée dans l’orientation de l’attention vers les stimuli extérieurs.

Jonction-temporo-parietal


Jonction temporo-pariétale (JTP) © Perrine Ruby / Inserm

“Cela explique pourquoi les grands rêveurs réagissent plus aux stimuli de l’environnement et se réveillent plus au cours de leur sommeil que les petits rêveurs, et ainsi pourquoi ils mémorisent mieux leurs rêves. En effet le cerveau endormi n’est pas capable de mémoriser une nouvelle information en mémoire, il a besoin de se réveiller pour pouvoir faire ça”

 explique Perrine Ruby, chargée de recherche à l’Inserm.

Le neuropsychologue sud-africain Mark Solms avait remarqué dans de précédents travaux que des lésions de ces deux zones conduisaient à une cessation des souvenirs de rêves. Les travaux de l’équipe lyonnaise ont pour originalité de mettre en évidence des différences d’activité cérébrale entre grands et petits rêveurs pendant le sommeil mais également à l’éveil. 

“Ces résultats montrent que les grands et petits rêveurs se différencient en terme de mémorisation du rêve mais n’exclut pas qu’ils se différencient également en terme de production de rêve. En effet, il est possible que les grands rêveurs produisent une plus grande quantité de rêve” conclut l’équipe de recherche.

Succès du projet CHILD-INNOVAC : passage à l’homme réussi d’un vaccin nasal contre la coqueluche

Le programme de recherche européen CHILD-INNOVAC, coordonné par l’Inserm, a permis de mettre au point un vaccin innovant, administrable par voie nasale, pour lutter contre la coqueluche qui connaît une forte recrudescence dans les pays développés ces dernières années. Le consortium de recherche, piloté par Camille Locht, directeur du Centre d’Infection et d’Immunité de Lille (Unité mixte Inserm -CNRS – Institut Pasteur de Lille – Université de Lille Nord de France), publie ce jour dans la revue en ligne PLOS ONE les résultats prometteurs des essais cliniques de phase I du vaccin chez l’Homme. 

Les chercheurs du projet européen CHILD-INNOVAC qui réunissait 10 partenaires européens* ont évalué l’efficacité et l’innocuité d’un nouveau concept de vaccination par voie nasale contre la coqueluche. Ils ont également réalisé des essais cliniques chez l’Homme qui se sont révélés probants. 

La coqueluche est une maladie injustement « oubliée », selon les termes de Camille Locht, Directeur de recherche à l’Inserm et Directeur Scientifique de l’Institut Pasteur de Lille. Or, la maladie touche plusieurs dizaines de millions de personnes et tue environ 300 000 enfants par an dans le monde. La morbidité et la mortalité associées sont en augmentation au niveau mondial. Sa recrudescence devient même inquiétante depuis 2010 dans certains pays développés comme les Etats-Unis, l’Australie, l’Angleterre, les Pays Bas et la France. 

Le projet CHILD-INNOVAC s’est concentré plus spécifiquement sur la lutte contre deux pathogènes respiratoires majeurs : Bordetella pertussis (bactérie déclenchant la coqueluche) et le virus respiratoire syncytial (virus déclenchant les bronchiolites chez les nourrissons). Ces pathogènes atteignent principalement des enfants âgés de 0 à 6 mois, mal protégés par les vaccins actuellement disponibles. Le projet a aussi fourni la preuve de concept que ce vaccin peut être appliqué à d’autres infections respiratoires.

Le chercheurs du projet CHILD-INNOVAC sont parvenus à tester pour la première fois chez l’homme un vaccin bactérien vivant, génétiquement atténué, spécialement conçu pour une administration par voie nasale pour lutter contre les pathogènes respiratoires majeurs. « Ce mode d’administration original rendra le vaccin accessible au plus grand nombre et à moindre coût. »  explique le coordinateur du projet Camille Locht.

CHILD-INNOVAC : un succès européen
Le premier succès de ce projet européen aura été de réaliser un vaccin dont l’immunogenicité et l’innocuité ont pu être testées chez l’homme en seulement deux ans et demi (contre 5 à 7 ans pour la plupart des projets de ce type). Ceci représente un temps très court que Camille Locht explique par « les compétences et la motivation du consortium qui a rassemblé les experts dans leur domaine de sept pays européens. La transmission des données aux différentes étapes du projet ont pu se faire de manière souple et efficace. » Le projet a bénéficié d’un budget de 5 millions d’euros, accordé par la Commission Européenne, dans le cadre du FP7. 

Les essais de phase I chez l’homme ont permis de mesurer l’immunogénicité et l’innocuité du vaccin, comparé à un placebo, en double aveugle. Ils se sont déroulés en Suède, où la population est la plus « naïve » vis-à-vis du vaccin contre la coqueluche, étant donné que la vaccination avait été abandonnée pendant plusieurs années dans ce pays, pour cause d’inefficacité. 
L’objectif principal de ces essais était de répertorier tous les éventuels effets secondaires : toux, éternuements, écoulements nasaux, effets sur l’état général, etc. Ces mesures ont été examinées par un comité indépendant (Independant Data Monitoring Committee).
Le second objectif était d’évaluer la prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale et le déclenchement d’une réponse immunitaire.
Trois doses différentes du vaccin ont pu être testées : une faible, une intermédiaire et une forte dose.
Après 6 mois de suivi des sujets vaccinés et l’analyse de 60 000 données, les résultats ont montré que le vaccin ne présentait aucun effet secondaire comparé au placebo, même à forte dose. La prise du vaccin au niveau du nez s’est révélée meilleure avec la forte dose. De plus, chez tous les sujets chez qui le vaccin avait pris, des réponses immunitaires ont été déclenchées. « Ce qui est particulièrement intéressant était qu’une seule administration nasale pouvait induire une réponse immunitaire qui se maintenait au moins pendant 6 mois, c’est-à-dire aussi longtemps que l’étude. » commente Camille Locht. 

La prochaine étape consistera à administrer des volumes plus élevés pour tenter d’augmenter le taux de prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale. L’ambition de Camille Locht et de ses collaborateurs est aussi d’améliorer la stabilité du vaccin dans le temps, dans l’objectif d’un prochain développement industriel. 

Inserm Transfert, en charge de la valorisation de la propriété intellectuelle liée à la technologie BPZE, a récemment conclu un accord avec un partenaire industriel pour développer cette dernière.

Pour en savoir plus

CHILD-INNOVAC

Le projet CHILD-INNOVAC visait à développer des vaccins innovants par voie nasale, contre les deux principaux agents pathogènes respiratoires qui sont la coqueluche et le virus respiratoire syncytial (VRS). Le projet a fourni des prototypes de vaccins multivalents, administrables par voie nasale sur la base de B.pertussis atténué. L’immunité induite par le vaccin BPZE1 a été étudiée en détail, ainsi que sa stabilité et sécurité génétique et biologique.
CHILD-INNOVAC a démarré en 2008 et a été soutenu par l’Union Européenne (FP7) pendant 4 ans. Il était coordonné par l’Inserm, comme 27 autres projets européens. Le projet impliquait 10 partenaires, dont 2 sociétés privées et 8 laboratoires, basés dans 7 pays européens :

Inserm (coordinateur), France : https://www.inserm.fr/
Inserm Transfert, France : https://www.inserm-transfert.fr/
Université Libre de Bruxelles, Belgique : https://www.ulb.be/
Innogenetics, Belgique : https://www.innogenetics.com
National University of Ireland-Maynooth, Irlande : www.immunology.nuim.ie
Istituto Superiore Di Sanità, Italie : https://www.iss.it/
Swedish Institute for Infectious Disease Control, Suède : https://www.smittskyddsinstitutet.se/in-english/
Netherlands Vaccine Institute, Pays-Bas 
National Institute for Public Health and the Environment, Pays-Bas : https://www.rivm.nl/
Imperial College of Science, Technology and Medicine, Angleterre : https://www3.imperial.ac.uk/

Découverte d’une molécule qui protège le cerveau d’une intoxication au cannabis

Deux équipes de chercheurs de l’Inserm dirigées par Pier Vincenzo Piazza et Giovanni Marsicano (Unité Inserm 862 “Neurocentre Magendie” à Bordeaux) viennent de découvrir qu’une molécule produite par le cerveau, la prégnénolone, constitue un mécanisme naturel de défense contre les effets néfastes du cannabis chez l’animal. Comment ? En empêchant le THC, le principe actif du cannabis, d’activer pleinement ses récepteurs cérébraux, notamment le récepteur CB1 dont la sur-activation par le THC est responsable des effets intoxicants du cannabis. Grâce à l’identification de ce mécanisme, les chercheurs développent déjà des approches pour le traitement de l’addiction au cannabis.

Ces résultats sont publiés dans la revue Science datée du 3 janvier.

L’addiction au cannabis concerne plus de 20 millions de personnes dans le monde et un peu plus d’un demi-million de personnes en France. Elle est devenue ces dernières années l’un des premiers motifs de consultation dans les centres spécialisés dans le soin des addictions. De plus la consommation de cannabis concerne principalement une population particulièrement fragile aux effets néfaste de cette drogue : les 16-24 ans, dont 30% en consomme.

Alors que les consommateurs de cannabis recherchent un état de détente, de bien-être et une modification des perceptions, les dangers d’une consommation régulière de cannabis sont nombreux. Deux troubles majeurs du comportement sont associés à la prise de cannabis chez l’homme : des déficits cognitifs et une perte généralisée de la motivation. Les utilisateurs réguliers de cannabis, en plus d’une forte dépendance au produit, présentent donc des troubles de la mémoire et un manque de motivation qui rendent leur intégration sociale particulièrement compliquée.

Le principe actif du cannabis, le THC, agit sur le cerveau par l’intermédiaire des récepteurs cannabinoïdes CB1 situés sur les neurones. En se fixant sur ces récepteurs, le THC les détourne de leur rôle physiologique qui consiste à réguler la prise alimentaire, le métabolisme, les processus cognitifs et le plaisir. La sur-stimulation des récepteurs CB1 par le THC va en revanche provoquer une diminution des capacités de mémorisation, une démotivation et progressivement une forte dépendance.

Effets cannabis cerveau

De nombreux scientifiques cherchent à identifier des molécules qui pourraient contrer les effets du cannabis et la dépendance qu’il engendre.

Dans ce cadre-là, les équipes Inserm de Pier Vincenzo Piazza et Giovanni Marsicano se sont intéressées à une hormone produite dans le cerveau : la prégnénolone. La pregnenolone était considérée jusqu’ alors comme un précurseur inactif dont transformation permet la fabrication de toutes les hormones stéroïdiennes (progestérone, testostérone, …). Mais les chercheurs de l’Inserm viennent de lui découvrir un nouveau rôle : la pregnenolone constitue un mécanisme de défense naturelle contre le cannabis et peut protéger le cerveau des effets néfastes de cette drogue.

En effet, la sur-activation des récepteurs cannabinoides CB1 par des fortes doses de THC – bien supérieures à celles auxquelles est exposé le consommateur régulier – déclenche la synthèse de prégnénolone. Elle se fixe alors sur un site qui lui est spécifique sur les mêmes récepteurs CB1 (voir figure ci-contre) et diminue certains des effets du THC.
Pour aller plus loin, les chercheurs ont administré de la prégnénolone à des souris. Cette administration externe de prégnénolone augmente encore plus le niveau cérébral de cette hormone, et permet ainsi de bloquer les effets néfastes du cannabis.

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© Derek Shore, Pier Vincenzo Piazza and Patricia Reggio


Au niveau neurobiologique, la prégnénolone diminue fortement la libération de dopamine déclenchée par le THC. Une libération excessive de dopamine par les drogues est considérée à la base de leurs effets addictifs.

Ce rétrocontrôle négatif (c’est le THC lui-même qui déclenche la production de pregnenolone que à son tour inhibe les effets du THC) assuré par la prégnénolone révèle un processus naturel, jusqu’alors inconnu, qui protège le cerveau d’une sur-activation des récepteurs CB1.

Un mécanisme de protection qui ouvre de nouvelles approches thérapeutiques.

En détails, des rats ont été soumis à de doses équivalentes de cocaïne, de morphine, de nicotine, d’alcool et de cannabis. Le dosage de plusieurs hormones stéroïdes produites par le cerveau (prégnénolone, testostérone, allopregnénolone, DHEA) a alors été effectué. Une seule substance, le THC, augmente les stéroïdes cérébraux. Parmi ces stéroïdes, seule la prégnénolone augmente de façon considérable (entre +1500 et 3000 % pendant 2 heures).

Dose pregnenolone


Cette augmentation est un mécanisme endogène qui modère les effets du THC. En effet, si on bloque la synthèse de prégnénolone, les effets du THC augmentent. A l’inverse, l’administration de prégnénolone à des rats ou des souris, à des doses (entre 2 et 6 mg/kg) qui augmentent encore plus les concentrations cérébrales de cette hormone, permet de bloquer les effets comportementaux négatifs du THC. Par exemple, les animaux ainsi traités récupèrent des capacités mnésiques normales, présentent une sédation plus faible et sont moins motivés pour s’administrer des cannabinoïdes.

Enfin des tests menés sur des cellules en culture qui expriment le récepteur CB1 humain confirment l’efficacité de la prégnénolone pour contrer l’action moléculaire du THC chez l’homme.



Pier Vincenzo Piazza met en garde contre une utilisation thérapeutique de la prégnénolone : ” Cette hormone ne pourra pas être utilisée telle quelle comme médicament car elle est mal absorbée et rapidement métabolisée par l’organisme ». Toutefois l’espoir de voir surgir une nouvelle thérapie de la toxicomanie de cette découverte est fort, nous explique le chercheur : “Nous avons développé des dérivés de la prégnénolone qui sont stables et bien absorbés et qui sont en principe utilisables comme médicament. Nous espérons commencer les essais cliniques bientôt afin de vérifier si nos attentes se confirment et si nous avons véritablement découvert la première thérapie pharmacologique de la dépendance au cannabis”.

Ces travaux ont bénéficié du soutien de la MILDT, du Conseil Régional d’Aquitaine, de l’ERC, et de l’Inserm

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