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Troubles du spectre de l’autisme : où en est la recherche ?

image de cerveau

Ces dernières années, les progrès des neurosciences et l’identification de facteurs de risque génétiques ou environnementaux ont permis de mieux appréhender les TSA. © Adobe Stock

Les trouble du spectre de l’autisme (TSA) résultent de particularités du neuro-développement. Ils apparaissent au cours de la petite enfance et persistent à l’âge adulte. Environ 700 000 personnes en France seraient concernées. Il n’existe à l’heure actuelle aucun traitement ciblant de façon spécifique l’autisme, pour améliorer les troubles du comportement ainsi que les altérations des interactions sociales associées. Les personnes peuvent toutefois avoir recours à des traitements pour d’éventuelles comorbidités comme les troubles du sommeil ou l’épilepsie. Dans les laboratoires de recherche, les efforts se poursuivent, non seulement pour identifier de nouvelles options thérapeutiques mais aussi pour améliorer le repérage précoce des TSA et leur prise en charge psychosociale tout au long de la vie.

L’autisme « typique », décrit par le pédopsychiatre Leo Kanner en 1943, est aujourd’hui intégré dans un ensemble plus vaste, celui des « troubles du spectre de l’autisme (TSA) ». Ce terme permet de rendre mieux compte de la diversité des situations. Ces troubles se caractérisent par :

  • des altérations des interactions sociales ;
  • des problèmes de communication (langage et communication non verbale) ;
  • des troubles du comportement : un répertoire d’intérêts et d’activités restreint et répétitif (stéréotypies : tendance à répéter les mêmes gestes, paroles ou comportements) ;
  • des réactions sensorielles inhabituelles.

En conséquence, certaines personnes présentent également des difficultés d’apprentissage. Les TSA peuvent également être associés à des comorbidités : troubles anxieux, problèmes de sommeil, déficits de la fonction motrice, épilepsie…

Au sein de cette grande diversité clinique, il est important de relever les « atouts » ou « talents » qui peuvent découler de ce développement cérébral atypique. Le développement de thérapeutiques doit donc cibler ce qui correspond aux plaintes des personnes tout en préservant leurs particularités.

Pour plus de détails lire le dossier de l’Inserm « Autisme » et celui de l’Université de Tours « En savoir plus sur l’autisme »

Ces dernières années, les progrès des neurosciences et l’identification de facteurs de risque génétiques ou environnementaux ont permis de mieux appréhender les TSA, mais leurs causes demeurent encore assez mal comprises. Dans ce contexte, la recherche thérapeutique avance difficilement.

On peut citer l’exemple de plusieurs essais cliniques récemment abandonnés, en raison de résultats jugés peu concluants – alors que les molécules étudiées avaient au départ généré beaucoup d’espoirs.

 

  • La première étude, un essai de phase III contrôlé et randomisé visait à tester l’efficacité d’une molécule appelée balovaptan sur les capacités de socialisation et de communication d’adultes atteints de TSA. Les résultats, publiés dans The Lancet Psychiatry montrent que le traitement n’a pas eu d’effet probant sur ces deux aspects.

 

  • Dans le deuxième cas, des enfants et des adolescents avaient reçu de l’ocytocine par voie intranasale. Dans l’étude publiée dans le New England Journal of Medicine, les résultats suggèrent que ce traitement n’a pas d’impact significatif sur les interactions sociales et le fonctionnement cognitif dans le groupe traité, par rapport au groupe contrôle qui recevait un placebo.

 

Dès lors, comment faire avancer la science et identifier de nouvelles molécules qui pourraient avoir des effets bénéfiques sur les TSA ? D’autres pistes thérapeutiques sont-elles à l’étude ? Au-delà des essais cliniques, quels sont aujourd’hui les enjeux prioritaires de la recherche dans ce domaine ?

 

  1. Les ions bromures, des résultats prometteurs

Une nouvelle étude, menée par des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, du CNRS, de Inrae et de l’université de Tours, publiée très récemment dans le journal Neuropsychopharmacology, apporte des résultats prometteurs sur un médicament qui a beaucoup été utilisé dans le traitement de l’épilepsie : les ions bromures. Avec l’arrivée sur le marché de nouveaux médicaments pour les patients épileptiques, son usage a diminué, mais il s’agit encore d’un outil thérapeutique intéressant, notamment en cas d’épilepsie résistante aux traitements classiques.

L’épilepsie est une comorbidité fréquemment retrouvée chez les personnes atteintes de TSA : il est probable que certains facteurs de risque et processus physiopathologiques soient communs. Les scientifiques ont donc estimé qu’il pouvait être intéressant d’étudier plus particulièrement l’efficacité de ce traitement dans le contexte des TSA.

 

Inhibition et excitation des neurones

 Dans le cerveau, le maintien d’un équilibre entre les phénomènes d’excitation et d’inhibition dans les circuits neuronaux est essentiel à son bon fonctionnement tout au long de la vie. On sait aujourd’hui que les déséquilibres entre excitation et inhibition des neurones sont à l’origine de nombreux troubles, en particulier de l’épilepsie. De même, certaines formes de TSA ont été associées à un dysfonctionnement des connexions neuronales inhibitrices.

Dans le cas de l’épilepsie, les ions bromures contribuent à corriger ce déséquilibre en favorisant l’inhibition, ce qui permet d’éviter les crises. L’hypothèse des scientifiques était donc qu’un effet similaire pouvait être attendu dans les cas de TSA, avec un impact clinique visible sur les comportements sociaux et stéréotypés.

 

Trois modèles de souris

L’équipe a donc testé ce traitement dans trois modèles précliniques de TSA. À chaque fois, les ions bromures ont eu un effet bénéfique sur le phénotype autistique, restaurant le comportement social et diminuant les comportements stéréotypés des animaux. Les ions bromures ont également permis de réduire leur anxiété.

Les résultats sont d’autant plus prometteurs que les tests ont été menés sur trois modèles de souris qui présentaient différentes mutations génétiques responsables du phénotype autistique.

« Le fait que des effets bénéfiques soient observés dans trois modèles différents permet d’être un peu plus confiant quant à la capacité du traitement à être généralisable à plusieurs sous-groupes d’individus autistes lors de futurs essais cliniques », soulignent Jérôme Becker, chercheur Inserm et Julie Le Merrer, chercheuse CNRS, derniers auteurs de l’étude.

 

Essai clinique à venir ?

Le projet a reçu un soutien important d’Inserm Transfert et de la cellule de Valorisation c-VALO[1]. Cela a abouti au dépôt de deux brevets, le premier sur la base des effets des ions bromures dans les trois modèles murins étudiés par les chercheurs, complété par un deuxième portant sur l’intérêt de combiner ce traitement avec une molécule facilitatrice de l’activité d’un récepteur à la surface des neurones (le récepteur au glutamate mGlu4), pour obtenir une synergie d’effets.

Toujours sur la base de ces résultats prometteurs, la prochaine étape sera de mettre sur pied un essai clinique sur un petit effectif de patients adultes.

 

2. D’autres enjeux prioritaires pour la recherche

Néanmoins, la recherche thérapeutique n’est pas le seul défi à relever pour améliorer le quotidien et la qualité de vie des personnes atteintes de TSA.

 

Identification précoce et interventions individualisées

Une priorité est de continuer à raccourcir les délais entre l’apparition des premiers signes évocateurs d’une trajectoire atypique et la mise en place d’interventions ciblées.

On sait désormais que plus ces signes sont identifiés tôt, dès les premières années de la vie, mieux on est capable d’accompagner et de prendre en charge les enfants et leurs familles. Identifier ces enfants de manière ultra-précoce, en s’intéressant par exemple à leur motricité dès le plus jeune âge ou à leur histoire pré- et périnatale, est à l’heure actuelle un axe de recherche intéressant.

Par ailleurs, continuer à proposer des prises en charge individualisées, reposant sur des équipes multidisciplinaires et sur des interventions dites « comportementales et développementales » comme le programme Denver ou la Thérapie d’échange et de développement (TED) a également un intérêt majeur pour accompagner de manière bénéfique le développement des enfants.

Lire le Grand angle du magazine de l’Inserm n° 45 : Autisme, un trouble aux multiples facettes

 

Accompagner le vieillissement

 Autre défi de taille : la prise en charge des adultes autistes, dans un contexte plus général de vieillissement de la population.

Il existe aujourd’hui une absence de continuum de prise en charge tout au long de la vie. Cependant, depuis plusieurs années, de nombreux programmes de recherche se mettent en place un peu partout dans le monde pour comprendre comment les personnes autistes vieillissent, si elles sont plus à risque de troubles neurodégénératifs et quelles interventions contribuent à augmenter leur qualité de vie et à lutter contre leur isolement social.

On peut également citer l’importance des programmes de réhabilitation psychosociale dédiés aux adultes avec TSA et qui visent notamment à travailler leurs compétences cognitives et à accompagner leur insertion professionnelle et sociale.

L’accès à ces programmes et, de manière plus générale, à la prise en charge, demeure toutefois inégalitaire sur le territoire. Selon les chercheurs, cet enjeu devra être pris en compte aussi bien par les équipes de recherche que par les décideurs publics afin d’offrir les mêmes opportunités et le meilleur accompagnement à toutes les personnes atteintes de TSA, à tous les âges de la vie.

[1] C-VaLo est une expérimentation complémentaire aux SATT régionales qui existe depuis 2019. Il s’agit d’un nouveau dispositif d’investissement public pour accélérer et simplifier le transfert des résultats de la recherche académique. Les membres de C-VaLo sont l’université d’Orléans, l’INSA Centre Val de Loire, le CNRS, l’Inserm, l’INRAE, le BRGM, le CHU de Tours, le Conseil Régional Centre-Val de Loire et l’université de Tours.

Publication de l’expertise collective Inserm – « Pesticides et effets sur la santé : Nouvelles données »

pesticides

L’expertise collective de 2021 dresse un bilan des connaissances sur les liens entre exposition aux pesticides et santé humaine au travers d’une analyse critique de la littérature scientifique internationale.©Adobe Stock

 

Les pesticides regroupent l’ensemble des produits utilisés pour lutter contre les espèces végétales indésirables et les organismes jugés nuisibles. Ils suscitent de nombreuses inquiétudes concernant leurs effets possibles sur la santé humaine, et plus largement sur l’environnement. En 2013, à la demande de la DGS, l’Inserm avait publié une expertise collective « Pesticides : effets sur la santé ». En 2018, cinq directions générales ministérielles[1] ont saisi l’Institut afin qu’il réactualise cette expertise et y inclue de nouvelles thématiques.

Le groupe d’experts réuni par l’Inserm a analysé la littérature scientifique récente afin d’examiner le lien entre une vingtaine de pathologies et les pesticides. Il analyse aussi les effets sanitaires de deux substances actives et d’une famille de pesticides : le chlordécone, le glyphosate et les fongicides inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHi).

Lexpertise collective de 2021 dresse un bilan des connaissances sur les liens entre exposition aux pesticides et santé humaine au travers d’une analyse critique de la littérature scientifique internationale. Elle aborde les troubles du développement neuropsychologique et moteur de l’enfant, les troubles cognitifs et anxio-dépressifs de l’adulte, les maladies neurodégénératives, et les cancers de l’enfant et de l’adulte. La santé respiratoire et les pathologies de la thyroïde et l’endométriose ont également été abordées et viennent enrichir cette expertise. Au total, ce sont plus de 5 300 documents qui ont été analysés par un groupe de chercheurs multidisciplinaire.

Pour chaque thématique, les experts ont étudié les nouvelles données épidémiologiques disponibles afin d’évaluer s’il y avait une présomption de lien entre l’exposition de différentes populations aux pesticides et la survenue d’une pathologie. Comme en 2013, cette présomption d’un lien a ensuite été qualifiée de forte (++), moyenne (+) ou faible (±). Ces résultats ont ensuite été mis en perspective avec ceux des études toxicologiques, afin d’évaluer la plausibilité biologique des liens observés.

Des liens établis entre l’exposition aux pesticides et certaines maladies

Les premières études épidémiologiques menées sur le sujet caractérisaient le plus souvent l’exposition aux pesticides sans distinguer avec précision la famille de pesticides ou la substance active. Elles concernaient souvent des personnes a priori les plus exposées car manipulant régulièrement ces produits dans le cadre de leur activité professionnelle. Les études plus récentes ont cherché à préciser les sous-types de pathologies (par exemple, différents types de leucémies), à identifier les substances actives impliquées ou encore à investiguer le lien avec des populations supposées moins exposées que les professionnels comme les populations riveraines des zones agricoles, la population générale ou des populations plus sensibles comme les enfants.

  • Chez l’adulte

L’expertise confirme la présomption forte d’un lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides et quatre pathologies : les lymphomes non hodgkiniens (LNH), le myélome multiple, le cancer de la prostate et la maladie de Parkinson. Elle met aussi en évidence une présomption forte de lien entre l’exposition professionnelle aux pesticides et deux autres pathologies : les troubles cognitifs et la bronchopneumopathie chronique obstructive/bronchite chronique (voir encadré).

Une présomption de lien moyenne a été également mise en évidence entre l’exposition aux pesticides, principalement chez les professionnels, et la maladie d’Alzheimer, les troubles anxio-dépressifs, certains cancers (leucémies, système nerveux central, vessie, rein, sarcomes des tissus mous), l’asthme et des pathologies thyroïdiennes.

Pour aller plus loin sur les six pathologies de l’adulte pour lequel un lien de présomption forte a été établi avec l’exposition professionnelle aux pesticides

Lymphome non hodgkinien : des liens entre l’exposition au malathion, au lindane, au DDT et aux organophosphorés (++) avait été identifiés en 2013. Les données récentes permettent de conclure à une présomption de lien plus forte en 2021 pour le diazinon (++) et le chlordane (+). Pour le glyphosate, la présomption de lien est renforcée pour l’exposition professionnelle (+). Un niveau de présomption faible est rapporté pour la première fois pour le dicamba (±). Les données suggèrent également des liens entre des sous-types de LNH et certains pesticides.

Myélome multiple :  pour la première fois, des liens avec des substances actives sont mis en évidence pour la perméthrine (+) et pour le carbaryl, le captane, le DDT et le glyphosate (±).

Cancer de la prostate : cette analyse renforce le rôle évoqué en 2013 de l’exposition professionnelle à certains insecticides organophosphorés comme le fonofos (+) et mettent en évidence celui du terbufos (+) et du malathion (+) ainsi que d’un insecticide organochloré (aldrine, +). Elle souligne un risque plus élevé de développer une forme agressive de la maladie, suggérant ainsi un rôle possible sur la progression de la maladie et pas uniquement sur la survenue. Pour le chlordécone, l’expertise conclu à un niveau de présomption fort (++) et estime qu’une relation causale est vraisemblable.

La maladie de Parkinson : les données confirment le lien avec le paraquat (+) et de nouvelles études évoquent des liens avec une présomption faible (±) avec des matières actives de la famille des fongicides dithiocarbamates (zinèbe, zirame et mancopper). Les nouvelles études sur l’exposition des riverains des terres agricoles suggèrent une présomption faible du lien avec les pesticides en général.

Les troubles cognitifs : la présomption d’un lien est passée de moyenne à forte (++) avec l’exposition aux pesticide, principalement des organophosphorés, chez les agriculteurs. Les études les plus récentes se sont élargies aux riverains de zones agricoles ou à la population générale et ont permis de conclure à une présomption moyenne (+).

La santé respiratoire (non traitée en 2013) : une présomption forte entre l’exposition professionnelle aux pesticides et la survenue de BPCO et de bronchite chronique est établie. Un lien est identifié entre dix-sept substances actives et une pathologie ou une atteinte d’un paramètre de la fonction respiratoire avec en majorité un niveau de présomption faible (±). Pour évaluer la plausibilité biologique de ce lien, trois effets ont été étudiés en toxicologie (stress oxydant, mitotoxicité et immunomodulation) et parmi ces 17 pesticides, 11 sont associés à au moins deux effets toxicologiques et deux, la perméthrine et le chlorpyrifos, aux 3 effets.

  • Chez l’enfant

Certaines périodes de la vie telles que la grossesse et la petite enfance sont d’une plus grande vulnérabilité face à la présence d’un évènement ou agent toxique.

Les résultats récents permettent de préciser le type de leucémies de l’enfant concernées lors d’une exposition de la mère pendant la grossesse : leucémies aiguës et usages domestiques (présomption de lien forte) et leucémie aiguë myéloïde et exposition professionnelle. Un nouveau lien a été mis en évidence entre le risque de leucémie aiguë lymphoblastique en cas d’exposition professionnelle paternelle en période préconceptionnelle (présomption moyenne).

Concernant les tumeurs du système nerveux central, l’expertise confirme la présomption forte d’un lien entre l’exposition professionnelle des parents aux pesticides (sans distinction) pendant la période prénatale. D’autre part, les résultats récents conduisent à une présomption forte d’un lien entre les tumeurs du système nerveux central et l’exposition domestique aux pesticides (sans distinction) pendant la grossesse ou pendant l’enfance.

D’autres travaux portent sur les liens entre l’exposition professionnelle ou environnementale des mères pendant la grossesse et les troubles du développement neuropsychologique et moteur de l’enfant. Ils confirment l’existence d’un lien avec un niveau de présomption fort, notamment pour certaines familles de pesticides, comme les organophosphorés. Concernant les pyréthrinoïdes, dont l’usage a augmenté en substitution aux insecticides organophosphorés, les résultats des nouvelles études sont concordants et mettent en évidence un lien entre l’exposition aux pyréthrinoïdes pendant la grossesse et l’augmentation des troubles du comportement de type internalisé tels que l’anxiété (présomption forte). Les données toxicologiques soutiennent une plausibilité biologique d’un effet à partir des modes d’action de ces pesticides.

Prendre en compte les données scientifiques les plus récentes pour mieux protéger les populations

La confirmation et la mise en évidence de présomptions fortes de liens entre certaines pathologies et l’exposition aux pesticides doit inciter à une meilleure prise en compte de ces enjeux par les autorités. Par ailleurs, la littérature scientifique sur le sujet fait émerger de nouvelles préoccupations, concernant notamment les effets indirects de certains pesticides sur la santé humaine par le biais des effets sur les écosystèmes qui mériterait d’être d’avantage pris en considération par les chercheurs et les décideurs.

Que peut-on dire du chlordécone, du glyphosate et des SDHi ?

  • Le chlordécone, un insecticide qui a été utilisé aux Antilles françaises de 1973 à 1993, persiste dans ces milieux naturels insulaires. La consommation des denrées alimentaires contaminées a entraîné une contamination importante de l’ensemble de la population. La causalité de la relation entre l’exposition au chlordécone et le risque de survenue de cancer de la prostate est jugée vraisemblable.
  • Le glyphosate est un herbicide pour lequel l’expertise conclut à une présomption moyenne de lien avec les lymphomes non hodgkiniens. D’autres liens ont été évoqués dans la littérature scientifique pour le myélome multiple et les leucémies, mais les résultats sont moins solides. Les études expérimentales de cancérogenèse chez les rongeurs montrent des excès de cas, mais ne sont pas convergentes. On y observe des tumeurs différentes, pour les mâles ou les femelles, mais qui ne se produisent qu’à des doses de glyphosate très élevées et uniquement sur certaines souches de rongeurs.
  • Enfin, les SDHi sont une famille de fongicides à large spectre, utilisée depuis 30 ans qui inhibent la respiration cellulaire chez les espèces cibles. Il n’existe à ce jour pratiquement aucune donnée épidémiologique portant sur les effets de ces substances sur la santé des agriculteurs ou de la population générale. Les études expérimentales sur des poissons suggèrent que certains SDHi peuvent avoir des effets perturbateurs endocriniens, au moins dans le modèle utilisé. Certains montrent des effets cancérogènes sur les rats ou les souris mais ces résultats sont discutés sur la base d’un mécanisme non extrapolable à l’être humain. Les experts soulignent le besoin de poursuivre des recherches pour améliorer l’évaluation du potentiel cancérogène des SDHi et combler le manque de données chez l’humain.

 

[1] Il s’agit de Direction générale de la prévention des risques, la Direction générale de la santé, la Direction générale du travail, la Direction générale de la recherche et de l’innovation, ainsi que le secrétariat général du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

Consultez l’expertise collective : « Pesticides et santé – Nouvelles données (2021)« 

À l’Inserm, la lutte contre la pandémie de Covid-19 se poursuit

 

Cellules infectées par le SARS-CoV-2. ©Sébastien Eymieux et Philippe Roingeard, Inserm – Université de Tours

Apparu en décembre 2019 à Wuhan, au centre de la Chine, le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 s’est très rapidement propagé à l’ensemble de la planète, entraînant la pandémie la plus grave de notre histoire récente. Dès le début de cette crise sanitaire mondiale, l’Inserm s’est mobilisé en tant qu’acteur de premier plan de la recherche biomédicale en France et à l’étranger, grâce à l’implication de ses nombreux experts sur des sujets liés aussi bien à la recherche fondamentale qu’à la thérapeutique ou à la modélisation de l’épidémie.

Un an après le début de la pandémie, alors que la plupart des pays initient leur campagne de vaccination et que l’émergence de variants ayant une incidence sur la transmission du virus marquent une nouvelle étape dans la lutte contre la Covid-19, les efforts de recherche à l’Inserm permettent chaque jour de nouvelles avancées dans la compréhension de la maladie, des facteurs de risque, de la dynamique de l’épidémie mais aussi une amélioration de la prise en charge et de la prévention.

La majorité des travaux publiés ont reçu un financement du fond d’amorçage du consortium REACTing, désormais intégré au sein de l’ANRS maladies infectieuses émergentes, la nouvelle agence créée au 1er janvier 2021. Ils concernent aussi bien la recherche fondamentale que la recherche thérapeutique et vaccinale, ou encore l’épidémiologie. De grandes cohortes ont par ailleurs été mises en place pour collecter des données de qualité permettant de répondre à des interrogations scientifiques capitales.

Jamais la mission portée par l’Inserm, la science pour la santé, n’a été aussi cruciale. Alors que de nombreuses questions restent en suspens, l’institution et ses chercheurs continuent à travailler, en collaboration avec leurs partenaires nationaux et internationaux, pour faire avancer les connaissances et éclairer les décisions publiques et la société en s’appuyant sur une recherche d’excellence alliant rigueur, transparence et éthique.

 

1. Les cohortes Covid-19, outil indispensable pour consolider les connaissances scientifiques en temps de pandémie

Les cohortes sont des groupes constitués d’un ensemble de personnes suivies individuellement dans le temps. Leur mise en place a pour objectif d’identifier la survenue d’événements de santé d’intérêt pour la recherche clinique ainsi que des facteurs de risque ou de protection. Elles constituent donc un instrument de référence pour la recherche épidémiologique et la santé publique.

En pleine pandémie, la constitution de larges cohortes de patients ou d’individus potentiellement à risque d’être exposés au virus permet aux scientifiques d’avoir accès rapidement à des données cliniques, biologiques et environnementales nombreuses, robustes et variées. Les équipe de recherche peuvent ainsi s’appuyer sur ces cohortes pour répondre à des interrogations scientifiques diverses, concernant aussi bien l’immunité, les facteurs de risque, l’efficacité des traitements, l’évolution et les symptômes de la maladie Covid-19 que l’impact socioéconomique ou encore psychologique de l’épidémie et des mesures de confinement sur les populations.

En France, plusieurs cohortes pilotées par l’Inserm ont été mises en place dès le début de la pandémie de Covid-19. En voici l’avancement sur quelques exemples non exhaustifs.

 

French Covid

Lancée fin janvier 2020, French Covid est une étude de cohorte française promue par l’Inserm. Elle repose sur le suivi d’un large groupe de patients ayant développé une forme clinique de la maladie qui nécessitait une hospitalisation, soit dans un service de médecine soit en réanimation. Au 20 janvier 2021, 4 300 patients avaient été inclus dans cette cohorte, la plus large cohorte française à l’heure actuelle de patients hospitalisés pour une infection par le SARS-CoV-2.

L’objectif est d’accumuler des connaissances sur la maladie Covid-19 et notamment sur les formes les plus graves, afin d’améliorer la prise en charge dans les cas où l’hospitalisation s’impose. La coordination de la cohorte est aujourd’hui confiée au Pr Jade Ghosn, chercheur au sein de l’unité 1137 IAME (Inserm/Université de Paris) et médecin infectiologue à l’hôpital Bichat AP-HP à Paris, en collaboration avec le Pr Catherine Chirouze, également infectiologue, au CHU de Besançon.

En plus des données cliniques et virologiques, des données immunologiques, génétiques, sérologiques, transcriptomiques sont collectées pour chaque participant afin de mieux caractériser la maladie et de définir le devenir des patients à court et à long terme (suivi jusqu’à 6 mois après le diagnostic).

Une étude fondée sur les données des premiers patients inclus avant le 15 mars 2020 a déjà été publiée en octobre 2020 dans The Journal of Medical Virology pour rendre compte de la mortalité dans la cohorte et des facteurs qui y étaient associés. Elle sera prochainement complétée par un article dans le journal PNAS portant sur le lien entre la dynamique de la charge virale et l’évolution de la maladie au cours du temps (mortalité).

Plusieurs groupes de recherche partenaires s’appuient également sur les données issues de French Covid pour mener leurs travaux, portant par exemple sur les facteurs génétiques associés aux formes graves de la maladie. Ainsi en septembre, deux publications dans la revue Science ont décrit les premières causes génétiques et immunologiques expliquant 15 % des formes graves de Covid-19. Elles soulignaient notamment que ces patients présentaient un défaut d’activité des interférons de type I (des protéines impliquées dans la réponse immunitaire).

D’autres travaux sont également menés à partir de la cohorte pour analyser l’impact de certains traitements (corticoïdes et hypertenseurs notamment) sur l’évolution des patients ou la persistance de séquelles. Enfin, les données de sérologie des participants ont aussi été utilisées afin de tester et de mettre au point de nouveaux tests de dépistage. Ainsi, une étude parue en décembre 2020 s’appuyant à la fois sur French Covid et sur la cohorte CoV-Contact (voir ci-après) a montré que l’identification d’un marqueur spécifique du virus dans les échantillons sanguins offrait une alternative intéressante de dépistage du virus.

Enfin, alors que les 1 000 premiers patients inclus dans la cohorte French Covid viennent d’atteindre les six mois de suivi, les chercheurs souhaitent désormais se pencher plus précisément sur la problématique de la persistance de certains symptômes à long terme.

French Covid est intégrée au consortium ISARIC basé à Oxford qui regroupe les données de plus de 100 000 patients à travers le monde et dont le but est de prévenir et de mieux comprendre les maladies infectieuses émergentes. À ce titre, ces données sont analysées dans le cadre de travaux de recherche internationaux publiés par ISARIC. Elle fait aussi partie du projet européen Orchestra (voir ci-après) et a reçu le label « priorité nationale de recherche » du comité CAPNET.

 

CoV-Contact

La cohorte CoV-Contact est une cohorte portant sur 300 à 350 personnes. Elle vise à mieux connaître les facteurs individuels associés au développement de la maladie Covid-19, après une exposition à risque de transmission du virus SARS-CoV-2. Dans ce but, des prélèvements à visée virologique et génétique sont réalisés sur les participants.

En septembre 2020, une étude parue dans Médecine et maladies infectieuses s’appuyant sur la cohorte CoV-Contact a évalué l’évolution clinique, virologique et immunologique à la suite d’un contact à risque non protégé avéré et daté parmi les professionnels de santé.

Elle a montré que la proportion des professionnels de santé infectés à la suite d’un contact professionnel à risque est très élevée et qu’un quart de ces infections sont asymptomatiques.

 

EpiCoV

La cohorte EpiCoV s’appuie sur un échantillon représentatif de 135 000 personnes sélectionnées par l’Insee pour représenter toute la diversité de la population vivant en France.

Porté par l’Inserm et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère des Solidarités et de la Santé, en lien avec leurs partenaires (Insee, Santé publique France, CNRS, Ined, Université Paris-Saclay), le projet EpiCOV est une large étude épidémiologique, adossée à une grande enquête statistique, proposant de fournir une cartographie globale et scientifiquement fiable du statut immunitaire de la population et de sa dynamique, sur l’ensemble du territoire, via la collecte d’échantillons biologiques (auto-prélèvement d’une goutte de sang sur un papier buvard) couplée à des questionnaires.

L’objectif est de renseigner sur la diffusion du virus dans la population mais aussi sur les conséquences de l’épidémie sur le quotidien, les problématiques socioéconomiques et la santé des individus.

Les résultats de la première campagne d’interrogation, fondée sur 135 000 réponses aux questionnaires rempli en mai 2020 ainsi que sur 12 000 analyses sérologiques réalisées sur les prélèvements envoyés par les participants, témoignent de la situation en France au printemps.

En France métropolitaine, 4,5 % des personnes de 15 ans ou plus avaient été en contact avec le virus en mai 2020. Cette part est plus importante parmi les 30-49 ans, dans les communes les plus densément peuplées et pour les personnes habitant dans des logements surpeuplés.

Une nouvelle campagne de questionnaires a été lancée à l’automne, afin d’assurer un suivi de l’évolution de la situation sanitaire au fil des mois.

 

Sapris

Sapris est une large enquête pilotée par l’Inserm qui s’appuie sur les grandes cohortes épidémiologiques françaises Constances, E3-E4N, NutriNet-Santé et Elfe-Epipage2. Elle vise là aussi à mieux comprendre la diffusion du virus dans la population et les conséquences de la pandémie sur la vie des individus.

Via un questionnaire en ligne, l’enquête coordonnée par Nathalie Bajos, sociologue-démographe et directrice de recherche Inserm, vise à évaluer l’évolution du nombre de personnes atteintes, les modes de transmission de la maladie, sa sévérité, les caractéristiques cliniques et les facteurs de risque d’infection et de complication, les conséquences sociales, économiques et psychologiques du confinement, mais aussi le recours au système de santé et la prise en charge.

Les grandes cohortes nationales sur lesquelles s’appuient les investigateurs de Sapris constituaient déjà une mine d’informations sur la santé, le mode de vie et le contexte social des participants. En s’appuyant sur toutes ces données déjà disponibles et en proposant des questionnaires axés sur la Covid-19 et son impact, ces cohortes françaises permettent de mieux appréhender l’évolution de l’épidémie.

L’étude Sapris comprend également un volet sérologique (le projet Sapris-Sero), s’intéressant aux échantillons biologiques de 14 600 participants interrogés pendant le premier confinement, sous la responsabilité de Fabrice Carrat, spécialiste en épidémiologie des virus, en coresponsabilité avec les responsables des cohortes participant à Sapris.

Les premiers résultats parus à l’automne 2020 suggèrent une proportion de tests positifs nettement plus élevée chez les personnes ayant présenté des symptômes évocateurs de Covid-19, comme les scientifiques en avaient fait l’hypothèse. Toutefois, 20 % des participants testés positifs n’ont présenté aucun symptôme.

 

Lancement de projets européens de grande ampleur s’appuyant sur des cohortes

Orchestra

Ce projet de recherche européen, lancé en décembre 2020 pour une durée de trois ans sous la direction de la chercheuse Evelina Taccinelli à l’université de Vérone, a pour objectif de créer une grande cohorte pan-européenne, regroupant des cohortes déjà existantes dans 15 pays, dont la France. Vingt-six institutions de recherche sont impliquées dont l’Inserm.

Bénéficiant d’un financement de plus 20 millions d’euros dans le cadre du programme de recherche et d’innovation européen Horizon 2020, le projet Orchestra vise à mettre en œuvre un suivi à long terme de milliers de personnes de tout âge, ayant été infectées ou non par le SARS-CoV-2, pour répondre à plusieurs questions de recherche qui persistent et pour guider les politiques publiques mises en place en réponse à la pandémie en Europe.

En s’appuyant sur les données collectées dans les cohortes des pays participants, la communauté scientifique souhaite en effet accroître les connaissances pour mieux protéger les populations les plus vulnérables et réduire les risques pour les soignants, étudier l’impact à long terme de la Covid-19 sur la santé et le bien-être des individus, mieux comprendre comment les populations répondent à la vaccination et enfin analyser l’influence de facteurs socioéconomiques et environnementaux sur la diffusion de l’épidémie.

Côté français, French Covid, Cov-Contact et Epicov sont incluses dans cette grande cohorte internationale : les informations collectées auprès des participants viendront donc alimenter cette grande base de données et soutenir les efforts de recherche à l’international, ainsi que la décision publique au niveau européen.

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Il s’agit de l’un de quatre projets sélectionnés par l’Union européenne pour étudier les effets de la pandémie à long terme sur la santé et sur le comportement des personnes. Quatorze partenaires européens, dont l’Inserm via l’implication de la chercheuse Maria Melchior et de ses équipes, collaboreront avec l’OMS pour investiguer les effets des confinements sur le bien-être et la santé mentale des individus au cours des trois prochaines années.

Les chercheurs s’appuieront pour cela sur les données de grandes cohortes internationales ainsi que sur des registres de santé accessibles en Suède, en Italie et en Espagne. L’objectif est également d’étudier les liens qui existent entre respect des mesures de confinement et certaines caractéristiques spécifiques aux individus (par exemple le lien entre détresse psychologique et respect des mesures de restriction).

Par ailleurs, les équipes s’intéresseront à l’efficacité de programmes mis en place par l’OMS pour réduire les problèmes d’anxiété et de dépression pendant la crise sanitaire, en se penchant tout particulièrement sur certains groupes plus « vulnérables » comme les soignants, les jeunes, les migrants, les personnes ayant perdu leur emploi et/ou en situation précaire.

 

2. Actualités de la rentrée : de nouveaux travaux pour accroître les connaissances scientifiques

 

Alors que la lutte contre la pandémie se poursuit dans les laboratoires de recherche et dans les hôpitaux, de nombreux projets ont connu ces derniers mois des avancées significatives. En ce début d’année, plusieurs équipes Inserm dévoilent de nouveaux résultats, concernant des aspects de recherche fondamentale mais aussi de prise en charge des patients ou encore l’impact de la pandémie sur la société.

Évaluer l’impact de la pandémie de la Covid-19 sur la santé et la vie sociale des jeunes adultes

Au début de la pandémie de Covid-19, l’attention publique a été portée sur les personnes âgées, considérées comme plus vulnérables car plus à risque de développer des formes graves de la maladie. D’abord absents dans le débat public, les jeunes adultes ont été rapidement stigmatisés en raison de préjugés quant à leur irresponsabilité face à la pandémie durant l’été.

Afin de documenter la manière dont la pandémie de Covid-19 affecte la santé et la vie sociale des jeunes adultes (18-29 ans), un consortium de recherche regroupant des chercheurs français et canadiens s’est alors constitué entre l’Inserm (Marie Jauffret-Roustide, sociologue, PI) et l’université de Colombie-Britannique à Vancouver (Rod Knight, chercheur en santé publique PI ; Pierre-julien Coulaud, coordinateur scientifique ; et Naseeb Bolduc, coordinatrice opérationnelle).

Menée grâce à un premier financement de l’Institut de recherche en santé du Canada (IRSC), cette recherche intitulée Focus (pour France-Canada Observatory on Covid-19, Youth health and Social well-being) a été impulsée afin de documenter l’impact de la pandémie sur la santé mentale, les conduites addictives, la santé sexuelle et la vie sociale et économique des jeunes adultes.

L’enquête Focus s’articule autour de deux volets complémentaires impliquant la mise en place d’une enquête en ligne (volet quantitatif) et la réalisation d’entretiens semi-directifs auprès des jeunes (volet qualitatif). Le volet quantitatif de la recherche mené entre octobre et décembre 2020 a permis à près de 4 000 jeunes dans chaque pays de partager leurs expériences sur les six mois précédant l’enquête.

 

Cette enquête s’inscrit aussi dans une démarche de recherche participative par la mise en œuvre d’un conseil de jeunes adultes qui aide à mieux orienter et à adapter les travaux de recherche. Crédit : Adobe Stock

Les premières analyses montrent qu’une large majorité des jeunes adultes interrogés rapportent appliquer les gestes barrières (par exemple 86 % respectent le port du masque et 91 % se lavent régulièrement les mains) et viennent ainsi contredire les stéréotypes concernant leur irresponsabilité. Elles démontrent également que la pandémie affecte très fortement la santé des jeunes, et particulièrement leur santé mentale. Près de 3 jeunes sur 4 ont déclaré éprouver un sentiment de solitude, 66 % sont très anxieux et la moitié des jeunes interrogés (48 %) présentent des symptômes dépressifs modérés à sévères.

Ces données seront complétées par la réalisation d’entretiens sociologiques afin de mieux appréhender le vécu des jeunes et d’identifier les mesures urgentes à mettre en place pour améliorer leur bien-être et leur situation sociale et économique.

Cette enquête s’inscrit aussi dans une démarche de recherche participative par la mise en œuvre d’un conseil de jeunes adultes qui aide à mieux orienter et à adapter les travaux de recherche.

Une deuxième vague d’enquête est prévue au printemps 2021 et devrait permettre, grâce à des financements complémentaires, de construite une cohorte de jeunes adultes en France et au Canada afin d’étudier les effets à moyen et long terme de la pandémie de Covid-19 sur leurs trajectoires de vie et leur santé dans deux contextes sociopolitiques et économiques spécifiques. Elle est le reflet d’une collaboration internationale fructueuse entre l’Inserm et l’université de Colombie-Britannique.

 

 

Pour en savoir plus sur la recherche Focus :

https://theconversation.com/irresponsables-ego-stes-negligents-en-finir-avec-les-stereotypes-sur-les-jeunes-et-la-covid-19-150854

https://focus-covid19.med.ubc.ca/

https://cihr-irsc.gc.ca/f/52195.html

Contact chercheur

Marie Jauffret-Roustide

 Sociologue, chargée de recherche Inserm, Cermes3

rf.mresni@editsuor-terffuaj.eiram

 

Mieux comprendre le cycle infectieux du virus

L’équipe de Philippe Roingeard à Tours s’attelle depuis le début de la pandémie à mieux comprendre la biologie fondamentale du SARS-CoV-2. À l’origine de photos du virus en microscopie électronique, les chercheurs se sont intéressés, dans une nouvelle étude parue dans Cellular and Molecular Life Science, aux étapes précoces et tardives du cycle infectieux.

Il s’agit de la première étude à se pencher de manière aussi minutieuse et détaillée sur le comportement du virus dans les cellules au cours du temps, en s’appuyant sur des techniques de microscopie électronique.

 

Cellule infectée par le SARS-CoV-2. Crédit : Sébastien Eymieux, Philippe Roingeard, Inserm/Université de Tours

L’étude, réalisée en collaboration avec l’institut Pasteur de Lille et le CIRI à Lyon, ouvre des pistes pour mieux comprendre les interactions entre le virus et les cellules. S’il était déjà clair que le SARS-CoV-2 induit des remaniements membranaires qui lui servent à ancrer ses complexes de réplication[1] dans les membranes afin de se protéger de la réponse immunitaire cellulaire, les chercheurs montrent comment ces remaniements s’opèrent. L’équipe rend compte de ces modifications structurales de la cellule qui interviennent à un stade très précoce de l’infection par le virus pour mieux comprendre comment le cycle infectieux se met en place, et à plus long terme pour identifier des stratégies permettant de bloquer ce processus.

L’étude montre aussi, pour la première fois, que lors des étapes tardives du cycle infectieux, des virus s’accumulent dans des grandes vacuoles intracellulaires. Les conséquences de ce phénomène ne sont pas encore bien comprises, mais cette accumulation pourrait être associée à la pathogénicité de la maladie.

Les chercheurs souhaiteraient désormais étudier le cycle infectieux dans d’autres types cellulaires, par exemple des cellules du tractus respiratoire, plus pertinentes pour la physiologie de l’infection, afin de confirmer leurs observations.

[1] Complexes enzymatiques intervenant dans la réplication du virus

Contact chercheur

Philippe Roingeard

U1259 MAVIVH
Université de Tours

rf.sruot-vinu.dem@draegnior

 

Le SARS-CoV-2 à l’assaut des neurones 

L’infection par le virus SARS-CoV-2 est connue pour être caractérisée par des atteintes respiratoires importantes. Toutefois, des symptômes neurologiques ont également très rapidement et régulièrement été rapportés chez les patients. Ces symptômes vont des maux de tête aux pertes de mémoire et à la perte d’odorat en passant par des manifestations cliniques plus sévères comme des pertes de conscience et des AVC.

Dès le printemps 2020, Karen Richie, directrice de recherche émérite à l’Inserm, alertait sur les risques posés par le virus sur le cerveau et la moelle épinière dans une revue de littérature publiée dans Brain Communications. Elle et ses collègues y apportaient des pistes pour mieux appréhender le lien entre cerveau, difficultés psychiatriques et neurologiques, et épidémie de coronavirus.

Néanmoins, si des travaux expérimentaux ont souligné que des traces d’ARN du virus ont été retrouvées dans le cerveau de patients décédés de la Covid-19 et des protéines virales dans certaines cellules de leur bulbe olfactif, la capacité du virus à infecter les cellules du cerveau et les conséquences possibles n’avaient pas été démontrées jusqu’alors.

C’est l’objet d’une nouvelle étude publiée le 12 janvier 2021 dans le Journal of Experimental Medicine. En collaboration avec l’université de Yale aux États-Unis, des chercheurs de l’Inserm, de Sorbonne université et du CNRS à l’Institut du cerveau ainsi que de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP ont utilisé trois approches différentes pour étudier l’infection dans le cerveau : des cultures de cellules cérébrales en 3D, un modèle murin d’infection au SARS-CoV-2 et des tissus cérébraux de patients décédés de la Covid-19.

 

Photo en 3D par imagerie en feuillet de lumière de la présence du virus dans les neurones du bulbe olfactif. Crédit : Inserm/Nicolas Renier

Leurs résultats confirment le tropisme cérébral du SARS-CoV-2 et sa capacité à infecter les neurones. Ils suggèrent également que les symptômes neurologiques observés dans la Covid-19 pourraient être une conséquence de cette atteinte directe du système nerveux central.

Ces recherches doivent à présent se poursuivre pour identifier précisément la voie empruntée par le virus pour entrer dans le cerveau et confirmer le lien entre les changements cellulaires observés au niveau des neurones et les symptômes neurologiques rapportés.

Contact chercheur

Nicolas Renier

Chercheur Inserm à l’ICM

gro.etutitsni-mci@reiner.salocin

 

Un meilleur pronostic vital des patients en réanimation 

Parmi les facteurs associés à un risque plus élevé de décès chez les patients infectés par le SARS-CoV-2 figurent l’âge et un faible nombre de lymphocytes circulants. Une lymphopénie[1] importante causée par l’infection virale est en effet fréquemment observée chez les patients atteints de Covid-19 sévère et des modifications des lymphocytes T antiviraux ont été corrélées avec la sévérité de la Covid-19.

Dans une étude publiée début janvier dans la revue Critical Care, l’équipe des chercheurs Inserm Rémi Cheynier et Stefano Marullo à l’institut Cochin (Paris) en collaboration avec des cliniciens de la clinique Ambroise-Paré (Neuilly-sur-Seine) ont mené une étude chez des patients hospitalisés en réanimation pour forme grave de Covid-19 avec atteinte pulmonaire. Ils se sont intéressés au thymus, l’organe producteur des lymphocytes T (un type de globule blanc), dont le rôle dans ces formes sévères de Covid-19 n’avait pas encore bien été documenté.

 

Une réactivation de la fonction du thymus est observée chez une majorité des patients survivant d’une Covid-19 sévère. Crédits : Rémi Cheynier.

En utilisant des scans pulmonaires sur 88 patients (dont 50 patients Covid et 37 patients témoins), les scientifiques ont systématiquement cherché à caractériser le degré d’hypertrophie du thymus[2]. Ils ont identifié une hypertrophie de cet organe chez de nombreux patients. Celle-ci s’accompagnait d’une production accrue de lymphocytes T, permettant de compenser la lymphopénie engendrée par le virus. Grâce à sa capacité à se réactiver et à produire massivement de nouvelles cellules T lors d’infections systémiques comme l’infection par le SARS-CoV-2, le thymus participe donc à la réponse immune antivirale. Un thymus hypertrophié est associé à un meilleur pronostic chez les patients hospitalisés en unité de soins intensifs pour Covid-19.

Une analyse scanner systématique du thymus permettrait de mieux évaluer les risques de développement d’une forme sévère de la maladie chez les patients hospitalisés pour Covid-19.

[1] Nombre anormalement faible de lymphocytes dans le sang

[2] L’hypertrophie thymique correspond à un développement anormal du thymus qui le fait enfler.

Contact chercheur

 Rémi Cheynier

Chercheur Inserm à l’institut Cochin

 rf.mresni@reinyehc.imer

 

Les engelures, dommages collatéraux d’une immunité performante

Les engelures sont des atteintes cutanées douloureuses qui apparaissent en réaction au froid. Dues à des troubles de la microvascularisation cutanée, elles se manifestent par des doigts rouges ou violacés, avec parfois la présence de petites cloques pouvant prendre un aspect nécrotique. Une fréquence inédite de consultations pour engelures a été rapportée en Italie puis en France dès le début de la pandémie de Covid-19.

Afin d’évaluer leurs liens avec l’infection par le SARS-CoV-2, une équipe de chercheurs menée par Thierry Passeron (unité 1065 Inserm/Université de Nice Sophia Antipolis) a mis en place une étude auprès des personnes reçues par la cellule Covid du CHU de Nice entre le 9 et le 17 avril et qui présentaient ce type de lésions. Au cours de cette période, 40 patients souffrant d’engelures ont été accueillis. Aucun d’entre eux n’avait présenté une forme grave de Covid-19 et la plupart étaient jeunes (âge médian de 22 ans). S’ils avaient tous été cas contacts ou suspectés d’être infectés par le SARS-CoV-2 dans les 3 semaines précédant la consultation, le résultat de la recherche du virus au niveau nasopharyngé (PCR) était négatif pour l’ensemble de ces patients, et une sérologie positive n’a été retrouvée que chez un tiers d’entre eux.

En analysant ces chiffres, si la causalité entre les lésions cutanées et le SARS-CoV-2 n’est pas démontrée, elle est malgré tout fortement suspectée par les scientifiques, notamment parce que le nombre de patients présentant des engelures à cette époque de l’année dans cette région du sud de la France est particulièrement surprenant. 

Se fondant sur les données biologiques et cliniques des patients concernés – leur âge plutôt jeune, la rareté de leurs symptômes associés à la Covid-19 ou encore la négativité des tests PCR et sérologiques –, les chercheurs estiment que les engelures sont la conséquence d’une immunité innée particulièrement efficace. Si les formes graves de Covid-19 semblent liées à un défaut de l’immunité adaptative, qui rend impossible une production suffisante de cellules et d’anticorps spécifiques du SARS-CoV-2, les engelures seraient à l’inverse l’illustration d’une surréaction de l’immunité innée. Cette diversité de réponses reposerait sur des variants génétiques associés à l’activité des médiateurs de l’immunité. Plus d’informations sur cette étude sur le site Inserm.fr.

Contact chercheur

Thierry Passeron

 Unité 1065 – Centre méditerranéen de médecine moléculaire

rf.ecinu@noressap.yrreiht

 

Repositionnement thérapeutique d’un hypertenseur

Dans le cadre du consortium REACTing coordonné par l’Inserm, l’équipe Virpath, codirigée par les chercheurs Inserm Manuel Rosa-Calatrava et Bruno Lina au Centre international de recherche en infectiologie (Inserm/CNRS/Université Claude-Bernard-Lyon 1/ENS Lyon), travaille au repositionnement de médicaments déjà disponibles sur le marché en vue de nouvelles indications thérapeutiques contre les infections virales. Pour tester l’efficacité thérapeutique de ces molécules contre le SARS-CoV-2, l’équipe a développé et caractérisé des modèles précliniques prédictifs d’infections virales.

Pour être au plus proche de la physiologie humaine, elle utilise des épithéliums respiratoires humains d’origine nasale, bronchique ou alvéolaire cultivés en interface air-liquide. Elle a déjà montré dans ces modèles l’intérêt du diltiazem, un antihypertenseur utilisé dans le traitement de l’angine de poitrine. Celui-ci a déjà été caractérisé et repositionné par les chercheurs de VirPath afin de stimuler fortement la réponse immunitaire innée des épithéliums respiratoires, notamment contre les virus influenza, les pneumovirus et le SARS-CoV-2.

Plus récemment, à partir de modèles animaux, les chercheurs en collaboration avec les équipes de l’IDMIT ont pu confirmer le mode d’action de ce traitement sur le SARS-CoV-2 : le diltiazem stimule l’expression des gènes des interférons de type 3, des protéines impliquées dans la réponse immunitaire et qui ne sont pas associées à de hauts niveaux d’inflammation. Fort de ces résultats encourageants, une nouvelle étude préclinique devrait démarrer en février avec l’objectif de confirmer l’intérêt du diltiazem et de caractériser les doses efficaces optimales dans l’optique de mettre en place un éventuel essai chez l’Homme.

Contact chercheur

Manuel Rosa-Calatrava

Chercheur Inserm au CIRI

rf.1noyl-vinu@avartalac-asor.leunam

Point d’étape : l’Inserm pleinement engagé dans la lutte contre la pandémie de Covid-19

Covid-19: Observation intracellulaire d’épithélium respiratoire humain reconstitué MucilAir™ infecté par le SARS-CoV-2. © Manuel Rosa-Calatrava, Inserm ; Olivier Terrier, CNRS ; Andrés Pizzorno, Signia Therapeutics ; Elisabeth Errazuriz-Cerda  UCBL1 CIQLE. VirPath (Centre International de Recherche en Infectiologie U1111 Inserm – UMR 5308 CNRS – ENS Lyon – UCBL1). Colorisé par Noa Rosa C.

 

  1. Une mobilisation rapide de l’Inserm pour accélérer la recherche et répondre à la pandémie

Apparu en décembre 2019 à Wuhan, au centre de la Chine, le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 s’est très rapidement propagé à l’ensemble de la planète, entraînant la pandémie la plus grave de notre histoire récente. Dès le début de cette crise sanitaire mondiale, l’Inserm s’est mobilisé, en tant qu’acteur de premier plan de la recherche biomédicale en France et à l’étranger, grâce à l’implication de ses nombreux experts sur des sujets liés aussi bien à la recherche fondamentale qu’à la thérapeutique ou à la modélisation de l’épidémie. Participant également à l’effort de solidarité nationale, l’Inserm a pu distribuer des dizaines de milliers de masques, gants, blouses, surchaussures, et réactifs aux équipes soignantes dans les hôpitaux.

Au 6 mai 2020, l’Inserm était impliqué dans 167 publications scientifiques sur le Covid-19 (dont 19 publications en preprint), témoignant de la mobilisation et du dynamisme des chercheurs de l’Institut depuis le début de la pandémie. Ces travaux de recherche portent principalement sur les potentielles voies thérapeutiques, la recherche d’un vaccin, l’épidémiologie, la mise en place de la télémédecine, la prédiction de la dissémination du virus dans les différents pays et sa transmission. La majorité des travaux publiés ont reçu un financement du fond d’amorçage du consortium REACTing.

Acteur central de la lutte contre la pandémie de Covid-19, REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases), lancé et coordonné par l’Inserm depuis 2013 sous l’égide d’Aviesan, a pour mission de préparer et de coordonner la recherche française sur les maladies infectieuses émergentes pour prévenir et lutter contre les épidémies.

Plusieurs groupes de travail (Task force Nouvelles approches thérapeutiques, Task force Vaccins Covid-19, Task force Modèle animal, Task force Modélisation et Task force Numérique) ont été formés afin de réfléchir aux grandes priorités de recherche et d’évaluer les projets soumis au consortium par des équipes de recherche réparties dans toute la France et à l’international.

Par ailleurs, l’Inserm est impliqué dans plusieurs groupes de travail à l’OMS, ainsi qu’au sein du conseil scientifique que consulte le gouvernement, et dans le Comité analyse, recherche et expertise (Care) mis en place par le ministère des Solidarités et de la Santé.

Jamais la mission portée par l’Inserm, la science pour la santé, n’a été aussi nécessaire. Alors que de nombreuses questions restent en suspens concernant l’évolution de la pandémie, l’Inserm continuera ses efforts pour éclairer les décisions publiques avec une recherche d’excellence, alliant rigueur et éthique.

  1. Soigner les patients

Au sein de REACTing, une Task force Nouvelles approches thérapeutiques se réunit chaque semaine afin d’évaluer les nombreux projets de recherche qui lui parviennent sur les pistes de traitement. Des experts des différentes thématiques abordées sont invités pour enrichir les discussions, ainsi que des membres du comité Care, de la direction générale de la santé, du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI), et du conseil scientifique REACTing Covid-19.

La piste des antiviraux : zoom sur l’essai Discovery

Cet essai est un projet européen dont la partie française a démarré grâce à un financement d’amorçage de REACTing, versé conjointement par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et le ministère de la Santé et des Solidarités. Il bénéficie également d’un financement du Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) et est par ailleurs intégré dans l’essai international de l’OMS Solidarity.

L’essai évalue l’efficacité de différents traitements antiviraux pour limiter la multiplication du virus observée chez certains patients hospitalisés dont l’état s’aggrave souvent autour du septième jour de maladie.

Il prévoit le recrutement de 3 200 patients européens atteints d’une forme modérée à sévère de Covid-19, dont au moins 800 en France, hospitalisés dans un service de médecine ou directement en réanimation. Aujourd’hui, plus de 750 patients sont inclus dans l’essai Discovery essentiellement en France.

  • Quels traitements ?

Discovery a pour objectif d’évaluer l’efficacité et la sécurité de différentes stratégies thérapeutiques expérimentales qui, en l’état actuel des connaissances scientifiques, ont été identifiées comme des candidats thérapeutiques potentiels contre le Covid-19. Pour rappel, il s’agit de tester et de comparer les cinq stratégies suivantes :

  • soins standards optimaux ;
  • soins standards optimaux plus remdesivir ;
  • soins standards optimaux plus lopinavir et ritonavir ;
  • soins standards optimaux plus lopinavir, ritonavir et interféron bêta ;
  • soins standards optimaux plus hydroxychloroquine.

Aucun des patients inclus dans l’essai n’est donc laissé sans soins. Aucun ne reçoit de placebo.

  • Pourquoi un essai randomisé ouvert ?

Discovery est un essai randomisé : le choix du traitement pour chaque patient n’est pas laissé au libre arbitre du médecin mais s’effectue de manière aléatoire. Chaque branche de l’essai clinique reçoit un nombre équivalent de patients afin que l’essai soit équilibré, avec des données suffisantes obtenues sur chacun des traitements testés.

Le choix d’un essai ouvert visait à gagner un temps précieux en cette période de pandémie. En effet, toutes les molécules testées ne se présentent pas sous les mêmes formes galéniques. Pour un essai en double aveugle, la préparation de placebos ne se présentant pas tous sous la même forme aurait été particulièrement longue, retardant le démarrage de l’essai clinique.

Toutefois, si les patients et les médecins ont connaissance du traitement qui est administré, les chercheurs responsables des analyses statistiques n’ont pas accès à ces informations, afin de limiter les biais. Cet essai ouvert contrôlé permettra donc d’obtenir des résultats le plus rapidement possible tout en respectant une méthodologie rigoureuse et de qualité.

La piste de l’immunomodulation : zoom sur Corimuno-19

Certains patients hospitalisés présentent un profil particulier : l’aggravation de leur état semble due non pas à la multiplication du virus mais à l’emballement de la réponse immunitaire pour faire face à l’infection. Une piste de recherche poursuivie à l’heure actuelle par des chercheurs de l’Inserm est de comprendre et d’évaluer l’effet des traitements qui moduleraient cette réponse sur l’état des patients atteints de Covid-19.

C’est tout l’enjeu du projet Corimuno-19, cohorte d’essais contrôlés randomisés ouverts. L’objectif général de cette large étude est de tester plusieurs traitements (notamment des traitements immunomodulateurs) et de déterminer lesquels présentent le rapport bénéfice/risque le plus favorable chez les patients adultes hospitalisés en raison de la pneumopathie à Covid-19, diagnostiqués soit au stade modéré́ ou sévère et ne nécessitant aucune ventilation mécanique, soit au stade de pneumonie critique nécessitant une ventilation mécanique.

La piste des anticorps : zoom sur Coriplasm

Particulièrement médiatisé, l’essai clinique Coriplasm est l’un des essais intégrés à Corimuno-19, dont l’AP-HP est promoteur. Dans ce cadre, l’Établissement français du sang met en œuvre, avec le soutien de l’Inserm et de REACTing, un processus permettant le prélèvement, la qualification, la préparation et la mise à disposition des plasmas de patients convalescents auprès des équipes cliniques. L’idée est d’évaluer si leur plasma est capable de transférer cette immunité de façon immédiate à un autre patient, comme cela avait été le cas dans le traitement de diverses maladies infectieuses avec pneumopathies telles que les infections SARS-CoV-1, le MERS-CoV ou influenza H1N1. L’objectif est de déterminer si cette stratégie permet de réduire la fréquence des formes graves du Covid-19 et la mortalité associée.

D’autres initiatives de recherche thérapeutique

Autres stratégies de repositionnement de médicaments

Le repositionnement thérapeutique consiste à trouver une indication thérapeutique nouvelle pour des médicaments bien connus, sûrs et déjà disponibles dans la pharmacopée. Dans le cadre de la pandémie de Covid-19 plusieurs équipes testent sur le SARS-CoV-2 des molécules utilisées pour d’autres pathologies, afin d’évaluer leurs effets antiviraux ou immunomodulateurs potentiels. L’équipe du directeur de recherche Inserm Manuel Rosa-Calatrava au Centre international de recherche en infectiologie (Inserm/Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS/ENS Lyon) travaille ainsi à la mise en œuvre d’une stratégie de repositionnement de médicaments pour de nouvelles indications thérapeutiques antivirales. Son groupe a déjà validé cette approche en repositionnant un antihypertenseur comme inhibiteur des virus influenza (un essai clinique de phase 2 est mené depuis trois hivers). Deux autres molécules également disponibles sur le marché ont déjà été repositionnées in vitro contre le MERS-CoV par son équipe. Les chercheurs testent désormais ces molécules en lignée cellulaire et dans leur modèle unique ex vivo d’épithélium respiratoire humain reconstitué infecté par le SARS-CoV-2.

Le programme CARE (Corona accelerated R&D in Europe), qui bénéficie d’un financement de l’Innovative Medicines Initiative est porté par l’Institut de recherche vaccinale sous tutelle de l’Inserm en partenariat avec 36 équipes de recherche issues de plusieurs pays européens, mais aussi de Chine et des États-Unis. Il a deux objectifs clés : développer des molécules efficaces pour répondre à l’urgence de la pandémie actuelle de Covid-19 mais aussi faire en sorte de parvenir à des traitements qui pourraient être utiles pour le contrôle d’épidémies à venir, si d’autres coronavirus émergeaient dans le futur. Les chercheurs ont développé un programme ambitieux de recherche et développement afin de faciliter l’identification de molécules candidates à un repositionnement thérapeutique. Le projet comportera également un volet de développement de nouvelles molécules. Toutes les molécules d’intérêt seront testées in vitro et dans des modèles animaux en laboratoire, puis les candidats les plus prometteurs pourront être testés dans le cadre de larges essais cliniques.

Plus d’informations : https://www.imi.europa.eu/news-events/press-releases/imi-announces-covid-projects-boosts-funding-pot-eur-72-million

Le projet MacCOV : lutter contre les détresses respiratoires aiguës

À Villejuif, l’équipe de Jean-Luc Perfettini (Inserm/Université Paris-Saclay/Gustave Roussy) travaille sur une nouvelle stratégie thérapeutique pour contrer le Covid-19 : la reprogrammation de certaines cellules du système immunitaire (les macrophages) dans le but de réduire leur capacité à favoriser une inflammation.

En effet, les données déjà disponibles sur la maladie causée par le SARS-CoV-2 indiquent qu’une de ses complications sévères, le syndrome respiratoire aigu, serait dû à des lésions des tissus pulmonaires provoquées par un afflux extrêmement important de molécules inflammatoires (les cytokines). Les spécialistes parlent même d’un « orage cytokinique ». Or, ces molécules pro-inflammatoires sont essentiellement produites par les macrophages. Les chercheurs espèrent donc qu’en reprogrammant ces cellules immunitaires, ils parviendront à empêcher l’orage cytokinique.

Corona-Pep-Stop : développer des peptides inhibiteurs de fusion

Le projet Corona-Pep-Stop, porté par la directrice de recherche Inserm Branka Horvat au Centre international de recherche en infectiologie (Inserm/Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS/ENS Lyon), vise à transposer des résultats de recherches déjà conduites par l’équipe sur le virus de la rougeole et le virus Nipah. Leur stratégie est de bloquer l’entrée des virus dans les cellules en utilisant des peptides spécifiques de la protéine de fusion virale.

En effet, la protéine de fusion virale permet aux virus possédant une membrane, comme le SARS-CoV-2, de fusionner cette dernière avec celle des cellules hôtes de façon à y transférer leur propre génome. Les chercheurs espèrent ici identifier une nouvelle classe de médicaments antirétroviraux (des inhibiteurs peptidiques de fusion) ciblant cette protéine et efficaces contre plusieurs coronavirus. Ces nouvelles molécules pourraient alors être utilisées de manière prophylactique et thérapeutique contre le SARS-CoV-2, mais aussi contre d’autres coronavirus qui pourraient émerger dans le futur.

Le projet CoV2-E-TARGET : la piste des venins à l’étude

Porté notamment par le chercheur Inserm Michel De Waard à l’Institut du thorax (Inserm/Université de Nantes/CNRS), ce projet vise à identifier un traitement ciblant une protéine de l’enveloppe du virus, la protéine E, qui a une fonction de canal ionique (c’est-à-dire qu’elle permet le passage sélectif de certains ions à travers la membrane cellulaire et facilite l’entrée du virus dans les cellules). Le laboratoire a à sa disposition une collection de venins qui renferme plus de 40 000 peptides, un grand nombre d’entre eux ciblant de façons très spécifiques des canaux ioniques. L’idée est d’identifier de potentiels peptides issus des venins animaux qui pourraient bloquer le passage des ions et empêcher la réplication du virus dans les cellules hôtes.

  1. Trouver un vaccin efficace contre le Covid-19

Si des essais cliniques de phase 1 pour tester des candidats vaccins ont d’ores et déjà été lancés aux États-Unis et en Chine, de nombreuses questions concernant la réponse immunitaire au virus et à un éventuel vaccin demeurent.

Partout dans le monde, plus d’une centaine d’équipes se penchent actuellement sur le développement de vaccins, parmi lesquelles plusieurs groupes français. Sur la trentaine d’équipes travaillant sur les candidats vaccins en France, une douzaine font partie d’unités Inserm. La plupart sont encore à des stades précoces de développement, mais leurs travaux font progresser les connaissances sur le virus et la recherche vaccinale dans son ensemble.

Pour les accompagner et identifier les priorités de recherche, REACTing a mis en place un groupe de travail dédié, la Task force Vaccins Covid-19. Son rôle est de recueillir l’information sur l’état d’avancement des différents candidats vaccins, de répertorier les travaux des équipes françaises et de discuter des actions les plus pertinentes à mettre en place dans le contexte national.

Plusieurs critères ont ainsi été définis par le groupe afin de prioriser les initiatives de développement de candidats vaccins contre le Covid-19 par les équipes françaises, parmi lesquels la rapidité du cycle de production des vaccins, la minimisation du risque d’exacerbation de la maladie du fait de mécanismes immunitaires, le potentiel de production du vaccin à très grande échelle, ou encore la disponibilité de résultats de tests précliniques suggérant l’induction d’une protection contre la maladie.

La recherche d’un nouveau vaccin

Membre de la Task force Vaccins Covid-19 de REACTing, Frédéric Tangy (institut Pasteur) dirige une équipe qui développe actuellement un candidat vaccin Covid-19 assez avancé. Il s’agit d’un vaccin utilisant comme plateforme le virus atténué de la rougeole qui avait déjà servi au développement de certains candidats vaccins, notamment contre la maladie de Chikungunya. La phase 1 d’un essai clinique est prévue pour septembre 2020.

L’Institut de recherche vaccinale est également un acteur de la recherche vaccinale dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Ses chercheurs sont mobilisés pour la mise au point accélérée d’un vaccin contre le coronavirus SARS-CoV-2 fondée sur son expertise et sur une technologie développée dans d’autres pathologies infectieuses comme l’infection par le VIH. L’approche originale portée par cet institut repose sur le ciblage des cellules dendritiques, cellules clés de la réponse immunitaire. Grâce à l’implication de l’Institut de recherche vaccinale dans French Covid-19, (la cohorte nationale des patients infectés par le SARS-CoV-2, coordonnée par REACTing en lien avec 56 hôpitaux en France), les recherches ont pour objectif de caractériser la réponse immunitaire chez les malades. Comprendre cet aspect de l’infection est un prérequis indispensable au développement de tout vaccin.

Le vaccin BCG pour protéger les soignants ?

Plusieurs études suggèrent que certains vaccins vivants comme le BCG ou encore le vaccin oral contre la polio auraient des effets bénéfiques non spécifiques sur certaines infections. Le BCG pourrait ainsi diminuer l’importance de l’infection au virus SARS-CoV-2 en stimulant la mémoire de l’immunité innée, première immunité à entrer en jeu face à une infection, et en induisant ainsi une « immunité innée entraînée ». Par ailleurs, les contre-indications à l’usage du vaccin BCG sont peu nombreuses et bien identifiées, et le coût très faible de ce vaccin est un avantage.

Une équipe Inserm prépare la mise en place d’un essai clinique français en double aveugle visant à tester les effets protecteurs non spécifiques du vaccin BCG. L’idée est d’évaluer si ce vaccin pourrait conférer une certaine protection aux soignants contre le Covid-19. Une collaboration entre cette équipe et des chercheurs espagnols, qui mènent aussi des recherches sur le sujet, permettrait de comparer à grande échelle les bénéfices de la vaccination au BCG à un placebo commun aux deux pays. Si un tel essai clinique voyait le jour, il serait nécessaire de suivre les participants pendant plusieurs mois pour obtenir des données fiables.

  1. Mieux comprendre la maladie

French Covid-19

French Covid-19 est une cohorte observationnelle française lancée fin janvier, ayant recruté plus de 2 000 patients hospitalisés. Elle est coordonnée par Yazdan Yazdanpanah, infectiologue à l’hôpital Bichat et directeur de l’institut thématique Immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie à l’Inserm. L’objectif est double : décrire les caractéristiques cliniques des formes de Covid-19 qui nécessitent une hospitalisation et identifier les facteurs prédictifs de gravité (à savoir l’admission en réanimation ou le décès). Pour cela, les chercheurs étudient toutes les données cliniques, biologiques, virologiques et d’imagerie disponibles dans les dossiers des patients. Ceux-ci seront suivis six mois après leur sortie de l’hôpital. Les résultats de ces travaux seront cruciaux pour mieux armer les médecins face à la maladie.

Autre étude s’intéressant aux formes graves de la maladie, le projet CritiSARS2 vise à identifier des marqueurs viraux, inflammatoires et/ou révélateurs d’une immunisation dans les formes critiques du Covid-19. Ces travaux sont en cours sous la direction de Karine Faure, cheffe du service des maladies infectieuses et tropicales au CHU de Lille et chercheuse au Centre d’infection et d’immunité de Lille (Inserm/CNRS/Université de Lille/Institut Pasteur de Lille).

Étudier le risque de réinfection

Simon Fillatreau (unité 1151, Inserm/Institut Necker-Enfants malades) et ses collègues se penchent sur une question majeure : est-on protégé d’une seconde infection après guérison de la maladie ? Si oui, combien de temps cette protection dure-t-elle, et varie-t-est selon l’âge de la personne ou bien d’autres paramètres individuels ? Plusieurs composants portent la mémoire du système immunitaire et sont susceptibles de nous protéger contre une nouvelle infection par le SARS-CoV-2. L’équipe s’intéresse tout particulièrement aux lymphocytes B et T Follicular Helper mémoires.

À la suite d’une réinfection, alors que l’on a déjà été exposé une première fois à un agent pathogène, ces lymphocytes sont à l’origine d’une augmentation extrêmement rapide et importante des taux d’anticorps protecteurs. Dans le cas de l’hépatite B par exemple, ce sont les cellules mémoires qui protègent l’individu en l’absence de production persistante d’anticorps.

Le projet, intitulé MEMO-CoV2, s’intéresse donc à la mémoire immunitaire portée par les lymphocytes B et T Follicular Helper spécifiques de SARS-CoV-2, afin d’estimer leur persistance, leur longévité, et l’origine de leur formation lors de la réponse à l’infection initiale.

À la recherche de biomarqueurs

Le projet Harmonicov, mené par une équipe Inserm à Rennes, s’appuie sur une cohorte composée d’une centaine d’adultes âgés de moins de 65 ans. À partir de celle-ci, les chercheurs vont analyser la réponse immunitaire de personnes atteintes de Covid-19 et comparer celle de patients guéris à celle de malades en situation critique qui nécessitent une ventilation assistée. L’objectif est d’identifier des marqueurs de l’évolution favorable ou défavorable de la maladie, mais aussi d’étudier les cellules mémoires productrices d’anticorps anti-SARS-CoV-2.

  1. Modélisation et surveillance de l’épidémie

La Task force sur la modélisation mathématique des risques infectieux a été mise en place très rapidement. Les travaux portent aussi bien sur la modélisation en population générale que sur des populations particulières comme celle des soignants.

Modélisation de la diffusion de l’épidémie

Depuis janvier 2020, les travaux de l’équipe dirigée par la chercheuse Inserm Vittoria Colizza à l’institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm/Sorbonne Université) ont permis de modéliser la diffusion de l’épidémie depuis la Chine jusqu’à l’Europe et l’Afrique, avec pour objectif de mieux orienter les politiques de prévention et d’améliorer la surveillance épidémique.

Leur première publication, dans le journal Eurosurveillance, portait ainsi sur le risque d’importation du virus en Europe, en s’appuyant sur la situation de toutes les provinces chinoises déclarant plus de dix cas à l’époque et sur les données des flux aériens en provenance de ces régions vers l’Europe datant de janvier 2019 et issues de l’OAG (une organisation mondiale leader dans la collecte de données sur les vols aériens). Une autre étude publiée par le groupe mi-février dans le Lancet évaluait le risque d’importation du virus en Afrique. L’Égypte, l’Algérie et l’Afrique du Sud y étaient présentés comme les pays les plus à risque.

Autre grand axe de recherche porté par Vittoria Colizza et son équipe, en collaboration avec le groupe de téléphonie Orange : l’analyse de l’impact du confinement sur la mobilité des populations, en étudiant des données agrégées et anonymisées issues du réseau de téléphonie mobile. Les chercheurs s’intéressent notamment aux changements spontanés dans la mobilité des personnes apparus avant et pendant le confinement et à l’impact de ceux-ci sur l’évolution de la pandémie. Les données récoltées sont aussi intégrées dans des modèles de diffusion de la pandémie développés par l’équipe, afin de mieux prévoir la propagation du virus et d’identifier les régions à risque de devenir un foyer épidémique et de voir leur système de soins saturé. Dans un rapport publié début mai, l’équipe montre que la mobilité a été réduite de 65 % pendant le confinement sur l’ensemble du territoire national.

L’équipe s’est aussi attachée à modéliser les scénarios possibles de déconfinement afin d’appuyer les décisions sur la sortie de la quarantaine. Dans un rapport publié mi-avril sur le site du laboratoire EPIcx, les chercheurs soulignent ainsi la nécessité d’accompagner toute stratégie de déconfinement par des mesures de dépistage massif, l’identification des individus ayant été en contact avec des cas avérés et l’isolation des cas détectés. Un rapport sur le rôle de la réouverture des écoles a également été publié début mai, montrant qu’une réouverture des écoles maternelles et primaires à partir du 11 mai, qu’elle soit progressive ou non, ne conduirait probablement pas à une saturation des services de réanimation. L’occupation de ces services n’atteindrait en effet au maximum que 65 % de leur capacité.

Surveillance de l’épidémie renforcée avec Covidnet

Mise en place en 2012 par le réseau Sentinelles (Inserm/Sorbonne Université) et Santé publique France, l’étude GrippeNet.fr est une mine d’informations pour les épidémiologistes qui cherchent à suivre l’évolution de la grippe saisonnière. Le réseau recueille chaque année des données épidémiologiques sur la grippe directement auprès de la population, par Internet et de façon anonyme. La neuvième saison de GrippeNet.fr a débuté fin novembre 2019 et compte à ce jour plus de 7 200 participants, qui déclarent chaque semaine les symptômes qu’ils ont ressentis ou non depuis leur dernière connexion. Pour mieux suivre l’épidémie en cours, l’étude GrippeNet.fr s’adapte et se transforme en Covidnet.fr. S’appuyant sur l’envoi de questionnaires aux volontaires de la cohorte GrippeNet.fr/Covidnet.fr, il s’agit actuellement du seul système de surveillance sanitaire en France permettant d’étudier les symptômes présentés par les personnes malades qui n’ont pas recours au système de soin.

Le projet NoCov mené par la chercheuse Inserm Chiara Poletto à l’institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm/Sorbonne Université) s’appuie également sur des données issues du réseau Sentinelles afin de modéliser la diffusion de l’épidémie à court terme et d’identifier les facteurs principaux de transmission du virus (notamment en s’intéressant à la transmissibilité et à la sévérité de la maladie en fonction de l’âge des individus).

Risque de transmission en milieu hospitalier

Parmi les travaux de recherche, des études visent à modéliser le risque de la transmission du SARS-CoV-2 en milieu hospitalier (risque nosocomial). Une étude sur le sujet est notamment menée par les chercheurs Didier Guillemot et Lulla Opatowski au sein du laboratoire Biostatistiques, biomathématiques, pharmacoépidémiologie et maladies infectieuses (Inserm/Institut Pasteur/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).

  1. Étudier le confinement et ses conséquences

L’étude Sapris et les enjeux sociaux du confinement

Vaste enquête s’appuyant sur les cinq grandes cohortes nationales en population générale (Constances, Étude familiale E3N-E4N, Elfe / Epipage 2, NutriNet Santé) et menée en étroite coordination avec les responsables de ces cohortes, le projet Sapris (Santé, pratiques, relations et inégalités sociales) s’intéresse aux enjeux épidémiologiques et sociaux des mesures de prévention exceptionnelles mises en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Coordonnée par Nathalie Bajos, directrice de recherche Inserm, sociologue-démographe, et par Fabrice Carrat, professeur de santé publique à Sorbonne Université, en collaboration avec Santé publique France, l’étude implique un groupe pluridisciplinaire constitué de chercheurs et de chercheuses de l’Inserm, de l’Ined, du CNRS, de l’Université Paris-Saclay, de Sorbonne Université, Sorbonne Paris Nord et de l’Université Paris Dauphine-PSL, du Cnam, de l’institut Gustave-Roussy et d’Inrae, issus de disciplines aussi variées que l’épidémiologie, la sociologie, la démographie et l’économie.

À l’aide d’un questionnaire envoyé aux participants dès les premiers jours du mois d’avril, complété par 115 000 participants, et reconduit plusieurs fois pendant et à l’issue du confinement, l’étude Sapris interroge ces individus à propos des enjeux spécifiques de l’épidémie et des mesures de confinement. L’incidence des symptômes du Covid-19 et d’autres problèmes de santé, le recours ou le renoncement aux soins pour d’autres pathologies, la perception du risque pour soi-même et en général, les effets des mesures de prévention sur la vie quotidienne, les relations sociales et le travail, ainsi que la prise en charge des enfants, constituent les thématiques principales abordées à travers cette étude. Par ailleurs, en collaboration avec l’unité des virus émergents (Inserm/IRD) dirigée par le virologue Xavier de Lamballerie, des tests sérologiques sont proposés aux participants, apportant des indications sur la prévalence au niveau national et permettant l’étude des facteurs associés à la séropositivité contre le SARS-CoV-2. Ces tests seront répétés pour étudier la persistance de la réponse immunitaire contre le SARS-CoV-2 et établir des corrélats de protection.

En complément, le projet EpiCOV (Épidémiologie et conditions de vie) est une large étude de santé publique dont l’objectif est de fournir une cartographie globale et représentative, au niveau national et de chaque département, du statut immunitaire de la population et de sa dynamique. Elle vise aussi à étudier les conditions de vie dans ce contexte particulier de limitation des déplacements, en tenant compte de la diversité des situations socioéconomiques.

Sous la responsabilité scientifique des chercheuses Inserm Josiane Warszawski et Nathalie Bajos, sociologue-démographe, l’enquête EpiCOV est conduite en collaboration avec la Drees, l’Insee et Santé publique France. Un échantillon de 200 000 personnes représentatif de la population âgée de 15 ans et plus a été constitué par l’Insee, de manière à fournir des données à l’échelle territoriale, et à étudier les conditions socioéconomiques, notamment pour les personnes en situation de précarité économique. Ces personnes sont invitées à remplir un questionnaire similaire à celui de l’enquête Sapris et à effectuer un test sérologique à domicile. Cette étude, qui a commencé début mai, permet d’éclairer finement les dimensions spatiales, temporelles, sociodémographiques et familiales de l’épidémie et des mesures de confinement. L’enquête sera répétée plusieurs fois pour étudier l’évolution de la circulation du virus et son impact sur les conditions de vie. L’enquête associe pleinement les collectivités territoriales à la démarche et aux résultats à venir.

Dans les deux enquêtes, Sapris et EpiCOV, les personnes sont invitées à se piquer le bout du doigt pour recueillir une goutte de sang et à presser leur doigt quatre fois sur un papier buvard fourni avec une enveloppe T avant de la renvoyer par la Poste aux chercheurs.

Évaluer les contacts des Français pendant le confinement

Une enquête en population afin de recueillir et d’analyser des données concernant les contacts entre les Français pendant le confinement a été lancée par l’institut Pasteur en collaboration avec l’Inserm et plusieurs universités. Cette étude baptisée SocialCov se fonde sur des questionnaires en ligne portant sur les contacts et les fréquentations des individus avant et pendant le confinement, dans le but de mieux comprendre son impact sur nos vies sociales et professionnelles. Plus spécifiquement, l’enquête permettra d’identifier le nombre de contacts que nous avons eus chaque jour, leur fréquence, et de répartir ces résultats par tranches d’âge.

Soutenir la santé mentale des personnes en confinement

Les mesures de distanciation sociale, et notamment le confinement de la population française, auront très certainement un impact sur la santé mentale et le bien-être des individus. Plusieurs études se sont déjà penchées sur la question : ainsi une méta-analyse publiée dans le Lancet suggère par exemple que le confinement est associé à un impact psychologique délétère, caractérisé par des troubles de l’humeur, des confusions, voire dans les cas les plus extrêmes par la manifestation d’un syndrome de stress post-traumatique.

Pour mieux appréhender ces effets, la chercheuse Inserm Anne Giersch, directrice du laboratoire Neuropsychologie cognitive et physiopathologie de la schizophrénie à Strasbourg, mène une étude auprès de volontaires sains. L’objectif est d’explorer aussi bien les effets positifs que les effets négatifs du confinement, en particulier sur la santé mentale. Les participants sont invités à répondre à des questionnaires de manière anonyme, portant sur l’état de santé général, l’inquiétude face au risque d’infection, les conditions du confinement, le réseau social avant et pendant celui-ci, mais aussi sur l’humeur, les émotions, ou encore le niveau de stress.

Afin d’aider la population générale à faire face aux angoisses liées à la pandémie, des chercheurs Inserm ont par ailleurs travaillé à une extension Covid-19 du dispositif StopBlues. Ce dispositif, fondé sur une application et un site web gratuit, a été développé en 2018 par l’équipe de recherche Eceve-Inserm, dirigée par Karine Chevreul. Les utilisateurs sont accompagnés pour identifier les signes de leur mal-être, rechercher les causes possibles et trouver des solutions concrètes pour y faire face. Dans le cadre de la pandémie, l’extension Covid-19 de StopBlues passe par la publication de capsules vidéo courtes décrivant les émotions que l’on peut ressentir face à la peur de la maladie, aux difficultés du confinement, à l’isolement social ou aux conflits familiaux.

Tempo Covid 19 : quel impact sur la santé mentale et les conduites addictives ?

Maria Melchior, chercheuse Inserm à l’institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm/Sorbonne Université), et ses collègues ont lancé le projet Tempo Covid 19. Les participants d’une cohorte française (la cohorte Tempo) ont été interrogés de manière hebdomadaire depuis le 24 mars sur leur santé et leurs difficultés psychologiques, sur l’isolement relationnel, sur leur consommation de tabac, d’alcool et de cannabis, ainsi que sur leur situation professionnelle, financière, familiale et leurs activités pendant la période de confinement. Le but est d’évaluer l’impact de l’épidémie et du confinement sur la santé mentale et les conduites addictives des personnes, en fonction de leur situation sociale. Entre 400 et 500 personnes ont répondu aux 6 questionnaires qui leur ont été soumis. Les chercheurs vont désormais réinterroger ces mêmes personnes au moment du déconfinement pour avoir un suivi le plus complet possible.

Maria Melchior travaille également en partenariat avec Santé publique France sur l’enquête Echo, qui vise à évaluer les connaissances à propos du virus et des mesures de protection (gestes barrières, confinement) chez des personnes vivant en situation d’exclusion et hébergées dans des structures gérées par des associations médico-sociales, dont une majorité de personnes migrantes. Les chercheurs souhaiteraient interroger 300 personnes d’ici la fin du mois de mai.

Epidemic : quelles répercussions émotionnelles ?

Coordonnée par Michelle Kelly-Irving du laboratoire Épidémiologie et analyses en santé publique : risques, maladies chroniques et handicaps (Inserm/Université Toulouse III Paul-Sabatier), l’enquête Epidemic étudie les déterminants sociaux et psychosociaux de l’épidémie et du confinement. L’enquête vise aussi à mesurer l’impact psychologique et les répercussions émotionnelles, sociales et comportementales de l’épidémie afin d’en prévenir les conséquences et de développer des outils d’aide adaptés.

Confinement, sommeil et rêves

L’équipe de Perrine Ruby au Centre de recherche en neurosciences de Lyon (Inserm/CNRS/Université Lyon 1/Université Jean Monnet Saint-Étienne) souhaite évaluer l’impact du confinement sur nos habitudes de vie, notre sommeil et nos rêves. Les chercheurs veulent comprendre comment le contenu ou la fréquence des rêves est impactée lors de cette période un peu particulière. Le questionnaire est encore accessible pour tous ceux qui souhaiteraient y participer. 

Covid Ethics, fabriquer l’éthique en temps de crise pandémique

Porté par Léo Coutellec, de l’équipe Recherches en éthique et épistémologie au Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations (Inserm/Université Paris-Saclay), ce projet suppose un engagement analytique et critique des chercheurs vis-à-vis de l’épidémie de Covid-19 pour mieux comprendre et renforcer notre cadre d’analyse des enjeux éthiques dans l’anticipation et la gestion des situations pandémiques. Cette recherche sera menée sur 18 mois. Plusieurs séminaires sont programmés sur le sujet.

  1. Dépister, accompagner le travail des soignants et les protéger

L’Inserm met à disposition ses laboratoires

L’Inserm participe aux efforts de dépistage de la population. Un décret et un arrêté publiés le 5 avril autorisent les préfets à réquisitionner les laboratoires de recherche publique afin de procéder aux tests de dépistage du Covid-19 en utilisant la technique dite de RT-PCR, fondée sur le matériel génétique. Le CNRS et l’Inserm se sont préparés en recensant, dans les laboratoires dont ils sont tutelles, le matériel disponible et le nombre de tests de ce type qui pourraient être réalisés par jour, dans les conditions fixées par le gouvernement.

L’Inserm lance un projet de recyclage des masques

Portés par les directeurs de recherche Inserm Nathalie Heuzé-Vourc’h et Mustapha Si-Tahar, une étude de « preuve de concept » d’un procédé de décontamination efficace des masques chirurgicaux et FFP2, pour réutilisation par les unités de soins, est en cours, menée en collaboration étroite avec le CHRU de Tours. Dans un contexte de pénurie de masques, plusieurs procédés de décontamination sont comparés. L’équipe a déjà montré qu’à chaleur humide à 70 °C pendant une heure, aucune détérioration de la structure des masques n’est constatée. La décontamination semble efficace, détruisant plusieurs virus et bactéries testés dans le cadre de l’étude « preuve de concept ». Par ailleurs, les propriétés des masques sont similaires aux masques non traités. Il s’agit désormais de consolider ces résultats en testant le processus sur des masques contaminés par le SARS-CoV-2.

Un projet de revêtement antiviral pour les personnes et les surfaces

Les équipes Inserm de l’unité Biomatériaux et bio-ingénierie (Inserm/Université de Strasbourg) et de l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques (Inserm/Université de Strasbourg) travaillent sur un projet commun de revêtements antiviraux. Il s’agit de développer un système de protection antivirale qui pourrait être appliqué à diverses surfaces de dispositifs médicaux et aux personnes notamment en milieu hospitalier, et qui serait capable d’éliminer le SARS-CoV-2 et de limiter la transmission de l’épidémie. Les chercheurs comptent d’abord passer au crible plusieurs molécules pour leur capacité à inhiber le virus, puis sélectionner les plus efficaces présentant les propriétés antivirales les plus intéressantes. Les revêtements seront ensuite développés à partir de ces molécules et leur efficacité sera testée.

Aphro-Cov, renforcer les capacités diagnostiques et la prise en charge des patients Covid-19 dans 5 pays d’Afrique subsaharienne

Dans le cadre de l’appui apporté par la France en réponse à la crise du coronavirus, Rémy Rioux, directeur général de l’Agence française de développement (AFD), et Gilles Bloch, président-directeur général de l’Inserm, ont annoncé en mars le lancement d’un dispositif conjoint visant à améliorer la veille sanitaire et la prise en charge des cas suspects de Covid-19 dans 5 pays d’Afrique (Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali, Sénégal). Appelé Aphro-Cov, ce programme piloté par REACTing cible les laboratoires, le dispositif d’alerte précoce, les services cliniques et, via une sensibilisation et une communication renforcée, toute la population.

Parce que la recherche est plus que jamais nécessaire pour assurer la santé de tous et pour répondre aux défis posés par cette nouvelle pandémie, l’Inserm a mis en place une plateforme de dons et fait appel à la générosité du public. Les fonds récoltés permettront de faire vivre et de mener à bien tous ces différents projets de recherche.

 

Pour faire un don et soutenir le travail de nos chercheurs sur le Covid-19 : https://don.inserm.fr/donner

 

L’Inserm et la lutte contre les fake news

La lutte contre les fausses informations et la diffusion d’une information scientifique claire et de qualité sont au cœur des préoccupations de l’Inserm. C’est d’autant plus le cas dans le cadre de la pandémie de Covid-19 car de nombreuses rumeurs et informations sans aucun fondement scientifique circulent rapidement sur les réseaux sociaux et autres plateformes. Afin d’informer au mieux le public et de lutter contre la désinformation, l’Inserm a depuis janvier 2020 :

Le consortium REACTing élabore chaque semaine une veille rigoureuse de la littérature scientifique portant sur le SARS-CoV-2 et le Covid-19. Le groupe met à disposition du public un résumé des publications scientifiques de qualité, pour ceux qui souhaitent suivre au plus près l’actualité de la recherche scientifique.

L’Inserm pleinement engagé dans la lutte contre la pandémie de Covid-19

Covid-19: Observation intracellulaire d’épithélium respiratoire humain reconstitué MucilAir™ infecté par le SARS-CoV-2. © Manuel Rosa-Calatrava, Inserm ; Olivier Terrier, CNRS ; Andrés Pizzorno, Signia Therapeutics ; Elisabeth Errazuriz-Cerda  UCBL1 CIQLE. VirPath (Centre International de Recherche en Infectiologie U1111 Inserm – UMR 5308 CNRS – ENS Lyon – UCBL1). Colorisé par Noa Rosa C.

 

1.   Une mobilisation rapide de l’Inserm pour accélérer la recherche et répondre à la pandémie

Apparu en décembre 2019 à Wuhan, au centre de la Chine, le nouveau coronavirus SARS-CoV-2 s’est très rapidement propagé à l’ensemble de la planète, entraînant la pandémie la plus grave de notre histoire récente. Dès le début de cette crise sanitaire mondiale, l’Inserm s’est positionné comme un acteur de premier plan dans le monde de la recherche en France et à l’étranger, mobilisant ses nombreux experts sur des sujets liés aussi bien à la recherche fondamentale qu’à la thérapeutique ou à la modélisation de l’épidémie. Participant également à l’effort de solidarité nationale, l’Inserm s’est mobilisé afin de distribuer des dizaines de milliers de masques, gants, blouses, surchaussures, et réactifs aux équipes soignantes dans les hôpitaux.

Au 13 avril 2020, l’Inserm était impliqué dans 44 publications scientifiques sur le Covid-19 (y compris les publications en preprint), témoignant de la mobilisation et du dynamisme des chercheurs de l’Institut depuis le début de la pandémie. Ces travaux de recherche portent principalement sur les potentielles voies thérapeutiques, la recherche d’un vaccin, l’épidémiologie, la mise en place de la télémédecine, la prédiction de la dissémination du virus dans les différents pays, et sa transmission. La majorité des travaux publiés ont reçu un financement du fond d’amorçage du consortium REACTing.

Acteur central de la lutte contre la pandémie de Covid-19, REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases), lancé et coordonné par l’Inserm depuis 2013 sous l’égide d’Aviesan, a pour mission de préparer et de coordonner la recherche française sur les maladies infectieuses émergentes pour prévenir et lutter contre les épidémies. Plusieurs groupes de travail (task Force Nouvelles approches thérapeutiques, task Force vaccins Covid-19, task Force modèle animal, task Force modélisation et task Force Numérique) ont été formés afin de réfléchir aux grandes priorités de recherche et d’évaluer les projets soumis au consortium par des équipes de recherche réparties dans toute la France et à l’international.

Par ailleurs, des chercheurs de l’Inserm sont également impliqués dans plusieurs groupes de travail à l’OMS ainsi qu’au sein du conseil scientifique que consulte le gouvernement, mais aussi dans le Comité analyse, recherche et expertise (Care) mis en place par le ministère des Solidarités et de la Santé.

Jamais la mission portée par l’Inserm, la science pour la santé, n’a été aussi importante. Alors que de nombreuses questions restent en suspens concernant l’évolution de la pandémie, l’Inserm continuera ses efforts pour éclairer les décisions publiques avec une recherche d’excellence, alliant rigueur et éthique. Les informations contenues dans ce dossier de presse sont amenées à évoluer en fonction des avancées de la recherche.

 

2.     Soigner les patients

Au sein de REACTing, une Task Force Nouvelles approches thérapeutiques se réunit chaque semaine afin d’évaluer les nombreux projets de recherche qui lui parviennent sur les pistes de traitement. Des experts des différentes thématiques abordées sont invités pour enrichir les discussions, ainsi que des membres du comité Care, de la Direction générale de la santé et du MESRI, et du conseil scientifique REACTing Covid-19.

La piste des antiviraux : zoom sur l’essai Discovery

De tous les projets de recherche sur les thérapeutiques, c’est très certainement l’essai Discovery coordonné par l’Inserm qui suscite le plus d’intérêt et d’interrogations de la part du public. Cet essai est un projet européen dont la partie française a démarré grâce à un financement d’amorçage de REACTing, versé conjointement par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et le ministère de la Santé et des Solidarités. Il bénéficie également d’un financement du Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) et est par ailleurs intégré dans l’essai international de l’OMS Solidarity.

L’essai évalue l’efficacité de différents traitements antiviraux pour limiter la multiplication du virus observée chez certains patients hospitalisés dont la réponse immunitaire est trop faible, et dont l’état s’aggrave souvent autour du septième jour de maladie.

Il prévoit le recrutement de 3 200 patients européens atteints d’une forme modérée à sévère de Covid-19, dont au moins 800 en France, hospitalisés dans un service de médecine ou directement en réanimation.

  • Quels traitements ?

Discovery a pour objectif d’évaluer l’efficacité et la sécurité de différentes stratégies thérapeutiques expérimentales qui, en l’état actuel des connaissances scientifiques, ont été identifiées comme des candidats thérapeutiques potentiels contre le Covid-19. Pour rappel, il s’agit de tester et de comparer les cinq stratégies suivantes :

  • soins standards optimaux ;
  • soins standards optimaux plus remdesivir ;
  • soins standards optimaux plus lopinavir et ritonavir ;
  • soins standards optimaux plus lopinavir, ritonavir et interféron bêta ;
  • soins standards optimaux plus hydroxychloroquine.

Aucun des patients inclus dans l’essai n’est donc laissé sans soins. Aucun ne reçoit de placebo.

  • Pourquoi un essai randomisé ouvert ?

Discovery est un essai randomisé : le choix du traitement pour chaque patient n’est pas laissé au libre-arbitre du médecin mais s’effectue de manière aléatoire. Chaque branche de l’essai clinique reçoit un nombre équivalent de patients afin que l’essai soit équilibré, avec des données suffisantes obtenues sur chacun des traitements testés.

Le choix d’un essai ouvert a été fait afin de gagner un temps précieux en cette période de pandémie. En effet, toutes les molécules testées ne se présentent pas sous les mêmes formes galéniques. Pour un essai en double aveugle, la préparation de placebos ne se présentant pas tous sous la même forme aurait été particulièrement longue, retardant le démarrage de l’essai clinique.

Toutefois, si les patients et les médecins ont connaissance du traitement qui est administré, les chercheurs responsables des analyses statistiques n’ont pas accès à ces informations, afin de limiter les biais. Cet essai ouvert contrôlé permettra donc d’obtenir des résultats le plus rapidement possible tout en respectant une méthodologie rigoureuse et de qualité.

La piste de l’immunomodulation : zoom sur Corimuno-19

Certains patients hospitalisés présentent un profil particulier : l’aggravation de leur état semble due non pas à la multiplication du virus mais à l’emballement de la réponse immunitaire pour faire face à l’infection. Une piste de recherche poursuivie à l’heure actuelle par des chercheurs de l’Inserm est de comprendre et d’évaluer l’effet des traitements qui moduleraient cette réponse sur l’état des patients atteints de Covid-19.

C’est tout l’enjeu du projet Corimuno-19, cohorte d’essais contrôlés randomisés ouverts. L’objectif général de cette large étude est de tester plusieurs traitements (notamment des traitements immunomodulateurs) et de déterminer lesquels présentent le rapport bénéfice/risque le plus favorable chez les patients adultes hospitalisés en raison de la pneumopathie à Covid-19, diagnostiqués soit au stade modéré ou sévère et ne nécessitant aucune ventilation mécanique, soit au stade de pneumonie critique nécessitant une ventilation mécanique.

La piste des anticorps : zoom sur Coriplasm

Particulièrement médiatisé, l’essai clinique Coriplasm est l’un des essais intégrés à Corimuno-19, dont l’AP-HP est promoteur. Dans ce cadre, l’Établissement français du sang met en œuvre, avec le soutien de l’Inserm et de REACTing, un processus permettant le prélèvement, la qualification, la préparation et la mise à disposition des plasmas de patients convalescents auprès des équipes cliniques. L’idée est d’évaluer si leur plasma est capable de transférer cette immunité de façon immédiate à un autre patient, comme cela avait été le cas dans le traitement de diverses maladies infectieuses avec pneumopathies telles que les infections SARS-CoV-1, le MERS-CoV ou influenza H1N1. L’objectif est de déterminer si cette stratégie permet de réduire la fréquence des formes graves du Covid-19 et la mortalité associée.

D’autres initiatives de repositionnement thérapeutique

Le repositionnement thérapeutique consiste à trouver une indication thérapeutique nouvelle pour des médicaments bien connus, sûrs et déjà disponibles dans la pharmacopée. Dans le cadre de la pandémie de Covid-19 plusieurs équipes testent des molécules utilisées pour d’autres pathologies sur le SARS-CoV-2, afin d’évaluer leurs effets antiviraux ou immunomodulateurs potentiels. L’équipe du Directeur de Recherche Inserm Manuel Rosa-Calatrava au Centre International de Recherche en Infectiologie (Inserm/Université Claude Bernard Lyon 1/ CNRS/ENS Lyon) travaille ainsi à la mise en oeuvre d’une stratégie de repositionnement de médicaments pour de nouvelles indications thérapeutiques antivirales. Son groupe a déjà validé cette approche en repositionnant un antihypertenseur comme inhibiteur des virus influenza (un essai clinique de phase 2 est mené depuis trois hivers dans 26 centres investigateurs). Deux autres molécules également disponibles sur le marché ont déjà été repositionnées in vitro contre le MERS-CoV par son équipe. Les chercheurs testent désormais ces molécules en lignée cellulaire et dans leur modèle unique ex vivo d’épithélium respiratoire humain reconstitué, infectés par le SARS-CoV-2.

 

3.     Trouver un vaccin efficace contre le Covid-19

Si des essais cliniques de phase 1 pour tester des candidats vaccins ont d’ores et déjà été lancés aux États-Unis et en Chine, de nombreuses questions concernant la réponse immunitaire au virus et à un éventuel vaccin demeurent.

Partout dans le monde, plus d’une centaine d’équipes se penchent actuellement sur le développement de vaccins, parmi lesquels plusieurs groupes français. Sur la trentaine d’équipes travaillant sur les candidats vaccinaux en France, une douzaine font partie d’unités Inserm. La plupart sont encore à des stades précoces de développement, mais leurs travaux font progresser les connaissances sur le virus et la recherche vaccinale dans son ensemble.

Pour les accompagner et identifier les priorités de recherche, REACTing a mis en place un groupe de travail dédié, la Task Force vaccins COVID-19. Son rôle est de recueillir l’information sur l’état d’avancement des différents candidats vaccins, de répertorier les actions des équipes françaises et de discuter des actions les plus pertinentes à mettre en place dans le contexte national.

Plusieurs critères ont ainsi été définis par le groupe afin de prioriser les initiatives de développement de candidats vaccins contre le Covid-19 par les équipes françaises, parmi lesquels la rapidité du cycle de production des vaccins, la minimisation du risque d’exacerbation de la maladie du fait de mécanismes immunitaires, le potentiel de production du vaccin à très grande échelle, ou encore la disponibilité de résultats de tests précliniques suggérant l’induction d’une protection contre la maladie.

La recherche d’un nouveau vaccin

Membre de la task force vaccination de REACTing, Frédéric Tangy (institut Pasteur) dirige une équipe qui développe actuellement un candidat vaccin Covid-19 assez avancé. Il s’agit d’un vaccin utilisant comme plateforme le virus atténué de la rougeole qui avait déjà servi au développement de certains candidats vaccins, notamment contre la maladie de Chikungunya. La phase 1 d’un essai clinique est prévue pour septembre 2020.

L’Institut de recherche vaccinale sous tutelle de l’Inserm est également un acteur de la recherche vaccinale dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Ses chercheurs sont mobilisés pour la mise au point accélérée d’un vaccin contre le coronavirus SARS-CoV-2 fondée sur son expertise et la technologie développée dans d’autres pathologies infectieuses comme l’infection par le VIH. L’approche originale portée par l’Institut repose sur le ciblage des cellules dendritiques, cellules clés de la réponse immunitaire.

Grâce à l’implication de l’Institut de recherche vaccinale dans French Covid-19, la cohorte nationale des patients infectés par le SARS-CoV-2, coordonnée par REACTing en lien avec 56 hôpitaux en France (dont l’hôpital Henri-Mondor à Créteil), les recherches qui y sont menées ont pour objectif de caractériser la réponse immunitaire chez les malades. Comprendre cet aspect de l’infection est un prérequis indispensable au développement de tout vaccin.

Le vaccin BCG pour protéger les soignants ?

Plusieurs études suggèrent que certains vaccins vivants comme le BCG ou encore le vaccin oral contre la polio auraient des effets bénéfiques non spécifiques sur certaines infections. Le BCG pourrait ainsi diminuer l’importance de l’infection au virus SARS-CoV-2 en stimulant la mémoire de l’immunité innée, première immunité à entrer en jeu face à une infection, et en induisant ainsi une « immunité innée entraînée ». Par ailleurs, les contre-indications à l’usage du vaccin BCG sont peu nombreuses et bien identifiées, et le coût très faible de ce vaccin est un avantage.

Une équipe Inserm prépare la mise en place d’un essai clinique français en double aveugle visant à tester les effets protecteurs non spécifiques du vaccin BCG. L’idée est d’évaluer si ce vaccin pourrait conférer une certaine protection aux soignants contre le Covid-19. Une collaboration entre cette équipe et des chercheurs espagnols, qui mènent aussi des recherches sur le sujet, permettrait de comparer à grande échelle les bénéfices de la vaccination au BCG à un placebo commun aux deux pays. Si un tel essai clinique voyait le jour, il serait nécessaire de suivre les participants pendant plusieurs mois pour obtenir des données fiables.

 

4.     Modélisation et surveillance de l’épidémie

La task force sur la modélisation mathématique des risques infectieux a été mis en place très rapidement. Les travaux portent aussi bien sur la modélisation en population générale, que sur des populations particulières comme celle des soignants.

Modélisation de la diffusion de l’épidémie

Depuis janvier 2020, les travaux de l’équipe dirigée par la chercheuse Inserm Vittoria Colizza, à ont permis de modéliser la diffusion de l’épidémie depuis la Chine jusqu’à l’Europe et l’Afrique, avec pour objectif de mieux orienter les politiques de prévention et d’améliorer la surveillance épidémique.

Leur première publication, dans le journal Eurosurveillance, portait ainsi sur le risque d’importation du virus en Europe, en s’appuyant sur la situation de toutes les provinces chinoises déclarant plus de dix cas à l’époque et sur les données des flux aériens en provenance de ces régions vers l’Europe datant de janvier 2019 et issues de l’OAG (une organisation mondiale leader dans la collecte de données sur les vols aériens). Une autre étude publiée par le groupe mi-février dans le Lancet évaluait le risque d’importation du virus en Afrique. L’Égypte, l’Algérie et l’Afrique du Sud y étaient présentés comme les pays les plus à risque.

Autre grand axe de recherche porté par Vittoria Colizza et son équipe, en collaboration avec le groupe de téléphonie Orange : l’analyse de l’impact du confinement sur la mobilité des populations, en étudiant des données agrégées et anonymisées issues du réseau de téléphonie mobile. Les chercheurs s’intéressent notamment aux changements spontanés dans la mobilité des personnes apparus avant et pendant le confinement et à l’impact de ceux-ci sur l’évolution de la pandémie. Les données récoltées sont aussi intégrées dans des modèles de diffusion de la pandémie développés par l’équipe, afin de mieux prévoir la propagation du virus et d’identifier les régions à risque de devenir un foyer épidémique et de voir leur système de soins saturé.

L’équipe s’attache aussi à modéliser les scénarios possibles de déconfinement afin de mieux accompagner la sortie de la quarantaine. Dans un rapport publié mi-avril sur le site du laboratoire EPIcx, les chercheurs soulignent ainsi la nécessité d’accompagner toute stratégie de déconfinement par des mesures de dépistage massif, l’identification des individus ayant été en contact avec des cas avérés et la mise en isolation des cas détectés.

Surveillance de l’épidémie renforcée avec Covidnet

Mise en place en 2012 par le réseau Sentinelles (Inserm/Sorbonne Université) et Santé publique France, l’étude GrippeNet.fr est une mine d’informations pour les épidémiologistes qui cherchent à suivre l’évolution de la grippe saisonnière. Le réseau recueille chaque année des données épidémiologiques sur la grippe directement auprès de la population, par Internet et de façon anonyme. La neuvième saison de GrippeNet.fr a débuté fin novembre 2019 et compte à ce jour plus de 7 200 participants, qui déclarent chaque semaine les symptômes qu’ils ont ressentis ou non depuis leur dernière connexion. Pour mieux suivre l’épidémie en cours, l’étude GrippeNet.fr s’adapte et se transforme en Covidnet.fr. S’appuyant sur l’envoi de questionnaires aux volontaires de la cohorte GrippeNet.fr/Covidnet.fr, il s’agit actuellement du seul système de surveillance sanitaire en France permettant d’étudier les symptômes présentés par les personnes malades qui n’ont pas recours au système de soin.

Risque de transmission en milieu hospitalier

Parmi les travaux de recherche, des études visent à modéliser le risque de la transmission du SARS-CoV-2 en milieu hospitalier (risque nosocomial). Une étude sur le sujet est notamment menée par les chercheurs Didier Guillemot et Lulla Opatowski au sein du laboratoire Biostatistiques, biomathématiques, pharmacoépidémiologie et maladies infectieuses (Inserm/Institut Pasteur/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines).

 

5.     Étudier le confinement et ses conséquences

L’étude Sapris et les enjeux sociaux du confinement

Vaste enquête s’appuyant sur les cinq grandes cohortes nationales en population générale (Constances, Étude familiale E3N-E4N, Elfe / Epipage 2, NutriNet Santé) et menée en étroite coordination avec les responsables de ces cohortes, le projet Sapris s’intéresse aux enjeux épidémiologiques et sociaux des mesures de prévention exceptionnelles mises en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Coordonnée par Nathalie Bajos, directrice de recherche Inserm, sociologue-démographe, et par Fabrice Carrat, professeur de santé publique à Sorbonne Université, en collaboration avec Santé publique France, l’étude implique un groupe pluridisciplinaire constitué de chercheurs et de chercheuses de l’Inserm, de l’Ined, du CNRS, de l’Université Paris-Saclay, de Sorbonne Université, Sorbonne Paris Nord et de l’Université Paris Dauphine-PSL, du Cnam, de l’institut Gustave-Roussy et de INRAE, issus de disciplines aussi variées que l’épidémiologie, la sociologie, la démographie et l’économie.

À l’aide d’un questionnaire, envoyé aux participants dès les premiers jours du mois d’avril et reconduit plusieurs fois pendant et à l’issue du confinement, l’étude Sapris interroge ces individus à propos des enjeux spécifiques de l’épidémie et des mesures de confinement. L’incidence des symptômes du Covid-19 et d’autres problèmes de santé, le recours ou le renoncement aux soins pour d’autres pathologies, la perception du risque pour soi-même et en général, les effets des mesures de prévention sur la vie quotidienne, les relations sociales et le travail, ainsi que la prise en charge des enfants, constituent les thématiques principales abordées à travers cette étude. Par ailleurs, dès que des tests sérologiques seront disponibles, les chercheurs souhaiteraient pouvoir établir la prévalence du Covid-19, sur la base d’auto-prélèvements qui pourraient être proposés aux participants, apportant des indications sur la prévalence au niveau national.

Évaluer les contacts des Français pendant le confinement

Une enquête en population afin de recueillir et d’analyser des données concernant les contacts entre les Français pendant le confinement a été lancée par l’institut Pasteur en collaboration avec l’Inserm et plusieurs universités. Cette étude baptisée SocialCov se fonde sur des questionnaires en ligne portant sur les contacts et les fréquentations des individus avant et pendant le confinement, dans le but de mieux comprendre son impact sur nos vies sociales et professionnelles. Plus spécifiquement, l’enquête permettra d’identifier le nombre de contacts que nous avons eus chaque jour, leur fréquence, et de répartir ces résultats par tranches d’âge.

Soutenir la santé mentale des personnes en confinement

Les mesures de distanciation sociale, et notamment le confinement de la population française, auront très certainement un impact sur la santé mentale et le bien-être des individus. Plusieurs études se sont déjà penchées sur la question : ainsi une méta-analyse publiée dans le Lancet suggère par exemple que le confinement est associé à un impact psychologique délétère, caractérisé par des troubles de l’humeur, des confusions, voire dans les cas les plus extrêmes par la manifestation d’un syndrome de stress post-traumatique.

Pour mieux appréhender ces effets, la chercheuse Inserm Anne Giersch, directrice du laboratoire Neuropsychologie cognitive et physiopathologie de la schizophrénie à Strasbourg, mène une étude auprès de volontaires sains. L’objectif est d’explorer aussi bien les effets positifs que les effets négatifs du confinement, en particulier sur la santé mentale. Les participants sont invités à répondre à des questionnaires de manière anonyme, portant sur l’état de santé général, l’inquiétude face au risque d’infection, les conditions du confinement, le réseau social avant et pendant celui-ci, mais aussi sur l’humeur, les émotions, ou encore le niveau de stress.

Afin d’aider la population générale à faire face aux angoisses liées à la pandémie, des chercheurs Inserm ont par ailleurs travaillé à une extension Covid-19 du dispositif StopBlues. Ce dispositif, fondé sur une application et un site web gratuit, a été développé en 2018 par l’équipe de recherche Eceve-Inserm, dirigée par Karine Chevreul. Les utilisateurs sont accompagnés pour identifier les signes de leur mal-être, rechercher les causes possibles et trouver des solutions concrètes pour y faire face. Dans le cadre de la pandémie, l’extension Covid-19 de StopBlues passe par la publication de capsules vidéo courtes décrivant les émotions que l’on peut ressentir face à la peur de la maladie, aux difficultés du confinement, à l’isolement social ou aux conflits familiaux.

 

6.     Dépister, accompagner le travail des soignants et les protéger

L’Inserm met à disposition ses laboratoires

L’Inserm participe aux efforts de dépistage de la population. Un décret et un arrêté publiés le 5 avril autorisent les préfets à réquisitionner les laboratoires de recherche publique afin de procéder aux tests de dépistage du Covid-19 en utilisant la technique dite de RT-PCR, fondée sur le matériel génétique. Le CNRS et l’Inserm se sont préparés en recensant, dans les laboratoires dont ils sont tutelles, le matériel disponible et le nombre de tests de ce type qui pourraient être réalisés par jour, dans les conditions fixées par le gouvernement. Une cinquantaine de structures, pouvant effectuer plus de 100 000 tests par jour, pourront être mises à contribution dès les prochains jours, sous la coordination de l’Inserm.

L’Inserm lance un projet de recyclage des masques

Portés par les directeurs de recherche Inserm Nathalie Heuzé-Vourc’h et Mustapha Si-Tahar, une étude de « preuve de concept » d’un procédé de décontamination efficace des masques chirurgicaux et FFP2, pour réutilisation par les unités de soins, est en cours, menée en collaboration étroite avec le CHRU de Tours. Dans un contexte de pénurie de masques, plusieurs procédés de décontamination sont comparés. L’équipe a déjà montré qu’à chaleur humide à 70°C pendant une heure, aucune détérioration de la structure des masques n’est constatée. La décontamination semble efficace, détruisant plusieurs virus et bactéries testés dans le cadre de l’étude « preuve de concept ». Par ailleurs, les propriétés des masques sont similaires aux masques non traités. Il s’agit désormais de consolider ces résultats en testant le processus sur des masques contaminés par le SARS-CoV-2.

APHRO-COV, un projet pour renforcer les capacités diagnostiques et la prise en charge des patients COVID19 dans 5 pays d’Afrique Subsaharienne

Dans le cadre de l’appui apporté par la France en réponse à la crise du Coronavirus, Rémy Rioux, Directeur général de l’Agence française de développement (AFD) et Gilles Bloch, Président-directeur général de l’Inserm ont annoncé en mars le lancement d’un dispositif conjoint visant à améliorer la veille sanitaire et la prise en charge des cas suspects de Covid-19 dans 5 pays d’Afrique (Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali, Sénégal). Appelé Aphro-Cov, ce programme piloté par REACTing cible les laboratoires, le dispositif d’alerte précoce, les services cliniques et, via une sensibilisation et une communication renforcée, toute la population.

Parce que la recherche est plus que jamais nécessaire pour assurer la santé de tous et pour répondre aux défis posés par cette nouvelle pandémie, l’Inserm a mis en place une plateforme de dons et fait appel à la générosité du public. Les fonds récoltés permettront de faire vivre et de mener à bien tous ces différents projets de recherche.

 

Pour faire un don et soutenir le travail de nos chercheurs : https://don.inserm.fr/donner

L’Inserm et la lutte contre les fake news

La lutte contre les fausses informations et la diffusion d’une information scientifique claire et de qualité est au cœur des préoccupations de l’Inserm. C’est d’autant plus le cas dans le cadre de la pandémie de Covid-19 car de nombreuses rumeurs et informations sans aucun fondement scientifique circulent rapidement sur les réseaux sociaux et autres plateformes. Afin d’informer au mieux le public et de lutter contre la désinformation, l’Inserm a depuis janvier 2020 :

Le consortium REACTing élabore chaque semaine une veille rigoureuse de la littérature scientifique portant sur le SARS-CoV-2 et le Covid-19. Le groupe met à disposition du public un résumé des publications scientifiques de qualité, pour ceux qui souhaitent suivre au plus près l’actualité de la recherche scientifique.

Dossier de presse : Diabète de type 1 : l’Inserm fait le point sur les recherches

Îlots pancréatiques observés au microscope ©François Pattou/Université de Lille

De la découverte de l’insuline en 1921 jusqu’aux premières greffes de pancréas à la fin des années 60, l’histoire récente de la recherche sur le diabète de type 1 a été jalonnée de succès. Ces avancées scientifiques et médicales ont transformé le pronostic et la qualité de vie des malades.  

En France et à l’étranger, les chercheurs continuent d’œuvrer pour améliorer la prise en charge des patients. À l’Inserm, onze équipes réparties dans neuf unités travaillent sur le sujet. Leurs activités portent principalement sur la caractérisation des cellules du pancréas et tentent de parvenir à une meilleure compréhension de la maladie (facteurs de risque, susceptibilité génétique, mécanismes physiopathologiques) et de ses complications.

L’une de ces équipes explore à Lille la transplantation d’îlots, technique prometteuse qui fait l’objet d’une nouvelle publication dans la revue Diabetes Care[1] et d’une mise au point dans The Lancet[2]. D’autres pistes très intéressantes sont aujourd’hui également à l’étude, notamment l’immunothérapie ou le développement de pancréas artificiels.

 

I. La recherche sur le diabète de type 1 à l’Inserm

Les équipes Inserm sont impliquées dans de nombreux projets collaboratifs pour faire avancer les traitements sur le diabète de type 1. Quelques-uns ont d’ores et déjà donné des résultats prometteurs.

  • Le projet EXALT (2014-2019)[3], auquel a participé l’équipe Inserm de Christian Boitard à l’Institut Cochin, visait à évaluer les effets d’une immunothérapie innovante sur des patients atteints de diabète de type 1. Fondée sur l’administration d’un peptide, l’objectif de cette immunothérapie était de modifier la réaction auto-immune dirigée spécifiquement contre les cellules bêta du pancréas. La première partie du projet a montré dans des modèles expérimentaux qu’il y a bien un effet sur la réaction auto-immune du diabète. Les résultats de l’étude clinique de phase 1b sont en cours d’analyse.

 

  • Le projet européen Hypo-RESOLVE,[4] mené sur la période 2018-2022 par Éric Renard à Montpellier (Inserm 1191/UMR 5203), vise à consolider les connaissances scientifiques au sujet de l’hypoglycémie. L’idée est de créer une base de données cliniques pérenne, de mener des études pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents de l’hypoglycémie et de réaliser une série d’analyses statistiques pour en définir les facteurs de prédiction et les conséquences. Par ailleurs, les chercheurs souhaitent aussi calculer le coût financier de l’hypoglycémie dans les pays européens. 

 

  • « Pancréas artificiel » : Éric Renard et ses collègues ont mené des travaux en collaboration avec l’Université de Virginie (Charlottesville, VA, USA) pour créer un pancréas artificiel. Le système algorithmique développé a été intégré dans le dispositif Tandem Control-IQ, en vue de commercialisation (voir la photo ci-dessous). Testé actuellement en France chez 120 enfants atteints de diabète de type 1 dans le cadre d’un programme hospitalier de recherche clinique national, les données de l’analyse intermédiaire indiquent un maintien à un taux normal de glycémie 71% du temps sur 24h, avec une réduction significative du temps passé en hypo- et en hyperglycémie. Si le nom peut porter à confusion, il faut savoir que le pancréas artificiel n’est pas un faux organe qui serait greffé au patient. Il s’agit plutôt d’une technologie externe, constitué de trois éléments clés : un capteur, une pompe et un algorithme. Le capteur sous-cutané mesure la glycémie du patient en continu. La pompe perfuse l’insuline par l’intermédiaire d’une fine tubulure positionnée sous la peau. L’enjeu du pancréas artificiel réside aujourd’hui dans la troisième partie du système : l’algorithme capable de faire le lien entre le capteur et la pompe de façon automatique. 

 

  • L’équipe Inserm de Raphaël Scharfmann à l’Institut Cochin a apporté au cours des dix dernières années de nouveaux modèles cellulaires du diabète de type 1, sous forme de lignées de cellules bêta humaines. Elle cherche aujourd’hui à développer des thérapies innovantes fondées sur l’usage des cellules souches.

II. Alternative à l’insulinothérapie

a) Îlots producteurs d’insuline

Dans ce contexte d’innovations permanentes, l’allogreffe d’îlots de Langerhans, ces cellules spécialisées du pancréas qui produisent l’insuline, s’est aussi imposée comme une piste thérapeutique particulièrement séduisante. Depuis une vingtaine d’années, François Pattou, Marie-Christine Vantyghem et Julie Kerr-Conte au sein de l’unité Inserm 1190 « Recherche translationnelle sur le diabète » et leurs collègues des services de chirurgie et d’endocrino-diabétologie du CHU de Lille ont développé cette approche et greffé plus de cinquante personnes.

Au-delà du bénéfice incontestable pour les patients, leurs travaux illustrent parfaitement l’apport de la recherche translationnelle et des échanges entre laboratoire et services hospitaliers pour faire progresser les connaissances et les traitements de la maladie.

En France, 3,9 millions de personnes sont diabétiques. Parmi elles, environ 5 % sont atteintes d’un diabète de type 1. Cette forme de la maladie est due au déficit d’une hormone appelée insuline, qui entraîne une élévation prolongée de la concentration de glucose dans le sang (l’hyperglycémie).[5]  Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune, puisqu’elle est causée par un dysfonctionnement des cellules immunitaires, qui identifient les îlots de Langerhans du pancréas comme des cellules étrangères à l’organisme, et les éliminent. Ces îlots ne peuvent donc plus assurer leur fonction normale de production de l’insuline.

b) Principe de la greffe

À l’heure actuelle, le traitement de référence du diabète de type 1 repose sur l’administration d’insuline, soit en injections sous-cutanées plusieurs fois par jour, soit par pompe. Les patients ont recours à des analogues d’insuline humaine qui permettent de rétablir et maintenir les taux de glycémie à un niveau normal.

Néanmoins, chez certains patients, le diabète n’est pas parfaitement régulé par ce traitement, malgré un suivi strict des conseils alimentaires et thérapeutiques. Des complications sévères peuvent alors survenir. Un contrôle glycémique insuffisant peut en effet être délétère pour les organes, affectant en premier lieu le cœur et les vaisseaux, mais aussi les petites artères qui alimentent les reins, les nerfs des membres inférieurs et la rétine.

À côté des approches technologiques (pompe à insuline, capteurs de glucose et bientôt pompe en boucle fermée), l’approche biologique par la greffe d’îlots a constitué une étape essentielle pour la recherche sur le diabète. En permettant de restaurer une sécrétion d’insuline quasi physiologique, la greffe de cellules insulino-sécrétrices transforme la vie des patients, qui se trouvaient jusqu’ici en impasse thérapeutique.

Le principe de la greffe d’îlots ou thérapie cellulaire du diabète est de remplacer les cellules détruites du pancréas afin de rétablir une production régulée d’insuline. Se faisant, elle permet de normaliser le contrôle glycémique des malades, voire d’interrompre l’insulinothérapie. « La greffe d’îlots est proposée à deux profils de patients : d’une part ceux qui ont un diabète de type 1 très instable, souvent ancien, avec notamment la survenue d’hypoglycémies sévères et/ou non ressenties, d’autre part les patients greffés d’un rein, qui prennent déjà des médicament immunosuppresseurs qu’il suffit alors d’ajuster », souligne Marie-Christine Vantyghem.

II. Deux décennies de greffes

a) Les débuts de la greffe d’îlots

Pendant longtemps, pour les patients diabétiques de type 1 dont les complications rénales justifiaient une greffe de rein, la greffe simultanée de pancréas entier a représenté l’alternative thérapeutique la plus efficace à l’insulinothérapie. Cette tendance pourrait néanmoins s’inverser au cours des prochaines années, car cette procédure comporte des risques non négligeables. Il s’agit en effet d’un organe fragile et difficile à prélever chez les donneurs.

L’injection des îlots, c’est-à-dire seulement des cellules utiles, sécrétrices d’insuline, constitue une intervention moins lourde et tout aussi efficace.  « La greffe de pancréas est une intervention efficace mais au prix d’un risque élevé de complications parfois sévères. Tant que la greffe d’îlots ne fonctionnait pas bien, et qu’elle ne rétablissait pas un contrôle glycémique adapté, la greffe du pancréas permettait de meilleurs résultats. Mais la greffe d’îlots, moins risquée, a beaucoup progressé et peut être proposée aujourd’hui chez des patients qui ne supporteraient pas une greffe de pancréas », précise François Pattou.

Les premiers essais expérimentaux puis cliniques de cette technique remontent à la fin des années 60. Toutefois, c’est l’année 2000 qui est considérée comme un tournant majeur dans l’histoire de l’allogreffe d’îlots. Cette année-là, des chercheurs canadiens publient les résultats d’un essai clinique dans le New England Journal of Medicine[6]. Grâce à une greffe d’îlots pancréatiques, sept patients atteints d’un diabète de type 1 sont devenus entièrement insulino-indépendants. Ils n’avaient plus besoin d’avoir recours aux injections d’insuline depuis un an.

 « Après 2000, les travaux autour de cette procédure ont explosé, et d’autres succès ont été rapportés dans le monde, notamment par notre groupe. Le problème, c’est que très peu d’études se sont ensuite intéressées aux patients sur la durée, et nous sommes les premiers à présenter les résultats d’une étude à 10 ans », soulignent François Pattou et Marie-Christine Vantyghem.

b) Suivi sur 10 ans

La nouvelle étude publiée dans Diabetes Care de François Pattou, Marie-Christine Vantyghem et leurs équipes, retrace en effet la trajectoire de 28 patients ayant bénéficié d’une greffe d’îlots entre 2003 et 2012. Souffrant d’insuffisance rénale, la moitié d’entre eux avaient en outre déjà été greffés du rein.  

Avant ces travaux, plusieurs groupes avaient déjà publié des résultats sur l’évolution de patients greffés avec des îlots pancréatiques, mais aucun n’était allé au-delà d’un suivi à cinq ans. Tous soulignaient des bénéfices cliniques pour les patients et une amélioration de leur qualité de vie. Toutefois, en l’absence d’un suivi rigoureux à plus long terme, des questions demeuraient en suspens : les bénéfices de la greffe d’îlots déclinaient-ils au-delà de cinq ans ? Qu’en était-il des complications associées à la prise d’immunosuppresseurs ?

Le protocole opératoire pour réaliser la greffe d’îlots pancréatiques a été mis en place au cours des deux dernières décennies par l’équipe lilloise, en mettant l’accent non seulement sur la qualité, mais aussi sur la quantité des îlots greffés. « Nous avons choisi de greffer initialement un nombre important d’îlots. S’ils proviennent d’un pancréas particulièrement robuste, et contenant beaucoup d’îlots, une seule greffe peut suffire. Cette situation est cependant l’exception et une ou deux greffes supplémentaires sont le plus souvent nécessaires. La particularité de notre programme est de planifier les nouvelles greffes rapidement, sans les conditionner aux résultats de la première, pour donner toutes les chances aux patients de retrouver une production d’insuline normale », explique François Pattou.

Greffe d’îlots : quelques mots sur la procédure

Les îlots sont aujourd’hui isolés dans quelques laboratoires spécialisés, à Lille par l’équipe de Julie Kerr-Conte, mais aussi à Genève, Paris, Montpellier et Strasbourg à partir de pancréas prélevés chez des donneurs en état de mort cérébrale. 

La préparation d’îlots est ensuite injectée dans le foie par une courte incision abdominale ou par voie percutanée afin de perfuser les îlots collectés dans la veine porte du foie. La thrombose constitue le risque principal de cette procédure, et les patients doivent donc recevoir des anticoagulants.

Îlots pancréatiques observés au microscope – François Pattou/Université de Lille

c) Des résultats prometteurs

Dans le cadre de leur étude, les patients ont été vus à l’hôpital au moins une fois par an pendant dix ans pour vérifier l’état de la greffe. La plupart ont été suivis de façon trimestrielle. À chaque visite, la situation clinique, l’équilibre glycémique, les besoins en insuline exogène (apportée de l’extérieur) et les complications du traitement et du diabète étaient évaluées.

L’équipe de recherche avait choisi d’étudier comme critère principal l’insulino-indépendance avec un équilibre glycémique normal. Les médecins souhaitaient en effet déterminer la proportion de leurs patients capable de maintenir un bon contrôle glycémique, sans apport exogène d’insuline. L’étude souligne que c’est le cas au bout de cinq ans pour la moitié des 28 patients, et à dix ans, encore pour près d’un tiers (28 %). Ces résultats sont similaires à ceux obtenus avec la greffe de pancréas entier.

Les chercheurs ont également montré que 80 % des patients avaient une greffe toujours fonctionnelle au bout de cinq ans, sans évènement majeur d’hypoglycémie. Après dix ans, c’était toujours le cas pour les deux tiers d’entre eux. Enfin, la fonction rénale ne s’était pas détériorée de façon significative, malgré la possible toxicité rénale des immunosuppresseurs, celle-ci étant probablement compensée d’une part par un ajustement étroit des doses, d’autre part par l’excellent contrôle glycémique obtenu chez la plupart des patients.

Ces résultats montrent que la greffe permet d’améliorer considérablement l’équilibre glycémique des patients diabétiques de type 1 instables, de les mettre à l’abri du risque potentiellement mortel des hypoglycémies sévères et non ressenties, d’éviter les complications graves de la maladie et d’augmenter significativement leur qualité de vie. 

Pour comprendre pourquoi la greffe est plus efficace à long terme chez certains patients que chez d’autres, plusieurs pistes se dessinent. « Il semblerait qu’il y ait un signal en faveur des femmes, et certains éléments expérimentaux montrent que la présence d’œstrogènes serait favorable à la survie des îlots. Les patients qui ont les meilleurs résultats à long terme sont surtout ceux qui avaient retrouvé un bon contrôle glycémique juste après la greffe. Si nous voulons l’optimiser, il faut miser sur la qualité et la quantité des îlots que nous greffons au départ », indiquent François Pattou et Marie-Christine Vantyghem.

Les démarches pour le remboursement de la greffe d’îlots sont actuellement engagées auprès de la Haute Autorité de santé. La réponse est attendue pour 2020.

 

III. Quelles perspectives d’avenir ?

Différents problèmes demeurent, notamment le possible rejet immunologique des cellules greffées, et le nombre limité de cellules insulino-sécrétrices humaines disponibles pour la greffe dans le contexte actuel de pénurie de donneurs.

En effet, pour éviter le rejet de leur greffe, les patients doivent se soumettre à un traitement immunosuppresseur qui comporte un certain nombre d’effets indésirables. Plusieurs équipes s’efforcent aujourd’hui de trouver de nouvelles solutions pour éviter ce rejet de greffon. Par ailleurs, afin de développer des alternatives aux donneurs humains, de nombreuses équipes dans le monde mènent actuellement des études visant à produire des îlots à partir de cellules souches pluripotentes, et de les greffer avec succès[7].

Ces deux problématiques pourraient être résolues par une approche commune pour diffuser plus largement la thérapie cellulaire du diabète : « Le Graal serait de produire au laboratoire des îlots à partir de cellules souches puis de les greffer au sein d’une capsule de biomatériaux les protégeant du système immunitaire », souligne François Pattou.

De plus, de nombreux travaux sont en cours pour développer des pancréas artificiels totalement autonomes. À l’heure actuelle, le contrôle glycémique obtenu avec ces dispositifs externes reste inférieur à celui obtenu par la greffe et la restauration « biologique » de la sécrétion d’insuline.  « Ces approches s’avèrent néanmoins complémentaires et seront proposées en fonction du profil de chaque patient », précise Marie-Christine Vantyghem

La publication des résultats de la greffe d’îlots à 10 ans est une nouvelle étape importante dans le traitement du diabète de type 1. Ces résultats démontrent en effet que la thérapie cellulaire peut fonctionner sur le long germe si la masse d’îlots transplantée est suffisante.   Ces travaux ouvrent des perspectives très intéressantes pour toutes les équipes qui travaillent sur de nouvelles sources de cellules insulino-sécrétrices, produites notamment à partir de cellules souches et qui permettront de pallier le manque de donneurs.

IV. Témoignages de patients

Michèle, 61 ans, greffée depuis 14 ans

©Alain Vanderhaegen, Direction Communication du CHU de Lille

« Votre fille ne vivra pas au-delà de l’année 2000. Elle ne se mariera jamais et n’aura pas d’enfants ».  C’est en ces termes qu’un médecin peu empathique déclare à la mère de Michèle que son enfant souffre de diabète de type 1. À ce moment, la fillette ne comprend pas bien ce qui est en train de se passer. Nous sommes dans les années 1970, et l’an 2000 lui paraît bien loin. Elle ne se sent pas malade. Certes, ces derniers temps elle avait beaucoup maigri, mais elle n’a souffert d’aucun malaise.

Tout à coup, tout change. Son hospitalisation en dortoir, seule petite fille au milieu de personnes âgées victimes d’importantes complications liées au diabète, notamment des amputations, est vécue comme un véritable traumatisme. « Psychologiquement, cela a été très dur. Ensuite, j’ai eu une vie de mensonges, à éviter les questions des autres », explique-t-elle.

La prise des traitements est difficile. Il faut affuter les aiguilles, faire bouillir les seringues et s’injecter l’insuline, avec en permanence le sentiment de honte, la volonté de se cacher. Michèle avance, elle tient le coup. Elle rencontre son mari Jacques, avec qui elle a un fils. Tous deux la soutiennent. Tout petit, son garçon a appris à réagir face aux hypoglycémies de sa mère, à aller chercher le sucre dans les placards quand celle-ci en manifeste le besoin.

Mais les crises d’hypoglycémie sévères se font plus fréquentes. Certains jours, ce sont cinq à six crises qui se succèdent, laissant Michèle et ses proches épuisés. Son diabétologue, qui avait rencontré les équipes lilloises lors d’une conférence, décide alors de l’orienter vers la greffe d’îlots. Il lui faudra un an pour qu’elle se décide à sauter le pas, en 2006. Trois greffes s’enchainent alors très rapidement. Tout de suite après la troisième, Michèle peut arrêter les injections d’insuline.  « Que les cellules proviennent de donneurs décédés me bloquait. J’avais aussi peur que la greffe me transforme. De fait, cela a changé ma vie mais je suis restée la même, à la différence qu’il y a toujours avec moi ces trois personnes. Il y a cette ombre-là qui est permanente. C’est pourquoi, si la recherche pouvait avancer sur la greffe à partir de cellules souches, cela serait un grand pas en avant », souligne-t-elle.

Cela fait maintenant 14 ans que Michèle a arrêté l’insuline, qu’elle prend les médicaments immunosuppresseurs tous les jours, sans effets indésirables majeurs. Pour ses proches comme pour elle, c’est une libération. « Je suis redevenue une femme libre, avec mon mari nous pouvons refaire des choses de manière indépendante. Parfois je m’inquiète du vieillissement de la greffe, revenir en arrière serait inconcevable », dit-elle.

 

Carole, 60 ans, greffée depuis 4 ans

©Alain Vanderhaegen

À 14 ans, Carole rentre en seconde, à l’internat. L’expérience lui déplait, d’autant qu’elle ne cesse de s’évanouir. Cependant, lorsque ses parents la changent de lycée, les choses semblent aller mieux. Elle se sent bien, ne pense plus à ses malaises. Jusqu’à une visite médicale qui révèle du sucre dans ses urines, suivie d’une prise de sang qui confirme le diagnostic de diabète de type 1.

À l’école, après un mois d’hospitalisation, tout le monde fait très attention à elle. « Je pouvais dire n’importe quoi en classe, parce qu’on se disait : « la pauvre, elle n’y est pour rien, elle est diabétique« .  J’en ai bien profité, je me suis amusée », explique-t-elle.

Elle supporte bien les traitements, mange presque normalement, passe son bac et devient institutrice. Sur son lieu de travail, elle a toujours des bouteilles de jus d’orange à portée de main en cas de crise.

Mais progressivement, les hypoglycémies se font plus sévères, elles sont non ressenties. Elles empiètent sur son quotidien et détériorent sa qualité de vie. « À la naissance de ma fille, les médecins n’avaient pas tenu compte de mon diabète. J’ai fait un œdème pulmonaire, j’ai été hospitalisée ailleurs. Je n’ai pas vu mon bébé pendant 15 jours, et j’ai fait la grève de la faim pour qu’on me laisse la voir. Quand je suis sortie de l’hôpital, un matin j’ai fait une hypoglycémie. Soudain, je ne me souvenais plus que j’avais une fille, je l’avais oubliée. Si j’avais été toute seule, j’aurais été capable de sortir et de la laisser à la maison », raconte-t-elle.

Un jour, un ami lui parle d’une émission radio, dans laquelle il a entendu parler de la greffe d’îlots qui est proposée à Lille. Carole en discute avec son diabétologue qui promet de se renseigner. Finalement, c’est elle qui trouvera les coordonnées de l’équipe.

Greffée en 2015 et 2016 à trois reprises, Carole est bien décidée à profiter à nouveau de sa vie. Dès la deuxième greffe, elle est insulino-indépendante. Cinq ans plus tard, elle vit toujours bien la prise d’immunosuppresseurs, qu’elle n’oublie jamais. Les hypoglycémies ont disparu. Elle peut désormais conduire, refaire du sport, se balader seule sans avoir à partager tout son emploi du temps avec son mari. « Je peux même remanger des gâteaux quand des proches en font. Mais j’ai tellement été habituée à ne pas manger de sucre, que maintenant en fait, je n’aime pas ça. La greffe a changé ma vie alors que j’étais dans une situation où je ne faisais plus rien par moi-même. Ces îlots, se sont mes amis, je leur ai donné un nom et je leur fête leur anniversaire », sourit-elle.

 

Béatrice, 54 ans, greffée depuis 1 an

©Alain Vanderhaegen

L’adolescence de Béatrice a été fortement perturbée par l’annonce de son diabète. Originaire d’un milieu rural près de Rennes, aucune des personnes de son entourage n’avait entendu parler de la maladie avant son diagnostic à l’âge de 11 ans. Les débuts sont difficiles : à l’école personne ne fait l’effort de comprendre la situation qu’elle traverse. Elle est obligée de manger dans les cuisines de la cantine, et se retrouve souvent seule dans la cour de récréation. Les injections d’insuline améliorent un peu la situation, même si des effets indésirables sont à noter, notamment la prise de poids à chaque augmentation des doses. Par ailleurs, Béatrice souffre de la discrimination dont elle est victime, et qu’elle retrouvera plus tard dans le milieu professionnel.

Au fil des années, de nouvelles technologies voient le jour pour aider les patients comme Béatrice à mieux contrôler leur glycémie. C’est le cas des pompes avec arrêt automatique d’insuline, et des capteurs qui mesurent en continu la glycémie. Néanmoins, il y a aussi de désavantages : en cas d’hypoglycémie, une alarme se déclenche, à toute heure du jour et de la nuit. « C’était très difficile à vivre au quotidien. Quand j’ai enfin été greffée mon mari a fait la remarque que désormais, « nous pouvions enfin dormir« . Notre qualité de vie a été nettement améliorée », souligne-t-elle.

C’est en lisant un article dans le journal de l’Association françaises des diabétiques que Béatrice découvre la greffe d’îlots. Elle est fatiguée, elle vient de perdre son travail. « J’avais l’impression d’être en bout de parcours, il me fallait une solution nouvelle, pour survivre. Pour continuer à vivre tout simplement. En lisant, j’ai tout de suite eu le sentiment que la greffe était pour moi », explique-t-elle.

Il s’écoulera deux ans avant qu’elle ne puisse convaincre sa diabétologue de l’orienter vers des connaisseurs du sujet, et qu’elle ne rencontre enfin l’équipe Inserm-CHU de Lille. Fin 2018, Béatrice bénéficie d’une greffe à trois reprises. Elle est insulino-indépendante très rapidement après. « Je perçois la greffe comme un cadeau énorme. Par respect pour les donneurs, il faut que je continue à me battre. J’ai envie de les faire vivre, je les appelle mes petits anges », explique-t-elle.

Si la prise d’immunosuppresseurs s’accompagne de désagréments, notamment des sensations de fourmillements dans les jambes, Béatrice reconnaît que ceux-ci sont bien moindres que ne l’étaient les complications liées à son diabète de type 1. « Le diabète de type occupait toutes mes pensées, j’avais l’impression de faire ma vie autour de la maladie. Nous verrons comment mon état évolue, et comment la greffe tient dans les prochaines années, mais un an après la procédure, je suis optimiste. Pour la première fois depuis longtemps, j’ai de l’espoir », dit-elle. 

Lexique

Îlots de Langerhans Les cellules des îlots de Langerhans (ou îlots pancréatiques) sont des cellules endocrines du pancréas dont la fonction principale est la production de l’insuline. Les îlots de Langerhans sont des micro-organes complexes disséminés dans le pancréas exocrine.

Allogreffe Greffes les plus courantes, qui concernent les cas où le donneur et le receveur sont de la même espèce biologique, mais étrangers l’un à l’autre.  

Xénogreffe : Greffe dans laquelle le greffon provient d’une espèce biologique différente, par exemple le porc.

Cellules souches pluripotentes : Cellules capables de se multiplier à l’infini et de se différencier en tous les types de cellules qui composent un organisme adulte.

[1] https://care.diabetesjournals.org/sites/default/files/care_upcoming/DC190401_ADVANCEDCOPY_STAMPED.pdf

[2]Advances in β-cell replacement therapy for the treatment of type 1 diabetes”.

Vantyghem MC, de Koning EJP, Pattou F, Rickels MR.

Lancet. 2019 Oct 5;394(10205):1274-1285. 

[3] https://cordis.europa.eu/project/rcn/110445/reporting/en

[4] https://hypo-resolve.eu/

[5] https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/diabete-type-1

[6] « Islet Transplantation in Seven Patients with Type 1 Diabetes Mellitus Using a Glucocorticoid-Free Immunosuppressive Regimen », New England Journal of Medicine, Juillet 2000. https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJM200007273430401

[7] https://www.ajd-diabete.fr/le-diabete/tout-savoir-sur-le-diabete/le-traitement/

Fertilité, endométriose : l’Inserm fait le point sur les recherches

©2019 Flore Avram/Inserm

Aujourd’hui, environ un couple sur 8 consulte pour des difficultés à procréer. Les raisons sont probablement liées au fait que les projets parentaux ont lieu plus tardivement qu’autrefois, ou encore que les couples consultent plus facilement en mettant de côté les tabous liés à l’infertilité. Ainsi, l’infertilité est devenue un problème de santé publique et la communauté scientifique se mobilise.

Où en sont les recherches sur ces questions au cœur des problématiques sociétales actuelles ? Quel est leur transfert possible vers la clinique ? Les axes de recherche sur les troubles de la fertilité sont nombreux. L’objet de ce point presse n’est pas de les aborder de manière exhaustive mais d’évoquer les secteurs sur lesquels la recherche avance.

Quand la recherche avance, c’est la santé de tous qui progresse.

  1. Recherche contre l’infertilité

On parle d’infertilité au sein d’un couple lorsque celui-ci n’a pas réussi à avoir un enfant de manière naturelle après 12 mois de tentative. Cette définition englobe des situations de stérilité totale, sans espoir de conception naturelle, et une majorité de cas d’hypofertilité, c’est-à-dire de couples ayant des chances réduites  –  mais non nulles  –  d’obtenir une grossesse.

On classe ces infertilités en 4 catégories selon leur origine :

–  30 % sont d’origine féminine ;

– 30 % sont d’origine masculine. Chez l’homme, l’azoospermie, et l’oligospermie sont les deux principales causes d’infertilité identifiées à ce jour ;

– 30 % sont d’origine féminine et masculine, c’est-à-dire qu’elles sont liées à un déficit de fécondité qui touche les deux partenaires ;

– 10 % de cas sont inexpliqués.

Chez la femme, à l’exception des causes mécaniques tubaires – lorsque les trompes sont altérées ou bouchées (le plus souvent suite à une infection) –  ou utérines, l’endométriose et les anomalies de l’ovulation sont les causes d’infertilité les plus fréquentes.

Parmi les anomalies de l’ovulation, on retrouve, entre autres, le syndrome des ovaires polykystiques (ce syndrome touche environ 10 % des femmes dans le monde), l’hyperprolactinémie et l’insuffisance ovarienne primaire (qui peut être aussi secondaire aux effets de la chimiothérapie).

La recherche actuelle vise, d’une part, à mieux comprendre les causes des infertilités et,  d’autre part, à rechercher de nouveaux traitements ou prises en charge ayant pour objectif d’augmenter les chances de procréer.

1.1. Mieux comprendre les causes

Approche génétique

La recherche des causes génétiques de l’insuffisance ovarienne est un axe sur lequel de nombreux chercheurs travaillent. Certains gènes ne fonctionnent pas ou fonctionnent mal dans plusieurs troubles de la fertilité. L’un des domaines de recherche en pleine expansion, notamment du fait de l’amélioration des méthodes de criblage à haut débit, est la recherche de variants génétiques.

Le laboratoire Inserm de Nadine Binart travaille, par exemple, sur l’insuffisance ovarienne primaire (IOP) caractérisée par une incapacité de maturation des follicules ovariens ou une perte du pool des follicules de réserve. À partir de l’analyse de l’ADN de femmes atteintes d’IOP, les chercheurs travaillent à isoler dans leur patrimoine génétique les gènes impliqués/altérés. Cette approche aide à mieux comprendre les pathologies mais ne peut pas permettre de traiter spécifiquement ces femmes car, lorsque l’ovaire ne contient plus d’ovocytes, la stérilité est définitive. En revanche, une prise en charge préventive peut être déclenchée si l’anomalie génétique est retrouvée avant que le stock de follicules soit totalement épuisé – lors d’une enquête familiale par exemple. C’est le rôle de la recherche clinique qui permet de pallier ces maladies lorsque des mutations sont identifiées dans des familles atteintes, d’informer les jeunes patientes sur le risque de voir leur ovaire s’appauvrir en ovocytes au fil du temps et éventuellement de mettre en place des techniques de préservation de la fertilité.

Approche hormonale : exemple de la kisspeptine et de la prolactine

Il est bien établi que l’allaitement entraîne à la fois une augmentation de la sécrétion de prolactine (PRL) par l’hypophyse et inhibe les capacités d’une femme à ovuler. Ceci empêche la survenue d’une nouvelle grossesse. Il existe des situations pathologiques où la PRL augmente : c’est le cas des tumeurs situées sur l’hypophyse sécrétant cette hormone. Ces hyperprolactinémies, responsables de troubles des règles et d’infertilité, sont une cause majeure d’anovulation. L’équipe Inserm de Jacques Young et de Nadine Binart a permis, en 2011, de décortiquer le mécanisme sous-jacent du blocage du fonctionnement ovarien. Les chercheurs ont démontré, en utilisant un modèle de souris de la maladie,  que la PRL inhibe la  sécrétion d’une neuro-hormone appelée kisspeptine. Or, cette kisspeptine est le point de départ de toute la cascade hormonale responsable de la cyclicité ovarienne. Dans un modèle de souris, l’administration de kisspeptine a permis de rétablir le fonctionnement cyclique des ovaires malgré l’hyperprolactinémie.

Cette découverte physiopathologique explique pour la première fois le lien entre l’infertilité et l’hyperprolactinémie et permet une ouverture thérapeutique originale. La validation de ce concept chez la femme vient d’être réalisée[1] ce qui permettra de proposer une alternative thérapeutique en cas de résistance aux médicaments actuels.

1.2. Préserver la fertilité : axes de recherche et derniers résultats

Depuis plusieurs années, des consultations spécialisées dites d’oncofertilité se sont largement développées et doivent maintenant faire partie intégrante du parcours de soin des patientes jeunes atteintes de cancer. Plusieurs techniques dites de préservation de la fertilité visant à cryoconserver des gamètes ou à préserver les capacités reproductives sont aujourd’hui disponibles et d’autres sont en cours de développement. En France, ces démarches s’inscrivent, depuis 1994, dans les différentes lois de bioéthique. L’article L.2141 11, modifié par la loi 2011-814 du 7 juillet 2011 prévoit que « Toute personne dont la prise en charge médicale est susceptible d’altérer la fertilité, ou dont la fertilité risque d’être prématurément altérée, peut bénéficier du recueil et de la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux, en vue de la réalisation ultérieure, à son bénéfice, d’une assistance médicale à la procréation, ou en vue de la préservation et de la restauration de sa fertilité ». Par ailleurs, le plan Cancer 2014-2019 a intégré des mesures de préservation de la fertilité stipulant que « l’accès aux traitements du cancer et en particulier aux traitements innovants, doit être garanti à tous les malades ».

Améliorer la conservation des gamètes

Plusieurs techniques permettant de cryoconserver des gamètes des femmes sont aujourd’hui disponibles. La congélation d’ovocytes matures ou d’embryons obtenus à partir de ces ovocytes représente la méthode de référence. Cependant, elle ne peut être réalisée chez les jeunes filles prépubères, lorsque le traitement doit être débuté en urgence. Elle peut également être problématique dans le cadre de pathologies hormono-sensibles. Aussi, d’autres techniques, bien qu’encore considérées comme expérimentales, peuvent être proposées dans ces situations.

Actuellement l’amélioration des méthodes disponibles et le développement de nouvelles stratégies sont un enjeu majeur en oncofertilité. C’est l’objet d’un des axes de recherche de l’équipe Inserm de Nadine Binard et Charlotte Sonigo en collaboration avec le Pr Michael Grynberg.

Utiliser l’hormone anti-müllérienne

La chimiothérapie fait baisser la fertilité en exerçant une toxicité directe sur les ovaires. Couramment utilisé dans le traitement du cancer, le cyclophosphamide provoque une destruction massive des cellules germinales contenues dans les follicules ovariens. Les chercheurs viennent de montrer, dans un modèle de souris, qu’un traitement par l’hormone anti-müllérienne, normalement secrétée par les ovaires, permettait de limiter la réduction du stock de follicules lors d’une chimiothérapie. L’hormone anti-müllérienne constitue ainsi une nouvelle promesse pour préserver la fertilité.

1.3. L’apport des nouvelles technologies : L’intelligence artificielle au service de la recherche en reproduction

Le stock des cellules germinales, contenues dans les follicules, constitue la réserve ovarienne. L’évaluation de la quantité de ces cellules germinales est couramment utilisée pour comprendre la physiologie ovarienne ou mesurer l’impact de l’environnement sur les ovaires. La méthode de référence utilisée chez la souris est longue et fastidieuse. Les chercheurs de l’Inserm viennent de développer, avec une entreprise spécialisée dans l’intelligence artificielle, une méthode d’intelligence artificielle automatisée de comptage folliculaire par  deep learning[2]. Ce nouvel outil sera disponible pour la communauté scientifique s’intéressant à la fertilité permettant un grand gain de temps et une meilleure reproductibilité des données.

 

  1. Recherche contre l’endométriose

L’endométriose est un syndrome complexe caractérisé par un processus inflammatoire chronique dû à la présence de tissu semblable à la muqueuse utérine en dehors de l’utérus. Cet « utérus ectopique » continue à fonctionner sous l’influence des hormones ovariennes provoquant chez certaines femmes de fortes douleurs et parfois une infertilité. En parallèle d’une médiatisation importante, notamment sous l’impulsion des associations de malades, la ministre de la Santé a annoncé un plan d’action pour renforcer la prise en charge de l’endométriose. Au niveau de la recherche, il existe une explosion des études sur le sujet depuis les 5 dernières années. Environ 1200 articles par an sont produits par les chercheurs du monde entier pour faire avancer les connaissances sur cette pathologie.

Qu’est ce que l’endométriose ?

©2019 Flore Avram/Inserm 

  • 1 femme sur 10 serait concernée par une forme d’endométriose
  • les localisations des lésions d’endométriose sont hétérogènes
  • le reflux de cellules de l’endomètre au moment des règles existe chez 90 % des femmes mais seules 10 % développent une pathologie
  • 4 stades sont classiquement décrits pour la maladie en fonction de l’étendue des lésions et de leur profondeur ; cependant, il n’y a pas de corrélation entre les symptômes et la sévérité de la maladie
  • on distingue 3 formes d’endométriose : l’endométriose superficielle ou péritonéale, l’endométriose ovarienne (ou kyste endométriosique, ou endométriome) et l’endométriose profonde.

2.1. Mieux comprendre les causes

L’approche épidémiologique

Aujourd’hui peu de choses sont connues sur les causes de l’endométriose, son évolution naturelle et les facteurs qui influencent sa progression. L’apport de la recherche en épidémiologie est primordial pour faire avancer ces connaissances. Seules quelques grandes cohortes épidémiologiques permettant d’explorer ces aspects existent à travers le monde. En termes d’exploration des facteurs de risque d’endométriose, la plus grande à ce jour est une cohorte de 116 430 infirmières américaines âgées de 25 à 42 ans en 1989. Parmi les facteurs de risques identifiés dans la littérature et confirmés dans cette cohorte : un faible poids de naissance, des menstruations précoces, un faible indice de masse corporel et des cycles menstruels courts (moins de 24 jours)[3]. Néanmoins, au-delà de ces facteurs, peu de connaissances sont disponibles sur les causes de la maladie, et son histoire naturelle est largement inconnue. Une revue de la littérature parue en août 2018 a permis de dresser le tableau suivant :

* L’association positive entre le tabagisme et la diminution du risque d’endométriose pourrait trouver une explication dans l’effet anti-oestrogénique du tabac. Cette observation viendrait confirmer l’intérêt thérapeutique des antiestrogènes pour  lesquels il existe des médicaments beaucoup plus recommandables que la cigarette dont les effets nocifs sont largement documentés.

Afin de mieux comprendre cette maladie, plusieurs projets épidémiologiques voient le jour en France sous l’impulsion de l’équipe de Marina Kvaskoff, épidémiologiste et chercheuse à l’Inserm. Parmi ceux-ci, une cohorte de patientes dédiée à l’étude de l’endométriose vient d’être mise en place : la cohorte ComPaRe-Endométriose. L’objectif de l’équipe scientifique est d’atteindre un nombre suffisamment important de femmes incluses dans cette cohorte pour obtenir des résultats robustes aux nombreuses questions encore en suspens sur cette pathologie. En moins de 6 mois, déjà plus de 8000 femmes participent à l’étude. L’équipe vise à recruter 15 à 20 000 participantes ; un large appel à participation est lancé aux femmes atteintes d’endométriose ou d’adénomyose (endométriose restreinte au muscle de l’utérus) pour accélérer les recherches sur ces pathologies, en répondant simplement à des questionnaires en ligne sur leur vécu de la maladie (https://compare.aphp.fr/). Les premiers axes de recherche sont d’explorer l’histoire naturelle de la maladie (évolution des symptômes et des caractéristiques de la maladie au cours du temps), et d’identifier les facteurs déterminant sa progression et ceux menant à une meilleure réponse au traitement. L’étude permettra également de décrire les circonstances du diagnostic et les parcours de soin des patientes, et d’examiner l’impact de la maladie sur leur quotidien.

L’étude de l’endométriose fait également l’objet de projets au sein d’autres grandes cohortes françaises, comme la cohorte CONSTANCES, une étude prospective de 200 000 hommes et femmes (105 000 femmes) représentative de la population française. L’équipe de Marina Kvaskoff a développé un projet de recherche épidémiologique qui permettra de déterminer la prévalence et l’incidence de la maladie en France ainsi que d’explorer ses facteurs de risque dans cette cohorte. D’autres travaux sont en développement et seront menés à terme dans d’autres cohortes.

La piste de l’environnement

Plusieurs études épidémiologiques ont exploré les associations entre les produits chimiques organochlorés (solvants, pesticides, insecticides, fongicides…) et l’endométriose, mais les résultats ne sont pas uniformes. Une méta analyse française de 17 études[4] a été publiée en février 2019 pour essayer de tirer des résultats plus robustes. Le risque de développer une endométriose était de 1,65 plus élevé chez les femmes exposées aux dioxines ; 1,70 pour celles exposées aux polychlorobiphényles (PCB) et 1,23 pour les pesticides organochlorés. Bien qu’elles soient statistiquement significatives, ces estimations doivent être considérées avec prudence en raison de leur hétérogénéité notable entre les études et de la faible ampleur de l’effet estimé. Le niveau de preuve a été jugé  » modéré  » avec un risque  sérieux  de biais ce qui justifie la nécessité de mener d’autres recherches épidémiologiques bien conçues pour combler les lacunes persistantes des données.

L’approche génétique et épigénétique pour un dépistage précoce

Le dépistage de l’endométriose à des stades précoces et en l’absence de symptômes permettrait une meilleure prise en charge des patientes. Si l’héritabilité de l’endométriose a été évaluée à 50 %, elle est très complexe et manifestement très polygénique. De nombreux gènes candidats ont été étudiés de ce point de vue dans des analyses de prédisposition à la maladie. Les premiers résultats ont montré qu’il n’existe pas un gène de l’endométriose mais que l’existence de variants génétiques caractéristiques de la pathologie pourraient permettre de diagnostiquer celle-ci et d’améliorer la prise en charge des patientes En 2017, les efforts de la communauté internationale ont permis d’identifier au total 14 variants (situés dans les gènes WNT4, GREB1, ETAA1, IL1A, KDR, ID4, CDKN2B-AS1, VEZT, FN1, CCDC170, SYNE1, FSHB et dans les régions chromosomiques 7p15.2 et 7p12.3). Ces 14 gènes sont impliqués dans la prolifération et le cycle cellulaire, l’adhésion et la matrice extracellulaire et l’inflammation, ce qui fait sens en matière d’endométriose. Néanmoins, chacun des variants identifiés n’explique qu’une part limitée de la variation génétique dans l’endométriose. La combinaison d’allèles à risque chez une patiente pourrait dans l’avenir donner une probabilité d’être atteinte utilisable pour diagnostiquer les patientes et les classer en fonction du type d’endométriose et de sa gravité.

Par ailleurs, l’existence de marques épigénétiques spécifiques de l’endométriose pourrait aussi permettre en théorie le dépistage précoce. Les cellules endométriosiques présentent effectivement des anomalies épigénétiques spécifiques qui modifient l’expression des principaux facteurs de transcription. Toutefois, on ne sait pas comment les interactions entre les cellules épigénomiques défectueuses et les gènes mutés des cellules épithéliales contribuent à la pathogenèse de l’endométriose.

La piste des microARN

La génétique est cependant insuffisante pour rendre compte de l’endométriose dans sa complexité. Les gènes n’interviennent dans le phénotype qu’en tant qu’ils sont exprimés. La régulation de cette expression passe par des mécanismes moléculaires épigénétiques. De ce point de vue, la plupart des études porte sur la recherche de microARN qui « marqueraient » la maladie. Pour l’instant, plusieurs ont été identifiés dans le plasma des patientes, avec cependant une reproductibilité très mauvaise d’une équipe à l’autre. Par exemple, une étude publiée en 2013[5] identifie quatre miARN seulement (miR-199a, miR-122, miR145* et miR-542-3p) comme suffisant pour classer, avec très peu d’erreurs, les patientes. Néanmoins, la confirmation sur des cohortes indépendantes des résultats de cet article tarde à venir. Une explication possible est le fait que l’extraction des ARN circulants demeure très hétérogène d’une étude à l’autre, peut-être en relation avec les outils techniques utilisés lors de l’extraction. Dans l’avenir, de nouvelles approches plus exhaustives pourraient apporter des résultats plus homogènes.

L’approche cellulaire : le stress oxydatif

Plusieurs études ont montré une augmentation du stress oxydatif dans le sérum des femmes atteintes d’endométriose. Le stress oxydatif est un mécanisme très général induisant et causé par l’inflammation. Face une maladie douloureuse, comme l’endométriose, trouver des altérations liées au stress oxydatif n’est pas surprenant. Dans des modèles murins, un traitement par des antioxydants ( N acetyl cystéine) a permis la réduction des lésions endométriosiques.

Par ailleurs, par une approche menée par les chercheurs de l’Institut Cochin, parmi les cascades de gènes dérégulées dans la lésion d’endométriose, ils ont trouvé de nombreux gènes liés au métabolisme du glutathion. Ce tripeptide joue un rôle clef dans la détoxification du peroxyde d’hydrogène, molécule majeure du stress oxydatif. La dérégulation négative en particulier des gènes GCLM et GCLC cruciaux pour la synthèse du glutathion, pourrait expliquer un accroissement du stress oxydatif dans les lésions d’endométriose.

La piste de la défaillance immunitaire ?

La survie des cellules endométriosiques à l’extérieur de l’utérus pourrait être liée à un mauvais fonctionnement du système immunitaire duquel résulterait une inflammation chronique locale, et un échec de ll’élimination de ces cellules ectopiques. Les mécanismes immunitaires en jeu restent mal compris, mais plusieurs éléments pointent à une dérégulation des cellules du système immunitaire, tels que les macrophages et les lymphocytes B. Les macrophages sont des cellules de l’immunité innée participant à l’inflammation et à l’élimination des débris cellulaires. Il a été montré que les macrophages de patientes souffrant d’endométriose favorisaient la croissance des cellules endométriosiques in vitro. Les lymphocytes B sont des cellules de l’immunité adaptative, et sont responsables de la fabrication d’anticorps. Leur dérèglement dans l’endométriose est illustré par une activation importante et la présence d’auto-anticorps contre des antigènes de l’endomètre. D’autres cellules immunitaires sont également impliquées et une recherche active pour mieux comprendre leur implication est en cours.

2.2. Les traitements : axes de recherche et derniers résultats

Changer les modalités du diagnostic : vers la fin de la chirurgie

Avant d’envisager un traitement, la première étape est de réduire le temps de diagnostic de l’endométriose aujourd’hui estimé entre 7 et 10 ans après l’apparition des premiers symptômes. Pour cela, médecins et chercheurs travaillent à l’élaboration d’un score diagnostique, basé sur une dizaine de questions à partir desquelles le médecin pourra poser un diagnostic  fiable à 85-90 %. Ce score pourra être complété si nécessaire par des examens d’imagerie qui, si ils sont réalisés et interprétés par des personnels médicaux formés, peuvent tout à fait renseigner le diagnostic d’endométriose.

Médecins et chercheurs s’accordent à dire qu’il contre-indiqué de pratiquer des chirurgies à visée diagnostiques pour l’endométriose.

Les 3 piliers du traitement

Le traitement médicamenteux, la chirurgie et  l’assistance médicale à procréation (AMP) sont les 3 seules approches existantes pour traiter les symptômes de l’endométriose et ses éventuelles conséquences sur la fertilité. L’enjeu majeur  – en l’absence de nouveaux traitements – est de bien comprendre quel rôle joue chacune des composantes de cet arsenal thérapeutique afin de l’utiliser à bon escient.

Le traitement médicamenteux repose sur le blocage des fonctions ovariennes pour créer une ménopause artificielle via des contraceptifs pris en continu. Ces traitements doivent être personnalisés et adaptés à chaque patiente (estroprogestatifs, progestatifs, analogues de la GnRH. Ils doivent être prescrits en première intention chez la femme sans désir de grossesse et ce afin de réduire les douleurs liées à cette pathologie.

Lors d’un projet de grossesse, l’AMP et la chirurgie peuvent être envisagées. Avant tout geste chirurgical, le recours à l’AMP doit être systématique afin de maximiser les chances de concevoir un enfant pour les couples qui le souhaitent. La chirurgie ne doit  pas être utilisée chez des femmes sans projet d’enfant pour lesquelles le traitement médicamenteux fonctionne. La chirurgie de l’endométriose peut être très invasive et invalidante (résection de certaines parties du côlon, risque élevé d’abîmer la réserve ovarienne en cas de retrait de kyste ovarien etc.,) et, en ne traitant pas la cause,  n’empêche pas la maladie de revenir. Là encore, médecins et chercheurs s’accordent sur le fait qu’une femme opérée jeune présente un risque important que les lésions endométriosiques reviennent et soient à nouveau problématiques au moment d’un éventuel souhait de grossesse.

Tout doit donc être fait pour que la chirurgie ne soit plus le traitement de référence de l’endométriose comme cela a été trop le cas dans le passé.

Aujourd’hui, certaines formes d’endométriose – notamment celles qui touchent les ovaires – sont une indication permettant aux femmes d’avoir accès aux différentes techniques de préservation de la fertilité.

L’apport des nouvelles technologies : l’exemple des ultrasons haute-fréquence

A Lyon, des équipes de cliniciens chercheurs sous l’impulsion du Pr Gil Dubernard (Hospices Civils de Lyon et unité Inserm 1032 LabTAU) ont mis au point un traitement de l’endométriose rectale à base d’ultrasons. Lorsque l’endométriose infiltre la paroi rectale, elle est responsable de douleurs rectales invalidantes qui peuvent altérer la qualité de vie. Après échec du traitement médical, une chirurgie est souvent proposée qui consiste à retirer une partie ou la totalité du rectum et nécessite parfois une dérivation digestive (anus artificiel) transitoire.

Une étude clinique de phase I menée sur 11 patientes a démontré en 2017 que les ultrasons de haute intensité peuvent être une alternative intéressante à la chirurgie. En effet, en quelques minutes, grâce à une sonde à ultrasons introduite par voie rectale, la lésion est « désensibilisée ». Afin de confirmer ces premiers résultats, un nouvel essai incluant 12 patientes s’est terminé le 1er avril 2019. L’analyse des données est en cours et sera bientôt disponible.

En parallèle et en collaboration avec la société EDAP-TMS (promotrice des essais cliniques), le laboratoire Inserm dédié aux ultrasons thérapeutiques dirigé par Cyril Lafon, le LabTAU (Université Claude Bernard Lyon 1/Inserm), travaille sur l’optimisation des conditions de délivrance des ultrasons (insonification) et l’amélioration de l’ergonomie de la sonde pour augmenter le nombre de patientes éligibles à ce nouveau traitement.

Cette thérapeutique innovante permettra très probablement de remplacer une bonne partie des chirurgies rectales réalisées pour cette maladie fonctionnelle qui guérit à la ménopause.

 

[1] Hypothalamic-Pituitary-Ovarian Axis Reactivation by Kisspeptin-10 in Hyperprolactinemic Women With Chronic Amenorrhea.

Millar RP, Sonigo C, Anderson RA, George J, Maione L, Brailly-Tabard S, Chanson P, Binart N, Young J.

[2] Sonigo C, Jankowski S, Yoo O, Trassard O, Bousquet N, Grynberg M, Beau I, Binart N. High-throughput ovarian follicle counting by an innovative deep learning approach. Sci Rep. 2018 Sep 10;8(1):13499. doi: 10.1038/s41598-018-31883-8.

[3] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30017581

[4] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30530163

[5] (Wang et al, JCEM , 2013)

 

Pour en savoir plus :

Lire les dossiers d’information sur inserm.fr :

Endométriose

Technique de préservation de la fertilité

Le magazine de l’Inserm numéro 36 : Fertilité : nos générations futures en danger ?

Agir sur les comportements nutritionnels, une expertise collective de l’Inserm

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© Fotolia

Le rôle des facteurs nutritionnels (alimentation et activité physique) dans le développement du surpoids et de l’obésité et dans la survenue de nombreuses maladies chroniques telles que les cancers, les maladies cardiovasculaires, le diabète et l’arthrose est à ce jour scientifiquement bien établi. Ces maladies constituent la première cause de mortalité à l’échelle de la planète et le nombre de patients concernés ne cesse d’augmenter.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’en 2014 plus de 1,9 milliard d’adultes étaient en surpoids, dont 600 millions d’obèses. En France environ un tiers des adultes sont en surpoids et 15% (7 millions) sont obèses. Au-delà des difficultés que rencontrent ces individus, le surpoids et l’obésité ont également un coût sociétal important. Dans le cas de la France, leur coût financier a été estimé à 4 milliards d’euros en 2008. Selon l’OMS, les projections effectuées prévoient qu’en 2030, 25 % des Français et 29 % des Françaises pourraient être obèses.

Pour faire face à cette hausse de l’obésité en France, l’État a mis en place dès 2001, une politique publique de santé nutritionnelle en lançant le Programme National Nutrition Santé (PNNS).En 2007, un décret de la loi de santé publique de 2004 impose que les publicités en faveur des produits alimentaires manufacturés et des boissons avec ajouts de sucres, sel, édulcorants de synthèse, doivent contenir une information à caractère sanitaire. Cette disposition s’applique quels que soient les médias (télévision, radio ou affichage publicitaire).

Ces messages sont à présent bien connus du public (5 fruits légumes par jour…). Cependant au fil du temps, des enquêtes montrent qu’ils attirent de moins en moins l’attention et que leur visibilité est inégale selon les supports. De plus, le mode de diffusion des messages engendre des problèmes de compréhension et ils sont parfois perçus comme une caution des produits présentés dans la publicité.

L’Inserm a été sollicité fin 2013 par Santé Publique France pour réaliser une expertise collective afin de de disposer d’un bilan des connaissances scientifiques et d’analyser l’impact de messages sanitaires diffusés par les médias de masse sur les cognitions, attitudes, intentions et comportements.

Cette expertise s’appuie sur une analyse critique de la littérature scientifique internationale faite par un groupe pluridisciplinaire de dix experts, chercheurs dans les domaines du marketing et des sciences de gestion, du droit, de la science politique, de l’économie, de la psychologie cognitive, de la psychologie sociale, des sciences de l’information et de la communication et des neurosciences.

Les textes de cette expertise sont regroupés en trois parties : une première partie donne des éléments de contexte au niveau législatif et sur l’impact du marketing sur les comportements alimentaires ; la deuxième partie fait le point sur différentes dimensions de l’évaluation des campagnes nutritionnelles basées sur les médias ; enfin, une troisième partie analyse les mécanismes psycho-cognitifs en jeu dans la réception et les traitements de messages sanitaires (« Mangez 5 fruits et légumes par jour », « Ne mangez pas trop gras, trop sucré, trop salé », etc.) par les individus.

Retrouvez l’intégralité du dossier de presse en téléchargement ci-contre.

Agir sur les comportements nutritionnels : Principales recommandations

Recommandations d’actions :

  • Mettre en place des lois restreignant les actions de marketing alimentaire auxquelles sont exposés les enfants. Le groupe d’experts recommande de réduire l’exposition des enfants au marketing pour des produits de mauvaise qualité nutritionnelle et d’en limiter les effets en interdisant par par exemple les publicités télévisées pour certains produits alimentaires durant les plages horaires visionnées par un nombre important d’enfants.
  • Reconsidérer  le dispositif des messages sanitaires sur les publicités en dissociant les messages et le contenu publicitaire. Plutôt qu’un bandeau, le groupe suggère par exemple de placer les messages sanitaires en plein écran en début et/ou en fin de publicité. Si le dispositif des messages sanitaires n’est pas modifié dans sa forme actuelle, le groupe d’experts propose alors d’étendre la mise en place du dispositif à d’autres supports de communication.
  • Concevoir des messages sanitaires qui pourront solliciter les différents niveaux d’attention :

    • Optimiser la voie des influences implicites (non-conscientes) et en faible attention, en améliorant la structure et en unifiant les messages pour permettre une bonne fluidité perceptive et conceptuelle.
    • Maximiser la voie des influences explicites (conscientes), le groupe d’experts recommande l’utilisation de messages nutritionnels simples, compréhensibles, spécifiques et faciles à mettre en application. Ces messages doivent également être personnalisés et émis par une source crédible (le gouvernement, les professionnels de santé ou la recherche académique).
  • Pré-tester de façon systématique toutes les stratégies de communication envisagées en contexte naturel et avant le lancement.

 

Recommandations de recherche :

  • Mieux connaître les populations cibles, ses motivations, ses attentes ;
  • Poursuivre les recherches sur les effets possibles des messages sanitaires inclus dans les publicités (dispositif actuel) comme les effets implicites ;
  • Mieux comprendre les mécanismes cognitifs et comportementaux en lien avec des messages nutritionnels ;
  • Mieux analyser les stratégies de « marketing intégré » des industries.

« Science Machina » une exposition du CEA et de l’Inserm

Explorer les confins du cerveau et de la matière, produire une énergie inépuisable, vaincre la douleur, modéliser l’inaccessible… autant de sujets chers à la science-fiction qui sont une réalité des laboratoires de recherche d’aujourd’hui !

L’exposition itinérante « Science Machina » célèbre la science et ses machines fantastiques à l’origine des découvertes et de progrès les plus extraordinaires de ces dernières années, et qui continuent d’ouvrir le champ des possibles pour le futur. Raconter la machine, c’est aussi se pencher sur le dialogue entre l’Homme et la machine, entre génie et technologie.

À travers la photographie et la bande-dessinée, partez à la découverte de ces machines de pointe, en un parcours composé de 12 dyptiques.

 

Quand la science rencontre le 9ème Art…

La bande dessinée est un élément clé de l’exposition, qui permet d’évoquer les machines scientifiques de manière décalée et de rapprocher ainsi les domaines des arts et de la science.

Le scénariste Felix Elvis a orchestré 12 dessinateurs qui se sont approprié un des outils de recherche utilisés ou développés en partie par les scientifiques de l’Inserm ou du CEA, pour en dresser le portrait via le médium BD. Comics, fantasy, manga… chaque planche a son univers propre, à l’image de la diversité des machines, de la micropompe au supercalculateur.

Et pour prolonger les échanges, commentez et posez vos questions sur les réseaux sociaux avec #sciencemachina.

L’intégralité du dossier de presse est disponible en téléchargement ci-contre.


Informations pratiques

SCIENCE MACHINA,

Une exposition proposée par l’Inserm et le CEA,

Du 29 octobre au 3 novembre 2016

Utopiales de Nantes / Festival international de science-fiction

Cité des Congrès de Nantes, 5 rue de Valmy, 44000 Nantes

Public : à partir de 7 ans

 

Les Utopiales de Nantes

Depuis sa création en 2000, Les Utopiales, Festival International de Science-Fiction de Nantes, se donne pour objectifs d’ouvrir au plus grand nombre et de faire découvrir de manière très qualitative le monde de la prospective, des technologies nouvelles et de l’imaginaire. Présidé par Roland Lehoucq, astrophysicien au CEA, le festival se déroulera du 29 octobre au 3 novembre 2016. Parallèlement au traitement de l’actualité annuelle de la science-fiction, le thème abordé cette année sera « Machines ».

Dans le cadre de ce partenariat, les chercheurs du CEA et de l’Inserm participent à des débats et des échanges auprès d’auteurs de SF sur les enjeux de ces machines et leurs applications possibles, la science n’ayant pas à faire à un univers fini mais bien au contraire à une matière qui ne cesse de se transformer, la science et la science-fiction ont un langage proche voire commun !

Machines pour voyager, Machines pour explorer, Machines pour servir, Machines pour transformer… autant de sujets que la fertile imagination des auteurs de SF a anticipé dans leurs œuvres et qui constituent les recherches des instituts de recherche d’aujourd’hui….

 

L’exposition Science Machina sera dévoilée aux Utopiales 2016 !

Dans le cadre de cet événement, douze machines seront présentées et des animations en présence de spécialistes des différents domaines de recherche abordés ponctueront le festival.

Le CEA exposera différents outils de recherche – ou leur reproduction – en complément de l’exposition. Les visiteurs découvriront ainsi :

  • la maquette en légo du détecteur Atlas, qui a permis de débusquer le Boson de Higgs, et permet d’enregistrer des centaines de millions de collisions de particules chaque seconde au LHC ;
  • la maquette du projet de scanner IRM le plus puissant du monde dédié à l’Homme: Iseult, son aimant produira un champ magnétique à 11,7 Tesla permettant d’étudier encore plus finement le fonctionnement du cerveau et de certaines pathologies qui le touchent ;
  • la maquette de la caméra MIRIM, qui équipera le télescope JWST, dont le lancement est prévu pour 2018, et qui sera le prochain outil des astrophysiciens pour étudier l’Univers peu de temps après sa formation, ainsi que les exoplanètes.

Les visiteurs pourront également tester un bras télé-manipulateur, utilisé pour manipuler des matériaux irradiés, et une caméra infrarouge avec écran.

 

Des ateliers de démonstration seront proposés au cours de la journée par des chercheurs de l’Inserm :

La réalité virtuelle (29 octobre)

Avec Pierre Jannin, directeur de recherche Inserm et Rojas Belladaramas, post-doctorant, Unité Inserm 1099 « Laboratoire traitement du signal et de l’image ».

Le public sera invité à tester un simulateur d’opération en salle virtuelle, outil dédié à la formation et au développement des compétences des neurochirurgiens. En chaussant des lunettes de vision en 3D relief, il sera en mesure de déplacer des appareils médicaux, effectuer une opération et interagir avec le personnel du bloc.

Heart Never Lies (30 et 31 octobre)

Avec Régis Logier, directeur du Centre d’investigation clinique – Innovation technologique Inserm CIC-IT 807, « Bio-capteurs et e-Santé : innovation et usages », CHRU de Lille.

« Peut-on mesurer nos émotions ? Tel est le pari de l’application Heart Never Lies (« le coeur ne ment jamais »), qui invite les participants à mesurer leur degré de bien-être ! Basé sur la variabilité de la fréquence cardiaque, le bioincubateur Eurasanté quantifie les émotions humaines.

Atelier bio-printing (1er et 2 novembre)

Avec Pierre Layrolle, directeur de recherche Inserm, Frédéric Blanchard, directeur de recherche Inserm et Luciano Vidal, doctorant Inserm, Unité Inserm 957 « Physiopathologie de la résorption osseuse et thérapie des tumeurs osseuses primitives ».

Nous sommes aujourd’hui capables de fabriquer un porte-clés ou une branche de lunette avec une imprimante 3D… pourquoi pas un os, un rein ou un cœur demain ? Les participants pourront découvrir l’impression d’une oreille ou d’un nez en plastique à différents moments de la journée.

 

Pendant 4 jours, des chercheurs de l’Inserm et du CEA interviendront lors de tables rondes sur des thématiques variées :

Samedi 29 octobre 2016

Rencontre avec Nathalie Besson (14h00, Hetzel)

Modération : Bénédicte Leclercq

Le voyage fantastique (15h00, Shayol)

Avec : François Rouiller, Mickael Tanter, Régis Logier et Pierre Jannin

Modération : Eric Picholle

Machines à produire de l’énergie (17h00, Hetzel)

Avec : Alain Bécoulet, Olivier Joubert, Nathalie Besson,

Modération : Bénédicte Leclercq

 

Dimanche 30 octobre 2016

Quand la machine singe le vivant (10h00, Shayol)

Avec : Pierre-Henry Gouyon, Paolo Bacigalupi, Sylvain Chambon, Alexei Grinbaum, Vincent Bontems

Modération : Raphaël Granier de Cassagnac

Merveilleuses machines de la réalité (13h00, Hetzel)

Avec : Pierre Jannin, Gérard Klein, Nathalie Besson, Alain Bécoulet,

Modération : Estelle Blanquet

La machine est un explorateur solitaire (14h00, Hetzel)

Avec : Mickael Tanter, Elisa Cliquet Moreno, Marc Sauvage et Laurent Gennefort

Modération : Raphaël Granier de Cassagnac

Les machines sont-elles nos esclaves ou… ? (17h00, Shayol)

Avec : Vincent Bontems, Gwen de Bonneval, Anna Starobinets, Lev Grossmann, Sylvie Denis

Modération : Simon Bréan

 

Lundi 31 octobre 2016

Vivant dans la machine et vie hors du corps (14h00, Hetzel)

Avec : Emmanuel Nhieu, François Rouiller, Philippe Baudouin, Christophe Bernard et René Ferrera

Modération : Estelle Blanquet

 

Mardi 1er novembre 2016

Rencontre avec Claire Wardak (11h00, Bar de Mme Spock)

Modération : Bénédicte Leclercq

Quand la machine (sur) protège l’homme (11h00, Shayol)

Avec : Martin Lessard, Paolo Bacigalupi, Laurence Boisset, Christophe Bernard et Olivier Grasset

Modération : Olivier Paquet

Vers une cyberpsychologie (12h00, Shayol)

Avec : Alexei Grinbaum, Milad Doueihi, Rachel Bocher, Olivier Getcher, Ann Leckie

Modération : Pascal J. Thomas

Les promesses des nano technologies (14h00, Bar de Mme Spock)

Avec : Philippe-Aubert Côté, Alexei Grinbaum

Modération : Eric Picholle

Quand la machine compense le handicap / Traduction LDS (14h00, Hetzel)

Avec : Olivier Getcher, Antoine Mottier, Claire Wardak et Olivier Fidalgo

Modération : Bénédicte Leclercq

 

Prochain lieu d’exposition

« Science Machina » sera aussi présentée les 24 et 25 novembre 2016 à la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image à Angoulême (France).

1 Français sur 2 souffre de douleurs articulaires

D’après les résultats d’un sondage IFOP « Les Français et les rhumatismes » mené pour l’Inserm et « Ensemble contre les Rhumatismes », 93% des Français déclarent avoir déjà souffert de douleurs articulaires[1] et un sur deux en souffre au moment de répondre à l’enquête. Ces douleurs articulaires impactent fortement leur quotidien. La qualité du sommeil et l’incapacité à pratiquer des activités de loisirs sont les deux aspects de la vie quotidienne les plus touchés devant la vie professionnelle et la vie familiale.

Les résultats de ce sondage soulignent la nécessité de continuer à mener des programmes de recherche ambitieux pour trouver de nouveaux traitements et d’inciter les Français à agir dès le plus jeune âge pour préserver leur capital articulaire.



Ce dossier de presse a été réalisé à l’occasion de la journée mondiale contre les rhumatismes et de l’initiative française « Ensemble contre les rhumatismes« (ECR) qui se dérouleront le 12 octobre prochain.

ECR rassemble les 3 plus importants acteurs de la recherche sur les maladies articulaires en France. Créé à l’initiative de L’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Inserm-AVIESAN), de la Fondation Arthritis et de la Société française de Rhumatologie (SFR), Ensemble Contre les Rhumatismes (ECR) a pour mission de promouvoir la recherche en Rhumatologie afin de prévenir, soulager et guérir les maladies des os et des articulations qui touchent un quart de la population européenne.

Les Rhumatismes

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© Inserm/Alexandra Pinci

Vrai / Faux

Les douleurs articulaires ne touchent qu’une petite partie de la population / FAUX
Plus de 1 Français sur 2 souffre en ce moment d’une douleur ostéoarticulaire
1/3 des 18-24 ans souffrent actuellement d’une douleur articulaire*
L’OMS a déclaré la lombalgie comme la première cause de handicap dans le monde. En France près de 4000 enfants souffrent de rhumatisme inflammatoire, près de 600 000 adultes des mêmes maladies et près de 10 millions de Français souffrent d’arthrose. Ces maladies ne sont donc clairement pas dues uniquement au vieillissement de la population.

Les maladies articulaires ne sont pas graves / FAUX
65% des Français ont eu un retentissement d’une douleur articulaire sur leur sommeil.
Pour les moins de 24 ans, plus de 1 jeune sur 2 considère que les rhumatismes ont eu un impact sur leur vie sociale et familiale*
Les maladies articulaires sont des maladies dont l’impact sur la qualité de vie, le sommeil, mais aussi la mortalité est majeur. C’est la cause principale d’arrêts maladie. Les rhumatismes sont la première cause de douleurs chroniques. Ils ont un impact direct sur la mobilité et un impact indirect en augmentant le risque de maladies cardiovasculaires et de cancers du fait de la sédentarité qu’elles entraînent.

Il faut bouger le moins possible / FAUX
Au contraire, l’activité physique, contrariée par les difficultés à bouger quand on est touché par ces maladies, est aussi un remède pour préserver son capital ostéoarticulaire.


Ce qu’il faut retenir de l’enquête Ifop
1) La fréquence des rhumatismes

La grande majorité des répondants (93%) ont déjà eu des douleurs articulaires au moins une fois dans leur vie. 8 Français sur 10 en ont même fait l’expérience plusieurs fois.
1 Français sur 2 et 1 jeune sur 3 (18-24 ans) souffre actuellement (au moment de répondre à l’enquête) de douleurs articulaires.
Ces chiffres, rapportés à ceux de la prévalence des rhumatismes en Europe (une personne sur 4 est atteinte de rhumatismes), auraient tendance à montrer que les Français sont des « malades » qui s’ignorent. La plupart d’entre eux n’associant pas leurs douleurs ostéo-articulaires avec la possibilité d’être soigné pour des rhumatismes.
Les chercheurs recommandent donc de parler progressivement aux Français de maladies ostéo-articulaires plutôt que de rhumatismes. D’une part, parce que le mot « maladies » permet de s’éloigner de la fatalité d’avoir ces douleurs. D’autre part, parce que le mot « ostéoarticulaire » décrit précisément la localisation des problèmes (os et articulations) au même titre qu’on parle de « maladies cardiovasculaires » ou de « maladies pulmonaires ».

Fréquence rhumatismes

2) Les idées reçues

8 Français sur 10 pensent à tort que les rhumatismes ne sont jamais mortels. Or, du fait de la sédentarité qu’elles entrainent, le taux de mortalité est augmenté de 50% lorsque la marche est limitée par ces maladies.

La majorité des répondants estiment que les rhumatismes sont des maladies de l’âge qui ne peuvent pas toucher les enfants. Or, 4000 enfants en France souffrent d’arthrite juvénile idiopathique.

généralité rhumatismes

3) L’impact sur le quotidien
Les douleurs articulaires impactent fortement le quotidien des personnes qui en souffrent. Les ¾ d’entre eux citent au moins un impact parmi les activités suivantes : sommeil, loisirs, vie professionnelle, vie familiale, vie de couple.
Ces maladies ont un retentissement tout particulier sur la qualité du sommeil et sur l’incapacité à pratiquer une activité dite de loisir.

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© Inserm/Alexandra Pinci

Et la recherche ?

La recherche médicale est un atout majeur pour lutter contre les rhumatismes première cause de handicap au monde et qui concerne plus d’un quart de la population européenne.

Il y a une vingtaine d’années par exemple, l’alliance entre la recherche fondamentale et clinique a permis la découverte de médicaments innovants. Il s’agit des biothérapies telles que les anti-TNF, qui ciblent spécifiquement des molécules de l’inflammation. Ces découvertes ont révolutionné le traitement des patients ayant une polyarthrite rhumatoïde ou une spondylarthrite.

Grâce à la recherche également, il y a quelques années un test sanguin diagnostic de la polyarthrite rhumatoïde, les anti-CCP, a permis aux médecins de faire un diagnostic précoce de polyarthrite rhumatoïde permettant ainsi de mettre en route un traitement avant que les articulations ne soient abîmées.

Beaucoup d’autres maladies ostéoarticulaires n’ont pas encore bénéficié des progrès de la recherche. Des chercheurs Inserm travaillent pour essayer de trouver de nouveaux traitements. En France, des projets très ambitieux sont soutenus par les 3 entités de l’initiative ECR.

PROJET MIRIAD

“MIcrobiome Research Initiative on spondyloArthritis and Dysbiosis”

Le projet MIRIAD, porté par le Pr Maxime Bréban, chercheur au sein de l’Unité Inserm 1173 « Infection et inflammation » et médecinà l’Hôpital Ambroise-Paré à Paris( AP-HP) en collaboration avec l’INRA et l’Institut de Biotechnologie des Flandres à Gent (Belgique) va étudier l’influence de l’environnement sur les rhumatismes inflammatoires et a pour objectifs précis : 1) D’identifier un marqueur diagnostic, 2) De tester une nouvelle stratégie thérapeutique consistant à ré-équilibrer le microbiote des patients atteints de Spondylarthrite par administration d’un microbiote sain.

PROJET ROAD

« Research on OsteoArthritis Diseases »

Le projet ROAD, porté par Jérôme Guicheux, directeur de recherche Inserm à Nantes (Unité Inserm 791 « Laboratoire d’ingénierie ostéo-articulaire et dentaire » : LIOAD), est le premier projet de recherche en réseau sur l’arthrose en France, rassemblant les 7 meilleurs laboratoires académiques et cliniques. Il a pour objectifs de : 1) Classifier les différents types d’arthrose chez la souris, 2) Classifier chez l’Homme, les arthroses du genou et créer la première Banque Nationale de tissus humains arthrosiques, 3) Identifier de nouveaux biomarqueurs et des cibles spécifiques, afin de développer des stratégies thérapeutiques innovantes.

Ces deux projets constituent des initiatives pionnières en Europe. Microbiote et vieillissement sont d’ailleurs deux des trois programmes de recherche transversaux prioritaires du plan stratégique 2016-2020 de l’Inserm.

COHORTES  ESPOIR ET DESIR

Deux cohortes multicentriques nationales sur la polyarthrite rhumatoïde (cohorte ESPOIR) et sur la spondylarthrite (cohorte DESIR) dans lesquelles participent plusieurs équipes Inserm ont déjà donné lieu à de nombreuses découvertes sur les facteurs de risque de ces maladies comme le tabac ou la mauvaise hygiène buccodentaire. Le Pr Xavier Mariette (Unité Inserm 1084) coordonne au sein de la cohorte ESPOIR un essai clinique visant à améliorer l’état buccodentaire des patients souffrant de polyarthrite rhumatoïde,

 

Peut-on prévenir les rhumatismes ?

En l’absence de traitement, il est possible d’agir sur les rhumatismes via leur prévention. Développer la notion de “Capital Articulaire”, capital à préserver coûte que coûte tout au long de la vie, et en particulier dès l’enfance est primordial. Ce capital est essentiel, car une fois touché par l’une ou l’autre de ces maladies, la perte de ce capital aboutit à la sédentarité dont on connaît les conséquences néfastes pour le cœur et les vaisseaux entre autres.

Ce “Capital ostéoarticulaire” repose sur:

  • Une activité physique spécifique à adapter aux patients atteints d’une maladie ostéoarticulaire.
  • Une alimentation équilibrée afin d’éviter, d’une part le surpoids, facteur de risque majeur de rhumatismes, et d’autre part la carence en calcium et vitamine D qui augmente le risque d’ostéoporose et donc de fracture.
  • Un arrêt du tabac et une bonne hygiène buccodentaire, 2 facteurs de risque démontrés d’initiation et d’aggravation de la polyarthrite rhumatoïde.
  • Des programmes de prévention des traumatismes, et ceci dès l’enfance/adolescence:
    • Rédiger des manuels scolaires (collèges et lycées, matière Sciences de la Vie et de la Terre) expliquant le fonctionnement physiologique de l’appareil locomoteur et les facteurs de risque environnementaux des principales maladies ostéoarticulaires, permettant d’intégrer la notion de “Capital ostéoarticulaire”
    • Former des entraîneurs sportifs aux conséquences ostéoarticulaires des traumatismes (échauffements ciblés, renforcement musculaire pour stabilisation des articulations, interruption sportive adaptée en cas de traumatisme, etc.)
  • Une prévention des chutes chez la personne âgée responsables de fracture chez des patients ayant une ostéoporose.

 

Une journée pour en parler

Chaque année a lieu le 12 octobre la journée mondiale sur les rhumatismes, le World Arthritis Day (WAD). C’est à l’occasion de cette journée que L’Inserm, Aviesan (Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé), la Fondation Arthritis et la Société française de Rhumatologie (SFR), 3 acteurs majeurs qui financent la recherche en rhumatologie en France, se sont associées pour organiser la journée
ECR 2016 (Ensemble Contre les Rhumatismes). Son but sera de communiquer d’une seule voix auprès du public et des responsables politiques sur l’importance de soutenir la recherche sur les rhumatismes.

Elle se déroulera au pavillon Daunou de 10h à 16h sous forme de tables rondes diffusées en direct sur le web et dans 2 villes en France.

Chaque thème de la journée « ECR 2016 » sera successivement présenté par un chercheur et par un représentant d’une association de patients et suivi d’un débat permettant un échange de points de vue entre chercheurs, médecins et patients.

Le programme a été préparé en très étroite collaboration avec les associations de patients qui ont été invitées à une première réunion à l’Inserm pour proposer et sélectionner des thèmes et des intervenants qui répondent à leurs besoins.

Pour plus d’informations : www.ensemblecontrelesrhumatismes.org

Email : gro.semsitamuhrselertnocelbmesne@ofni

gro.semsitamuhrselertnocelbmesne@muabnerebsicnarf

 

[1] Les Rhumatismes regroupent l’ensemble des maladies de l’appareil locomoteur (os / cartilages / muscles / tendons / ligaments)

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