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Communiqués et dossiers de presse

Agir sur le système immunitaire avant même qu’un cancer ne survienne serait possible

26 Juin 2019 | Par INSERM (Salle de presse) | Cancer

Visualisation en coloration multispectrale d’une sous-population de cellules immunitaires infiltrant une tumeur. Inserm/Jerôme Galon

La réponse immunitaire s’active dès l’apparition de cellules précancéreuses à des stades très précoces. Malheureusement, cette réponse s’accompagne simultanément de la mise en place de mécanismes chargés de la bloquer, permettant la progression du cancer. C’est la première fois que la réponse immunitaire est décrite avec cette précision à des stades précancéreux, ici dans le cancer du poumon. Ces travaux de l’équipe de Jérôme Galon, directeur de recherche Inserm au sein du Centre de recherche des Cordeliers (Inserm/Université de Paris/Sorbonne Université) à Paris, et de Céline Mascaux au sein du Centre de recherche en cancérologie de Marseille (Inserm/CNRS/Centre de lutte contre le cancer/Aix-Marseille Université), montrent que l’utilisation d’immunothérapies à des stades très précoces pourrait peut-être favoriser la prévention du cancer. Ces travaux sont parus dans Nature.

Les connaissances sur le fonctionnement du système immunitaire en cas de cancer ne cessent de progresser. Jérôme Galon et son équipe de l’Inserm contribuent largement à ces avancées. Après avoir montré que la progression du cancer dépend entre autres de la présence et de la fonctionnalité des lymphocytes T dans le microenvironnement tumoral et de l’Immunoscore, les chercheurs prouvent que la réponse immunitaire et ses blocages surviennent à des stades très précoces, pré cancéreux.

Autant dire que quand le cancer survient, une bonne partie de la surveillance immunitaire mais aussi les mécanismes qui permettent de lui échapper sont déjà déroulés.

Actuellement, la surveillance de lésions pré cancéreuses dans le cancer du poumon permet de les retirer si les médecins ont le moindre soupçon qu’elles soient à risque de donner un cancer. Mais les cliniciens étaient probablement loin d’imaginer qu’il est à priori, à ce stade, déjà possible de cibler le système immunitaire pour lutter contre l’aggravation de ces lésions. C’est ce que montrent les travaux de Jérôme Galon et son équipe. Les chercheurs ont eu accès à 122 biopsies pulmonaires provenant de personnes fumeuses à risque de cancer. Ils y ont retrouvé tous les stades des lésions pré cancéreuses à cancéreuses. Pour chaque biopsie, ils ont étudié le système immunitaire dans le microenvironnement tumoral. Ils ont procédé à une étude génomique des cellules présentes et à l’observation de ces dernières par fluorescence multispectrale, une technique d’imagerie fondée sur l’utilisation d’anticorps spécifiques ciblant différents types de cellules immunitaires. Ce travail leur a permis de caractériser la nature, la quantité et la disposition des différents acteurs immunitaires dans le microenvironnement tumoral à chaque stade pré cancéreux et cancéreux.

La réponse immunitaire précède le cancer

Ils ont ainsi pu comparer les trajectoires évolutives du cancer et de la réponse immunitaire. Au stade de la dysplasie de bas grade, soit à un stade extrêmement précoce, lorsque les cellules présentent simplement quelques anomalies morphologiques, des défauts de réparation de l’ADN et une plus grande capacité à se diviser, les chercheurs constatent l’activation des cellules immunitaires locales et l’arrivée de lymphocytes T naïfs, c’est-à-dire non éduqués pour détruire spécifiquement les cellules anormales. Ensuite, au stade de la dysplasie de haut grade correspondant à des anomalies morphologiques et moléculaires plus importantes, les chercheurs observent un recrutement massif de l’immunité innée et adaptative avec la présence de lymphocytes B et T spécifiques des cellules anormales et une mise en place de la réponse immunitaire mémoire. Mais cette activation s’accompagne déjà à ce stade de l’apparition de points de blocage du système immunitaire appelés checkpoints et de cytokines suppressives, des molécules destinées également à bloquer la réponse immunitaire. Cela signifie que le fonctionnement du système immunitaire est déjà altéré avant l’apparition du cancer à proprement parler. Cette découverte effectuée dans le cancer du poumon doit encore être confirmée dans les autres types de cancers. Jérôme Galon y travaille déjà dans le cancer du côlon.

Pour les chercheurs, ces travaux auront certainement à terme des retombées sur la prise en charge des patients. D’une part, ils soulignent l’importance de découvrir des biomarqueurs immunitaires pour mieux prédire les risques d’évolution des lésions pré cancéreuses vers des cancers.

D’autre part, il semblerait que l’utilisation des immunothérapies destinées à lever les points de blocage immunitaire, les fameux checkpoints, pourrait être bénéfique aux patients à des stades précoces en prévention du cancer.

Contacts
Contact Chercheur

Jérôme Galon

Directeur de recherche Inserm

Unité 1138 Centre de recherche des cordeliers (Inserm/Université de Paris/Sorbonne Université)

rf.ueissuj.crc@nolag.emorej

Tel : 01 44 27 90 85

 

Céline Mascaux

Unité 1113 Interface de recherche fondamentale et appliquée en cancérologie (IRFAC)

rf.gruobsarts-urhc@xuacsam.enilec

Contact Presse

rf.mresni@esserp

Sources

Immune evasion before tumor invasion in early lung squamous carcinogenesis

Céline Mascaux 1,2,3†,4†,5†*‡, Mihaela Angelova 6*, Angela Vasaturo 6, Jennifer Beane 5, Kahkeshan Hijazi 5, Geraldine Anthoine 4, Bénédicte Buttard 6, Françoise Rothe 7, Karen Willard-Gallo 8, Annick Haller 9†,10, Vincent Ninane 11, Arsène Burny 12, Jean-Paul Sculier4, Avi Spira 5, Jérôme Galon 6‡
1 Department of Pneumology, Nouvel Hôpital Civil, University Hospital,Strasbourg, France
2 Unité INSERM U1113, Streinth Lab, Strasbourg University, Strasbourg, France
3 Centre of Cancer Research of Marseille (CRCM), INSERM, CNRS, Aix-Marseille Université, Marseille, France.
4 Department of Intensive Care and Thoracic Oncology, Jules Bordet Institute,Centre des Tumeurs de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), B-1000 Brussels,Belgium.
5 Section of Computational Biomedicine, Department of Medicine, Boston University School of Medicine, Boston, MA, 02118, USA.
6 INSERM, Laboratory of Integrative Cancer Immunology, Equipe Labellisée Ligue Contre le Cancer, Sorbonne Université, Sorbonne Paris Cité, UniversitéParis Descartes, Université Paris Diderot, Université de Paris, Centre de Recherche des Cordeliers, F-75006 Paris, France.
7 Breast Cancer Translational Research Laboratory, Jules Bordet Institute,Centre des Tumeurs de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), B-1000 Brussels,Belgium.
8 Laboratory of Molecular Immunology, Jules Bordet Institute, Centre desTumeurs de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), B-1000 Brussels, Belgium.
9 Department of Pathology, Jules Bordet Institute, Centre des Tumeurs de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), B-1000 Brussels, Belgium.
10 Pathology Centre, Schiltigheim, France.
11 Department of Pulmonary Medicine, CHU Saint-Pierre, Université Libre de Bruxelles (ULB), B-1000 Brussels, Belgium.
12 Laboratory of Molecular and Cellular Biology, Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux (FUSAGx), B-5030 Gembloux, Belgium.
* Contributed equally to the work
† Previous affiliation for this author where the work was done partially.

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