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Communiqués et dossiers de presse

Tuberculose : une enzyme clé dans la résistance du germe aux antibiotiques

22 Avr 2010 | Par INSERM (Salle de presse) | Immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie

A la veille de la journée mondiale de lutte contre la tuberculose, des chercheurs de l’Inserm au Centre de Recherche des Cordeliers (1) ont identifié une nouvelle cible pour le traitement des infections dues à des souches multirésistantes aux antibiotiques. Des résultats de recherches dont les applications sont d’ores et déjà à l’étude pour le développement de nouveaux médicaments antituberculeux. Ces travaux sont publiés dans la revue Nature Medicine.



La tuberculose est une maladie contagieuse provoquée par une bactérie touchant essentiellement les poumons et se propageant par voie aérienne. En 2009, selon l’OMS le nombre de décès attribuable à la résistance aux antibiotiques de la bactérie est en constante augmentation, de même que les décès dus aux co-infections VIH/Sida et tuberculose, en particulier en Afrique et en Asie.

La principale cause de la résistance est liée à la non-observance des traitements antibiotiques qui sont longs et contraignants. Alors que plus de 99 % des bactéries sont éliminés durant les 15 premiers jours de la thérapie, six mois de traitement sont nécessaires pour complètement éradiquer quelques bactéries survivantes qualifiées de « persistantes ». « S’il y a un mauvais suivi du traitement, ces bactéries persistantes peuvent muter et devenir résistantes » explique Michel Arthur, directeur de recherche à l’Inserm et co-auteur de cette étude.

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© CDC/Dr. Ray Butler, Janice Carr Mycobacterium tuberculosis grossi 15 549 fois

Face à la résurgence de la maladie et l’émergence de souches extensivement résistantes à l’ensemble des antituberculeux disponibles, le besoin de nouveaux antibiotiques est de plus en plus urgent.

La paroi de Mycobacterium tuberculosis : cible des chercheurs

La paroi de la bactérie responsable de la tuberculose est au centre des recherches actuelles. Véritable « cotte de maille », elle protège la bactérie de la pression osmotique l’empêchant ainsi d’éclater. De nombreuses infections bactériennes sont traitées par les antibiotiques de la famille des β-lactamines (pénicilline) qui inhibent la formation de la paroi. En empêchant la formation de cette « cotte de maille » ces antibiotiques entraînent la mort de la bactérie qui éclate. Cependant, contrairement aux autres bactéries, Mycobacterium tuberculosis possède la particularité de produire naturellement une enzyme (la β-lactamase) qui détruit les β-lactamines.

Dans cette nouvelle étude publiée dans Nature Medicine, les chercheurs de l’Inserm ont identifié une enzyme nouvelle : la L,D- transpeptisase qui joue un rôle clé dans la synthèse de la paroi de Mycobacterium tuberculosis et pourrait être une cible pour le développement de nouveaux antibiotiques. Sous ce nom un peu barbare se cache une enzyme qui forme les liaisons peptidiques et qui n’a pas de rôle essentiel dans la synthèse de la paroi des autres bactéries. Cette L,D-transpeptidase est inhibée par une famille très particulière de β-lactamines, les carbapénèmes.

Ces résultats viennent éclairer les travaux récents de Jean-Emmanuel Hugonnet, chercheur à l’Inserm (Science 2009), qui démontrent l’efficacité thérapeutique de l’association d’un carbapénème (le méropénème) et d’un inhibiteur de β-lactamase (l’acide clavulanique). En effet, l’étude publiée dans Nature Medicine montre que cette association d’antibiotiques inhibe la synthèse de la paroi en agissant sur la L,D-transpeptidase. « Nos travaux expliquent pourquoi le traitement fonctionne. Le méropénème est le seul antibiotique à cibler spécifiquement la L,D transpeptidase », précise Michel Arthur.

Même si ces deux molécules, l’acide clavulanique et le méropénème, ont d’ores et déjà des autorisations de mise sur le marché, la limite de cette alternative thérapeutique reste son mode d’administration par voie intraveineuse. Tout le travail futur consistera à identifier d’autres antibiotiques dont le mode et la durée d’administration seraient plus compatibles avec le traitement de la tuberculose. Un défi qui semble à portée de main maintenant que l’enzyme cible est connue !

(1) Unité mixte Inserm, Université Pierre et Marie Curie, Université Paris Descartes

Contacts
Contact Chercheur

Michel Arthur
Laboratoire de Recherche moléculaire sur les Antibiotiques
Unité 872
Centre de Recherche des Cordeliers, Inserm, Université Pierre et Marie Curie, Université Paris Descartes
Tél. : 01.43.25.00.33

 

Sources

Source

"The Mycobacterium tuberculosis protein LdtMt2 is a nonclassical transpeptidase required for virulence and resistance to amoxicillin"
Radhika Gupta1, Marie Lavollay2-4, Jean-Luc Mainardi2-5, Michel Arthur2-4, William R Bishai1 & Gyanu Lamichhane1

(1) Department of Medicine, Johns Hopkins University, Baltimore, Maryland, USA.
(2) Centre de Recherche des Cordeliers, Laboratoire de Recherche moléculaire sur les Antibiotiques, Université Pierre et Marie Curie, Paris, France.
(3) Université Paris Descartes, Paris, France.
(4) Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Paris, France.
(5) Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris, France.

Nature medicine, 21 March 2010

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