Contrairement aux idées reçues, la cellulite n’est pas signe de surpoids, mais ce facteur contribue à la rendre plus apparente (image d’illustration). © AdobeStock
Les beaux jours marquent le retour des astuces pour perdre du poids et éliminer la cellulite. Entre deux publicités pour des probiotiques « spécial ventre plat » et des compléments alimentaires réputés « brûle-graisses », il n’est pas rare de tomber sur des conseils pour éradiquer les capitons qui élisent domicile sur les fesses, les cuisses et le ventre d’au moins huit femmes sur dix, d’après certaines études.
Crèmes, ventouses, ondes de choc, compléments alimentaires… L’industrie de la beauté redouble d’imagination pour nous faire investir dans des cosmétiques et des appareils qui promettent un grain de peau aussi lisse que sur les images photoshoppées. Mais d’où vient l’obsession d’éliminer la cellulite et que dit vraiment la science des traitements proposés ? Canal Détox, la rubrique de l’Inserm qui lutte contre les fausses informations en santé, fait le tour de la question.
Qu’est-ce que la cellulite ?
Le mot « cellulite » est apparu pour la première fois dans un dictionnaire français en 1873 pour désigner « une inflammation du tissu cellulaire », selon un article de Rossella Ghigi.
Dans la revue spécialisée Travail, genre et sociétés, cette sociologue italienne explique que c’est via les magazines féminins que cette expression s’est fait connaître du grand public. Dès les années 1930, certains journaux féminins mettent en garde leurs lectrices contre cette « infiltration graisseuse », cette « chair dégénérée », ou ces « déchets » organiques, selon les articles. Dans les magazines de l’époque, la définition de la cellulite varie souvent mais ce qui est sûr, c’est que cette particularité est jugée disgracieuse. Et déjà, certains soins sont recommandés pour essayer de s’en débarrasser, tels que « la gymnastique »,ou « les massages ».
Aujourd’hui, la cellulite désigne l’aspect bosselé de l’épiderme. L’obsession d’éliminer cette « peau d’orange » est restée intacte, alors même que les scientifiques s’accordent à dire que ce n’est pas une maladie, mais un phénomène parfaitement normal qui affecte au moins 80 % des femmes adultes, minces ou non, ainsi que certains hommes.
Contrairement aux idées reçues, la cellulite n’est pas signe de surpoids : ce facteur contribue seulement à la rendre plus apparente. De fait, les raisons qui favorisent son apparition restent floues. Certains scientifiques ont avancé des explications anatomiques : chez les femmes, les cloisons de collagène (ou septas) qui relient l’épiderme aux couches les plus profondes de la peau seraient orientées verticalement, ce qui faciliterait le passage de la graisse vers la surface, tandis que chez les hommes, leur inclinaison oblique limiterait cet effet de relief. D’autres évoquent des altérations dans la circulation sanguine, d’autres encore, une inflammation des tissus sous-cutanés… Mais ces hypothèses sont le fruit d’études isolées, aux résultats parfois contradictoires.
Quels sont les traitements proposés ?
De très nombreux traitements ont pour objectif de combattre, ou du moins d’atténuer la cellulite en palpant, chauffant, ou en gelant la peau.
La cryolipolyse (appelée aussi lipocryolyse) est supposée « sculpter la silhouette grâce à l’action du froid sur les graisses ». La radiofréquence et les ultrasons envoient des ondes magnétiques ou sonores pour chauffer l’hypoderme – la zone sous la peau où se trouvent les cellules graisseuses. Les massages et les ventouses (manuelles ou électriques) quant à elles s’appuient sur des techniques de « palper-rouler », censées stimuler la circulation de la lymphe – un liquide qui contribue à évacuer les toxines et des déchets des cellules. Avec la subcision, les chirurgiens ciblent les septa fibreux qui traversent la graisse sous-cutanée avec une lame. Les traitements par ondes de choc promettent de relancer la « microcirculation » du sang et de la lymphe, supposée ralentie dans les zones de cellulites. La mésothérapie consiste à injecter des produits supposés lutter contre les capitons dans les couches supérieures de l’épiderme.
En revanche, depuis le 1er mars 2012, cinq techniques de lyse adipocytaire qui promettent d’« affiner » la silhouette par le biais d’injections dans le tissus graisseux ont été interdites en France, en raison des risques de lésions, d’infections et d’urticaire pointés par un avis de la Haute autorité de santé.
Que dit la science ?
La plupart des études consacrées aux traitements anti-cellulite ne sont pas très solides, en raison notamment d’un faible nombre de participants.
Après avoir épluché les résultats de 24 essais contrôlés randomisés auxquels ont participé plus de 2 000 patients, en novembre 2024 , des scientifiques ont conclu qu’aucun traitement ne garantit des effets « significatifs et durables » contre la cellulite dans la revue de chirurgie esthétique de référence Aesthetic Plastic Surgery.
Selon cette même étude, les ondes de choc montreraient les meilleurs résultats, mais les preuves scientifiques sont loin d’être suffisantes : seulement trois essais randomisés ont été réalisés sur des groupes de taille modeste (entre 17 et 45 participantes). Et quand bien même il y aurait un effet positif, des séances d’entretien seraient nécessaires pour le maintenir.
En bref, que faut-il retenir ?
La cellulite est un phénomène tout à fait normal qui touche au moins huit femmes sur dix, ainsi que certains hommes. Les ventouses, crèmes et autres traitements qui promettent de l’éliminer montrent au mieux des effets temporaires, et manquent de preuves scientifiques solides.
Le sport et une alimentation équilibrée sont souvent recommandés pour lutter contre la cellulite. Ces habitudes sont indéniablement bénéfiques pour la santé, mais à ce jour, aucune étude scientifique n’a rigoureusement prouvé leur efficacité directe sur les capitons. Elles peuvent toutefois entraîner une perte de poids (même si nous ne sommes pas tous égaux sur ce point !), ce qui peut rendre la cellulite moins visible.
Enfin, même si la cellulite n’est pas une maladie, elle peut être associée à une souffrance psychologique bien réelle. Si vous tournez en boucle avec des pensées négatives persistantes, vous souffrez peut-être de dysmorphophobie, un trouble mental qui entraîne une obsession sur un défaut supposé, dont la perception est totalement démesurée. Une psychothérapie peut alors être utile pour apprendre à poser un regard bienveillant sur son corps !
Cet article a été relu par Laurence Michel, chercheuse spécialiste de la dermatologie à l’Inserm, et par David Boccara, professeur des universités-praticien hospitalier, chirurgien plasticien à l’hôpital Saint-Louis (AP-HP) et chercheur associé à l’unité Inserm 976.
