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Les comportements d’addiction aux drogues et la vulnérabilité aux rechutes seraient liés à l’aptitude de notre cerveau à produire de nouveaux neurones. C’est la conclusion de chercheurs de l’Inserm du Neurocentre Magendie de l’Université Bordeaux, obtenue après avoir observé le comportement de souris ayant appris à s’auto-administrer de la cocaïne. Leurs résultats, à paraître dans Molecular Psychiatry, mettent en évidence un lien entre production déficiente de nouveaux neurones dans l’hippocampe et dépendance aux drogues.
Dans le cerveau, l’hippocampe est l’un des centres de la mémoire. Il comprend le gyrus dentelé, qui présente la particularité de produire de nouveaux neurones (neurogenèse) chez l’adulte. Une neurogenèse anormale est corrélée à de nombreux désordres neuropsychiatriques comme des troubles de la mémoire ou de l’humeur.
Bien qu’une relation entre neurogenèse erratique et addiction à la drogue ait déjà été soupçonnée, jusqu’à aujourd’hui aucune preuve scientifique concrète ne venait étayer cette hypothèse. Les équipes de recherche Inserm de Nora Abrous et de Pier-Vicenzo Piazza, du Neurocentre Magendie (Unité 1215) de l’Université de Bordeaux, se sont penchées sur le rôle de la neurogenèse dans la dépendance à la cocaïne.
Deux groupes de souris ont été comparés : un groupe sain et un groupe génétiquement modifié pour que la neurogenèse au niveau de l’hippocampe soit moindre. Les souris ont été entraînées à s’auto-administrer de la cocaïne en introduisant leur nez dans un trou, déclenchant ainsi la diffusion par voie intraveineuse de cocaïne dans leur sang. Le nombre d’actions à fournir pour obtenir une quantité similaire de drogue a ensuite été progressivement augmenté. Les chercheurs ont constaté que les souris transgéniques montraient une plus grande motivation (mesurée en nombre d’actions dans les trous) à « travailler » pour obtenir de la cocaïne.
La transition vers l’addiction est un processus associant l’exposition répétée à des stupéfiants et une vulnérabilité propre à chaque individu : en démontrant que la neurogenèse est un facteur clé dans la vulnérabilité à l’addiction, ces travaux offrent de nouvelles perspectives dans la compréhension de la fragilité individuelle face à la pharmacodépendance.
Dans ses prochains travaux, son équipe « cherchera à manipuler les nouveaux neurones à l’aide d’approches de pharmacogénétique, de façon à diminuer la motivation des souris pour la drogue et à bloquer les rechutes au cours du sevrage ».