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Déficiences intellectuelles, une expertise collective de l’Inserm

La déficience intellectuelle (DI) fait référence, selon l’Organisation mondiale de la santé et d’autres autorités reconnues, à un déficit de l’intelligence (capacité sensiblement réduite de comprendre une information nouvelle ou complexe et d’apprendre et d’appliquer de nouvelles compétences) ainsi qu’à des limitations du fonctionnement adaptatif[1], ces limitations apparaissant au cours de la période développementale. La déficience intellectuelle est fréquente puisqu’environ 1 à 2 % de la population seraient concernés. L’explosion récente des connaissances, tant sur les causes des DI que sur les processus cognitifs et adaptatifs sous-jacents, permet de mieux appréhender le fonctionnement des personnes avec une déficience intellectuelle et d’envisager des stratégies adaptées d’apprentissages, d’accompagnements et de soutiens.

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(c) Fotolia

Dans ce contexte, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a confié à l’Inserm la réalisation d’une expertise collective afin de disposer des connaissances scientifiques récentes issues des recherches internationales et pluridisciplinaires sur la déficience intellectuelle. La démarche d’expertise collective a permis de dresser un bilan des données scientifiques dans les domaines suivants : définition et épidémiologie ; évaluation des compétences et des déficiences de la personne ; accompagnement et soutien durant les principales étapes de la vie.

Un groupe multidisciplinaire de 12 experts, chercheurs et cliniciens, a été constitué en tenant compte de la complémentarité des disciplines scientifiques représentées. L’Inserm a constitué un fonds documentaire de 2 500 références qui ont été soumises à l’analyse critique du groupe d’experts.

Parmi les différents constats de l’expertise, l’évaluation des compétences et des limitations de la personne avec une DI ainsi que des besoins de soutien reste souvent incomplète. Aussi, parmi les recommandations issues de ce travail, les auteurs préconisent de mener une réflexion approfondie quant à l’opportunité de développer des centres de ressources en déficience intellectuelle. Ces structures rassembleraient les compétences nécessaires, sous la forme d’équipes pluridisciplinaires (médecins généralistes, pédiatres, gériatres, spécialistes de la douleur, neurologues, psychiatres, psychologues, infirmiers, éducateurs spécialisés, orthophonistes, assistants sociaux…) pour assurer une évaluation multidimensionnelle des capacités et des limitations d’activité de la personne, d’évaluer ses besoins de soutien afin d’organiser l’accompagnement requis et d’apporter une aide concrète et coordonnée qui pourrait s’inscrire tout au long du parcours de vie de la personne avec une déficience intellectuelle et de sa famille.

Retrouvez l’intégralité du dossier de presse en téléchargement ci-contre.

Déficiences intellectuelles : Principales recommandations

Recommandations d’actions :

  • Inscrire toute action dans le cadre des définitions internationales de la déficience intellectuelle, que ce soit dans les politiques publiques, les pratiques professionnelles et la recherche.
  • Mieux repérer précocement un trouble neurodéveloppemental en favorisant le repérage précoce chez les enfants « tout-venant »et en renforçant le dépistage systématique d’un trouble neurodéveloppemental lors des examens obligatoires.
  • Développer une évaluation multidimensionnelle et individualisée pour un meilleur diagnostic et un accompagnement adapté en améliorant l’évaluation des capacités intellectuelles, en complétant celle-ci par une évaluation des comportements adaptatifs, en évaluant les compétences socio-émotionnelles et les capacités cognitives et langagières. Enfin, en permettant l’accès au diagnostic étiologique génétique.
  • Développer les compétences de la personne présentant une DI tout au long de sa vie en favorisant le développement de la communication et du langage, l’acquisition de la numératie et de la littéracie, et le développement de l’autodétermination.
  • Accompagner le parcours de vie de la personne de la petite enfance à l’âge adulte en faisant la promotion du droit à l’intervention et à l’éducation précoces ainsi qu’à l’accès aux services communs de la petite enfance accessibles à tous. À l’âge adulte, en accompagnant l’accès à l’emploi et à la vie sociale et en favorisant les transitions dans les parcours de vie.
  • Améliorer l’accès aux soins et le diagnostic des pathologies somatiques grâce au dépistage et au suivi régulier des pathologies souvent associées à la DI, en développant le suivi médical de proximité et en améliorant les conditions d’accueil et de soins dans les hôpitaux et cliniques.
  • Créer des « Centres ressources déficience intellectuelle ».Ces structures rassembleraient des équipes pluridisciplinaires pour apporter une aide concrète et coordonnée qui pourrait s’inscrire tout au long du parcours de vie de la personne avec une déficience intellectuelle et de sa famille.
  • Apporter aux familles un soutien gradué, adapté et évolutif en valorisant leurs propres compétences en accompagnant l’annonce du diagnostic, en apportant un soutien adapté et en envisageant la distanciation psychologique entre la personne avec DI devenue adulte et sa famille.
  • Développer et encourager la formation sur la déficience intellectuelle pour tous les professionnels dans une perspective inclusive.

 

Recommandations de recherche :

  • Valider et développer des outils de diagnostic et d’évaluation de la personne
  • Mieux connaître les déficiences intellectuelles et les trajectoires des personnes
  • Mieux comprendre le développement des compétences de la personne avec DI
  • Mieux appréhender les différents aspects d’un accompagnement adapté

Manaslu 2015 : Une expédition scientifique à plus de 5000m d’altitude

Pendant 5 semaines, 5 équipes de recherche internationales vont conduire une expédition scientifique au Népal, au cœur de l’Himalaya, proche du sommet du Manaslu (8156 m). La partie française de l’expédition, coordonnée par un chercheur de l’Inserm (Unité 1042 « Hypoxie et physiopathologies cardiovasculaire et respiratoire » Inserm/Université Joseph Fourier), va y mener un projet original sur l’impact cérébral et cardiaque de l’altitude et sur les altérations du sommeil qu’elle induit. Les chercheurs français étudieront également l’intérêt d’un masque spécifique d’amélioration de l’oxygénation pour combattre les symptômes du mal aigu des montagnes. Pour cela, 50 volontaires les accompagneront dans ce trek à plus de 5000 mètres d’altitude. Les internautes pourront suivre cette expédition en temps réel sur les réseaux sociaux grâce au hashtag #scienceausommet

Echocardiographie réalisée au sommet du Mont Blanc lors d'une précédente expédition © Samuel Verges

Echocardiographie réalisée au sommet du Mont Blanc lors d’une précédente expédition © Samuel Verges

Le développement des loisirs, la multiplication des séjours en moyenne et haute altitude pour des personnes parfois peu expérimentées pose la question de l’intolérance à l’altitude. Ces difficultés d’adaptations résultent de mécanismes physiopathologiques associés à la diminution de la disponibilité en oxygène au fur et à mesure que l’on s’élève en altitude.

Ces pathologies, invalidantes au point d’imposer l’interruption du séjour en altitude, parfois graves voire fatales sont le mal aigu des montagnes (associations de symptômes tels le mal de tête, fatigue, nausées, etc…), l’œdème pulmonaire de haute altitude (généralement associé à une toux, un essoufflement et lié à une accumulation de liquide dans les poumons pouvant s’avérer grave) et l’œdème cérébral de haute altitude (fuites de liquide dans le cerveau constituant un phénomène particulièrement grave, avec des troubles importants du comportement). Les formes aiguës surviennent chez des personnes peu acclimatées à l’altitude, rapidement après l’exposition (6 h à 4 jours). Les formes foudroyantes surviennent même après acclimatation, à des altitudes supérieures à 5000 mètres. De manière générale, une personne sur deux est touchée par le mal aigu des montagnes au-delà de 4000 mètres, trois sur quatre au-dessus de 5000 mètres.

Ces conditions peuvent, dans une certaine mesure, être évitées par le respect de règles simples de prévention. Mais, il semble aussi que certaines personnes soient plus susceptibles que d’autres de développer ces symptômes en altitude. Les facteurs prédictifs de la tolérance à l’altitude, les mécanismes sous-jacents aux difficultés d’adaptation, leur prise en charge et les stratégies optimales d’acclimatation restent particulièrement méconnus.

Ce sont les thèmes qui seront étudiés par l’équipe de recherche française, sous la coordination de Samuel Vergès, chargé de recherche Inserm au sein de l’Unité 1042 « Hypoxie et physiopathologies cardiovasculaire et respiratoire ». L’équipe est composée de 6 scientifiques et médecins expérimentés ayant tous une expérience de la haute montagne et d’expéditions scientifiques de ce type.

Un premier projet de recherche sur le cœur et le cerveau

Autour de 3 grands axes, ce projet vise, en faisant appel à des techniques innovantes et transportables (utilisables en haute altitude) à préciser les effets d’un séjour en haute altitude sur le cerveau et le cœur et d’évaluer l’effet d’un masque de ventilation par pression expiratoire positive sur ces réponses cérébrales et cardiaques.

  • Manque d’oxygène et cerveau

Des études in vitro et in vivo montrent que le manque d’oxygène altère la fonction neuronale et diminuerait les performances cognitives humaines. Une série d’études en laboratoire et en haute altitude (Observatoire VALLOT, massif du Mont-Blanc) ont mis en évidence des perturbations cérébrales significatives induites par l’hypoxie, à la fois dans les premières heures d’exposition et après plusieurs jours. L’anatomie du cerveau, la perfusion et l’oxygénation cérébrales ainsi que la fonction des neurones moteurs en particulier sont altérées par l’hypoxie, ce qui conduit à reconsidérer les mécanismes d’adaptation à l’altitude en incluant le versant cérébral comme un facteur jouant probablement un rôle majeur.

  • Altitude et fonctionnement du cœur

L’exposition à l’altitude est associée à des modifications majeures au niveau cardiaque. Des études antérieures ont démontré que l’hypoxie aigüe entraîne une altération des propriétés de relaxation du myocarde. Une diminution des propriétés contractiles des cardiomyocytes pourrait être responsable de ce phénomène sans que des preuves objectives n’aient été encore obtenues. De nombreuses études ont également montré que l’exposition à l’altitude engendre des altérations au niveau du ventricule droit qui pourrait être impliqué de manière importante dans le relâchement du ventricule gauche, sans que les phénomènes mécaniques en cause ne soient totalement établis.

Depuis peu, à partir d’une nouvelle technologie d’échographie par poursuite des signatures acoustiques (Speckle Tracking Imaging), la mesure des vitesses et des déformations myocardiques peut être réalisée de manière globale, permettant une investigation de la contractilité et des capacités de relaxation myocardiques, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives de compréhension des effets de l’hypoxie d’altitude sur le cœur.

  • Développement d’un masque minimisant les effets délétères de l’altitude

L’ajout d’une pression expiratoire positive, dite PEP, au niveau de la bouche d’un personne en condition d’altitude permet une augmentation artificielle des pressions intra-pulmonaires et a été suggéré par certaines équipes de recherche comme méthode susceptible de prévenir ou de minimiser les effets délétères de l’altitude. Les chercheurs du laboratoire Hypoxie-Physiopathologie (HP2) de Grenoble ont récemment démontré l’intérêt de cette méthode pour augmenter l’oxygénation sanguine et musculaire[1].

Leurs résultats suggèrent qu’un équipement de type masque portatif induisant une augmentation de la pression expiratoire pourrait constituer une méthode non-pharmacologique originale et efficace pour améliorer l’acclimatation à l’altitude et les symptômes associés au mal aigu des montagnes. Une étude de grande ampleur et de terrain en haute montagne est nécessaire pour déterminer si la PEP est susceptible de devenir une méthode à diffuser largement. La commercialisation d’un système de masque PEP pourra être envisagée, avec l’avantage d’être une méthode portable, peu encombrante, non-médicamenteuse et utilisable par le plus grand nombre.

Un second projet sur l’altération du sommeil en altitude

L’altitude est connue pour profondément perturber le sommeil et provoquer des apnées du sommeil, dites d’origine centrale. Dès 2500 mètres d’altitude, on observe une diminution moyenne ainsi que des oscillations cycliques de l’oxygénation du sang. Le développement de ces troubles s’accompagne également d’une diminution de l’efficacité du sommeil, d’une augmentation du temps d’endormissement, d’une diminution de la durée des phases de sommeil profond ainsi que d’une augmentation importante des éveils intrasommeil. La quantification de ces troubles a longtemps été limitée à l’analyse des oscillations de la saturation artérielle en O2.

Une question n’a cependant à l’heure actuelle pas encore trouvé de réponse claire : les apnées centrales sont-elles un marqueur d’une mauvaise ou d’une bonne adaptation de l’organisme à l’altitude ? Cette question est importante car de grandes différences existent d’un sujet à l’autre en termes d’intensité des perturbations du sommeil induites par une exposition à l’altitude. Il a été récemment montré dans le laboratoire dirigé par Samuel Vergès, que des individus qui présentent des symptômes sévères d’intolérance à la haute altitude ont (au cours d’une nuit en altitude simulée en laboratoire) moins d’apnée du sommeil que des individus comparables mais qui eux tolèrent bien la haute altitude. Il reste cependant à l’établir sur le terrain en haute altitude.

L’étude de cette question devrait améliorer la compréhension des mécanismes d’adaptation à l’altitude et influencer les conseils et évaluations proposés aux personnes se rendant en altitude.

L’étude portée par le groupe français au sein de l’expédition scientifique a donc pour objectif :

– D’évaluer les effets du masque à résistance expiratoire (ventilation avec PEP) sur l’oxygénation artérielle et tissulaire, sur les fuites extravasculaires pulmonaires ainsi que sur les symptômes de mal des montagnes lors d’un séjour en haute altitude pour un grand échantillon de volontaires.

– D’étudier sur la base de nouvelles technologies (spectroscopie proche infrarouge, échographie par Speckle Tracking) les altérations cérébrales et cardiaques induites par le manque d’oxygène (hypoxie) de haute altitude et évaluer leur réversibilité grâce au port du masque.

– De comparer les modifications du sommeil induites par l’altitude chez des trekkeurs s’adaptant bien à l’altitude comparé à ceux présentant des symptômes de mal aigu des montagnes.

L’étude par les chercheurs des effets du manque d’oxygène sur des organismes sains en haute altitude doit permettre de mieux comprendre les conséquences du manque d’oxygène chez certains patients en plaine, par exemple atteints de pathologies respiratoires. La haute altitude est ainsi un véritable laboratoire à ciel ouvert constituant un modèle original d’étude des capacités et des limites d’adaptation de l’organisme humain.

Une première phase d’étude en plaine

Tous les participants au trek et à l’ascension du Manaslu se sont prêtés, du 16 au 23 février dernier, à une batterie d’évaluations scientifiques et médicales au niveau de la mer au Pays de Galles (Bangor University). L’ensemble des mesures qui seront effectuées en haute altitude ont été réalisées au niveau de la mer, permettant d’obtenir ainsi les valeurs de référence pour chaque sujet auxquelles seront comparées les mesures de haute altitude.

test doppler plaine

Mesures en plaine © Samuel Verges

La phase de test en plaine a été l’occasion d’aborder les questions techniques et logistiques à résoudre pour que les tests puissent être répétés dans les meilleures conditions possibles en haute altitude lorsque que la pression atmosphérique sera réduite (ce qui impacte fortement le matériel), que le froid sera présent (jusqu’à -20°C) et que les organismes tant des chercheurs que des sujets volontaires seront durement touchés par l’altitude.

Un laboratoire scientifique installé à 5000 mètres

5 groupes de 10 personnes partiront de Katmandou avec 1 jour d’intervalle chacun pour étaler les mesures. 10 jours sont nécessaires pour arriver à destination. Les 5 équipes de recherche internationales installeront alors leur laboratoire et toute la logistique nécessaire (tentes, production d’énergie solaire et par éolienne, etc…) légèrement au-dessus du camp de base du Manaslu à un peu plus de 5000 mètres d’altitude. L’essentiel des mesures de haute altitude seront réalisées sur l’ensemble des participants au trek qui arriveront jour après jour. D’autres mesures seront réalisées au cours du trek et lors de l’ascension du Larkya Peak (6249 m). L’ensemble de l’expédition durera 5 semaines entre le 21 mars et le 26 avril.

Comme en plaine, les évaluations consisteront à mesurer le liquide extravasculaire pulmonaire par échographie pleuropulmonaire, la perfusion cérébrale par Doppler transcranien, l’oxygénation cérébrale par spectroscopie proche infrarouge et la fonction cardiaque par échographie en Speckle Tracking avant et pendant une ventilation sous pression expiratoire positive. Les symptômes seront évalués par questionnaire. Enfin, le sommeil sera évalué au cours des nuits passées sous tente au camp de base du Manaslu par la pose de différents capteurs permettant d’identifier la qualité du sommeil, la survenue d’apnée du sommeil associée à une chute de l’oxygénation du sang telles que fréquemment observées en haute altitude. Ces mesures sont identiques aux tests dits de polygraphie réalisés au sein des laboratoires du sommeil des hôpitaux afin de diagnostiquer chez les patients un syndrome d’apnée du sommeil.

Après 4 jours d’acclimatation à 5000 mètres, cette batterie de test sera reconduite afin de voir les adaptations du corps humain à cette altitude élevée. L’ensemble des participants restera 10 jours au camp de base puis l’équipe bouclera le tour du Manaslu avec une descente en 3 jours jusqu’à Besisahar.

Les participants à ce trek présentent un profil classique de population prenant part à des treks en haute altitude, âgés de 22 à 65 ans, de condition physique et d’expérience de l’altitude relativement variées. Ils se sont portés volontaires pour réaliser un trek de plusieurs semaines autour du Manaslu et pour, dans ce cadre, se prêter à des expériences scientifiques en particulier pendant 5 jours consécutifs au camp situé au point culminant du tour du Manaslu, où seront installés les laboratoires.

Les 4 autres projets scientifiques internationaux menés dans le cadre du projet MEDEX

MEDEX (www.medex.org.uk) a été créé en 1992 en Grande Bretagne pour encourager des projets d’expéditions scientifiques et médicales. Plusieurs expéditions scientifiques de grandes envergures ont été depuis organisées tous les 4-5 ans, en 1994 sur l’Everest, en 1998 au Kanchejunga, en 2003 en Hongu et en 2008 dans la Hidden Valley. Ces expéditions ont conduit à des avancées scientifiques et médicales majeures en lien avec l’altitude, avec à la clef des publications scientifiques ainsi que des communications grands publics et des actions de formation des professionnels et pratiquants de la haute montagne.

Lors de cette expédition, 4 autres projets scientifiques seront conduits en parallèle des 2 menés par l’équipe de Samuel Verges.

– Comment faire face au stress pour les travailleurs en altitude –équipe de Sue Paddon (Advanced Personnel Management, Australia-UK))
– Influence de la préparation physique et mentale sur le succès d’une expédition en haute altitude – équipe de Sam Olivier et Jamie Macdonald (Bangor University)
– Perturbation de la fréquence cardiaque comme indicateur du mal aigu des montagnes ? Jamie Macdonald (Bangor University)
– Impact des treks sur la santé des personnels Népalais employés pour accompagner les expéditions – Mary Morrell (Impérial College of London)

 

Le dispositif d’accompagnement sur les médias sociaux

Pour faire vivre une expédition scientifique aux internautes comme s’ils y étaient alors même que l’endroit (le sommet du Manaslu) est particulièrement inaccessible, l’Inserm se mobilise pour suivre l’expédition. Des contenus enrichis (photos ou vidéos) seront postés chaque jour sur @Insermlive et sur la page Facebook de l’Institut : du quotidien (avion, arrivée sur place, installation) au détail des expérimentations scientifiques (quels dispositifs, quels buts, quelles mesures, etc…)

Un hashtag #scienceausommet
Un relais sur @inserm_en pour la communauté internationale est également prévu.

Sur la salle de presse de l’Inserm, un module de discussion instantanée sera ouvert pour poser des questions aux chercheurs avant leur départ et après leur retour.

[1] Ces résultats ont été publiés dans PlosOne

 

Activité physique et prévention des chutes chez les personnes âgées – Une expertise collective de l’Inserm

Avec l’avancée en âge, chaque personne peut être atteinte par des déficiences sensorielles, motrices et cognitives, ainsi que par des pathologies chroniques. Au-delà de 85 ans, plus des trois quarts des Français déclarent des limitations dans leurs activités. Les chutes, événements fréquents chez les personnes âgées, participent aux risques de perte d’autonomie et d’entrée en institution, et s’avèrent très coûteuses en termes de qualité de vie et de prise en charge. Dans un contexte de vieillissement de la population, leur prévention et la préservation de l’indépendance dans les activités quotidiennes représentent donc des enjeux majeurs de santé publique.

L’Inserm a été sollicité par le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports pour réaliser une expertise collective permettant de disposer d’un bilan des connaissances scientifiques sur la contribution de la pratique d’une activité physique à la prévention des chutes chez les personnes âgées.

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Les auteurs de l’expertise collective soulignent ainsi l’effet bénéfique d’une activité physique régulière, centrée sur le travail de l’équilibre, pour tous les sujets âgés à risque plus ou moins élevé de chute. Pour être adaptés à l’état de santé et au mode de vie des personnes, les programmes d’exercices physiques doivent être davantage encadrés et mieux associer les acteurs du monde médical, associatif et sportif.

Extraits :

Chutes accidentelles des personnes âgées : état des lieux et conséquences

La population des personnes âgées constitue un groupe très hétérogène d’un point de vue médical et fonctionnel. Après 65 ans, 15 à 20 % des personnes vivant à domicile seraient fragiles. Or la fragilité est associée à un risque majoré de mortalité et d’événements péjoratifs comme les chutes.

En France, en 2009, les chutes représentent 90% des accidents de la vie courante recensés dans les services d’urgence chez les plus de 75 ans. 20 à 33 % des personnes âgées de 65 ans ou plus rapportent avoir chuté au cours de l’année écoulée. Parmi les chuteurs, la moitié aurait fait au moins deux chutes dans l’année. Les chutes représentent par ailleurs la principale cause de traumatismes physiques chez les plus de 70 ans et sont aussi souvent responsables d’une perte de confiance en soi, pouvant conduire à une restriction des activités.

Les exercices physiques contribuent à réduire le taux de chutes et le risque de chuter

Les programmes d’exercices de prévention des chutes les plus efficaces sont ceux centrés sur le travail de l’équilibre. Globalement, ceux-ci entraînent une réduction significative du risque de chute de l’ordre de 25 %. Le renforcement musculaire et l’amélioration de l’endurance participent également au maintien des capacités fonctionnelles et ont des effets complémentaires au travail de l’équilibre sur la prévention de ces dernières. Pour les personnes âgées vivant à domicile, les programmes reposant sur plusieurs types d’exercices d’activité physique sont efficaces à la fois sur la réduction du taux de chutes, du risque de chuter et du risque de fractures. De façon générale, les bénéfices de l’exercice sont rapidement perdus après l’arrêt du programme, ce qui implique idéalement la poursuite de l’entraînement physique aussi longtemps que possible pour le maintien des effets sur le long terme.

L’activité physique : une solution au maintien de l’autonomie de la personne âgée

Les personnes âgées qui consacrent du temps à l’activité physique ont une meilleure perception de leur santé en général, de leur vitalité et de leur condition mentale et physique.


Recommandations

Les recommandations d’actions des auteurs de cette expertise collective comportent trois objectifs principaux :

  • Développer des programmes d’exercices physiques adaptés à l’état de santé du sujet âgé ;
  • Favoriser la mise en œuvre de programmes d’activités physiques ;
  • Informer sur les chutes, identifier et prendre en charge les personnes âgées à risque.


Les auteurs de cette expertise ont également formulé plusieurs recommandations de recherche :

  • Réaliser des études permettant de préciser les programmes optimums en termes d’efficacité et d’acceptabilité, notamment pour les personnes les plus âgées, les moins mobiles et les plus fragiles ;
  • Réaliser des évaluations coût-efficacité des programmes de prévention ;
  • Analyser l’incidence des chutes et leurs conséquences en France ;
  • Élucider les mécanismes fondamentaux qui sous-tendent les facteurs de risque de chute ;  
  • Appréhender les aspects psychologiques et comportementaux du risque de chute liés à la peur de tomber ;
  • Mieux définir les facilitateurs et les freins à l’engagement dans la pratique d’activité physique chez les personnes âgées.

Lire l’ensemble du dossier de presse

Lire la synthèse du rapport  » Activité physique et prévention des chutes chez les personnes âgées »

Ebola : le point sur la recherche en France

L’épidémie d’Ebola continue de s’étendre, en Afrique de l’Ouest en particulier. Selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), daté du 17 octobre, 9.216 cas d’Ebola ont été recensés et 4.555 personnes en sont décédées.

Laboratoire P4 Jean Mérieux/Inserm.

F. Guenet/Inserm

Dans le contexte actuel de l’épidémie d’Ebola, la nécessité d’une mobilisation rapide de la recherche française pour y répondre s’est vite imposée.

A ce titre, la Ministre de la Santé et la Secrétaire d’Etat à l’Enseignement Supérieur et à la Recherche ont confié à Aviesan en août 2014, la préparation et l’organisation de la réponse de la recherche française aux émergences infectieuses.

Fort de son expérience passée et reconnue dans la coordination de la recherche lors de l’épidémie H1N1 en 2009 et plus récemment en réponse à l’émergence du virus Chikungunya dans les Caraïbes en 2013, l’Institut de microbiologie et maladie infectieuse d’Aviesan a bénéficié du savoir-faire du réseau REACTing (voir p. 11 dossier de presse)pour monter le programme de recherche Ebola.

Ce réseau s’appuie sur les équipes, centres de recherche et plateformes existantes en France et dans les pays du Sud.

Dans leur mise en place, ces projets sont coordonnés principalement par des équipes de l’Inserm, du CEA, de l’Institut Pasteur, de l’IRD, des Universités, sans oublier un partenariat étroit avec des équipes en Guinée, Côte d’Ivoire et Sénégal. Le réseau des sites ANRS ainsi que des chercheurs de l’Afrique de l’Ouest ont aussi été mobilisés.

infographie-aviesan-ebola copyright Inserm

© Inserm

Lire l’intégralité du dossier de presse sur le site d’Aviesan

L’étude INSIGHT : mieux comprendre les facteurs de déclenchement de la maladie d’Alzheimer

Plus de 35 millions de personnes dans le monde souffrent de démence, incluant la maladie d’Alzheimer [1]. En France, en 2014, environ 900.000 personnes sont atteintes et la prévalence de la maladie va considérablement augmenter : on estime que 1,3 million de personnes seront atteintes en 2020 [2] et plus de 2 millions en 2040 [3], avec plus de 225.000 nouveaux cas déclarés chaque année.

La Journée Mondiale de la Maladie d’Alzheimer qui aura lieu le dimanche 21 septembre, est l’occasion de faire un état des lieux de l’avancée de la recherche et de présenter INSIGHT, une étude inédite lancée par des équipes de l’Inserm et de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) au sein de l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer (IM2A) et de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière (ICM), rassemblées au sein de l’IHU-A-ICM, et en collaboration avec Pfizer, visant à observer et comprendre l’histoire naturelle de la maladie d’Alzheimer. INSIGHT est une étude ancillaire de la cohorte nationale MEMENTO.Etude de la maladie d'Alzheimer

Etude de la maladie d’Alzheimer – Atrophie de l’hémisphère cérébral consécutif à la maladie d’Alzheimer.

INSIGHT est une étude innovante sur la maladie d’Alzheimer, et l’une des 1ères au monde à suivre des sujets sains à risque. Porteuse de grandes ambitions en matière de compréhension de la maladie, ses résultats pourraient apporter la promesse de traitements futurs pour les malades.

« Les recherches sur la maladie d’Alzheimer, et plus globalement sur les pathologies liées aux troubles de la mémoire, sont en pleine évolution. Nous sommes aujourd’hui en mesure de reconnaître la maladie très tôt grâce à une signature biologique identifiable chez tous les patients. Ce que nous cherchons désormais à explorer, ce sont les conditions endogènes et exogènes de l’évolution de la maladie : pourquoi et comment elle se déclare chez certains sujets mais pas chez d’autres » précise le Professeur Bruno Dubois, Directeur de l’IM2A (l’Institut de la Mémoire et de la Maladie d’Alzheimer, hébergé à la Pitié Salpêtrière à Paris) et Directeur de l’Equipe Inserm « Cognition, Neuro-imagerie et Maladies du Cerveau » à l’ICM, qui dirige cette étude en tant qu’investigateur principal.

Méthode d’investigation
Le projet est de suivre 400 sujets sains volontaires âgés de 70 ans à 85 ans, dont les bilans de mémoire sont normaux. Il ne s’agit ni de dépister ni de traiter la maladie mais d’observer l’évolution de ces sujets sains. Ont-ils des lésions dans le cerveau ? Vont-ils déclarer la maladie ? Quelles sont les délais d’apparition des premiers symptômes ? Ces sujets bénéficient tout au long de l’étude du suivi et de l’accompagnement d’une des meilleures équipes mondiales sur les pathologies liées à la mémoire. A ce jour, près de 220 sujets ont déjà été recrutés.
Cette étude monocentrique, qui se déroulera dans sa totalité à l’IM2A (l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer hébergé à la Pitié-Salpêtrière, AP-HP), constitue en soi un défi sans précédent.

INSIGHT est une étude ambitieuse rendue possible grâce à un dispositif innovant inédit dans la recherche médicale : un socle pluri-partenarial associant notamment les investissements d’avenir à travers l’IHU-A-ICM et Pfizer aux côtés des équipes de l’IM2A et de l’ICM autour d’un objectif commun, mieux comprendre la maladie d’Alzheimer

[1] Voir à ce sujet le rapport 2013 d’Alzheimer’s Disease International
[2] Chiffres issus du dossier d’information Inserm dédié à la maladie d’Alzheimer
[3] Plus d’informations sur le site de France Alzheimer & maladie apparentées

Impression 3D Laser du vivant : une approche innovante à Bordeaux

Ces dernières années, l’impression 3D a connu un véritable essor dans le domaine de la santé. Les dispositifs médicaux ou prothèses sur mesure ont été les premières applications de cette nouvelle technologie. En 2011, une mâchoire en titane, imprimée en 3D, était implantée pour la première fois. Deux ans plus tard, une femme de 22 ans aux Pays-Bas recevait une prothèse de crâne (la plus grande jamais posée). Mais qu’en est-il de la bio-impression, c’est-à-dire l’impression de matière vivante cellulaire dans l’optique de réaliser des tissus biologiques fonctionnels ? Comment bio-imprimer des structures cellulaires 3D avec un laser? Que peut-on imprimer actuellement avec les techniques existantes?


Outre les dispositifs médicaux réalisés à partir de matières inertes, les chercheurs se sont lancés un défi d’une toute autre nature : La Bio-impression consiste à imprimer de la matière vivante cellulaire !

Contrairement à l’impression classique 3D, la Bio-impression implique de considérer une 4ème dimension : la dimension temporelle au cours de laquelle les cellules imprimées vont s’organiser, migrer et se différencier de manière autonome pour former des tissus fonctionnels.
ModuLAB 1

Bio-imprimante 3D © Inserm/ Guillemot, Fabien – Alphanov / Lescieux, Ludovic


La Bio-impression Laser à Bordeaux, une approche innovante

Le laboratoire « Bio-ingénierie tissulaire » (Unité Inserm 1026)
développe des technologies Laser et de micro-fabrication en vue d’imprimer des tissus in vitro et in vivo. Cette unité mixte de recherche de l’Inserm et de l’Université de Bordeaux est l’une des seules au monde à utiliser ce procédé. Les travaux de Fabien Guillemot, chargé de recherche Inserm, et de son équipe ont donc fait figure de pionniers en Europe : dès 2005, ils ont permis de développer la Bio-impression assistée par Laser. L’objectif de l’équipe de Fabien Guillemot n’est pas seulement de positionner les cellules en 3D mais de définir et modéliser la dynamique d’auto organisation des cellules imprimées.

Quels résultats avec la Bio-impression assistée par Laser?

En laboratoire, la Bio-impression utilise les principes de l’impression 3D, et procède ainsi à l’assemblage couche par couche des constituants des tissus biologiques (tels que les cellules et la matrice extracellulaire) selon des organisations prédéfinies par conception numérique.

Cette technologie permet la fabrication de tissus complexes grâce à l’impression d’encres biologiques dont les concentrations cellulaires sont voisines des conditions physiologiques et ce, avec une très haute résolution et une vitesse d’exécution élevée (> 10 000 gouttelettes par seconde).

« Dans le domaine de la Bio-impression, la technologie Laser est celle qui offre la résolution la plus élevée » explique Fabien Guillemot, chargé de recherche Inserm.


Depuis 2005, l’équipe de recherche est parvenue à imprimer différentes structures et types cellulaires : des multicouches de kératinocytes (cellules de la couche superficielle de la peau et des phanères : ongles, poils, cheveux) et de collagène.

Impression de peau

Impression de peau réalisée en juin 2014
© Ludovic Lescieux Alphanov / Fabien Guillemot Inserm.


Les cellules imprimées sont viables (97% de viabilité après 6h) et les chercheurs ont confirmé que la Bio-impression n’affectait pas la différenciation cellulaire dans le cas d’impression de cellules souches humaines adultes.

Actuellement, les chercheurs travaillent sur l’impression de tissus de cornée et de la peau afin de répondre aux besoins de la médecine régénératrice, de la pharmacologie, de la cosmétique.

En parallèle, l’équipe de recherche mène également des expériences in vivo sur des souris. Elle est parvenue en 2010 à imprimer des cellules souches mésenchymateuses directement dans l’os de souris vivantes. La prochaine étape consiste à tester une chirurgie assistée par ordinateur qui permettrait d’imprimer des tissus in vivo directement à l’endroit même où cela est nécessaire.

Quelles perspectives pour demain?

La Bio-impression a pour objectifs de concevoir des tissus fonctionnels dans le but de créer :

  • Dans l’immédiat, des modèles prédictifs reproduisant la physiologie de tissus humains sains ou de tissus pathologiques permettant de tester de manière plus prédictive des molécules, ingrédients et candidats médicaments. Ces modèles physiologiques seront utilisés dans le domaine pharmaceutique.

  • D’ici 3 à 5 ans, des tissus individualisés, réalisés à partir des cellules du patient, permettant de sélectionner in vitro sur ces tissus les traitements et de développer des solutions thérapeutiques personnalisées. L’équipe de Fabien Guillemot a pour ambition d’inscrire la Bio-impression dans les développements du nouveau plan cancer qui concernent notamment la médecine individualisée.  Dans le domaine du cancer par exemple, il pourrait être possible grâce à la reconstruction en 3D des tissus du patient eux mêmes (en tenant compte de l’environnement cellulaire de la tumeur) ,de savoir s’il réagira bien ou non à telle ou telle chimiothérapie.

  • D’ici 7 à 10 ans, des tissus implantables pour la médecine régénératrice. Le développement et la fabrication de tissus biologiques représentent des enjeux socio-économiques majeurs. Le marché de l’ingénierie tissulaire est évalué à 15 Milliards de dollars en 2014 et devrait doubler d’ici 2018 (source : MedMarket Diligence, LLC.). Aussi, du fait de l’allongement de la durée de la vie et de l’incidence de pathologies majeures telles que le cancer et le diabète, le nombre de personnes en attente d’une greffe d’organe est en constante augmentation (51 000 personnes en Europe en 2013).


Malgré les avancées des recherches, il n’est actuellement pas possible d’imprimer des organes fonctionnels.

« Quand les chercheurs pourront créer des tissus fonctionnels, ils seront alors capables de modifier ces tissus pour les améliorer. Le débat éthique sera nécessaire pour savoir dans quelles mesures la modification des tissus sera possible et à quelles fins » (Fabien Guillemot)


]Pour en savoir plus : Lire le Dossier de presse« Impression 3D Laser du vivant : quelles avancées pour demain?« 

L’Inserm célèbre ses 50 ans


« Au seuil de cet ouvrage, je souhaite, un instant encore, me retourner vers tous ceux qui nous ont précédés et ont tracé notre route, convaincu que je suis qu’il n’est pas plus bel hommage à rendre au passé qu’un regard résolument tourné vers l’avenir que l’Inserm a contribué et contribuera toujours à façonner au service de la science et de la santé »


(Extrait de la Préface du livre Au coeur du vivant)


portrait officiel André Syrota

Pr André Syrota, Président-Directeur général de l’Inserm

©Inserm/Marouani Alain



L’INSERM DEPUIS 1964

Des ressources
Chercheurs, ingénieurs, techniciens et personnels administratifs ont tous contribué à faire de l’Inserm un organisme unanimement reconnu dans le champ de la recherche biomédicale.

Des valeurs
Pour être à la pointe de la recherche en santé, l’Inserm a su relever des défis scientifiques de taille et n’a eu de cesse depuis sa création de réaffirmer ses priorités et ses ambitions.

50 ans d’excellence scientifique – L’Institut a participé à des avancées médicales décisives (traitements des cancers, thérapie génique, nouvelles technologies d’imagerie, découverte du VIH). Deux de ses chercheurs ont, ces trente dernières années, reçu le Prix Nobel de médecine. L’Inserm est devenu incontestablement un producteur et un diffuseur de travaux scientifiques de référence et un expert des enjeux de santé.

50 ans de dialogue avec la société Soucieux de rendre accessible la science auprès d’un large public, l’Institut n’a cessé de diversifier ses actions de sensibilisation. L’objectif est de familiariser des non-spécialistes avec l’univers de la recherche et de ses enjeux actuels. Animé par cette même démarche d’ouverture, l’Inserm œuvre depuis une dizaine d’années pour un rapprochement entre associations de malades et chercheurs.

50 ans de renommée internationale – L’Institut a acquis, au fil des années, une assise nationale et une réputation internationale. C’est en effet le premier organisme européen de recherche biomédicale. L’Inserm entretient une longue tradition de coopérations nationales, européennes et internationales se concrétisant notamment par un nombre croissant de co-publications.


LES TEMPS FORTS DES 50 ANS DE L’INSERM

A l’occasion de ses 50 ans, l’Inserm souhaite véhiculer ses messages-clefs à travers une centaine de manifestations qui se dérouleront dans toute la France et qui mobiliseront tout au long de l’année l’ensemble de ses personnels, partenaires et tutelles.

Parmi les temps forts de l’année :

    • L’ouvrage Au coeur du vivant
    • Science Tour
    • Virus Attack
    • Destination Labo
    • Rencontres « Les chercheurs accueillent les malades »
    • Concours Famelab
    • Colloque des 50 ans (Le programme de la journée)


Pour en savoir plus, télécharger le dossier de presse disponible sur la salle de presse.

Pour toute demande d’informations complémentaires, d’interviews, de coordonnées, d’illustrations,… contacter le service de presse de l’Inserm : rf.mresni@esserp

Conduites addictives chez les adolescents – Une expertise collective de l’Inserm

Télécharger la synthèse de l’expertise collective.

En France, les niveaux de consommation de certaines substances psychoactives, en particulier l’alcool, le tabac et le cannabis, demeurent élevés chez les adolescents, en dépit des évolutions de la réglementation visant à limiter l’accès des mineurs à ces produits et des campagnes de prévention répétées.

Dans le contexte de l’élaboration du Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017[1], la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) a sollicité l’Inserm pour établir un bilan des connaissances scientifiques sur les vulnérabilités des adolescents (âgés de 10 à 18 ans) à l’usage de substances psychoactives dont la consommation est notable chez les jeunes et pour lesquelles un risque de comportement addictif est avéré (alcool, tabac, cannabis), mais aussi aux pratiques identifiées comme pouvant devenir problématiques (jeux vidéo/Internet, jeux de hasard et d’argent). La commande de la MILDT portait également sur l’analyse des stratégies de prévention et d’intervention efficaces pour cette tranche d’âge.

conduite addictive chez les ados

©Fotolia

Pour répondre à cette demande, l’Inserm a réuni un groupe pluridisciplinaire d’experts en épidémiologie, santé publique, sciences humaines et sociales, addictologie, neurosciences et communication.

L’analyse par les experts des données issues des principales enquêtes de consommations en France[2] et de la littérature scientifique internationale des dix dernières années permet de mieux évaluer l’ampleur du phénomène chez les jeunes âgés de 10 à 18 ans, d’identifier les principaux produits concernés et l’évolution des modes de consommation, les facteurs de risque, les principaux effets sur la santé ainsi que les dommages sociaux associés, et enfin de décrire les stratégies d’intervention ayant fait l’objet d’une évaluation, dans le but de proposer des recommandations utiles à la prévention des consommations à risque et à la prise en charge des adolescents concernés.

Les experts ont notamment constaté une modification des usages et des modes de consommation de certaines substances psychoactives, comme par exemple l’alcoolisation ponctuelle importante qui tend à se développer chez les adolescents. Par ailleurs, ils soulignent la plus forte sensibilité de cette population aux effets neurotoxiques de l’alcool et du cannabis par rapport aux adultes, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux conséquences de la consommation de ces substances.

L’adolescence, période de vulnérabilité

L’adolescence s’accompagne de nombreux changements physiologiques et physiques, mais c’est également une étape de maturation et d’évolution psychologique complexe. Le jeune s’affranchit progressivement du lien de dépendance aux parents et développe un niveau élevé d’interactions sociales ; il recherche de nouvelles expériences associant souvent une certaine résistance aux règles établies. L’adolescence constitue également une phase de curiosité, de prises de risque et de défi.

C’est principalement à cette période que se fait l’initiation à la consommation de substances psychoactives licites (alcool/tabac) mais aussi de certaines substances illicites (cannabis…) : seuls 6,6 % des adolescents de 17 ans n’ont expérimenté aucun de ces 3 produits. Les adolescents manifestent des attentes/motivations très variées, le plus souvent en fonction du genre et socialement différenciées. Ils se révèlent peu sensibles à la mise en garde vis-à-vis des risques sanitaires à long terme car ils ne les perçoivent que comme un risque très lointain ne les concernant pas vraiment.

La plupart des travaux soulignent que chez les adolescents, une première expérience positive avec des substances psychoactives peut influencer l’évolution de la consommation, favorisant des consommations régulières puis, potentiellement la survenue d’une dépendance.

Le cerveau de l’adolescent est plus vulnérable aux substances psychoactives que le cerveau de l’adulte. Il présente la particularité d’être dans un état de transition vers l’état adulte. Les processus de maturation cérébrale (qui se poursuivent jusqu’à environ 25 ans) entraînent une vulnérabilité exacerbée de l’adolescent vis-à-vis de la neurotoxicité des substances psychoactives en général. Une zone du cerveau, le cortex préfrontal, qui permet la prise de décision, l’adaptation du comportement à la situation, est plus particulièrement concernée par cette maturation à l’adolescence.

Quel que soit le produit considéré, la précocité de l’expérimentation et de l’entrée dans la consommation accroît les risques de dépendance ultérieure et plus généralement de dommages subséquents.

Consommations de substances psychoactives[3] et dommages associés

On distingue l’usage à risque (mise en danger) de l’abus ou usage nocif (préjudiciable à la santé) et de la dépendance. Quant à l’addiction, ce terme recouvre généralement celui de dépendance, mais ce point demeure discuté. Pour certains auteurs, l’addiction se caractérise par l’impossibilité répétée de contrôler un comportement et la poursuite de celui-ci en dépit de la connaissance et de la présence de ses conséquences néfastes.

  • Alcool

En France, l’alcool est la première substance psychoactive consommée en termes de niveau d’expérimentation, d’usage occasionnel et de précocité d’expérimentation. En 2011, à la fin de l’adolescence, l’expérimentation concerne 91 % des garçons et des filles. Parmi les élèves âgés de 11 ans, 58 % ont déclaré en 2010 avoir déjà expérimenté une boisson alcoolisée.

Des usages réguliers d’alcool (au moins dix fois dans le mois) apparaissent dès la fin du collège : en 2010, 7 % des élèves de 3ème ont déclaré avoir consommé une boisson alcoolisée au moins 10 fois dans le mois précédant l’enquête. En 2011, ces usages réguliers d’alcool concernaient 15 % des garçons et 6 % des filles de 17 ans ; toutefois, la consommation quotidienne d’alcool concernait moins de 1 % des jeunes de 17 ans. Il est à noter une diminution de l’écart entre les garçons et les filles ainsi qu’une légère augmentation des usages réguliers entre 2008 et 2011.

L’ivresse alcoolique est une expérience vécue par certains dès le collège. Parmi les collégiens de 3ème, 34 % déclarent avoir déjà connu ce type d’ivresse. À 17 ans, 59 % des garçons et des filles rapportent avoir déjà été ivres au cours de leur vie et 53 % déclarent avoir vécu au cours du mois précédant l’enquête, une alcoolisation ponctuelle importante (API, à savoir la consommation d’au moins 5 verres d’alcool en une même occasion). Les API au cours du mois sont en hausse continue : 46 % en 2005, 53 % en 2011.

En 2011, si la France occupe une position médiane en Europe pour les alcoolisations ponctuelles importantes à 16 ans, elle se situe au-dessus de la moyenne pour la consommation régulière d’alcool.

Dommages & vulnérabilité des adolescents

Comparé à l’adulte, la consommation d’alcool chez l’adolescent, et notamment l’intoxication massive, exerce des effets neurotoxiques plus prononcés sur le cerveau, aussi bien au niveau structural (par exemple sur la génération de nouveaux neurones/neurogenèse) que fonctionnel, ce qui se traduit par une plus grande interférence avec les fonctions cognitives (apprentissage/mémoire). Il a été documenté que les atteintes morphologiques et fonctionnelles sont plus importantes chez les filles que chez les garçons du même âge. Les déficits observés à moyen terme sont proportionnels à la quantité d’alcool consommée.

Les jeunes sont moins sensibles aux effets « négatifs » de l’alcool (hypnose, hypothermie, incoordination motrice…) mais plus réceptifs aux effets ressentis comme « positifs » (désinhibition, facilitation des interactions sociales…).

  • Tabac

En 2011, en France, plus de 2 jeunes sur 3 âgés de 17 ans (68 %) ont expérimenté le tabac.

Le tabac est le premier produit psychoactif consommé quotidiennement à l’adolescence : à 17 ans, 30 % des filles et 33 % des garçons sont fumeurs quotidiens. Selon les données de 2011, on observe des usages quotidiens dès le collège (8 % parmi les élèves de 4ème et 16 % parmi ceux de 3ème). Il est observé une légère augmentation du tabagisme quotidien entre 2008 et 2011.

La France se situe en 2011 parmi les pays européens où la prévalence du tabagisme chez les jeunes âgés de 16 ans est la plus élevée.

Dommages associés

Outre le risque élevé de dépendance, le tabac entraîne de nombreuses conséquences sanitaires à long terme bien connues (pathologies respiratoires, cardiovasculaires, cancers…).

  • Cannabis

En France, le cannabis est le premier produit psychoactif illicite consommé à l’adolescence. En 2011, 42 % des adolescents de 17 ans ont déjà fumé du cannabis au moins une fois (39 % des filles et 44 % des garçons). Les garçons sont plus consommateurs que les filles qui expérimentent plus tardivement le produit.

Les premières expérimentations, encore très rares à l’entrée au collège, sont observées dès les dernières années de collège (11 % des élèves de 4ème, 24 % des élèves de 3ème) et concernent près d’un lycéen sur 2 en 2011.

Les usages réguliers de cannabis (au moins dix fois dans le mois) concernent 2 % des élèves de 3ème en 2010-2011, 6 % des élèves de 2nde, 7 % des élèves de terminale. Parmi les adolescents âgés de 17 ans, 5 % présenteraient en 2011 un risque d’usage problématique voire de dépendance : 7 % des garçons et 3 % des filles.

La France, avec le Canada, la République tchèque, la Suisse, les États-Unis et l’Espagne, se situe en 2011 parmi les pays où la prévalence de consommation de cannabis chez les adolescents est la plus élevée.

Dommages & vulnérabilité des adolescents

Dans les heures qui suivent l’usage de cannabis, les troubles cognitifs observés concernent l’attention, le temps de réaction, la mémoire de travail, et les fonctions exécutives. Il existe par ailleurs une corrélation significative entre l’usage et divers « passages à l’acte » (tentatives de suicide, boulimie, comportements sexuels à risque…) dus à la levée de l’inhibition comportementale.

Ces troubles cognitifs ont tendance à disparaître dans le mois suivant l’arrêt de la consommation.  Chez l’adolescent, certains de ces troubles peuvent persister, y compris après sevrage, en particulier si la consommation a débuté avant l’âge de 15 ans. Les troubles cognitifs observés à long terme sont corrélés à la dose, la fréquence, la durée d’exposition et à l’âge de la première consommation de cannabis.

La consommation régulière de cannabis a des effets à long terme qui peuvent altérer les résultats scolaires, et les relations interpersonnelles.

Enfin, l’usage de cannabis peut également précipiter la survenue de troubles psychiatriques (troubles anxieux, troubles dépressifs, symptômes psychotiques et schizophrénie) chez l’adolescent. Concernant les troubles psychotiques, ce risque peut être modulé par certains facteurs génétiques, l’âge d’exposition et l’existence préalable d’une vulnérabilité à la psychose (antécédents familiaux).

  • Autres substances et polyconsommations

==> Médicaments psychotropes et autres produits illicites

En 2011, 41 % des jeunes de 17 ans déclarent avoir pris au cours de leur vie au moins un médicament psychotrope. Les médicaments psychotropes les plus fréquemment expérimentés sont : les anxiolytiques (15 %), les somnifères (11 %), puis les antidépresseurs (6 %).

Les expérimentations de produits illicites autres que le cannabis, comme les amphétamines (dont l’ecstasy), les champignons hallucinogènes, le LSD, la cocaïne ou encore l’héroïne, n’apparaissent qu’à la fin de l’adolescence, dans des proportions comprises entre 3 % pour les champignons hallucinogènes et la cocaine, et 0,8 % pour l’héroïne. La plupart de ces expérimentations sont en baisse sur la période 2008-2011, en particulier celle de l’ecstasy.

À 17 ans, on n’observe quasiment pas d’usage répété dans le mois de substances illicites autres que le cannabis. Seuls les produits à inhaler comme les colles, les solvants ou les poppers présentent des niveaux d’expérimentation relativement élevés à cet âge (9 % disent avoir expérimenté ces derniers).

==> Boissons énergisantes et prémix

Les boissons énergisantes sont consommées seules ou mélangées à de l’alcool, à l’instar des prémix (ou alcopops), mélange de sodas et d’alcools forts titrant de 5 à 8 degrés. À tous les âges de l’adolescence, les garçons sont plus souvent consommateurs de boissons énergisantes que les filles. En France, la consommation de boissons énergisantes est passée de 20 % en 6ème à 36 % en 2nde.

L’usage des prémix reste relativement moins fréquent que celui des autres grandes catégories de boissons alcoolisées. L’engouement des jeunes, notamment des filles pour ce type de boissons très sucrées et au goût masquant largement le degré d’alcool a été freiné par la mise en place en France d’une taxe très élevée spécifique à ces produits.

L’association des boissons énergisantes à des boissons alcoolisées a été identifiée comme présentant des risques : elle augmente les conséquences de l’alcool et notamment le risque de rapports sexuels non protégés. Par ailleurs, il pourrait y avoir un lien entre la consommation de boissons énergisantes associées à l’alcool et la survenue ultérieure d’une dépendance à l’alcool.

==> Polyconsommations

À 17 ans, 4 % des adolescents se déclarent à la fois fumeurs quotidiens de tabac et consommateurs réguliers (au moins 10 fois par mois) de boissons alcoolisées ou à la fois fumeurs quotidiens de tabac et réguliers de cannabis. Enfin, 2 % sont polyconsommateurs réguliers de tabac, alcool et cannabis.

Pratiques des jeux vidéo/Internet et des jeux de hasard et d’argent[4] et dommages associés

Dans le cas des jeux vidéo/Internet et des jeux de hasard et d’argent, on parle de pratique sociale ou récréative (c’est-à-dire d’usage simple), de pratique à risque ou problématique (c’est-à-dire d’abus) et de jeu pathologique ou excessif (c’est-à-dire la dépendance).

  • Pratique des jeux vidéo /Internet

En 2011, parmi les 80 % des 17 ans déclarant avoir utilisé Internet durant les sept derniers jours, environ 1/4 l’utilise entre 2 et 5 heures par jour ; moins d’1/5 entre 5 et 10 heures et 1/10 plus de 10 heures par jour.

Selon les outils de mesure utilisés et les pays, la prévalence d’utilisation problématique d’Internet par les adolescents varierait de 2 à 12 %. En France, en 2011, des premières estimations révèlent que 3 à 5 % des adolescents de 17 ans seraient concernés.

Par ailleurs, 5 % des adolescents de 17 ans joueraient aux jeux vidéo entre 5 et 10 heures par jour. Si les garçons totalisent des durées moyennes de pratique des jeux plus élevées que les filles, le temps passé devant l’écran est identique, les filles utilisant davantage les réseaux sociaux.

Alors que les jeux vidéo peuvent présenter des aspects positifs, notamment sur le développement des fonctions cognitives et spatiales, ils peuvent entraîner une perte de contrôle et un comportement problématique. Parmi les différents types de jeux, les MMORPG (Massive Multiplayer Online Role Playing Games) auxquels les garçons jouent le plus souvent, sont décrits comme potentiellement très addictogènes.

Parmi les joueurs (tous types de jeux vidéo) de 17 ans, 26 % disent avoir rencontré au cours de l’année écoulée, à cause de leur pratique de jeu, des problèmes à l’école ou au travail et environ 4 % des problèmes d’argent.

Dommages associés

Au-delà du temps passé qui s’avère parfois très long, des problèmes d’ordres psychique et somatique peuvent survenir en cas d’usage excessif : troubles du sommeil, irritabilité, tristesse, anxiété, isolement, baisse des performances scolaires, difficultés rencontrées avec les parents… Une pratique problématique des jeux vidéo peut favoriser l’usage de substances (tabac, cannabis, alcool, boissons énergisantes…) et augmenter le risque de sédentarité et de surpoids.

  • Pratique des jeux de hasard et d’argent

En France comme dans la plupart des pays occidentaux, la pratique des jeux de hasard et d’argent est illégale avant 18 ans. Pourtant, selon les études internationales, les mineurs pratiquent les jeux de hasard et d’argent : 80 % ont déjà joué au cours de la vie et 10-20 % ont une pratique hebdomadaire.

L’initiation a lieu le plus souvent à l’adolescence (voire même au début de l’adolescence selon certains auteurs), généralement dans le cercle familial ; les garçons jouent plus que les filles, quel que soit le pays étudié ou la période de référence.

En France, la pratique des jeux de hasard et d’argent chez les adolescents de 17 ans a été explorée pour la première fois en 2011 : 44 % ont déjà joué au cours de leur vie et 10 % ont joué au cours de la semaine. Parmi les jeunes de 17 ans ayant joué dans la semaine écoulée, 14 % seraient des joueurs à risque modéré et 3 % des joueurs excessifs. On peut donc considérer que 1,7 % des adolescents de 17 ans pourraient présenter une pratique des jeux à risque modéré ou excessive.

En France, les adolescents jouent principalement à des jeux de grattage et de tirage achetés dans un bureau de tabac. La possibilité de jouer en ligne est particulièrement attractive pour les jeunes, même mineurs. Près de 14 % des adolescents de 17 ans ont déclaré avoir joué à un jeu de hasard et d’argent sur Internet au moins une fois dans l’année écoulée.

Dommages associés

Si la dérive addictive liée à la pratique des jeux n’entraîne pas directement de dommages physiques, elle peut avoir des conséquences négatives (usage de substances psychoactives, symptômes dépressifs et anxieux, risque suicidaire, pertes financières, diminution des performances scolaires, activités délictueuses…). Les travaux évaluant les dommages du jeu problématique/pathologique à l’adolescence sont encore rares même si l’on constate que la prévalence du jeu problématique/pathologique est plus élevée chez les adolescents que chez les adultes.

Facteurs associés aux usages problématiques

Les facteurs psychologiques (mauvaise estime de soi, manque de confiance en soi…), socioéconomiques, scolaires (parcours scolaire perturbé) et familiaux (transmission intergénérationnelle des conduites addictives) concourent aux usages problématiques des substances ou aux pratiques aboutissant à des conduites addictives.

Alors que les adolescents issus de milieux favorisés ont des niveaux d’expérimentation plus élevés, les jeunes issus de milieux sociaux défavorisés ou qui ont des difficultés scolaires ont un risque plus élevé de s’engager dans une consommation régulière excessive de tabac, alcool ou cannabis. De même, les jeunes dont les parents présentent des conduites addictives ont un risque majoré de consommation régulière ou excessive : les enfants de fumeurs sont 2 fois plus souvent eux-mêmes fumeurs, les enfants de consommateurs excessifs d’alcool sont 2 fois plus souvent eux-mêmes consommateurs réguliers d’alcool. Il en est de même au sujet de la pratique des jeux de hasard et d’argent.

La cohésion familiale (entente entre parents et enfants, connaissance qu’ont les parents de l’entourage et des activités de leurs enfants) réduit le risque de conduites addictives des adolescents.

Les experts notent également le rôle influent du cercle amical et de l’ensemble des produits marketing et des informations publicitaires déployés par les industriels qui incitent les jeunes à acheter les produits addictifs licites (tabac, alcool, jeux dans leur globalité). Ces publicités et outils marketing peuvent par ailleurs limiter l’efficacité des programmes de prévention destinés aux jeunes.

Enfin, il faut souligner le rôle des facteurs génétiques dans le risque de dépendance. Selon les études, une part non négligeable du risque de développer une addiction serait attribuable à des facteurs génétiques, parmi lesquels de nombreux gènes candidats ont été identifiés en fonction des produits.

Accompagnement des adolescents et stratégies de prévention

  • Accompagnement des adolescents

L’accompagnement sur les lieux de vie de l’adolescent repose sur une intervention précoce et des stratégies de réduction des risques. L’intervention précoce consiste à agir le plus tôt possible afin de ne pas laisser s’installer les comportements à risque ; les stratégies de réduction des risques visent à réduire les dommages sans rechercher l’abstinence. L’accompagnement dans les lieux de consultation et les traitements en milieu hospitalier/résidentiel a pour objectif  la réduction des consommations, voire un sevrage.

Les « Consultations jeunes consommateurs » (CJC), gratuites, anonymes et mises en place depuis 2004, sont des lieux d’accueil et de prise en charge dédiés aux jeunes consommateurs de substances psychoactives. Ces consultations proposent des prises en charge validées au niveau scientifique. Les « entretiens motivationnels » réalisés en consultation externe se fondent sur la nécessité de mettre en lumière et d’appuyer la motivation de l’adolescent pour qu’il puisse changer le(s) comportement(s) addictif(s). Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) fournissent aux jeunes des stratégies alternatives pour gérer des situations qui concourent au passage à l’acte addictif et les thérapies familiales mobilisent les parents et leur environnement pour encadrer et accompagner le jeune. Elles ont montré leur efficacité dans le contexte des CJC en France et en Europe. Elles s’avèrent davantage efficaces pour les situations sévères, les moins de 16 ans et lorsque les troubles du comportement sont importants.

D’autres approches existent comme les approches psychodynamiques, centrées sur l’individu et le renforcement « du moi ». Elles servent le plus souvent de modèle de compréhension que de base d’action.

En cas d’échec des soins ambulatoires, les soins résidentiels qui incluent les hospitalisations longues et les postcures, permettent une évaluation et un suivi global de l’adolescent (addictions et insertion/scolarisation).

  • Stratégies de prévention efficaces 

Plusieurs stratégies d’interventions ont montré des effets bénéfiques sur la prévention ou la diminution de la consommation de substances psychoactives. En particulier, trois types d’intervention sont le plus souvent présents dans les programmes validés comme efficaces : le développement des compétences psychosociales[5] des jeunes (gestion des émotions, prise de décisions, estime de soi) et de leurs parents (amélioration de la communication, gestion des conflits) ; les stratégies à composantes multiples (intégrant au niveau local d’autres acteurs que l’école et les parents en plus du développement des compétences des jeunes et des parents).

Il existe également d’autres types d’interventions : les interventions d’aide à distance (ordinateur ou téléphone mobile); les campagnes dans les médias (notamment pour la réduction du tabac) ou encore les actions législatives et réglementaires visant à limiter l’accès aux produits addictifs.

Recommandations

Les experts soulignent que les actions à développer doivent cibler en priorité l’alcool et le tabac, voire le cannabis, en raison des niveaux d’usage et des dommages associés qui prédominent sur les autres substances et les jeux.

Les recommandations d’actions préconisées par le groupe d’experts ont trois objectifs principaux :

==> Prévenir l’initiation ou en retarder l’âge 

Le groupe d’experts recommande de sensibiliser le public et les différents acteurs (jeunes, parents, intervenants du secteur scolaire, parascolaire ou médical…) à la vulnérabilité de l’adolescent et aux dangers associés à une initiation précoce. Il s’agirait de renforcer, sans dramatiser, les messages décrivant l’impact durable sur la santé, et en particulier sur le cerveau, d’une consommation massive et rapide d’alcool ainsi que d’une consommation régulière de cannabis pendant l’adolescence. Pour modifier les motivations, les attentes et les représentations existantes de ces produits, les campagnes média doivent être accompagnées de mesures éducatives et législatives.

Pour prévenir l’initiation, les experts soulignent également l’importance du développement des compétences psychosociales des adolescents. Cela pourrait s’inscrire dans des activités de groupe, notamment en milieu scolaire, et être en adéquation avec l’entrée dans la consommation des différents produits (10-12 ans par exemple pour le tabac).

Les adolescents demeurent très sensibles aux messages véhiculés par les parents. C’est pourquoi le groupe d’experts recommande d’informer régulièrement les parents sur les dommages liés aux consommations précoces, sur l’évolution des modes de consommation chez les jeunes et sur les codes marketing qui leur sont destinés et qui visent à promouvoir la consommation. Il s’agit d’aider les parents à avoir l’attitude la mieux adaptée à la situation.

En renforçant la formation des intervenants en milieu scolaire, sportif ou de loisir, l’ensemble des acteurs en contact avec les adolescents seraient informés des problématiques addictives et formés au repérage précoce des adolescents et aux interventions qui peuvent être réalisées.

Afin de mieux encadrer la vente du tabac et de l’alcool, les experts préconisent que l’achat de ces produits soit systématiquement assorti de la présentation d’un document officiel indiquant l’âge. Ils mettent l’accent sur le respect et le renforcement des lois réglementant la publicité qui favorise également la pratique précoce des jeux de hasard et d’argent. Il conviendrait également d’assurer une meilleure visibilité du contenu des jeux vidéo grâce à la présence et l’amélioration des logos définissant les classifications d’âge et de contenus.

==> Eviter les usages réguliers et les dommages sanitaires et sociaux

Pour éviter l’installation d’une conduite addictive, le groupe d’experts préconise d’améliorer le repérage des usages à risque et les interventions précoces, de renforcer les actions de première ligne telles que les « Consultations Jeunes Consommateurs » en formant le personnel aux méthodes de prise en charge précoce et de former un certain nombre aux thérapies ayant fait preuve de leur efficacité (TCC, thérapie familiale type MDFT[6]). En cas d’échec des soins en ambulatoire, une prise en charge des adolescents présentant des conduites addictives devrait être proposée dans les centres spécialisés et en milieu résidentiel.

L’existence de souffrances ou de troubles psychiques associés à une consommation excessive ou à des pratiques addictives exige de renforcer les liens entre les dispositifs d’addictologie et les services de pédopsychiatrie/psychiatrie, notamment ceux spécialisés dans l’évaluation et l’intervention précoce chez le jeune adulte ainsi qu’avec les maisons des adolescents.

Enfin, le groupe d’experts recommande d’améliorer la coopération des professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice (lien avec les juges pour enfants et la protection judiciaire de la jeunesse) pour optimiser l’orientation et la prise en charge.

==> Assurer une coordination nationale et régionale des acteurs territoriaux

Le groupe d’experts souligne la nécessité de soutenir et développer au niveau local des structures publiques transversales d’animation dédiées aux addictions afin d’assurer une coordination régionale des acteurs territoriaux. Le recensement des actions de prévention à l’échelle régionale en France, permettrait de connaître et de diffuser les stratégies de prévention validées et de proposer des recommandations à l’intention des établissements scolaires et collectivités territoriales. Pour assurer cette coordination, les experts recommandent la mise en place d’une commission d’évaluation des programmes de prévention, qui sont actuellement rarement évalués.

Des recommandations de recherche ont également été formulées :

Des recherches multidisciplinaires, cliniques et fondamentales associées à des études longitudinales doivent être soutenues afin de suivre les trajectoires de consommations et de vie afin de mieux connaître les usages, les facteurs de risque, de résilience et les effets sanitaires et sociaux (conséquences sur la scolarité par exemple) de la consommation de substances psychoactives ou la pratique de jeux menant à des conduites addictives.

Les recherches en sciences humaines et sociales, notamment sur les motivations des adolescents et leurs pratiques sociales, apparaissent nécessaires pour des interventions de prévention plus efficaces.

Les experts insistent sur l’intérêt de développer, évaluer et valider les outils de dépistage et les stratégies de prise en charge des jeunes présentant des conduites addictives.
Ils recommandent également de conduire des recherches sur les moyens de prévenir les pratiques addictives des jeunes (rôle des technologies numériques par exemple).

Sensibiliser les jeunes aux addictions par la recherche : le pari du programme Apprentis-Chercheurs MAAD (Mécanismes des Addictions à l’Alcool et aux Drogues)

« On a cherché à voir s’il y avait une différence entre les individus addicts et ceux n’ayant jamais touché à la drogue » ; « on a coloré des coupes de cerveaux pour voir quels sont les différents neurones impliqués dans l’addiction » ; « on a calculé le taux d’expression des gènes après consommation ». Voilà quelques propos tenus par les adolescents qui ont été sélectionnés pour le programme MAAD et ont travaillé tout au long de l’année scolaire, à raison de 1 ou 2 mercredi après-midi par mois, dans un des 5 laboratoires de recherche sur les addictions participant au programme, à Amiens, Bordeaux, Marseille, Paris et Poitiers.

Piloté par l’Inserm et financé par la Mildt, le projet MAAD s’appuie sur le dispositif Apprentis-Chercheurs mis en place par l’association Arbre des connaissances créée en 2004 par des chercheurs de l’Institut d’Hématologie de l’hôpital St Louis et dont l’objectif principal est d’intéresser les jeunes aux questions de science par la pratique de la recherche expérimentale.

Encadrés par un chercheur senior de l’équipe d’accueil, les jeunes, en binôme constitué par un collégien en classe de 3ème et un lycéen en classe de 1èreS, sont engagés dans une vraie démarche expérimentale : question scientifique, planification et  réalisation des expériences, analyse des résultats. Dix binômes ont pu être accueillis. Plasticité synaptique, expression génomique, immuno-histochimie, méthodes d’analyse comportementale, électrophysiologie… n’ont plus de secrets pour eux.

Après le laboratoire vient le temps de la communication. A l’occasion des congrès qui se sont tenus dans chaque ville, les apprentis-chercheurs MAAD, comme des scientifiques chevronnés, présentent leurs travaux au public, élèves de leur établissement scolaire, parents, enseignants…. , devenant ainsi des médiateurs scientifiques ; les 5 congrès organisés ont réuni environ 500 personnes.

Le regard des apprentis-chercheurs MAAD sur les drogues a changé : « c’est intéressant de savoir pourquoi on devient addict » ; « j’ai compris que l’addiction ne relève pas seulement de la volonté de l’individu » ; «  ce n’est pas seulement une faiblesse de l’esprit »…

Autant de messages et d’autres encore qui seront relayés par la génération suivante d’apprentis-chercheurs MAAD, car l’aventure continue. En effet, la deuxième édition du programme, 2013-2014, s’appuie sur 9 laboratoires et s’est élargie au tabac et au cannabis.

Pour plus d’informations et assister à une séance MAAD le mercredi après-midi et/ou aux congrès de fin d’année qui auront lieu du 2 au 10 Juin 2014 dans toute la France: rf.mresni@esserp


[1]  Plan adopté le 19 Septembre 2013. http://www.drogues.gouv.fr/site-professionnel/la-mildt/plan-gouvernemental/plan-gouvernemental-2013-2017/

[2] Depuis la fin des années 1990, trois enquêtes documentent les usages de produits psychoactifs en population adolescente : HBSC (Health Behaviour in School-aged Children), Espad (European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs) et Escapad (Enquête sur la santé et les consommations réalisée lors de la Journée Défense et Citoyenneté) permettant de couvrir l’ensemble de la période 11-17 ans.

[3] D’après les enquêtes HBSC, Espad et Escapad

[4] D’après l’enquête Escapad

[5] Capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne (OMS)

[6] Thérapie familiale multidimensionnelle

Pesticides : Effets sur la santé, une expertise collective de l’Inserm

Depuis les années 1980, les enquêtes épidémiologiques ont évoqué l’implication des pesticides dans plusieurs pathologies chez des personnes exposées professionnellement à ces substances, en particulier des pathologies cancéreuses, des maladies neurologiques et des troubles de la reproduction. Ces enquêtes ont également attiré l’attention sur les effets éventuels d’une exposition même à faible intensité lors de périodes sensibles du développement (in utero et pendant l’enfance).

Dans ce contexte, la DGS a sollicité l’Inserm pour effectuer un bilan de la littérature scientifique permettant de fournir des arguments sur les risques sanitaires associés à l’exposition professionnelle aux pesticides, en particulier en secteur agricole et sur les effets d’une exposition précoce chez le fœtus et les jeunes enfants.

Pour répondre à cette demande, l’Inserm s’est appuyé sur un groupe pluridisciplinaire d’experts constitué d’épidémiologistes spécialistes en santé-environnement ou en santé au travail et de biologistes spécialistes de la toxicologie cellulaire et moléculaire.

D’après les données de la littérature scientifique internationale publiées au cours des 30 dernières années et analysées par ces experts, 

il semble exister une association positive entre exposition professionnelle à des pesticides et certaines pathologies chez l’adulte: la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et certains cancers hématopoïétiques (lymphome non Hodgkinien, myélomes multiples).

Par ailleurs, les expositions aux pesticides intervenant au cours de la période prénatale et périnatale ainsi que la petite enfance semblent être particulièrement à risque pour le développement de l’enfant.

tracteur pesticides © Fotolia

Pesticides : définitions, usages et voies d’exposition

Du latin, Pestis (fléau) et Caedere (tuer), le terme pesticide regroupe de nombreuses substances très variées agissant sur des organismes vivants (insectes, vertébrés, vers, plantes, champignons, bactéries) pour les détruire, les contrôler ou les repousser.

Il existe une très grande hétérogénéité de pesticides (environ 1 000 substances actives ont déjà été mises sur le marché, entre hier et aujourd’hui, actuellement 309 substances phytopharmaceutiques sont autorisées en France). Ils divergent selon leurs cibles, leurs modes d’actions, leurs classe chimiques ou encore leur persistance dans l’environnement.

–  Cibles : on distingue les herbicides, les fongicides, les insecticides…

– Il existe près de 100 familles chimiques de pesticides : organophosphorés, organochlorés, carbamates, pyréthrinoïdes, triazines…

– Il existe près de 10 000 formulations commerciales composées de la matière active et d’adjuvants et qui se présentent sous différentes formes (liquides, solides : granulés, poudres,…..).

– La rémanence des pesticides dans l’environnement peut varier de quelques heures ou jours à plusieurs années. Ils sont transformés ou dégradés en nombreux métabolites. Certains, comme les organochlorés persistent pendant des années dans l’environnement et se retrouvent dans la chaine alimentaire.

Dans l’expertise, le terme pesticide représente l’ensemble des substances actives, indépendamment des définitions réglementaires.

Des pesticides pour quels usages ?

En France, peu de données quantitatives par type d’usages sont accessibles. La majeure partie des tonnages (90%) est utilisée pour les besoins de l’agriculture, mais d’autres secteurs professionnels sont concernés : entretiens des voiries, jardins et parcs ; secteur industriel (fabrication, traitement du bois,…) ; usage en santé humaine et vétérinaire, lutte anti-vectorielle (moustique), dératisations…Il faut ajouter à cette liste les usages domestiques (plantes, animaux, désinsectisation, jardinage, bois).

En France, les fongicides représentent près de la moitié des tonnages. 80% des tonnages de pesticides sont utilisés pour un traitement des céréales à paille, maïs, colza, vigne. Les plus vendus ont comme principe actif le soufre ou le glyphosate.

Les sources d’exposition :

Les pesticides sont présents partout dans l’environnement. On peut les trouver dans l’air (air extérieur et intérieur, poussières), l’eau (souterraines, de surface, littoral, …), le sol, et les denrées alimentaires (y compris certaines eaux de consommation).

En milieu professionnel, la voie cutanée représente la principale voie d’exposition (environ 80%). L’exposition par voie respiratoire existe lors de circonstances particulières d’application (fumigation, utilisation en milieu fermé). L’exposition peut se produire à différents moments : manutention, préparation, application, nettoyage, ré-entrées (tâches effectuées dans des zones traitées), mais les plus exposantes sont la préparation des bouillies ou mélanges et les tâches de ré-entrées. En population générale, la voie orale est souvent considérée comme la principale voie d’exposition à travers l’alimentation.

Pesticides et cancers

L’expertise collective a ciblé 8 localisations de cancer : 4 cancers hématopoïétiques, ainsi que les cancers de la prostate, du testicule, les tumeurs cérébrales et les mélanomes. La plupart de ces localisations avaient été identifiées dans des méta-analyses antérieures comme potentiellement associées à une exposition aux pesticides, généralement sans distinction sur les matières actives incriminées.

  • Cancer de la prostate

D’après les données de la littérature, une augmentation du risque existe chez les agriculteurs, les ouvriers d’usines de production de pesticides et les populations rurales (entre 12 et 28% selon les populations). Quelques matières actives ont été spécifiquement documentées, en population générale : chlordécone ; en population professionnelle : carbofuran, coumaphos, fonofos, perméthrine. Toutes sont actuellement interdites d’usage. Pour certaines d’entre elles, un excès de risque est observé uniquement chez les agriculteurs ayant des antécédents familiaux de cancer de la prostate.

  • Cancers hématopoïétiques

D’après les données de la littérature, une augmentation de risque de lymphomes non hodgkinien et de myélomes multiples existe chez les professionnels exposés aux pesticides du secteur agricole et non agricole. Les pesticides organophosphorés et certains organochlorés (lindane, DDT) sont suspectés. Bien que les résultats soient moins convergents, un excès de risque de leucémies ne peut être écarté.

Concernant les autres localisations cancéreuses étudiées, l’analyse de l’ensemble des études reste difficile. Plusieurs raisons peuvent être évoquées : une incidence faible (cancer du testicule, tumeurs du cerveau et maladie de Hodgkin) ou l’existence d’un facteur de confusion important (comme par exemple, l’exposition aux ultras violets de la population agricole, facteur de risque reconnu pour le mélanome).

Pesticides et maladies neurodégénératives

L’expertise collective s’est intéressée a 3 maladies neurodégénératives, la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer et la sclérose latérale amyotrophique, ainsi qu’aux troubles cognitifs, qui pourraient prédire ou accompagner certaines pathologies neuro-dégénératives.

  •  Maladie de Parkinson

Une augmentation du risque de développer une maladie de Parkinson a été observée chez les personnes exposées professionnellement aux pesticides. Un lien a pu être mis en évidence notamment lors d’une exposition aux insecticides et herbicides. L’association avec les fongicides n’a, à ce jour, pas été mise en évidence mais le nombre d’études est nettement moins important.

Pour les autres maladies neurodégénératives, les résultats sont plus contrastés. Par exemple, dans le cas de la maladie d’Alzheimer, les résultats des études de cohortes sont convergents pour révéler un excès de risque quand les études cas-témoins sont peu robustes. Quant à la sclérose latérale amyotrophique, trop peu d’études sont disponibles pour conclure.

Par ailleurs, plusieurs revues et une méta-analyse récente concluent à un effet délétère des expositions professionnelles aux pesticides notamment aux organophosphorés sur le fonctionnement cognitif. Cet effet serait plus clair en cas d’antécédents d’intoxication aigue.

 

Effets sur la grossesse et le développement de l’enfant

Il existe maintenant de nombreuses études épidémiologiques suggérant un lien entre l’exposition prénatale aux pesticides et le développement de l’enfant, à court et moyen terme.

  • Conséquences des expositions professionnelles en période prénatale

La littérature suggère une augmentation significative du risque de morts fœtales (fausses-couches) ainsi qu’une augmentation du risque de malformations congénitales lors d’une exposition professionnelle maternelle aux pesticides. D’autres études pointent une atteinte de la motricité fine et de l’acuité visuelle ou encore de la mémoire récente lors du développement de l’enfant. Enfin, une augmentation significative du risque de leucémie et de tumeurs cérébrales a été mise en évidence dans les méta- analyses récentes.

  •  Conséquences des expositions résidentielles en période prénatale (voisinage ou usage domestique)

Plusieurs études cas-témoins et de cohortes montrent une augmentation du risque de malformations congénitales chez les enfants des femmes vivant au voisinage d’une zone agricole ou liée aux usages domestiques de pesticides (malformations cardiaques, du tube neural, hypospadias).

Une diminution du poids de naissance, des atteintes neurodéveloppementales et une augmentation significative du risque de leucémie sont également rapportées.

Pesticides et fertilité

Le lien entre certains pesticides (notamment le dibromochloropropane), qui ne sont plus utilisés, et des atteintes de la fertilité masculine a été clairement établi mais de nombreuses incertitudes subsistent en ce qui concerne les pesticides actuellement employés.

Le lien entre pesticides et infertilité chez la femme est mal connu et mériterait d’être mieux étudié.

Mécanismes biologiques

La littérature ne permet pas actuellement d’identifier avec précision les mécanismes cellulaires et moléculaires mis en jeu dans les pathologies potentiellement associées à une exposition à certains pesticides. Toutefois, certains modes d’action des substances soutiennent les données épidémiologiques. Le stress oxydant semble par exemple jouer un rôle majeur, comme  dans la maladie de Parkinson. Des dommages à l’ADN ou des perturbations de certaines voies de signalisation pouvant conduire à une dérégulation de la prolifération ou de la mort cellulaire, ou des altérations du système immunitaire sont autant de mécanismes susceptibles de sous tendre les effets des pesticides sur la santé.

 La question des mélanges de pesticides 

Les populations sont exposées de façon permanente et à faible dose aux pesticides et à de nombreuses autres substances contaminant l’environnement. Ces mélanges de pesticides et autres substances pourraient donner lieu à des impacts sanitaires difficilement prévisibles actuellement, ce qui fait de la question des mélanges et des faibles doses un des enjeux importants de la recherche et de l’évaluation des dangers.

Les experts rappellent que «ne pas être en mesure de conclure ne veut pas dire obligatoirement qu’il n’y a pas de risque».

Si certaines substances sont mises en cause, c’est qu’elles ont été plus souvent  étudiées que d’autres (en particulier dans le contexte des États-Unis) ; de nombreuses substances actives n’ont pas fait l’objet d’études épidémiologiques.

Recommandations

Les recommandations soulignent la nécessité d’une meilleure connaissance des données d’exposition anciennes et actuelles de la population professionnelle exposée aux pesticides directement ou indirectement.

Les recommandations attirent également l’attention sur des périodes critiques d’exposition (périodes de développement) aussi bien en milieu professionnel qu’en population générale.

Des recherches pluri- et trans-disciplinaire doivent être soutenues pour permettre une caractérisation plus rapide des dangers potentiels des substances actives de pesticides.

Lire l’intégralité du dossier de presse

Handicaps rares, contextes, enjeux et perspectives : une expertise collective de l’Inserm

A l’occasion du comité de suivi annuel du schéma national pour les handicaps rares qui s’est tenu le 30 avril 2013, et a été présidé par Mme Marie-Arlette Carlotti, Ministre chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, l’Inserm rend publique l’expertise collective « Handicaps rares, contextes, enjeux et perspectives. »

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Dans le cadre du Schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour les Handicaps Rares 2009-2013, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a sollicité l’Inserm pour la réalisation d’une expertise collective sur la question des handicaps rares.

L’objectif était de mieux connaître les difficultés rencontrées par les personnes atteintes de handicaps rares et mieux répondre à ces situations, réparties en petit nombre sur le territoire national.

Le terme de « handicaps rares » a été introduit dans la législation française pour prendre en compte, dans l’organisation du secteur médico-social, la situation des personnes (enfants ou adultes) atteintes de deux déficiences ou plus et dont la prise en charge requiert le recours à des compétences très spécialisées. Les textes réglementaires définissent les handicaps rares par une faible prévalence (inférieure à 1 cas pour 10 000 habitants), une combinaison de déficiences et de limitations nécessitant une prise en charge complexe pour laquelle il existe peu d’expertise d’intervention (au niveau de la détection, de l’évaluation fonctionnelle et de l’accompagnement).

La démarche proposée au groupe d’experts sollicité par l’Inserm, a été d’aborder, sous un angle à la fois clinique et scientifique, plusieurs configurations illustratives (surdicécité, maladie de Huntington, association d’épilepsie et d’autisme, polyhandicaps sévères) pouvant servir de « modèles » et aider à conceptualiser une problématique de prise en charge des handicaps rares. Il a été également recherché les spécificités et points communs aux différentes situations de handicaps rares : (historique de la notion, référence aux classifications internationales) ; données de prévalence ; stratégies d’intervention (éducation et scolarité, accompagnement des familles, communication et langage, coût des prises en charge…).

Principaux constats et recommandations
1. La notion de handicaps rares a été introduite dans la politique du handicap en France pour prendre en compte les personnes ne bénéficiant pas d’accompagnement adapté au regard de la spécificité de leurs besoins. Mais, le terme de handicaps rares n’a pas d’équivalent stabilisé dans le contexte international et la notion de handicaps rares questionne les modèles conceptuels du handicap en général qui sous-tendent les définitions réglementaires françaises.
L’expertise recommande de construire une définition évolutive des handicaps rares qui permette l’intégration de nouvelles configurations en fonction des contextes socio-politiques différents et qui reflète la multi-dimensionnalité de ces formes de handicap (déficiences de fonctions, limitations d’activité, restrictions de participation sociale en fonction des environnements).

La Classification internationale du fonctionnement (CIF), du handicap et de la santé constitue aujourd’hui un cadre de référence qui permettrait de caractériser les handicaps rares.

2 Les données épidémiologiques disponibles en France sont parcellaires et portent principalement sur des associations de déficiences sensorielles. La littérature internationale rapporte, pour l’essentiel, des données de prévalence concernant des handicaps rares dont l’étiologie est précisée et qui relèvent également du champ des maladies rares.

La mise en place de registres ou de bases de données populationnelles européens ou internationaux paraît indispensable pour disposer d’une assise de population adaptée à l’étude de groupes de patients de taille aussi limitée.

3 L’identification des situations de handicaps rares ainsi que l’évaluation des déficiences et des capacités des personnes restent difficiles à appréhender. Cependant, la France a mis en place un dispositif organisationnel original d’accompagnement des personnes et des professionnels avec les Centres de ressources nationaux handicaps rares. Pour renforcer ce dispositif, l’expertise propose de :

• améliorer la visibilité, l’accessibilité et l’efficacité des dispositifs existants ;
• mettre en place une personne ou une équipe référente « handicaps rares » par inter-région ;
• renforcer la mission de mutualisation des connaissances du Groupement national de coopération handicaps rares ;
• sensibiliser les professionnels de santé, de l’éducation et du champ médico-social à l’identification des personnes présentant un handicap rare.

4 L’accompagnement peut se construire sur les influences réciproques entre la recherche médicale, les professionnels et l’expérience des sujets et de l’entourage proche. Les stratégies d’intervention et leur qualité reposent sur la capacité des proches, des aidants et des professionnels à développer un partenariat et à intégrer des connaissances générales sur les handicaps, mais aussi des données individuelles (notamment les stratégies adaptatives développées par la personne), et sur la capacité d’ouverture et de créativité nécessaires à l’exploration de voies nouvelles et ajustées d’accompagnement.
La scolarisation des enfants présentant un handicap rare suppose un système inclusif capable de répondre aux besoins éducatifs de chacun. Le mode de scolarisation des enfants « à besoins éducatifs particuliers » dépend des conceptions de l’éducation et du handicap. Des approches éducatives ajustées aux situations complexes existent.

Les familles sont quotidiennement confrontées à des difficultés sur le plan pratique, psychologique, et social. De nombreux écrits soulignent la nécessité d’une co-construction de l’intervention par les professionnels et les familles et associant si possible, les personnes handicapées.

D’une façon générale, il est apparu au groupe d’experts que la notion « handicaps rares » questionne les pratiques et les connaissances, son historique montre que sa définition est intrinsèquement liée à une réflexion et une critique des prises en charge existant dans le champ du handicap.

La question des handicaps rares incite à modifier et innover les pratiques d’accompagnement dans le sens d’une plus grande cohérence, avec comme objectif de contribuer au bien-être des personnes et au respect de leurs droits, ce qui pourra avoir un impact bénéfique pour l’ensemble des personnes en situation de handicap.

Groupe d’experts et auteurs
Claire AMIET, Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière AP-HP, Paris
Catherine ARNAUD, UMR 1027 Inserm, Université Toulouse III, Unité d’épidémiologie clinique, Centre hospitalier universitaire, Toulouse
Anne-Catherine BACHOUD-LÉVI, Inserm U 955 E01 IMRB- UPEC, Créteil-IEC ENS, Paris et AP-HP, Centre de Référence Maladie de Huntington, Hôpital Henri Mondor, Créteil
Catherine BARRAL, Maison des sciences sociales du handicap, Ecole des hautes études en santé publique (MSSH-EHESP), Paris
Jean-Jacques DETRAUX, Département de Psychologie, cognition et comportement, Université de Liège, Belgique
Karine DUVIGNAU, Sciences du langage, Université de Toulouse 2, Ecole interne IUFM et CLLE-ERSS, Toulouse
Serge EBERSOLD, Groupe de recherche sur le handicap, l’accessibilité, les pratiques éducatives et scolaires (GRHAPES-EA 7287), Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’Éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA), Suresnes et Université de Strasbourg
Agnès GRAMAIN, Institut des sciences sociales du travail (ISST) et Centre d’économie de la Sorbonne, Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Paris
Régine SCELLES, Laboratoire psychologie et neurosciences de la cognition et de l’affectivité, Université de Rouen
Jacques SOURIAU, ancien directeur du Centre de ressource expérimental pour enfants et adultes sourdaveugles et sourds-malvoyants (Cresam), Saint-Benoit, et Université de Gröningen, Pays-Bas
Myriam WINANCE, Cermes-3, Inserm U 988, CNRS UMR 8211, EHESS, Université Paris Descartes, Villejuif
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