Arthrose de la main © Fotalia
L’équipe du service de rééducation et de réadaptation de l’appareil locomoteur et des pathologies du rachis de l’hôpital Cochin-Port Royal AP-HP, de l’Inserm et d’Université Paris Cité, coordonnée par le Professeur Christelle Nguyen, a comparé les effets de l’injection intra-articulaire de toxine botulique de type A (Botox®) à celle de sérum salé en cas d’arthrose douloureuse de la base du pouce (rhizarthrose). Les résultats de cet essai, soutenu par l’AP-HP dans le cadre du Contrat de Recherche Clinique 2016 ont fait l’objet d’une publication le 23 juin dans la revue Lancet Rheumatology.
L’arthrose de la main est une des maladies les plus fréquentes de l’appareil locomoteur. Elle touche essentiellement les femmes après 45 ans et peut affecter les doigts longs et la base du pouce. L’arthrose de la main entraîne des douleurs, une perte de mobilité articulaire, une gêne esthétique et des limitations dans les activités manuelles du quotidien. En dehors de l’orthèse de repos rigide sur mesure1, aucun traitement médicamenteux ou non médicamenteux n’a démontré son efficacité avec un haut niveau de preuve dans le traitement de l’arthrose de la base du pouce. Pour les phases aigüe et subaiguë2 de la maladie, les injections intra-articulaires de corticoïdes peuvent être proposées, mais sont moins efficaces que dans le genou. Il n’existe donc pas aujourd’hui de traitements intra-articulaires dans l’arthrose de la base du pouce ayant fait la preuve de son efficacité sur la douleur à court et moyen termes. La toxine botulique de type A est utilisée en neurologie et en médecine esthétique pour ses propriétés parésiantes. Les études précliniques et cliniques ont montré que la toxine botulique de type A avait également des propriétés analgésiques par inhibition de certains neurotransmetteurs de la douleur (substance P, glutamate, peptide relié au gène calcitonine) à la fois au niveau périphérique et central. L’équipe de recherche a donc émis l’hypothèse que son injection intra-articulaire pourrait réduire la douleur à court terme.
L’équipe de recherche a mené un essai monocentrique randomisé contrôlé en double aveugle comparant l’injection intra-articulaire de toxine botulique de type A (Botox®) à l’injection intra-articulaire de sérum salé pour l’arthrose douloureuse de la base du pouce.
Au total, 60 participants ayant une arthrose douloureuse de la base du pouce, répondant aux critères de l’American College of Rheumatology de 19903, ont été inclus : 30 participants dans le groupe expérimental qui ont reçu une injection intra-articulaire échoguidée (articulation trapézo-métacarpienne) d’1 ml de Botox® (50 unités) et 30 participants dans le groupe témoin qui ont reçu une injection intra-articulaire échoguidée d’1 ml de sérum salé.Les participants des deux groupes avaient une orthèse de repos rigide sur mesure.
Le critère d’évaluation principal était la réduction moyenne par rapport à l’inclusion de la douleur de la base du pouce sur une échelle numérique (0, pas de douleur, à 100, douleur maximale) 3 mois après l’injection.
Les critères d’évaluation secondaires étaient la réduction moyenne par rapport à l’inclusion de la douleur de la base du pouce à 1 et à 6 mois, la réduction moyenne des limitations d’activité spécifiques à la main, le pourcentage de répondeurs OARSI-OMERACT4 et la consommation d’antalgiques et d’anti-inflammatoires non stéroïdiens à 3 et à 6 mois.
À l’inclusion, l’âge moyen des participants était de 64,9 ans, leur douleur moyenne était de 60 points sur 100 et 80% des participants étaient des femmes. À 3 mois, la réduction moyenne de la douleur de la base du pouce a été plus importante dans le groupe expérimental que dans le groupe témoin : la douleur a diminué de 25,7 points sur 100 dans le groupe expérimental contre 9,7 points sur 100 dans le groupe témoin, soit une différence absolue de 16 points sur 100. Aucune différence n’a été détectée pour les critères d’évaluation secondaires à 3 et à 6 mois. Aucun effet indésirable considéré comme sévère n’a été observé.
[1] Rannou F et al. Ann Intern Med. 2009
[2] Se dit d’un état pathologique ou d’une maladie dont les symptômes sont de faible intensité mais se prolongent et ne s’atténuent que faiblement.
[3] Critères adaptés à l’arthrose de la base du pouce – douleur ou raideur de la base du pouce et élargissement de l’articulation ou déformation de l’articulation
[4] liste de critères pour mesurer l’échelle de la douleur
Christelle Nguyen, Hendy Abdoul, Raphaël Campagna, Henri Guerini, Léa Jilet, Catherine Bedin, Franck Chagny, Gaëlle Couraud, Camille Daste, Jean-Luc Drapé, Rémy Fléchon, Charlotte Gil, Corinne Guérin, Marie-Martine Lefèvre-Colau, Serge Poiraudeau, Estelle Randriamampandry, Alexandra Roren, Antoine Feydy, François Rannou
Lancet Rheumatology