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Communiqués et dossiers de presse

Maladie de Huntington : le potentiel thérapeutique de la triheptanoïne confirmé

07 Jan 2015 | Par INSERM (Salle de presse) | Bases moléculaires et structurales du vivant

Une équipe de chercheurs de l’Inserm dirigée par Fanny Mochel et située à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (Inserm/CNRS/UPMC/AP-HP) vient de démontrer le potentiel thérapeutique de la triheptanoïne chez dix patients atteints de la maladie de Huntington. Les dérivés de ce triglycéride de composition unique, en améliorant le métabolisme énergétique du cerveau, pourraient ralentir l’évolution de la maladie. Ces travaux sont publiés dans la revue Neurology.
PhotoCP web

Etude de la maladie de Huntington. Image de microscopie à balayage de la couche épendymaire d’une souris modèle de la maladie de Huntington. © Inserm/Saudou, Frédéric

La maladie de Huntington est une maladie génétique qui touche environ 5 000 personnes en France auxquelles s’ajoutent 10 000 individus à risque. La mutation du gène codant pour la protéine Huntingtine a pour conséquence une dégénérescence progressive des neurones, en particulier les régions impliquées dans le contrôle du mouvement, entrainant ainsi des problèmes neurologiques, moteurs, cognitifs et psychiatriques importants. Une perte de poids est également constatée chez les patients à un stade précoce de la maladie malgré des apports alimentaires normaux voir augmentés. Ces deux observations (dégénérescence des neurones et perte de poids) ont conduit les chercheurs à émettre l’hypothèse d’un défaut énergétique chez ces patients qui pourrait jouer un rôle important dans le déclenchement et la progression des symptômes de la maladie.

Pour valider cette hypothèse, les chercheurs devaient réussir à mesurer les fluctuations énergétiques dans le cerveau en fonction de certains états d’activation cérébrale. Pour cela, il leur a fallu mettre au point des technologies permettant de doser des composés reflétant le fonctionnement énergétique du cerveau de façon dynamique.

« On s’est aperçu que les variations du rapport de concentration entre deux composés énergétiques riches en phosphore (Pi/PCr) traduisaient parfaitement ce dysfonctionnement énergétique cérébral » explique Fanny Mochel qui a coordonné ce travail.

D’un point de vue pratique, la mesure de ce rapport a été réalisée par spectroscopie par RMN[1]. Tout en enregistrant leur production énergétique cérébrale, il a été demandé à neuf patients et treize volontaires sains de réaliser un « effort » cérébral simple conduisant leur cerveau à consommer de l’énergie. Pour cela, ils ont été soumis à un stimulus visuel sous forme d’un damier clignotant pendant quelques minutes.

Le rapport Pi/PCr était clairement diminué chez les malades comparés aux personnes contrôles traduisant une altération de leur métabolisme cérébral à faire face à cet effort. Une fois ce biomarqueur validé, les chercheurs ont alors eu la possibilité de tester l’efficacité de traitements potentiels pour rétablir un métabolisme cérébral correct.

Un essai clinique pilote…

Dix patients atteints de la maladie de Huntington ont pris pendant un mois, un traitement à base de triheptanoïne, un triglycéride (sous forme d’huile à ingérer au cours des repas) afin d’améliorer leur métabolisme énergétique cérébral. A la fin de cet essai thérapeutique, leur profil énergétique était normalisé. Le choix de ce traitement ne s’est pas fait au hasard, puisqu’il avait déjà fait ses preuves chez des malades atteints de maladies rares incapables d’utiliser certains lipides présents dans l’alimentation. L’idée était de compenser le dysfonctionnement énergétique généralisé par un apport supplémentaire de métabolites spécifiques capables de ré-enclencher le bon fonctionnement énergétique de l’organisme. La nouveauté de l’approche proposée par le Dr Mochel est d’appliquer ce concept de traitement énergétique à des pathologies touchant le cerveau comme la maladie de Huntington.

… Avant un essai à plus large échelle.

Sur la base de ces résultats, les chercheurs vont initier en début d’année 2015 une étude en France et aux Pays-Bas, en double aveugle d’une durée d’un an chez une centaine de patients avec comme critères d’évaluation des paramètres cliniques et d’imagerie.

« La complexité de la maladie nous oblige à concevoir des approches thérapeutiques complémentaires de façon à cibler différentes facettes de la maladie : génétique, métabolique, inflammatoire, etc. Utilisées ensemble, ces approches auront probablement les meilleures chances de succès comme c’est le cas dans d’autres pathologies plus fréquentes. » conclut Fanny Mochel.


Ces résultats, protégés par des brevets, ont récemment fait l’objet d’un accord de concession de licence négocié et signé par l’ICM (Institut du Cerveau et de la Moelle Épinière) et Inserm Transfert avec la société américaine Ultragenyx qui va lancer une nouvelle étude clinique dans le domaine de la maladie de Huntington.

 

[1] La spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (RMN) est une méthode non invasive d’étude de la biochimie et du métabolisme du système nerveux central. Elle permet la quantification précise de plusieurs dizaines de molécules. (Source CEA)

Contacts
Contact Chercheur
Fanny Mochel
Unité Inserm 1127
Institut du Cerveau et de la Moelle épinière
Hôpital Pitié-Salpêtrière
rf.cmpu@lehcom.ynnaf
Contact Presse
rf.mresni@esserp
Sources
Triheptanoin improves brain energy metabolism in patients with Huntington disease Adanyeguh IM (MS)1, Rinaldi D (PhD)1, Henry PG (PhD)2, Caillet S (MS)3, Valabregue R (PhD)1,4, Durr A (MD, PhD)1,5, Mochel F (MD, PhD)1,5 1 Inserm U 1127, CNRS UMR 7225, Sorbonne Universités, UPMC Univ Paris 06 UMR S 1127, Institut du Cerveau et de la Moelle épinière, ICM, F-75013, Paris, France 2 Center for Magnetic Resonance Research (CMRR), University of Minnesota, Minneapolis, MN, United States 3 AP-HP, Pitié-Salpêtrière University hospital, Department of Dietetics, F-75013 Paris, France 4 Center for NeuroImaging Research (CENIR), Institut du Cerveau et de la Moelle épinière, 75013 Paris, France 5 AP-HP, Pitié-Salpêtrière University hospital, Department of Genetics, F-75013 Paris, France Neurology, 7 janvier 2015
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