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Communiqués et dossiers de presse

Une forte consommation d’alcool à l’âge adulte accélère le déclin cognitif chez les hommes

16 Jan 2014 | Par INSERM (Salle de presse) | Santé publique

D’après les résultats d’une étude épidémiologique conduite par des chercheurs franco-anglais associant l’Inserm et l’University College London, les hommes buvant plus de 36 grammes (3.5 verres) d’alcool par jour présenteraient un déclin de mémoire accéléré qui se traduit notamment par une diminution de leurs capacités d’attention et de raisonnement. Cette étude est publiée en ligne le 15 janvier 2014 dans le journal Neurology.

Dans cette nouvelle étude, la consommation d’alcool habituelle a été rapportée à 3 reprises sur une période de 10 ans chez 5054 hommes et 2099 femmes. Les consommations d’alcool comprenaient du vin, de la bière et des spiritueux. Des premiers tests cognitifs ont ensuite eu lieu lorsque les participants étaient âgés en moyenne de 56 ans. Ces tests ont été répétés à 2 reprises à 5 et 10 ans d’intervalle.

Les chercheurs ont étudié leurs capacités de mémorisation et leurs fonctions exécutives, c’est-à-dire les capacités d’attention et de raisonnement utilisées afin d’atteindre un objectif. Le test de mémoire consistait à se rappeler en une minute du plus de mots possibles parmi la liste des 20 mots qui étaient énoncés juste auparavant. Les fonctions exécutives étaient évaluées à partir de 3 tests : un test de raisonnement logique constitué de 65 questions et de 2 tests de fluence verbale durant lesquels les participants devaient écrire respectivement le plus de mots commençant par S et de mots d’animaux, en une minute.

La plupart des études sur l’association de la consommation d’alcool avec la mémoire et les fonctions exécutives ont été mené chez des personnes âgées. « Notre étude est basée sur des personnes âgées en moyenne de 56 ans lors des premiers tests cognitifs, ce qui est relativement jeune par rapport aux études précédentes sur ce sujet. Elle suggère qu’une forte consommation d’alcool serait associée à un déclin cognitif plus rapide dans tous les domaines cognitifs étudiés.» rapporte l’auteur de l’étude Séverine Sabia, PhD, de l’University College London au Royaume-Uni.

Chez les hommes, alors qu’aucune différence dans le déclin de la mémoire et des fonctions exécutives n’a été observée entre ceux qui ne boivent pas, les anciens buveurs, et les buveurs légers à modérés[1], les gros buveurs quant à eux montrent un déclin de la mémoire et des fonctions exécutives plus rapide que les buveurs modérés.

Cette différence est selon les tests cognitifs, comprise entre 1.5 et 6 années supplémentaires de déclin cognitif. Par exemple, un gros buveur de 55 ans aurait un déclin de mémoire comparable à celui d’une personne de 61 ans.
Dans cette étude, il n’a pas été possible d’étudier de fortes consommations d’alcool chez les femmes qui buvaient des quantités comparables aux hommes car trop peu d’entre elles consommaient de telles quantités. Toutefois, un déclin plus rapide des fonctions exécutives est suggéré chez les femmes qui buvaient plus de 2 verres d’alcool.
Les mécanismes impliqués dans l’association entre une forte consommation d’alcool et un déclin cognitif accéléré ne sont pas simples. Une des principales hypothèses concerne les mécanismes cérébraux et cardiovasculaires qui pourraient impliquer des effets sur de longues périodes dans le temps. En effet, une forte consommation d’alcool est un facteur de risque reconnu de maladies vasculaires et il existe de nombreux arguments en faveur d’une contribution de différents facteurs vasculaires au déclin cognitif. De plus, une forte consommation d’alcool aurait un effet délétère à court et long termes sur le cerveau, via des effets neurotoxiques et pro-inflammatoires, et des effets indirects via les maladies cerobro-vasculaires et la déficience en vitamines.

Pour les auteurs de cette publication, « il serait intéressant de pouvoir répéter ce genre d’étude afin d’évaluer plus en détails l’impact d’une forte consommation d’alcool sur le déclin cognitif chez les femmes. De plus, de nouvelles mesures de fonctions cognitives seront bientôt disponibles chez les mêmes participants. Elles permettront d’étudier si l’effet de la consommation d’alcool en milieu de vie (40 à 60 ans) sur le déclin cognitif est d’autant plus évident lorsque les personnes vieillissent. »

En termes de santé publique, cette étude est en accord avec les précédentes et suggère qu’il est peu probable qu’une consommation d’alcool modérée soit délétère pour le vieillissement cognitif. Toutefois, ces résultats suggèrent également qu’une forte consommation d’alcool en milieu de vie pourrait entraîner un déclin cognitif plus rapide au cours de la vieillesse.

[1] C’est-à-dire ceux qui boivent moins de 20 grammes, ou moins de 2 verres d’alcool par jour.

Contacts
Contact Chercheur
Séverine Sabia ku.ca.lcu@aibas.s Tel : 01 45 59 51 52
Contact Presse
rf.mresni@esserp
Sources
Alcohol Consumption and Cognitive Decline in Early Old Age Séverine Sabia, PhD1* Alexis Elbaz, MD, PhD2,3 Annie Britton, PhD1 Steven Bell, PhD1 Aline Dugravot, MSc4 Martin Shipley, MSc1 Mika Kivimaki, PhD1 Archana Singh-Manoux, PhD1, 2, 3, 4, 5 1 Department of Epidemiology & Public Health, University College London, 1-19 Torrington Place, London WC1E 6BT, United Kingdom (ku.ca.lcu@aibas.s) 2 INSERM, U1018, Centre for Research in Epidemiology and Population Health, Villejuif, France 3 University Paris 11, F- 94807, Villejuif, France 4 University Versailles St-Quentin, Boulogne-Billancourt, France 5 Centre de Gérontologie, Hôpital Ste Périne, AP-HP, France Neurology, 15 janvier 2014
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